Petite improvisation sur l'instant.

Quelque part. Par là. Enfin dans le coin quoi. Peu importe après tout.

Assise sur une chaise déglinguée, elle fixe le vide, un verre de vin dans sa main, l'autre touchant inconsciemment le médaillon pendu à son cou. Un léger tic qu'elle a chopé... Quand ça déjà? Bah... Quelle importance en fait. Courant d'air, la porte claque et la fait sursauter légèrement. A peine. Elle n'a tout simplement pas la force de faire mieux. La douleur a cet effet là parfois, de clouer les gens sur place et de leur ôter toute parcelle de vie, toute envie, toute fureur de se battre. Un soupir remonte le long de sa gorge et s'évanouit sur ses lèvres. Même ça elle n'arrive pas à le faire correctement. Alors à quoi bon.

Encore une journée. Une de plus. Une page à arracher sur le calendrier, sans passer par la case petite blague quotidienne. Cadeau d'une ex-amie pour le nouvel an. Qui sérieusement oserait offrir ce genre de chose à une personne proche: "365 jours en blagues et citations". Pour ça suffit juste de regarder le 20h. Il y a largement de quoi faire à la télévision. Enfin, la bonne nouvelle, c'est qu'en plus de savoir quel jour il est à tout moment, elle a largué de sa vie cette amie. Elle aura bien fait me direz vous. Un calendrier? Faut être sérieux...

A force de fixer le vide, ses paupières se rebellent et s'emballent, laissant couler une larme qui s'échappe bien malgré Elle. Les heures se sont écoulées sans qu'elle ne s'en rende compte. Se redressant, elle fini enfin par fermer les yeux quelques secondes, essuyant de sa main libre sa joue humide puis inspire profondément. Un coup d'oeil sur le verre qu'elle laisse tel quel sur la table tandis qu'elle se lève et s'étire. Un petit coup d'"on se ressaisie ma chérie" tandis qu'elle ravale la boule amère qui voudrait exploser sa tronche.

Il est grand temps de faire le ménage. Un grand sac poubelle pour commencer. Au diable l'avarice, elle en prendra même un deuxième, c'est qu'elle s'est un peu trop rependue ces derniers temps. Adieux les emballages vides, les bouteilles de vins, les factures obsolètes, les pubs des grandes surfaces et les rouleaux vides de PQ. Adieu, adieu le quotidien, il est grand temps de se réveiller. Serpillière, aspirateur et produits ménager, tout y passe. Virer la crasse, virer la poisse.

Les heures filent aussi vite que les premières. Mais alors que trône toujours sur la table le verre de vin , l'appartement lui reluit. Et en plus sent particulièrement bon le propre (faut dire qu'elle avait investi dans le nettoyant pour carrelage). Une douche et une tenue confortable plus tard, elle s'arrête devant son miroir et s'observe. Au choix. "Mais p'tin c'est quoi encore que cette gueule"? Ou la solution qu'elle préférera "Bonjour toi". Tout bête. Mais parfois il suffit d'un rien. Un clin d'oeil et un coup de mascara, un peu de blush et de gloss, une paire de boucle d'oreille et d'escarpins, elle attrape ses clefs et sort de chez elle, avant de revenir sur ses pas. D'attraper le verre plein, d'aller le vider dans l'évier et de se casser de là. Pour de bon cette fois.

Au programme? Vous le savez aussi bien que moi. Vous n'avez pas besoin d'un dessin pour savoir que peu importe ce qu'elle fera, elle le fera bien. Parce que parfois, savoir se ressaisir suffit amplement. Parce qu'ainsi va la vie et le reste. Parce qu'il suffit de vivre tout simplement.