[Roman] L'homme à la hache

 
  • Mansuz

    Amant des romans

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    #1 25 Novembre 2015 21:09:41

    Bonsoir, tout le monde

    J'écris un livre et j'aimerais avoir des retours.
    Le style est-il correct ? L'orthographe est bonne ? Les personnages attachants ? Je me pose des tonnes de questions ^^

    Je vais le publier ici, petit à petit. (pour voir la suite plus vite, rdv  sur wattpad ;) )


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    Hello !

    Je vais essayer de publier un chapitre par semaine.
    Un chapitre trop violent ? Un chapitre ennuyeux ? N'hésitez pas à partager vos réactions, je suis là pour recueillir vos remarques et conseils. Si vous voyez de vilaines fautes d'orthographe, il faut me tirer les oreilles !

    Résumé :

        Ed aime regarder des films d’horreur avec sa copine, mais seul, il trouve l’expérience encore plus grisante. Aujourd’hui, il en paye le prix fort, ses rêves se sont transformés en cauchemars… Décidé à se prendre en main, le jeune homme quitte la demeure familiale pour s’installer à Trévoux, une petite ville au charme médiéval.

    Sa vie bascule lorsqu’il découvre une pierre...


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    1 - Dans la rue



    La cinquantaine, écrasé par le système et abandonné de tous, il vivait dans la rue depuis peu. Crasseux, poisseux et mal rasé, Victor avait honte. À Lyon, avec le début de l'automne, la température commençait à chuter. Plongé dans la misère, il enchaînait les journées de galère, quand il n'était pas fatigué, la faim le tenaillait. Hier au soir, il avait rencontré une belle et jeune fugueuse. En causant avec elle, il avait appris qu'elle s'était échappée de chez ses parents à la suite d'une dispute et qu'elle vagabondait dans les rues depuis une bonne semaine. Dans cette immensité bétonnée, c'était la loi de la jungle et des proies si jolies, ça ne faisait pas long feu. Inquiet, il l'avait raisonné en choisissant les mots justes pour qu'elle rentre retrouver les siens. En retour, elle lui avait donné un bon tuyau, enfin, c'est ce qu'elle prétendait... Pourtant, ses quelques mots avaient redonné de l'espoir à Victor.

    « Va à la Place Louis Pradel entre treize heures et quatorze heures, le vendredi, samedi ou dimanche. Ouvre grand les yeux, admire le spectacle et régale-toi. »

    Curieux, il était sur la place, mais il n'y avait rien de particulier en vue, à part peut-être un peu plus de monde que d'habitude. En croisant Victor, beaucoup de passants le dévisageaient ou s'écartaient comme s'il avait la peste, c'était dur d'être un paria.

    Un personnage en sandales, vêtu d'une tunique orangée se détacha du reste. Cette tenue rappelait à Victor les reportages qu'il avait vu sur l'Inde. L'homme marchait tranquillement avec un baluchon et il s'arrêta pour le déposer à terre.

    Déplié au sol, le baluchon servait de tapis. Par-dessus, en quelques secondes, il monta une structure métallique et recouvrit l'ensemble d'une toile sombre. En la soulevant, l'homme pénétra dans la structure puis le drap s'agita de l'autre côté pour le laisser ressortir. C'était comme une cabine d'essayage, sauf qu'elle avait une entrée et une sortie. Victor était intrigué, qu'est-ce que cet hurluberlu allait faire ?

    Le type se précipita dans la cabine pour ressortir avec une pancarte et une corbeille. Il accrocha l'écriteau sur la toile puis posa la panière au sol. L'homme pointa le panneau du doigt puis se désigna en posant la main sur son torse. Victor venait de comprendre, ce personnage se présentait à son public, il s'appelait Sadjo Bel !Curieux, il s'approcha pour profiter de la suite du spectacle. L'individu avait une barbe blanche imposante et une tignasse grisonnante. Personne ne pouvait s'y tromper, sa barbe était postiche mais pour les cheveux le doute était permis.

