[Suivi Lecture] Zorba

 
  • Zorba

    Livraddictien débutant

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    #1 04 Novembre 2019 22:59:51

    Bonjour à tous,

    J'inaugure mon suivi de lecture, ma mémoire étant faillible, j'essaierais d'inscrire sur ce forum mes impressions  sur les bouquins que je lirai dans l'avenir. Au plaisir d'échanger si un lecteur égaré fait surface.

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    Débutons par un livre difficile à prendre en main : Gershom Scholem: The Man and His Work. J'ai découvert Gershom Scholem par le biais du regretté ottomaniste Gilles Weinstein (dont les cours sur l'empire ottoman sont disponibles sur le site du collège de France). Tous deux se sont intéressés sur la vie du messie juif Sabbataï Tsévi qui bouleversa profondément le monde juif au XVIIe siècle.
    Ainsi, j'entame maintenant  le pavé de Gershom consacré à la vie du faux messie, cependant, je souhaitais - au préalable - en connaître un peu plus sur le parcours de Gershom Sholem. Et il faut dire que ce livre ne fournit pas grand-chose à se mettre sous la dent... Certes,  plusieurs interventions de différents spécialistes de la science juive nous présentent une vue d'ensemble des principaux travaux scientifiques de l'auteur, mais ça reste superficiel et vu que je ne suis pas un spécialiste de la Kabbale - il faut l'avouer - je n'ai pas compris grand-chose.  Je repère quand même grâce à ce livre que Gershom fût une figure majeure de l'étude de la mystique juive, qu'il bouleversa l'historiographie de la science juive profondément, en étudiant des textes volontairement oubliés (par exemple l'haskala).

    Dernière modification par Zorba (12 Novembre 2019 21:28:22)

  • Zorba

    Livraddictien débutant

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    #2 05 Novembre 2019 12:04:06

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    Dialogue politique entre trois ivrognes est un magnifique livre de fiction politique, son auteur Nakae Chômin qui vécut vers la deuxième moitié du XIXe siècle fût l'un des instigateur de la culture philosophique et politique française au Japon. Dans ce récit, il fait intervenir trois personnages qui — autour d'une bouteille de whisky — dissertent sur la meilleure politique que devrait adopter le Japon dans l'avenir. Deux intervenants s'affrontent : l'occidentalisé pacifiste et le vaillant guerrier, deux conceptions du monde se font face, l'une utopiste, l'autre réaliste et belliqueuse. Et c'est à travers ces deux points de vue caricaturaux que Nakae Chômin réussit brillamment à nous immerger dans la période de bouleversement que connue le Japon après son ouverture forcée au monde par les occidentaux, en 1854. L'auteur — sans  créer une dichotomie réelle entre les deux opposants — exploite sa thèse d'un syncrétisme culturel où la philosophie européenne se trouve justifiée par la pensée chinoise afin de souligner l'universalité de certaines théories (comme celle de la paix perpétuelle). Cependant, on remarque que les théories de Spencer (le promoteur d'une forme de darwinisme social) ont le vent en poupe et que le Japon se doit d'imiter les politiques extérieurs des puissances coloniales afin qu'il ne disparaisse pas à son tour. Pour terminer un troisième personnage intervient à la fin du livre, c'est le professeur Nankai, figure de sagesse qui arbitre le débat et met un point final au débat apportant la thèse de l'auteur:
    "Les esprits des gens sont comme les greniers des idées du passé. toutes les pratiques sociales sont le résultat des idées du passé. C'est pourquoi pour bâtir du nouveau, nous devons tout d'abord planter l'idée nécessaire dans les cerveaux, pour qu'elle devienne un jour une idée établie, une idée du passé. Pourquoi ? Une action porte toujours dans l'immédiat, mais une idée s'enracine toujours dans le passé [...] tout ce qui est arrivée aux nations est le résultat de leurs idées. Mais idées et actions ne s'alignent pas d'elles-mêmes dans les rangs. Elles forment une courbe tortueuse, et cette courbe c'est l'histoire des nations."

  • Mypianocanta

    Livraddictien de l'espace

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    #3 05 Novembre 2019 17:00:34

    Bienvenue par ici,
    tu fais des études particulières pour t'intéresser à ces livres-là ? ils ne sont vraiment pas courants alors je fais ma curieuse.
    Bonne lecture :)
  • Zorba

    Livraddictien débutant

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    #4 05 Novembre 2019 21:30:38

    Salut, merci pour ton accueil, je fais des études d'histoire, mais je lis ça par curiosité tout simplement :)
  • Catyladya

    Lecteur professionnel

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    #5 05 Novembre 2019 23:58:12

    Coucou !
    Le deuxième livre est très intéressant :)
  • Widukind

    Lecteur timide

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    #6 06 Novembre 2019 01:34:45

    Bonsoir Zorba,
    Je me réjouis de l'ouverture de ce suivi. Il est rare de voir chez les livraddicticiens quelqu'un qui lit des livres aussi passionnants et pointus... et surtout à une telle cadence.
    Je pourrais me constituer une belle bibliographie en histoire rien qu'avec tes livres lus.
    En tout les cas je souhaite longue vie à ton suivi et je repasserai par là autant que possible.
  • Zorba

    Livraddictien débutant

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    #7 06 Novembre 2019 08:42:07

    Thecatlady a écrit

    Coucou !
    Le deuxième livre est très intéressant :)


    Oui très certainement, un livre essentiel pour comprendre la crise que connue le japon à la fin du XIXe siècle. Merci pour vos retours, j'essaierais de tenir ce suivi à jour le plus longtemps possible.

