Les mouvements nègres en FrancePhilippe Dewitte

L'entrée en 1914 d'un député africain au parlement français, la venue en Europe pendant la Première Guerre Mondiale des "tirailleurs sénégalais", le triomphe en 1917 de la Révolution bolchévique, la diffusion en Europe des thèmes panafricains nés en Amérique sont autant de facteurs qui vont se conjuguer et permettre l'éclosion à partir de 1919 d'une revendication politique et culturelle nègre.
Les Français de l'entre-deux-guerres, engourdis par la bonne conscience impériale, vont ainsi assister à la naissance en Métropole d'un mouvement afro-antillais multiple, protéliforme, clamant son droit à la liberté et à l'égalité, son originalité et l'excellence de sa culture. L'engouement pour les Bals Nègres, les succès du jazz ou de l'Art nègre ne sont qu'une la partie visible de cet extraordinaire foisonnement.
La négritude qui s'exprime sur les bords de la Seine à la fin des années trente n'a pu voir le jour que grâce au travail de défrichement entrepris dès 1919 par ces pionniers oubliés de la "diaspora noire" de France. Pan-nègres ou assimilationnistes, communistes, ou panafricain, les militants noirs imaginent une union fraternelle avec la "France des droits de l'Homme", tentent de définir un humanisme noir à la charnière du socialisme européen et de la tradition africaine, s'engagent dans la voie d'un chauvisme à rebours ou opèrent la synthèse entre lutte des classe et conscience de race.