    Sadjo traversa la cabine pour en ressortir avec deux chaises en bois, puis il les posa devant la scène. Ensuite, il cogna dessus à plusieurs reprises pour prouver qu'elles étaient robustes avant de s'asseoir dessus. Tranquillement, il répéta l'opération. Victor comptait dans sa tête, il y avait maintenant six chaises. À chaque fois qu'il passait sous cette toile, Sadjo sortait chargé d'objets encombrants. Comment faisait-il ? Les chaises traditionnelles rempaillées ne pouvaient pas se plier, c'était de la magie.

    Le magicien tira une petite table de la cabine, quelques secondes après une deuxième table apparaissait, il les plaça côte à côte et recouvrit l'ensemble d'une nappe en tissu.

    Sadjo observait son public, chaque minute un peu plus nombreux. Son regard inquisiteur se posa sur Victor. Le magicien s'avança doucement vers lui, puis s'empara de sa main pour le conduire sur la scène, et chaleureusement, il l'invita à s'asseoir sur une chaise. L'illusionniste alla chercher d'autres individus dans la foule. Victor en connaissait certains, c'étaient des sans-abris.

    Une fois tous les convives en place, Sadjo fit apparaître un plateau chargé d'assiettes, de verres, de couverts et de serviettes. Ensuite, il dressa la table avec délicatesse, puis il s'esquiva derrière la toile. La foule était en ébullition. Qu'est-ce que Sadjo Bel, l'illusionniste leur réservait ?

    Soudain, une odeur très commune embauma la scène. Dès cet instant, les convives savaient ce qu'ils allaient manger. La toile s'agita et laissa apparaître le dos du magicien. Il marchait à reculons et semblait porter quelque chose de lourd, c'était une marmite. Il déposa le plat sur la table et leva le couvercle pour dévoiler une formidable choucroute garnie. Sous un tonnerre d'applaudissements, Place Louis Pradel, les invités furent servis généreusement, et pendant qu'ils dégustaient leurs repas, Sadjo Bel plaça une pancarte « entracte ». L'homme se mis en tailleur et il ferma les yeux. Subjugués, des passants jetèrent des pièces dans la panière. Une fois leur assiette terminée, les convives goûtèrent aux fromages apportés par le magicien et rassasiés, ils sortirent de table, pour se fondre dans la foule.

    Heureux, Sadjo Bel commença le dernier acte de son spectacle. Dans la marmite, l'homme empila les assiettes, les verres et les couverts puis il s'assit en tailleur avec l'ensemble sur ses genoux. De sa tunique, il fit apparaître un feutre et une feuille de papier pour écrire quelques mots. Il présenta le message à la foule et interpella deux hommes du regard.

    « Recouvrez-moi de la nappe, retournez dans le public, et comptez jusqu'à dix ».

    Deux convives s'avancèrent pour se saisir de la nappe et ils recouvrirent le magicien avant de s'éloigner. Bravant leur timidité, à voix haute, ils entonnèrent : « un, deux, trois ». Et la foule se joignit à eux : « quatre, cinq, six, sept, huit, neuf, dix ».

    Victor ne remarqua aucun changement, mais doucement, la toile s'effondra au sol. Sadjo Bel, l'illusionniste s'était volatilisé et le public resta estomaqué. Soudain, la toile de la cabine s'agita, le magicien était de retour. Acclamé par des spectateurs comblés, il salua la foule avec une gestuelle théâtrale puis durant l'ovation, il rangea les tables et les chaises dans la cabine. Ensuite, il décrocha la toile et démonta les tiges de la structure. Après avoir plié le tapis pour reformer son baluchon, il salua une dernière fois son public avant de partir.

    Victor n'avait jamais assisté à quelque chose d'aussi grandiose. Sadjo Bel était arrivé avec un baluchon et sans dire un mot il avait fait apparaître une table, des chaises et une marmite pour leur servir un repas. En plus, il s'était régalé avec la choucroute et le plus extraordinaire, c'était sans conteste la disparition sous la nappe. Cet instant-là était bluffant, mais ce magicien ne semblait en avoir conscience, il se remettait en route simplement, comme un type ordinaire. Ravi, Victor songea que la jeune fugueuse avait raison, c'était un bon tuyau.


