Je me suis rendue compte que l'on pouvait vous soumettre ici nos écrits personnels.
Donc, je me lance et, pour la toute première fois de ma vie, je vous présente un de mes textes, d'ailleurs écrit en plusieurs phases. N'hésitez pas à me donner vos avis, vos impressions, votre ressenti... Sur le style, les lourdeurs ou quoi que ce soit...
Je tiens simplement à préciser que la majuscule au pronom personnel "Elle" est totalement volontaire.
Merci de votre indulgence :-)
Le service en terrasse n'était pas assuré.
Après tout, on ne pouvait guère s'attendre à plus : ce n'était qu'un simple petit snack! Juste un point de ralliement pour la retrouver dans cette ville qu'il ne connaissait pas. Et quoi de mieux, quoi de plus logique, que le snack de la gare? On est toujours à même de trouver la gare dans n'importe quelle ville de France. C'est d'ailleurs un des rares lieux publics qui bénéficie d'un fléchage officiel avec des panneaux indicateurs, dans toute bonne ville qui se respecte...Même au fin fond de son petit village de Provence il y en avait un, de ces panneaux routier pour indiquer la direction de la gare...Pourtant bien petite, où si peu de trains s'arrêtaient encore.
Elle avait bien une demi-heure à tuer avant que l'heure fatidique arrive.
Passée au comptoir pour se commander une noisette et un croissant, histoire de se donner tout de même une contenance, Elle était vaillamment attablée, le plus à l'écart possible, sur ce semblant de terrasse.
Ce n'était que le prolongement du parvis de la gare, où des tables et des chaises en plastiques avaient été installées... Avec leurs parasols publicitaires jaunes et rouges, c'était du plus beau kitsch.
Elle n'attendait pas un train, encore moins un passager.
Mais ce n'est pas pour autant qu'Elle n'était pas anxieuse, presque fébrile dans son attente. Après avoir nonchalamment tourné sa petite cuillère en plastique dans sa tasse en carton, d'où se dégageaient de légères volutes de chaleur, Elle sorti son téléphone et son étui à cigarettes. Avoir les mains occupées, voilà ce qu'il lui fallait!... Pour éviter de penser, de trop réfléchir... De trop gamberger plutôt oui!..."Mais qu'est-ce que je fais là?" pensait-Elle.
Elle avait tout planifié dans les moindres détails.
Deux jours avant, Elle s'était fait chouchouter chez sa coiffeuse habituelle. Avide de cancans, celle-ci n'avait pas tardé à lui faire avouer le pourquoi de ce rendez-vous précipité, alors qu'elles s'étaient vues à peine deux semaines auparavant : Elle avait une rencontre en vue!...
Bien évidemment, prête à se confier, Elle n'avait eu de cesse que de lui expliquer avec qui et pourquoi... Ses coups de fils qui n'en finissaient plus, qu'Elle attendait avidement tous les soirs ou presque... Ces longues conversations sur tout, sur rien, sur leurs vies déjà bien entamées, sur leurs espoirs et leurs souhaits... Elle n'a pas mis longtemps à se confier à ce semblant de compagnie féminine, que représentait sa coiffeuse, dans sa vie bien morne et si bien réglée.
Sa fille qui grandissait, son travail qui n'était somme toute qu'un boulot alimentaire, sa trop vide vie de célibataire...
Il était venu illuminer tout cela...
Jusqu'à sa tenue qu'Elle avait voulu différente de ce qu'elle portait habituellement.
L'avant veille, sortant revigorée de sa séance chez la coiffeuse, Elle s'était octroyé une petite après-midi de shopping... Une nouvelle jupe sexy, en voile aérien aux imprimés à la mode... Une paire de sandales à talons qui lui faisait le pied fin et élégant... Une jolie paire de boucles d'oreilles, de pacotille certes, mais délicieusement assortie à sa tenue... Tout!...Elle avait tout prévu, tout anticipé, tout préparé... Jusque dans les moindres détails, Elle s'était inventé la scène dans sa tête bien des fois pour se rassurer...
