Bonjour,
J'espère que vous allez bien ! Je reprends un peu ce suivi lecture avec des avis des derniers livres que j'ai lus et dont je garde systématiquement une trace.
Relecture du premier roman de Maupassant,
Une Vie. Je ne garde aucun souvenir de la découverte de cet ouvrage, alors que j’ai 16/17 ans (la suite explique peut-être pourquoi j’ai si peu de souvenirs). Nous avons vu, avec mon amoureux, une adaptation exceptionnelle au théâtre d’
Une Vie. Clémentine Célarié nous a bluffés par sa performance. Il fallait donc que je relise ce livre.
Une Vie n’est ni plus ni moins qu’une triste vie, une vie faite de drames, de désillusions, de trahisons. Jeanne a tout pour être heureuse : ses parents sont humains, généreux et fortunés, ses parents l’aiment, ses parents ne lui imposeraient rien qui aille contre son bonheur. Son mariage avec Julien de Lamare, qui se montre charmant le temps de la parade amoureuse, la plonge dans une série d’événements sombres, négatifs et la pousse à vivre une vie faite d’attente, de rien, de vide. Jeanne est rudoyée, trompée, privée de la fortune de ses parents et du confort dont elle pourrait bénéficier. Elle passe sa vie dans sa grande maison, ancrage important. Son fils n’a guère plus d’égards pour elle, la prenant pour un portefeuille ambulant dans lequel on puise et qu’on ignore entre deux emprunts.
Étonnamment, il se passe peu de choses... on assiste à la déchéance de Jeanne, à cette solitude qui prend forme, à cette attente interminable (essentiellement tournée autour du retour du fils tant aimé). J’aime beaucoup Maupassant et sa plume. Il est cruel, cynique et cela lui permet de peindre avec précision le genre humain, souvent noir, souvent mesquin, souvent intéressé.
*****
Les Rêveurs d'Isabelle Carré est un petit bijou, simple condensé d’amour, de douceur, de doutes, de douleurs, de souffrances. Un condensé de vie, en somme. La vie d’Isabelle Carré, actrice discrète et délicate, m’a happée par son parcours atypique, riche, coloré et sombre à la fois. Elle y raconte ses parents, êtres sensibles, artistes, son enfance et sa jeunesse parsemées, constellées de bonheurs et de drames intimes, personnels mais aussi familiaux. Elle ne verse jamais dans le pathos, ni dans une forme de misérabilisme. Tout récit autobiographique qu’est ce livre, c’est avec pudeur et justesse qu’elle se dévoile. J’aimais l’actrice, j’aime désormais l’autrice.
*****
Roman culte paru en 1962, Vol au-dessus d’un nid de coucou relate l’univers psychiatrique d’un hôpital américain. La particularité de celui-ci est la poigne de fer avec laquelle est tenu le service par une ancienne infirmière militaire, Mlle Ratched (ou La Major pour les intimes). Mlle Ratched maintient l’ordre avec fermeté, mettant au pli patients, mais aussi surveillants et médecins. Elle tisse une toile, répand son emprise pour une mécanique bien huilée pour elle et terrible et mal vécue par les résidents. L’arrivée d’un homme va alors enrayer cette mécanique et un sérieux bras de fer va s’engager entre le corps médical et les internés.
Ce récit est mené par un indien se faisant passé pour sourd et qui laisse traîner ses oreilles partout. Il y raconte des anecdotes cocasses, tragiques, sa vie passée, ses parents massacrés par le rouleau compresseur qu’est l’Etat qui délogeait les derniers indiens à cette époque.
Ken Kesey raconte l’internement psychiatrique de manière glaçante. Les sévices imposés, les traques de la thérapie commune soit-disant positive et bénéfique pour tous, les petits détails du quotidien qui rendraient encore plus fou un homme entrant là-dedans, tout est effrayant, même si grâce à MacMurphy, quelques petites folies ont pu être vécues. Les personnages sont forcément barrés mais on s’attache à ce petit groupe haut en couleurs, uni, rebelle parfois, lâche parfois.
*****
J.H. cherche âme-sœur de Leïla Sebbar. Je ne sais pas trop quoi écrire sur ce livre... j’ai trouvé le style âpre, dur et je crois que je n’ai pas réussi à accrocher à l’histoire. Je m’attendais à autre chose : un vrai échange entre deux détenus sur leurs histoires de cœur. Les récits enchâssés de leurs histoires respectives (et la communication difficile voire impossible entre Roland et Jaffar) et de leur quotidien en prison (peut-être pas assez décrit à mon goût) ne m’ont pas aidée à me plonger pleinement dans ce récit. Je suis déçue parce que je pensais vraiment m’attacher aux personnages et adhérer à ce livre.
Le fait que ce soit une autrice algérienne et qu’elle plante les bases de son récit dans univers carcéral m’avaient convaincue (en plus de la très belle première de couverture des éditions Elyzad). Je ne m’avoue pas vaincue et je me tournerai vers elle une prochaine fois.