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    Dernière modification par Unmec (11 Décembre 2015 21:08:50)

  • Georwell

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    #2 26 Novembre 2015 15:36:45

    Bien que je ne m'habitue pas trop à ce style contemporain, j'ai bien aimé ton premier chapitre ! Le numéro est bien décrit, l'ambiance pourrait peut-être un peu plus développé.
    Sinon continue comme cela c'est très bien !
  • Mansuz

    Amant des romans

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    #3 27 Novembre 2015 10:04:30

    Merci ! Je suis d'accord avec toi, l'ambiance pourrait être plus  développée. J'ai encore beaucoup de mal à mettre des détails (de peur d'ennuyer mes lecteurs ou de faire des distorsions dans l'intrigue ). Mais j'essaye, je pense que je vais m'améliorer sur ce point avec le temps :)

    Dernière modification par Unmec (27 Novembre 2015 10:05:52)

  • Mansuz

    Amant des romans

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    #4 02 Décembre 2015 21:16:52

    Voilà le chapitre 2 ;) N'hésitez pas à réagir !

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    2 - Film d’horreur




    Deux mois plus tôt.
    À vingt-trois heures quarante, en regardant un film d’horreur, Edward était crispé sur son lit. L’écran de l’ordinateur illumina la pièce, dernier hurlement, le jeune homme sursauta, le film était terminé.
    Ce soir, ses parents mangeaient chez des amis. Il était seul dans la maison et maintenant accablé par le silence, il avait peur. Comme les volets étaient ouverts, la lueur de la lune l’empêchait de trouver le sommeil. Il regrettait d’avoir oublié de les fermer, et maintenant que l’obscurité régnait en maître, il n’osait plus le faire. Le battement d’un volet ne faisait qu’augmenter sa nervosité. « Bordel, il faut que papa change ce crochet » songea-t-il. Agacé, il se leva, puis d’un bond il ouvrit la fenêtre.
    L’air était frais et la nuit pesante. Un bruissement dans les buissons l’interpella, ses sens étaient en émoi ! Qu’est-ce que c’était ? Un chien, un loup, un rôdeur ? Rien qu’en y pensant, il eut un frisson dans le dos. Sans réfléchir, il se jeta sur le crochet droit et referma le battant. Paniqué, il rencontra quelques difficultés avec le crochet gauche. Il claqua les volets, ferma la fenêtre et sauta dans son lit. Son cœur battait la chamade.
    Victime de son imagination débordante, il se sentit bête. Quelques minutes après, il dormait paisiblement.


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    Dernière modification par Unmec (11 Décembre 2015 21:09:35)

  • Georwell

    Apprenti Lecteur

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    #5 03 Décembre 2015 06:53:56

    J'ai vraiment beaucoup aimé ce chapitre !
    L'ambiance est très bien développée, l'état d'esprit du personnage également et le suspense est très bien tenu d'ailleurs vivement la suite.
    Le fait de revenir en arrière est aussi très intéressant !

    Bravo et vivement la suite !
  • Mansuz

    Amant des romans

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    #6 04 Décembre 2015 06:10:09

    Merci :)
  • Mansuz

    Amant des romans

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    #7 11 Décembre 2015 21:06:25

    Comme promis, voici la suite ;)

