[Liens de sang - Février 2024] - Parlons du roman

Tout à fait ! Comme Emmani et Grominou le disent, j'aime la subtilité des réactions et le réalisme qui s'en dégage et toutes les réflexions. C'est très intéressant ces questions et de prime abord on aurait envie de pousser la révolte :goutte:

Han, j'aime bien cette idée qui pourrait "justifier" un peu, mais sinon oui, c'est dommage

Spoiler (Cliquez pour afficher)

de n'avoir aucune explication sur le voyage dans le temps... ça fait un peu le fameux "ta gueule c'est magique" mais c'est vrai que c'est plus le côté historique qui est mis en avant et important dans l'histoire...

Spoiler (Cliquez pour afficher)

Ahah je pense que j'étais dans le déni moi, je m'étais dit "ouais c'est une explication le mur" alors que non... mais oui, je suis tout à fait d'accord, c'est dommage d'avoir su dès le début qu'ils revenaient et qu'ils étaient ensemble. J'aurai plus stressé sans ce prologue !

Spoiler (Cliquez pour afficher)

Je n'aurais pas aimé qu'une "belle" histoire se crée entre Rufus et Alice, avec lui qui aurait été positivement influencé par Dana dès tout petit et qu'il aurait changé complètement son regard, par exemple...
C'est ce que je craignais dès le moment où on a su qu'Alice et Rufus auraient au moins un enfant ensemble.
Évidemment, leur relation est très triste, mais me semble plus cohérente avec le contexte si dur...

Spoiler (Cliquez pour afficher)

J'ai craint à un moment aussi qu'il dévie trop (bon, sauf qu'on savait via le prologue qu'elle le réclamait....).
Malgré ses actions positives, il rentre un peu dans le moule parfois.
Et surtout, ce qu'on aperçoit de lui même dans la partie présent ne me plaisait pas forcément... Je pense au fait qu'il avait trop lourdement insisté pour qu'elle lui tape ses textes à la machine, par exemple (et plus généralement, j'avais l'impression qu'il la déconsidérait parfois).
Après, on est en 1976, la considération pour les femmes a encore un peu de chemin à faire...

Spoiler (Cliquez pour afficher)

Par exemple de ne pas sortir de chez elle car s'il y a un "appel" de Rufus pendant qu'elle est en voiture, elle ne pourrait pas arriver à la même vitesse mais sans la voiture comme protection. C'est tout bête comme réflexion mais le fait de l'intégrer m'a plu.

Spoiler (Cliquez pour afficher)

Je ne m'attendais pas à une explication sur ces voyages, donc je n'ai pas ressenti de frustration.
C'est en vous lisant que je me questionne un peu sur ce "pourquoi elle" (et pourquoi à ce moment de sa vie).

Spoiler (Cliquez pour afficher)

que le "décalage temporel" soit modifié à un moment... Au moment du suicide d'Alice, je crois?
Elle revient et il ne s'est finalement pas écoulé autant de temps que d'habitude, côté décalage? :chaispas:

Spoiler (Cliquez pour afficher)

Je cite "Je comprends à quel point il est facile de conditionner les gens à accepter l'esclavage"
Cette dimension est fort bien traitée !

J'ai aussi trouvé la dimension filiale à la fois étrange et intéressante : quid du cas où elle ne sauve pas Rufus?
Car alors pas de descendance O_o

Spoiler (Cliquez pour afficher)

je me demande si l'auteure n'a pas justement voulu montrer que tout n'est pas encore réglé en 1976 dans la relation homme blanc/femme noire, qu'il y a encore des trucs malsains qui subsistent même si ça s'est grandement amélioré?

Concernant le décalage temporel lorsqu'elle revient la dernière fois, c'est simplement que Rufus s'est retrouvé en danger plus vite que d'habitude, non?  Moi c'est ce que j'ai compris.

Mais oui, on sent bien que le voyage temporel n'est qu'un prétexte à confronter deux réalités, mais je ne l'ai pas vu comme une facilité comme l'a dit Lutétia ci-dessus.  Plutôt comme une convention qu'on accepte parce que ça sert le récit.  Cela ne m'a pas dérangée (à part le petit détail que j'ai soulevé concernant le pourquoi c'est Dana qui est affectée)

Spoiler (Cliquez pour afficher)

Je pense à l’affection incompréhensible que ressent Dana pour Rufus… enfin justement, on comprend l’ambiguïté de cette relation ultra toxique. Au début, je comprenais les excuses qu’on pouvait lui trouver d’autant plus qu’il était un jeune maître, dans la classe des blancs dominants, mais aussi un enfant qui n’a pas encore eu à prendre des décisions… mais à partir du viol d’Alice, puis le fait qu’il devienne cet adulte toujours aussi capricieux que l’enfant qu’il fut… c’était de plus en plus difficile à lire. Même si encore une fois, on le voit à différents moments et entre sa mère très permissive et son père décrit comme violent mais "juste", il y avait peu de chances qu’il devienne un jeune homme équilibré. (il me semble qu'il craint vraiment son père)

Dana semble avoir de l’affection pour lui, mais elle n’a pas vraiment le choix non plus… D’une, elle pensait pouvoir semer des graines dans l’esprit de Rufus afin de pouvoir rendre l’avenir plus doux pour les esclaves et pour Alice (bon c’est raté). De deux, elle devait survivre.
Malgré tout ce qu’il lui fait subir, elle s’estime presque heureuse de son sort, qui rend même certains autres exclaves jaloux. Ces moments entre esclaves étaient aussi très intéressants car l’autrice abordait différentes questions sur la contrainte, la soumission, sur la façon de s’adapter à ce qui parait inconcevable parce que c’est "raisonnable" et tellement risqué de résister et de fuir. Je trouve ces ambiguïtés subsistent comme la position de Sarah qui est considérée comme une mammy (la question d’être blanc à l’intérieur vis-à-vis d’autres personnes noires notamment). Presque toutes les relations semblent ambigues car dans un monde où les rapports de domination sont prégnants. Il y a aussi le passage de la fête où Rufus semble à la fois aimé et craint par les esclaves.

J’ai aimé le personnage d’Alice et je la comprends dans sa rancœur. Dana n’a pas eu le choix et a fait ce qu’elle a pu, mais elle lui a annoncé qu’elle devait choisir entre la peste et le choléra : subir des viols répétés ou se faite bouffer par des chiens/protéger ses enfants… choix qui n’en est évidemment pas vraiment un puisqu’elle est privée de liberté, mais peut-être est-ce pire d’avoir cette illusion de choix, de devoir ravaler sa haine et d’entretenir une zone grise. Là on a à la fois la dimension raciste et misogyne. A un moment, il y a une allusion au fait qu’elle s’habitue à cette condition, comme si à force, elle développait un syndrome de Stockholm, avec la lucidité qu’elle ne doit pas ressentir du positif envers son bourreau. Dana est totalement impuissante face à ça, et je pense que cela explique le fait qu’elle laisse Alice se défouler sur elle. Je trouve qu'Alice est un personnage fort et résistant. 

J’ai trouvé le thème bien exploité avec ces personnages du XXème siècles qui s’acclimatent, même Dana finalement (p165)… les informations historiques qui sont disséminées sans lourdeur. Un autre passage qui m’a marquée, celui où les enfants jouent aux esclavagistes en simulant une vente, ce qui ne choque pas Kevin…