Le premier jour de ma vie

 
    • Anaé Lambre

      Livraddictien débutant

      Hors ligne

      #1 26 Mai 2016 18:43:07

      Coucou !

      Je vous présente ce texte parce que ce n'est pas du tout ce que j'ai l'habitude d'écrire, puisque c'est mon premier texte engagé... Et comme j'aimerais en écrire beaucoup d'autres me tenant à cœur comme celui-ci, j'aimerais avoir votre avis pour savoir ce que je pourrais améliorer et ce qui est positif ! je vous remercie beaucoup d'avance pour votre temps et vos conseils :)


      Le premier jour de ma vie


                  J'ouvre les yeux. Pour la première fois, je vois la lumière. Elle est belle, elle me réchauffe. Je tente un premier pas. Un, deux, trois... J'avance ! Je goûte l'air autour de moi, qui emplit doucement mes poumons. Mon petit corps frêle et fragile s'éveille à la vie. Je sais, au fond de mon cœur, que j'ai de merveilleuses choses à découvrir. Je les rêve, je les imagine déjà, même si j'ignore encore quelles formes elles auront... Marcher me fatigue, je dois encore prendre possession de mes membres hésitants. Maman m'apprendra. C'est elle qui me protégera tant que je serai faible. Je me tourne, je me retourne. Je cherche maman des yeux, je sais qu'elle devrait être là. Pourtant, je ne la vois pas. J'appelle mais elle ne répond pas. A côté de moi, ma sœur l'appelle aussi. Elle est triste et se blottit contre moi. Elle a peur d'être seule. Bientôt elle se tait : elle a perdu espoir. Moi je continue, je m'obstine, espérant qu'elle apparaisse, comme par magie, pour nous envelopper de sa chaleur maternelle. Combien de temps s'est-il écoulé ? Je n'en sais rien. Je m'inquiète, ce n'est pas normal.       

                  Quelqu'un finit par approcher. Il est grand et vêtu de blanc. Ce n'est pas maman... Il nous attrape, ma sœur, moi, et d'autres encore. Certains courent en tous sens pour essayer d'échapper à sa poigne. Je tente de protéger ma sœur, elle semble encore plus fragile que moi. Mais quoi que nous fassions, nous sommes pris au piège. Il n'y a aucun moyen de s'évader. Il nous attrape tous et nous jette dans une caisse. Nous sommes secoués. Je sens ma sœur trembler tout contre moi. L'homme retourne la caisse, nous tombons à la renverse, abandonnés au vide. Notre chute s'arrête enfin, sur un sol noir et caoutchouteux. Je tente de me relever mais le tapis roulant me déstabilise. Il y a des bords, nous ne pouvons pas sauter, ils sont trop hauts pour nous. Je parviens à me frayer un passage jusqu'à ma sœur, un peu plus loin. Elle ne comprend pas, elle a peur. Je voudrais pouvoir la rassurer, mais je suis tout aussi perdu. Dans cet endroit étrange, la lumière m'aveugle et l'odeur qui monte à mes narines est âcre, lourde, chargée d'un parfum angoissant et répugnant. Autour de nous, les autres remuent comme un flot vivant, ils ne comprennent pas ce qui leur arrive et jettent en tous sens des regards apeurés.
                 
                  Soudain une main m'empoigne, m'arrachant à ma sœur qui s’époumone en me voyant éloigné d'elle. Elle me fixe de ses yeux emplis d'effroi, impuissante. La main gantée me retourne, me palpe sans ménagement. Mais que me veut-on ? On me jette dans une nouvelle caisse où d'autres s'entassent déjà. Où est ma sœur ? Je dois la retrouver. Elle n'a pas notre mère, comment survivra-t-elle si je la laisse seule ? Quoiqu'il arrive, nous serons plus forts à deux... Autour de moi les autres s'agitent, tentent de ne pas se faire écraser par les nouveaux arrivants. Que va-t-on faire de nous ? Ma sœur ne m'a pas rejoint mais un homme arrive déjà et s'empare de la caisse. Il la retourne au-dessus d'un sac noir dans lequel nous tombons tous inexorablement. J'atterris sur les uns, les autres me tombent dessus. Mes camarades sont terrifiés, je le sens. Leur angoisse me gagne, la peur commence à monter en moi. Je tente de me dégager et lève la tête pour pouvoir respirer plus facilement. Je croise son regard. Il est glacial et me fixe sans émotion. Sur ce visage de marbre, le sac se referme sur les ténèbres.

                  A mes côtés, les autres paniquent. Mon cœur bat la chamade, ses battements s'envolent à un rythme effréné. Ma sœur ! Où est ma sœur ? De toutes parts s'élèvent des piaillements, sonnant comme des hurlements à mes oreilles. J'ai du mal à respirer, j'ai chaud, je me prends des coups car les autres, incapables de garder leur calme, tentent en vain de s'échapper, de percer cette paroi qui résiste, résiste encore. Leur panique me gagne, je me débats pour trouver l'air qui se fait de plus en plus rare. Je ne vois pas mes compagnons mais je les entends, je les sens remuer comme une vague au désespoir. Mon cœur bat si vite, et mes poumons ont tant de mal à se remplir...