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    3 - Dream journal


    Bercé par les chants d’oiseaux et les rêves étranges, Edward somnolait. En s’immisçant doucement dans la chambre, la lueur du jour le réveilla. Sans attendre, Ed s’empara d’un carnet sur sa table de nuit, puis il écrivit compulsivement dessus.
    Comme à son habitude, chaque matin, avant de se lever, il notait ses rêves. Au départ, il était content de pouvoir s’en rappeler. Parfois Edward s’envolait, courait sur des distances interminables, parcourait des lieux loufoques et découvrait des personnages hauts en couleur. Ce monde sorti de son inconscient le fascinait et l’effrayait. Et son “Dream journal” pouvait lui en donner un aperçu. Mais ces derniers temps, ses songes viraient aux cauchemars, il peinait à les noter et aurait aimé les avoir oubliés. Celui de cette nuit était étrange et basculait vers la folie. L’ensemble était confus, mais il avait en tête la trame principale.
    Il se rappelait qu’il courait sous un soleil de plomb. En dépit d’une chaleur étouffante, son rythme était élevé. En sueur, Ed avait envie de boire, mais il n’y avait aucun point d’eau à l’horizon, il était seul au milieu de la nature. Sous la contrainte, il continua son effort jusqu’à atteindre un bar et assoiffé, il s’effondra au sol. Plusieurs clients assis en terrasse assistèrent à la scène. En sauveurs, ils allèrent à sa rencontre.
    D’une voix presque inaudible Ed répétait sans cesse :
    — J’ai soif …
    Un des curieux rétorqua :
    — Nous avons que de l’alcool !… Ça déshydrate…
    — J’ai soif …
    — Y’a pas d’eau dans l’coin j’te dis. Faut aller en ville !
    Un autre client donna de la voix :
    — Tu vois pas qu’il ne peut plus bouger. Y’a que Gilberte qui peut l’aider.
    Tous crièrent en cœur : « Gilberte, Gilberte, Gilberte ! ». 
    Les hommes s’écartèrent pour laisser passer une bimbo à la poitrine volumineuse. La jeune femme dégrafa son soutien gorge et empoigna le coureur assoiffé. Elle lui présenta son sein et il téta tel un nourrisson. Après une moue de dégoût, il cracha par terre et hurla :
    — Ce n’est pas du lait !
    La bimbo riposta :
    — Qu’est-ce que tu crois, c’est du cent pour cent silicone !
    Quand les clients éclatèrent de rire, Ed se réveilla.
    Est-ce que les films d’horreur étaient à l’origine de ce phénomène ? Il préférait ne pas trop y penser. Par contre il était sûr d’une chose, regardé en solitaire dans un lieu isolé, un film d’horreur avait plus d’impact. Il se leva puis s’habilla à la hâte pour déjeuner. Il avait une journée chargée en perspective, car il devait commencer à emballer ses affaires dans de gros cartons. Il allait bientôt quitter la demeure familiale pour emménager dans un petit appartement, un deux pièces de quarante-cinq mètres carrés.


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    Dernière modification par Unmec (11 Décembre 2015 21:10:17)

  • Mansuz

    Amant des romans

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    #8 21 Décembre 2015 20:29:44

    Bonne lecture ! :)

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    4 - Déménagement


    Edward avait récupéré des cartons à son travail, il venait d'emballer ses livres et ses vêtements. Maintenant, un tri s'imposait, il avait accumulé beaucoup de magazines, de bibelots et de vieux cours. Sur l'étagère murale trônait une multitude d'objets de son enfance. Les Pogs, ces petites rondelles en carton imagées lui rappelaient l'école primaire, c'était à la mode. Il fallait que les deux joueurs empilent au moins un pog, l'un par-dessus l'autre. Et le joueur qui arrivait à retourner la pile en lançant son "kini" remportait la partie. De nombreux souvenirs remontaient à la surface, les parties gagnées et perdues, il y avait tant joué. Juste à côté, il repéra quelques billes dans un sachet, des coquillages, des scoubidous, des pin's, un pompon en laine et un yo-yo sans ficelle. Il souriait en observant les premiers fossiles et les pierres qu'il avait découverts dans un chemin avec ses cousins. Ce jour-là, Edward avait trouvé une pierre lisse d'un côté et fendue de l'autre. Étant charmé par son aspect, il l'avait ramassée sans hésitation. Cette pierre n'avait pas changé, elle était toujours spéciale à ses yeux. Maintenant, elle lui rappelait quelque chose, mais quoi ? Il s'amusait en retrouvant les fèves et couronnes des rois provenant des galettes mangées lors de l'Épiphanie. Se séparer de tous ses objets lui était impossible. Edward plaça un carton au sol, puis avec des gestes rapides et délicats, il rangea le tout à l'intérieur. Ensuite, il s'empara du ruban adhésif et d'un marqueur pour finaliser l'emballage. Ses souvenirs d'enfance tenaient dans une boîte. Pour le reste, la décision fut brève. Les vieux cours et les magazines vétustes partiront en direction du tri sélectif.

