#349 16 Juin 2016 18:30:52
Pendant que j'y suis, je viens de me souvenir que j'ai fini deux autres livres dont je n'avais pas encore parlé, ou alors si peu :
- un polar régional, Le tueur à la coiffe alsacienne / D'r teter met dem elsassesch schlupf-hüewa de Jacques Zimmermann et Jean-Marie Stoerkel. Je l'avais acheté vite fait avant Noël pour mon chéri parce que c'est un roman bilingue avec une présentation originale : quand on l'ouvre dans un sens, c'est la version française, et quand on le retourne on ouvre la version alsacienne. L'idée me paraissait originale, mais je dois dire que le résultat est mitigé. Déjà, gros handicap pour la version alsacienne : c'est du haut-rhinois, et nous on est bas-rhinois. Vu de "l'Intérieur", comme on appelle le reste de la France, ça peut paraître trivial, mais il y a suffisamment de différences phonétiques pour qu'on ait du mal à lire de manière fluide. D'autant que c'est quand même une langue avant tout orale, et que l'écrit est assez rare, dans l'ensemble. Bref, j'ai lu quelques passages après les avoir lus en français, mais en général je n'y arrivais pas sans faire une gymnastique passant par la lecture à haute voix et l'adaptation de la phonétique pour reconstituer quelque chose que je pourrais comprendre.
L'histoire en elle-même est assez marrante, avec un policier qui arrive de Paris pour résoudre une série de meurtres commis par un tueur déguisé avec un masque et une coiffe alsacienne. En parallèle, on suit les tribulations d'une drôle de bonne femme qui a de sérieux problèmes de voix intérieures et qui n'en finit pas de se faire agresser et de se défendre avec des conséquences plus ou moins… définitives. Le lien entre les deux histoires n'est pas celui auquel on pourrait s'attendre, et c'est tant mieux.
Tout cela n'est en fait qu'un prétexte pour parler de l'Alsace, de son patrimoine du Nord au Sud, et de ses personnages célèbres, historiques et surtout contemporains des auteurs qui réussissent à caser à tout bout de champ des références à des artistes régionaux, à d'autres auteurs et à leurs ouvrages, bref même s'il y a des choses indéniablement intéressantes dedans, ça fait un chouïa "promo des copains" par moments avec un certain manque de subtilité. Je doute que tout cela soit très accessible pour des lecteurs étrangers à l'Alsace, honnêtement.
Ma partie préférée, la résolution de l'enquête par un commissaire aux méthodes originales mais efficaces, est finalement beaucoup trop courte !
- l'autre, dont j'avais mentionné l'achat en mars, est un essai sur l'archéologie, Qu'est-ce qu'un fait archéologique de Philippe Boissinot. Changement total de style ! C'est une réflexion sur la définition de l'archéologie, en étudiant l'histoire de la discipline, comment elle est née et s'articule avec d'autres champs d'études, et en s'interrogeant sur ce qui définit un "fait" archéologique. Je dois avouer qu'il y a tout une partie de considérations sociologiques qui me passent très haut au-dessus de la tête, mon manque de culture dans ce domaine est flagrant et je retombe toujours sur les mêmes références à des gens célèbres que je ne connais pas. J'ai bien apprécié les réflexions sur l'influence que peut avoir l'archéologue sur l'objet qu'il étudie : c'est en effet une discipline particulière qui porte le plus souvent sur des éléments invisibles, on est donc toujours tenté de "remplir les vides" pour reconstituer ce qui a pu se passer à un endroit donné, à une époque donnée, en fonction des traces qui restent (ou qui ne restent pas). Quand on n'a pas d'écrits - et même quand on en a - pour décrire exactement la situation, c'est pratiquement impossible d'avoir des certitudes sur quoi que ce soit. Du coup, comme dans n'importe quelle autre science, il ne faut pas oublier que tout ce qu'on peut faire, c'est émettre des hypothèses en fonction de ce qu'on connaît, et qu'on n'est pas à l'abri de devoir réviser ses conclusions.
C'était une lecture dense, parfois aride et parfois totalement passionnante. J'ai parfois regretté le manque d'exemples concrets, même s'il y en avait quelques-uns ils n'étaient pas toujours décrits avec suffisamment de détails pour moi, profane qui ne suis pas au courant de toutes les recherches, études et publications. Ce n'est clairement pas un ouvrage de vulgarisation (sans aucune connotation négative), il faut avoir un certain bagage pour profiter de l'ensemble du livre, mais j'ai bien aimé être obligée de me titiller les neurones à cette occasion. Ça donne envie de se plonger un peu plus dans tout ce que j'ignore !