                  Un éclair de lucidité me traverse. Alors, je comprends. Un frisson secoue mon corps encore si fragile et malgré la chaleur, mon sang se glace dans mes veines. Jamais je ne reverrai ma sœur. Jamais je ne reverrai cette belle lumière qui avait réchauffé mon cœur pendant ces brefs instants. Jamais je ne pourrai me nicher contre ma mère. Jamais je ne pourrai découvrir ce monde que je rêvais d'explorer il y a si peu de temps encore, quand j'avais cru à tort que la vie s'offrait à moi. J'allais retourner à ce néant que j'avais quitté quelques heures plus tôt...

                  A cette pensée, j'ai envie de hurler, moi aussi. Je me mets à trembler frénétiquement. Je suis perdu. Je n'ai d'autre choix que d'admettre cette terrible réalité alors même que mes poumons s'affolent. Je tente de réfléchir, mais mes idées ne sont plus très claires. Pourtant, une question m'apparait avec une netteté dramatique : pourquoi m'a-t-on fait naître ? Pourquoi me faire subir ça ? Pourquoi me renvoyer dans le noir, moi qui n'ai encore rien vu, rien fait ? Est-ce que ma vie n'est rien ? Je ne comprends pas, rien de tout cela n'a de sens. L'air me manque. Autour de moi, les hurlements s'éteignent comme un feu mourant agité des derniers crépitements, les corps tremblants s'immobilisent et leurs cœurs innocents comptent leurs ultimes battements. Les derniers soubresauts me secouent, je n'ai plus la force de me battre. J'ai beau chercher l'air, il n'y en a plus. Je sens la vie me quitter. Déjà ma vue devient floue, les ténèbres m'engloutissent. J'agonise sur le chemin de mon premier et dernier voyage.

      Dernière modification par Anaé Lambre (27 Mai 2016 17:41:46)

    • Wakanda

      Petit joueur sur les mots

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      #2 26 Mai 2016 20:59:39

      Vraiment superbe texte! Il y a beaucoup d'images très fortes et magnifiques!
      Je n'ai pas vraiment compris pourquoi au début tu disais que c'était un texte engagé je suis donc allée sur ton blog où j'ai découvert le sens profond de ton texte. C'est vraiment révoltant et je ne comprends pas comment on peut faire ça, heureusement qu'il y a encore des gens, comme toi, pour ne pas fermer les yeux devant ces pratiques inhumaines.

      Je n'ai pas de conseils à te donner, désolée. Je souhaite juste d'encourager à continuer! ;)
    • Anaé Lambre

      Livraddictien débutant

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      #3 27 Mai 2016 13:54:52

      Merci d'avoir pris le temps de lire, de répondre et même d'aller chercher des réponses sur mon blog. Je n'en n'attendais pas tant, ça me touche beaucoup :)
    • Invité

      Invité

      #4 27 Mai 2016 14:15:52

      Bonjour,

      Joli texte, bien écrit. Tout d'abord bravo, pas de faute à part "goutte" au lieu de goûte" au début, et cela fait plaisir de lire du français.
      Juste une remarque : le "narrateur" ne sait pas qui l'empoigne pour le séparer de sa soeur et ensuite tu dis "l'homme". Peut-être rester dans le descriptif plutôt que de mettre un nom sur la menace de cet être "qui n'est pas maman".

      Je ne suis pas encore allée voir sur le blog car la description m'a tout de suite évoqué le sort ignoble des poussins mâles que l'on jette vivants, après le sexage, dans les broyeurs  car ils ne "servent à rien" ; on ne garde que les poules pour la ponte. Tant de cruauté gratuite me paraît inconcevable, et pourtant...

      C'est une atmosphère semblable que tu as su rendre ici.  On a envie d'en savoir plus.

      Donc je vais voir ton blog.
    • Anaé Lambre

      Livraddictien débutant

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      #5 27 Mai 2016 17:41:21

      Tout d'abord merci pour ton avis !
      Ouille, il fallait bien que j'en laisse passer une, beurk, je modifie ça de ce pas ! Je vais voir pour retravailler dans ce sens. Merci !
    • Astyala

      A la découverte des livres

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      #6 31 Mai 2016 12:21:55

      Salut,
      Je vais être un peu plus dure, mais comme tu cherches des avis et pas que des compliments, je me permets.
      C'est vrai que l'écriture est maîtrisée, c'est agréable à lire.
      Par contre, je trouve que ton texte manque de rythme, c'est un peu plat, on devrait sentir l'halètement de l'animal, sa peur, son effroi qui brouille ses pensées, les coupures du récit. Là, ses pensées sont trop claires tout le long, et d'ailleurs un peu trop complexes pour un nouveau-né, j'ai du mal à accrocher. C'est un peu trop "gentillet" en somme, j'ai du mal à le ressentir, pas de frisson.

      Belle cause à défendre en tout cas :)