    Un coup de klaxon, c'était le signal. Dans la cour, son père était à bord d'un véhicule de la ferme, une camionnette. Le dur métier d'agriculteur apportait tout de même quelques avantages. Sur le siège passager, Edward remarqua Thomas son cousin. Il était jeune, large d'épaule et costaud, une véritable force de la nature, sa présence était de bonne augure. Il fila en direction du garage et s'activa. Edward ouvrit grand les battants, puis il laissa approcher le camion en marche arrière. Ensuite la joyeuse bande commença à charger le plus gros : le lit, le matelas et les meubles. Afin de combler les espaces vides, en sueur, ils enchaînèrent avec les chaises et des cartons. Une fois le camion chargé, les portes se fermèrent. Pour l'électroménager, Edward avait tout acheté, l'ensemble serait livré à domicile en début de semaine. Après un tour de clé, le moteur ronronna et les trois hommes prirent la route, direction Trévoux. Le déménagement allait se faire dans un appartement du centre-ville.


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    Dernière modification par Unmec (21 Décembre 2015 20:31:14)

  • Mansuz

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    #9 25 Décembre 2015 09:18:58

    Joyeux Noël à tous ! ;)

    L'homme à la hache a tenu à vous faire une petite surprise :)
    Il faut gratter l'image pour la découvrir.

    http://krobars.com/krob/jag.php?lx=451& … -hfond.png
  • Mansuz

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    #10 08 Janvier 2016 21:38:54

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    5 - Rêve


    Installé depuis une semaine, Edward était aux anges. Il venait de faire le ménage et avant d'accueillir Marianne sa copine, il inspectait son appartement. Dans la pièce principale, il avait imaginé un coin cuisine en installant le réfrigérateur-congélateur et la table à manger à côté. Dans l'autre moitié, c'était la partie salon. Elle était formée : d'un canapé, d'une table basse, d'une télévision, d'un baby-foot et de quelques étagères. La décoration était sommaire pour le moment, il la peaufinerait avec le temps. Dans la chambre, son lit deux places était imposant et laissait peu d'espace pour le reste. Sur le meuble de chevet, le Dream Journal était là. Il prit le temps de le feuilleter, son regard se figea sur un paragraphe. En lisant quelques mots griffonnés à la hâte, des images, des odeurs lui revinrent à l'esprit. Il perdit pied et bascula dans son imaginaire.

    Son rêve revenait à la surface. Au cœur d'une forêt dense, Edward était en fuite. Ses assaillants étaient trop nombreux et ils se rapprochaient dangereusement. Épuisé par cette course poursuite, il espérait trouver un refuge. Son regard s'arrêta sur un baobab creux, une cachette idéale. Il se glissa à l'intérieur, mais le répit fut de courte durée. Il se rendit compte qu'il était encerclé par les archers belliqueux. Il n'y avait plus d'issue possible. Piégé, il envisageait sa mort avec une certitude déconcertante. Au cœur du tronc, un grignotement l'interpella. En se rapprochant du bruit, il décerna un écureuil. L'homme et la bête échangèrent un regard complice. Puis le rongeur confia une pierre à Edward et baragouina :

    - Voici ton échappatoire. Avec, où tu veux être, tu seras .

    Hésitant, le jeune homme s'empara du caillou. Après avoir effectué un clin d'œil magistral, l'écureuil fila à toute vitesse. Envahi par un espoir de liberté, Edward serra la pierre dans sa main. Sa paume dégagea une chaleur apaisante puis il disparut. Edward venait d'apparaître, plus loin, hors de danger. À l'écart, il regardait les guerriers prendre d'assaut le baobab. Incrédules, ils peinaient à comprendre que l'arbre était vide.