*****
La librairie de la place aux herbes d'Eric de Kermel. J’ai été séduite par le début de ce petit livre préfacé par Erik Orsenna, gage de qualité, a priori. Nathalie, professeur de Lettres, quitte sa vie parisienne pour Uzès où elle reprend la librairie. Elle va croiser la route de lecteurs aux vies, âges, fêlures divers.
Le début m’a complètement embarquée. Tout d’abord, c’est très bien écrit. Un style de qualité. Les premiers personnages m’ont parlé, je les ai trouvés touchants. Et puis... d’autres m’ont paru moins intéressants, les digressions de Nathalie quant à sa vie, aux siens m’ont presque ennuyée, le tout un peu trop stéréotypé à mon goût. J’ai aimé malgré tout les nombreuses références littéraires, je pense lire quelques ouvrages cités parce que la narratrice a su en parler, a su les vendre.
Quand je lis un livre, je tiens à la vraisemblance... je veux sentir que OUI, tout ce qu’on me raconte pourrait réellement exister. Sinon je me plonge dans un ouvrage fantastique/merveilleux/ de SF. Là, Nathalie tombe en peu de temps sur des lecteurs qui se livrent très facilement, elle s’immisce dans leur vie avec une telle aisance et elle fait les fait évoluer de manière si impressionnante que j’ai fini par ne plus y croire. J’aimerais savoir à quel point les libraires peuvent avoir un impact aussi puissant et à quelle fréquence sur des gens qu’ils croisent comme ça...
Je m’interroge aussi sur mon propre statut de lectrice. Je tiens à fréquenter seulement des librairies indépendantes. J’avoue ne pas vraiment aimer être dérangée lorsque je déambule dans les rayons d’une librairie. Pourtant, je regrette de ne pas pouvoir plus souvent échanger avec des gens sur la littérature. Je n’ai jamais été confrontée à un.e libraire qui me dirait : « Vous avez pris cela, si vous aimez ce livre, la prochaine fois, dirigez-vous vers cet.te auteur.e » Peut-être que je suis un peu jalouse de la clientèle de la librairie d’Uzès et que j’aimerais qu’on mette sur ma route des auteurs vers lesquels je ne serais pas allée naturellement parce que j’ai un a priori ou que je ne les connais pas, tout simplement.
*****
Belle du Seigneur d'Albert Cohen. Je viens de finir ce chef-d’œuvre hors du commun. J’ignore comment l’aborder de manière concise et argumentée. C’est un pavé de plus de 1100 pages, c’est un livre très dense, très riche au style sublime mais atypique. J’ai lu 700 pages, fait une pause de quelques semaines et l’ai repris ces jours derniers de peur de ne plus m’y replonger ensuite.
Ai-je aimé ? Je crois. La passion amoureuse est remarquablement dépeinte. Ai-je été à l’aise avec ce livre ? Pas tout le temps. Assez peu souvent, même. Les faux-semblants de l’univers politique suisse (qui pourraient probablement être valables pour tout autre pays), le côté guindé d’Ariane et Solal m’ont plongée dans un univers anxiogène, factice, sans une once de spontanéité. C’est déroutant, dérangeant aussi.
La passion a-t-elle du bon ? Assurément, non. La destruction de ce couple fait froid dans le dos. Ils ne s’épargnent rien. Il ne lui épargne rien. Elle met du cœur à l’ouvrage pour que la passion (l’amour) dure, elle est prête à tout. Lui aussi, d’une certaine manière. Mais c’est brutal, déséquilibré.
Au-delà de ça, l’antisémitisme sous-jacent du milieu des années 30 est glaçant. J’ai été emportée par les déclarations d’amour du début, dérangée par ces longs passages sans aucun signe de ponctuation. On peut s’interroger sur le statut de la femme, la vie qu’on lui réserve, sur ce monde administratif complètement absurde, sur cet antisémitisme grandissant. J’ai vécu l’ennui, l’angoisse, le soulagement, l’inquiétude, peu de bonheur, de sérénité, de joie.
C’est une expérience unique que de lire Belle du Seigneur. Pour autant, je ne suis pas mécontente de refermer ce livre, de quitter ces personnages contraints de vivre sous le regard de la société qui pèse si lourd. Je les ai plaints d’être pieds et points liés, d’être prisonniers de ce qu’ils sont : femme et juif.
*****
Actuellement, je lis grâce à une lecture commune Les Misérables de Victor Hugo. J'en suis à la moitié et je suis tellement heureuse de découvrir cette œuvre dans son intégralité et j'ai découvert de passages sublimes.
Je suis également dans Changer l'eau des fleurs de Valérie Perrin, un petit page-turner agréable à lire, touchant et prenant.
J'espère que vous allez bien. Les vacances se passent au gré de longues promenades, de baignades, de moments en famille et de lecture. J'aspire à la sérénité que j'ai du mal à trouver en ce moment.
Au plaisir de vous lire :)