  • Zorba

    Livraddictien débutant

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    #8 09 Novembre 2019 11:57:51

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    Le Moyen-Âge italien reste largement  méconnu des Français. Cette période  ne répond aucunement au système féodal imprimé dans nos cerveaux depuis l'école. Par son originalité, cette histoire se révèle complexe et passionnante. L'Italie des communes éclaircit les zones d'ombres du système des communes  qui s'instaurent dans l'Italie du XIe siècle. On remarque alors que ces "cités-états" se retrouvent prises en tenaille par l'influence gibeline —  composée des partisans de l'Empereur du Saint-Empire romain germanique — face à l'influence guelfe — constituée des partisans du pape. Cependant,  Derrière cette  division simpliste, l'ouvrage nous  dévoile qu'il existe  une  stratégie sous-jacente de chacune des communes, passant d'un camp à l'autre au fil de l'histoire. Ces changements sont l'écho de bouleversements au sein même des villes dans lesquelles plusieurs familles guerroient afin d'obtenir l'hégémonie dans la cité (citons par exemple Bologne, les Lambertazzi, faction gibeline, furent condamnés à l'exil par les Geremei, faction guelfe, 12000 personnes quittèrent la ville, soit à peu près 10% de la population de Bologne).
    Le livre réussit son travail, il définit clairement certains termes inconnus  ou mal compris (comme le podestat, le consul etc), il n'oublie pas non plus le sud de la péninsule qui disposait des villes les plus peuplées au XIe siècle. Néanmoins, l'ouvrage reste un catalogue pour réussir les concours, il faudrait un travail en supplémentaire pour comprendre en profondeur le phénomène urbain majeur qui se répandit  sur le sol italien.

    Dernière modification par Zorba (10 Novembre 2019 23:20:32)

  • Zorba

    Livraddictien débutant

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    #9 10 Novembre 2019 23:07:55

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    L'orthodoxie m'a toujours intrigué, tout d'abord par mes origines grecques, mais aussi à travers les œuvres de Dostoïevski et ses personnages iconiques comme le Starets Zozime.  Quand je pense à l'orthodoxie, j'ai la date du grand schisme de 1054 en tête qui scinde l'Eglise en deux. Mais comment  et sur quoi cette scission s'est elle opérée ? L'ouvrage L'Orthodoxie : L'Eglise des sept Conciles de Kallistos Ware (un anglican converti à l'orthodoxie) répond à cette interrogation. L'auteur, dans la première partie de son essai, retrace brièvement le processus de création de la foi orthodoxe, elle est à ses yeux, la plus pure des branches du christianisme, celle qui se rapproche le plus de l'Eglise des premiers chrétiens (orthodoxie signifiant en grec respectueux de la tradition). On remarque dès le départ, que l'auteur écrit un essai à thèse. Néanmoins, le livre reste plaisant à lire. j'ai noté quelques petites erreurs, des jugements de valeur (notamment sur les vieux-croyants). Dans la seconde partie, il précise les similitudes et les différences entre la doctrine orthodoxe et le catholicisme à travers sa liturgie, celle-ci étant plus malléable que celle du dogme catholique romain. En définitive, la division entre une Eglise de l'Ouest et une Eglise de l'Est porte sur l'infime, un simple terme, celui de filioque  qui bouleverse le dogme de la trinité. Pour les catholiques, l'Esprit Saint relève du Père et du Fils (d'où le terme filioque), alors que pour les orthodoxes, l'Esprit Saint relève uniquement du Père (je vous avoue que ce débat, encore d'actualité, me dépasse).

    Dernière modification par Zorba (10 Novembre 2019 23:09:30)

  • Zorba

    Livraddictien débutant

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    #10 15 Novembre 2019 18:11:50

    Dans la veine du post précédent, je me suis attardé sur une curiosité parisienne, quelque chose d'unique, dissimulée du tourisme de masse: la paroisse Saint-Serge.
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    Le livre d'Alexis Kniazeff: L'Institut Saint Serge: De l'Académie d'autrefois au rayonnement d'aujourd'hui présente succinctement les faits d'armes de cette institution, puisque la paroisse n'est pas qu'un lieu où l'on pratique le culte, mais aussi une école de théologie. Dès sa création, en 1925, l'institut répond à la crise majeure qui bouleverse l’Église orthodoxe russe après l'arrêt complet des écoles théologiques en Russie (elle est d'ailleurs la seule école orthodoxe russe dans le monde de 1925 à 1945). Par sa distance avec le pouvoir séculier russe, l'institution prend une plus ample indépendance et innove dans des concepts oubliés de la théologie orthodoxe russe, elle cherche même à se rapprocher d'autres églises chrétiennes afin de dialoguer (ainsi va naître l'œcuménisme qui conduira à la publication de la Traduction œcuménique de la Bible). Le livre d'Alexis Kniazeff reste concis et clair, notre auteur est un ancien élève et professeur de l'institut. Son récit se veut être une sorte d'hagiographie de l'institution (pour une visée critique, on passera), en revanche, on sent un réel attachement à l'histoire et au symbole de la paroisse Serge Radonège qui fut le dernier territoire d'une Russie à jamais perdue, mais aussi le symbole de la renaissance d'un dogme sclérosé par l'époque synodale ( période de 1721 à 1917 où grosso modo L’Église orthodoxe fut inféodée à l’État).

    Dernière modification par Zorba (23 Novembre 2019 17:29:16)