Le club des caméléons
Milan Dargent2010

« La première mission consista à visiter le chantier situé juste en face de l’immeuble où nous habitions, mon frère et moi. Le quartier, en pleine rénovation, subissait d’incessants travaux. On ne s’entendait plus, avec ces bulldozers et ces marteaux-piqueurs. L’heure de la vengeance avait sonné. Sacs de ciment éventrés, bétonneuses renversées, coups de pioche, coups de massue, tôle froissée, briques et moellons brisés… Le bilan fut très lourd pour l’ennemi – un ennemi qui ne put se défendre, car il fut lâchement attaqué le dimanche, son jour de repos. Cette première action nous exalta. C’était si facile, en fait, de foutre le boxon. Il suffisait d’oser, après ça venait tout seul. » Vingt-cinq courts récits à la plume alerte et colorée, impossibles à chasser de l’esprit tant ils cognent fort, une imagination débridée et une verve truculente : voilà de quoi se compose Le Club des caméléons. Parce qu’il rend les réflexions et les questionnements de ses personnages si proches, si humains qu’il en donne la chair de poule, Milan Dargent fait partager leurs abîmes avec compassion. « Quand vous repensez à votre vie et que vous en tirez ce qu’il faut bien appeler un bilan, vous vous apercevez que beaucoup de choses sont restées dans l’ombre, à l’abri, en vous. La part secrète de notre existence, en somme, celle que nous sommes seuls à connaître, à parfois porter comme un poids. À chacun sa conscience, et ses cas de conscience. Je n’ai pas toujours eu la conscience tranquille, personnellement. J’ai commis toutes sortes de bourdes, mais la plupart n’ont fait qu’une victime, moi-même. » Un drôle de petit livre traversé par le vertige de la vie humaine.