    La pierre de son enfance si spéciale à ses yeux, il en avait rêvé le mois dernier ! Le songe était encore très présent dans son esprit, tenace, indélébile. Il fonça en direction du placard mural pour ouvrir un carton, puis il fouilla frénétiquement à l'intérieur. Après avoir longuement brassé des pogs, des coquillages et des billes, ses doigts se refermèrent sur un objet. Il tenait dans sa main la pierre de son rêve. Il n'y avait pas de doute, cette forme, cette couleur, il ne pouvait pas l'oublier.

    Son téléphone vibra et après un SMS reçu, c'était le retour à la réalité. Marianne était en bas dans la rue. Pour Edward, elle était incroyable. Il ne l'avait pas charmée, c'était elle qui l'avait séduit. Elle était espiègle, curieuse, pétillante, audacieuse et il avait succombé. Il mit la pierre dans la poche arrière de son jean, puis il descendit calmement les escaliers et il traversa la cour intérieure pour déboucher sur le hall. Elle était en face et profitait des bouquets et plantes qu'exposait le fleuriste. Elle était petite et ses cheveux bouclés descendaient juste au-dessus de ses épaules. Elle humait délicatement des roses. Échange de regard, sourire réciproque, joie de se retrouver, elle se jeta dans ses bras pour l'embrasser. Ils restèrent enlacés un moment, puis Edward l'invita à découvrir son appartement.

    En principe, ils se retrouvaient un week-end sur deux. En ce moment c'était plus décousu, car sa belle était en vacances durant l'été et elle était souvent en vadrouille avec ses copines. Marianne étudiait à Lyon dans une école de comptabilité. Un milieu complètement étranger et abstrait aux yeux d'Ed qui travaillait dans l'industrie.

    Un cri de victoire résonna dans l'appartement, Marianne venait de gagner au baby foot. Avec une mimique narquoise et la langue tirée elle murmura :

    - Je t'ai laminé mon cœur.

    En faisant la moue, Edward répondit :

    - Je n'aime pas perdre.

    Marianne s'approcha de son homme. Un câlin réconfortant, c'était la meilleure des solutions pour oublier une défaite. Avec grâce, elle lui caressa les épaules, et ses mains délicates descendirent doucement le long de son dos musclé, pour s'arrêter sur ses fesses, puis elles glissèrent dans les poches du jean. Ses doigts frôlèrent un objet. Curieuse, elle le tâta puis regarda Edward en souriant :

    - C'est une pierre ?

    Il acquiesça d'un mouvement de la tête et l'embrassa fougueusement. Elle s'agrippa à lui pour enrouler ses jambes autour de sa taille et approcha ses lèvres pulpeuses de son oreille pour lui susurrer ses désirs. Il la porta dans la chambre. Envie intense, corps entrelacés, plaisir charnel, apothéose.

    Allongé sur le côté, Edward caressait le dos de sa chérie qui de temps à autre, frissonnait. Marianne brisa le silence :

    - Ed, pourquoi cette pierre est dans ta poche ?

    - Avec, je suis invincible !

    - Non sérieusement ?

    Edward s'allongea sur le dos puis il raconta son rêve et Marianne écouta son récit avec attention. Il hésita puis nu, il se leva pour fouiller son jean et lui présenter la pierre.

    En tenant le galet à deux doigts, il entonna :

    - Avec, je sens que je peux me téléporter.

    Incrédule, Marianne ricana :

    - Dans tes rêves seulement !

    Vexé, il lui jeta la pierre au visage. Trop lentement, elle l'intercepta et sourit.

    - Je la tiens dans le creux de ma main et je pense très fort à un lieu, c'est ça ?

    Elle serra la pierre, ferma les yeux, se concentra sur une destination. Rien ne se passa, elle était toujours sur le lit. Durant un instant, elle y avait cru, une vague de désillusion la gagna, elle rit jaune et d'une pichenette elle envoya valdinguer le caillou à l'autre bout de la chambre. Sèchement, elle annonça :

    - Les songes restent des songes Edward... Et puis tu as plus important à faire ! On doit préparer ta pendaison de crémaillère.

    D'un signe de la tête, Edward acquiesça.


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    Dernière modification par Unmec (08 Janvier 2016 21:39:28)