Montmartre secretLiesbeth Passot-Kanbier2002

Paradoxalement, Montmartre, l’un des lieux les plus touristiques de la capitale, se révèle être un quartier très secret dont les plus saisissantes beautés ne s’offrent pas d’emblée au visiteur pressé. Montmartre se mériterait-il ? Certainement. C’est du moins ce que montre sans ambages le beau livre de Liesbeth Passot-Kanbier qui est parvenue, grâce à la finesse de son regard, à s’éloigner des clichés les plus tenaces sur la butte et à s’emparer de ce à côté de quoi les yeux passent la plupart du temps.
Entre la mélancolique rue Caulaincourt, l’énigmatique « Rocher de la sorcière » caché dans un passage boisé, la sculpture du Passe-Muraille réalisée par Jean Marais place Marcel Aymé, la réserve d’oiseaux de la rue Saint-Vincent, la place du Tertre la nuit, les vigne montmartroises, une poignée de maisons pittoresques qu’on croirait tout droit issues d’un village de Bourgogne, ou encore l’extraordinaire enfilade de réverbères de la rue du Chevalier-de-la-Barre (oui, ce jeune homme torturé et brûlé vif à dix-neuf ans en 1766 pour ne pas avoir salué une procession et dont Voltaire défendit la mémoire), le Montmartre que l’on découvre ici n’a rien d’une carte postale retouchée sur Photoshop. S’en plaindra-t-on ? Certainement pas. Car au-delà des images d’Epinal, le secret de Montmartre est à ce prix. Tantôt enveloppé dans les brumes du Sacré-Coeur, tantôt alangui au soleil sur la terrasse d’un café de la rue Lepic, fluctuant et éternel.