#9 30 Avril 2016 19:33:21
Rebonjour !
Tome 1 des Îles glorieuses de Glenda Larke !
C'est rare de sortir d'un livre avec une telle non-impression. Le livre est bien écrit, sans plus. L'histoire est prenante, sans plus. Les personnages sont intéressants, sans plus.
Globalement, je n'ai pas grand chose à lui reprocher, mais pas grand chose non plus qui m'ont enthousiasmé. Il s'agit d'un roman d'enquête et d'aventure qui commence comme un roman noir et termine en une aventure où la magie regorge de toute part. On y suit le récit de Braise Sang-Mêlé, une mercenaire à la solde des Vigiles, une entité politique dominante dans un univers insulaire. L'histoire prend place à la Pointe-de-Gorth, une île sordide où se réfugient tous les parias de la société des Îles Glorieuses.
Premier problème du roman : le récit est à la première personne mais... Est un recueil fait par un ethnologue auprès d'une Braise Sang-Mêlé âgée de 80 ans. Donc, d'emblée, on sait que tout ce qui lui arrivera ne sera jamais mortel. Désamorçage instantané d'une bonne partie de la tension des péripéties, compensé par une surenchère de tortures et de situations en l'espace de quelques jours qui devraient rendre fou même le plus endurci des héros. On pourrait penser que ce n'est pas tant l'histoire que importe que le message qu'elle porte : dommage, c'est vraiment très plat là aussi. L'esclavage c'est mal, le bien et le mal c'est pas toujours si évident, la religion dogmatique c'est pas cool pour vivre dans la tolérance, vaut-il mieux être pauvre et libre que confortablement installé et à la solde d'autres personnes ? Des questions intéressantes mais qui restent vraiment à l'état d'embryon. Même le regard de l'ethnologue lors des ouvertures de chapitre (on lit son point de vue à travers des échanges épistolaires entre chaque partie du roman) n'apporte pas grand chose et demeure assez creux.
Autre gros souci : le monde. Encore une fois, je précise que par gros souci, je veux dire que ce n'est pas un mauvais roman, mais qu'il se situe à un tel point d'équilibre entre le très bon et le très mauvais qu'à la sortie du livre... J'en reste tout dubitatif. Bref, donc le monde, c'est un des points majeurs dans un roman de fantasy. Ici, il y a de bonnes idées, mais malheureusement elles sont toutes noyées dans une tonne de références au monde réel à moitié camouflées. On a une Église dédiée à un dieu unique qui va donner à Braise une série de critique de la religion moyen-âgeuse par un esprit du XXème siècle ; une bonne partie du roman qui repose sur la critique de la citoyenneté et des valeurs d'égalité et de justice quand tout ça est géré par une élite qui continue de s'arroger nombre de privilèges. À chaque fois, on sent l'auteur insérer des éléments typique de la fantasy, les mélanger à notre histoire occidentale, et les juger au regard du XXIème siècle. C'est très bancal, et ça ruine l'immersion.
Et puis pour terminer : les personnages ne sont pas mauvais, mais la plupart des personnages hormis Braise qui reste assez impulsive et torturée à souhait, hormis elle, tous sont dépourvu de secrets : le méchant est méchant, le gentil amant est gentil, l'employeur de Braise qui a l'air d'un salaud est un salaud. Ils sont presque tous dépeints dans les premières pages du livre, et globalement rien ne change au cours des 400 pages. C'est vraiment dommage car le début brillait par une aura de mystère, de paranoïa, c'était vraiment bien foutu.
Malgré tout, les scènes sont très bien écrites. On a plusieurs passages qui m'ont littéralement saisi d'horreur à la description de la magie carmine. J'ai beaucoup aimé l'importance donnée aux femmes, le fait que le beau rôle leur soit donné sans que cela semble un vulgaire prétexte : les deux principales femmes de ce roman sont vraiment exceptionnelles en force de volonté, en audace, en courage, en intelligence. C'est rafraichissant et c'est probablement une des raisons qui me poussera à lire la suite. Le personnage de Braise est en tension permanente entre ses désirs, sa perspicacité, et des valeurs qu'elle sait justes, mais refuse de défendre. C'est vraiment un chouette personnage dont j'aimerais lire davantage, mais je crois que la suite de la saga change de personnage principal, donc, à voir.
Bref, avec tout ça je ne sais pas par quoi continuer :
- j'ai craqué pour les premiers tomes d'une très jolie édition du Cycle des robots d'Asimov. Après Hyperion, je me sens une fringale de science fiction.
- forcément en lisant Glenda Larke, j'ai immédiatement pensé à Garett, détective privé de Glen Cook, une saga de one-shot sur un détective parodique dans un univers de fantasy déjanté. Une sorte de Terry Pratchett en moins loufoque (à peine) et plus sombre (à peine) ; je n'avais pas accroché quand je l'avais commencé, mais j'ai trouvé l'envie de m'y recoller !
- un petit polar, j'en ai plusieurs qui ont l'air très prometteur et ça comblerait bien la frustration de roman noir à la sortie des Îles Glorieuses.
Bref, donc je vais voir !