Les 600 mots les plus truculents de la langue française
Daniel Lacotte2015

Synopsis

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EXCELLENT

À l'instar d'un groupe d'individus dans lequel chacun cherche à mettre en valeur son propre tempérament, les mots qui composent la langue française ne possèdent pas tous la même personnalité. Ainsi, aux côtés de vocables ternes et atones, voit-on surgir ici ou là des termes imagés. Turbulents et sautillants. Croustillants et truculents. De ceux que l'on aime entendre claquer avec gourmandise sur la langue, un peu comme d'autres gourmets apprécient le velouté gouleyant ou la hardiesse surprenante d'un bon vin. Toujours aussi malicieuse, la sémantique protège dans ses recoins les plus cachés de délicieuses résonances et réverbérations (cacochymes, carabistouilles, pusillanime). Mais aussi des mots dont le simple écho sonore se confond étrangement, mais très exactement, avec sa définition (atrabilaire, borborygme, tintinnabuler). Et puis, il y a aussi ces vocables un peu plus énigmatiques (amphibologie, battologie, latitudinaire) dont on croit saisir un sens qui, finalement, échappe. Sans oublier les termes familiers (mais ô combien expressifs) dignes des plus beaux romans réalistes (roubignoles, nibards ou maquerelle, par exemple). Situations drolatiques Ne nous y trompons pas, il convient de toujours regarder un mot pour ce qu'il désigne intrinsèquement. Car un vocable ne naît jamais soutenu, courant, familier, populaire, grossier, trivial ou vulgaire. D'ailleurs, les dictionnaires sérieux ne s'accordent que rarement sur la bonne étiquette qu'il convient d'attribuer à tel ou tel mot truculent, original ou pittoresque. Par surcroît, il existe ici ou là de drolatiques situations sémantiques. Car elles donnent à ces classements que les linguistes appellent «niveaux de langage» une valeur sociale qui s'apparente à une sorte de lutte des classes. Amusons-nous un instant avec quelques exemples croustillants. Calcif (caleçon) serait populaire, tandis que soutif (soutien-gorge) est familier. Petit rappel d'importance : un vocable populaire ne s'emploie jamais dans la bourgeoisie ; un terme familier appartient au langage parlé, sans distinction de rang social. Quant à la vulgarité, elle s'immisce dans les mots «frappés d'un interdit de nature morale». En conséquence, la populace serait la seule à parler de ses calcifs. En revanche, prolétaires et aristocrates évoqueraient de conserve les soutifs de leurs épouses. On le voit, les frontières restent pour le moins ténues et ces classifications n'affichent pas forcément une parfaite cohérence. Ce qui prouve d'ailleurs la vitalité des nuances subjectives qui entretiennent la vivacité des images et de l'esprit. Et tout pourrait encore se compliquer lorsque l'argot entre dans la danse. Sauf que nous sommes ici en présence d'un langage structuré, cohérent et lexicalisé. En fait, l'exceptionnelle richesse de la «langue verte» rassemble sous son aile protectrice des termes à la fois familiers et populaires, déformés, reformulés ou corporatistes, mais surtout imagés, gaillards, polissons, grivois, vifs, crus, ardents, évocateurs, osés, provocateurs, égrillards, lestes, libertins, licencieux, paillards... Un peu comme si ce corpus argotique mettait tout le monde d'accord. Dans son souci d'établir des passerelles avec le langage commun, il donne du piment aux conversations quotidiennes et à moult textes revigorants dont certains sont devenus de grands classiques de la littérature. Alors, populaire et familier ? Oui, pourquoi pas, à condition d'y entendre sans tonalité péjorative la subtilité suivante : utilisée avec jubilation par le plus grand nombre. Tout cela pour montrer qu'un vocable ne doit pas endosser de responsabilité morale, éthique ou sociale. Car un terme ne dénonce rien ni personne. Il se contente benoîtement de caractériser un objet, d'évoquer une idée, d'illustrer une action. Ce qu'en font ensuite les humains ne le concerne plus. Et il convient de ne pas camoufler honteusement un mot derrière la pudibonderie d'une bienséante feuille de vigne. Le contexte, le Heu, le locuteur ou l'auteur suffit à donner le ton.

1 édition pour ce livre

2015 Editions Larousse

Française Langue française | 256 pages | Sortie : 18 mars 2015 | ISBN : 9782035907523

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