Cela faisait bien longtemps qu'Elle ne s'était si volontiers confiée à un homme...
Apeurée, échaudée, les hommes n'étaient plus un objectif prioritaire dans sa vie depuis que le père de sa fille les avait quitté un fameux Mardi d'Août : le jour de ses 25 ans!... Depuis lors, ses jours et ses nuits, Elle ne les avait consacrées qu'à sa fille. A faire de cet enfant magnifique, une enfant enjouée, curieuse et bien dans sa peau... Sa jolie petite fille qui avait cessé, il y a bien longtemps, de poser des questions sur ce père qu'elle ne connaissait pas : elle était encore tout bébé quand il était parti... Sa jolie petite fille était aujourd'hui une adolescente épanouie et confiante... A l'aise dans ses baskets, avec une pléiade d'amies et une cour de garçons bien trop envahissante parfois... Son enfant s'acheminait doucement et sûrement vers une indépendance qui rendait sa présence maternelle, chaque jours, moins nécessaire...
Ayant bien occupé son rôle de maman toutes ces années, Elle avait fini par se convaincre qu'Elle avait désormais le droit de redevenir une femme... Le droit de retrouver sa féminité et de la laisser s'exprimer auprès de la gent masculine. Oh bien sûr, les hommes lui faisant des avances ne manquaient pas sur son lieu de travail... Elle avait même eu un petit faible pour ce gentil chef de rayon qui était si prévenant avec Elle, fût un temps... Mais, les cancans avaient vite pris le pas sur une amitié un peu trop voyante et il avait cessé de s'intéresser à elle... La peur du qu'en-dira-t-on avait apparemment été la plus forte...
Alors, ivre de solitude, Elle avait osé composer ce numéro bizarre...
Osé parler, engager la conversation avec ces hommes inconnus... Beaucoup lui avaient fait des avances à peine déguisées, carrément obscènes parfois même... Et puis, il y avait eu sa voix... Une voix douce et chaleureuse... Grave, inspirant la confiance... Réticente dans les débuts, Elle avait finit par l'appeler directement... Et, de soir en soir, au fil des conversations qu'ils avaient eu, un lien s'était créé... De quelle sorte?... Elle n'en savait rien... Mieux : Elle ne voulait même pas le définir de peur qu'il ne se brise aussitôt né.
Après des semaines de discussions à bâtons rompus, il lui avait délicatement soumis l'idée de se rencontrer enfin.
De ne pas lui avoir imposé cela l'avait bien vite séduite. Et, après quelques jours de réflexions, Elle avait accepté.
Non sans peurs, non sans réticences d'ailleurs... Elle n'était plus aussi sûre d'elle et de son apparence que quand Elle avait 20 ans. Aujourd'hui, les coups de la Vie avaient laissé leurs traces sur son visage, sur son corps...
Allait-Elle lui plaire autant en vrai, qu'avec ses mots?...
L'attente devenait presque douloureuse.
Assisse là, à cette terrasse qui n'en était presque pas une, devant cette tasse en carton au contenu bien fade, Elle commençait à sérieusement douter... Serait-il là?... Tiendrait-il parole?... Serait-Elle à la hauteur de ses attentes?... Et lui?... Serait-il aussi rassurant de visu qu'au téléphone?... Toutes ces questions tournaient dans sa tête... Eh oui!... Même si Elle s'était interdit de le faire, Elle s'était mise à gamberger à toute vitesse...
Les minutes étaient longues, sans fin... On aurait dit que le temps s'était volontairement mis à ralentir... Juste pour la faire stresser un peu plus... Derrière ses lunettes de soleil, Elle observait tous ceux qui passaient à proximité... Est-ce que c'est lui, là?... Avec ce pantalon à pince et ces chaussures de ville?... Ou alors celui-là, en jeans et mocassins?... Oh mon Dieu!... Que cette attente était cruelle... Grillant ses cigarettes presque les unes derrière les autres, Elle sentait les battements de son cœur s'accélérer au fur et à mesure que l'heure du rendez-vous se précisait...
Et puis Elle entendit la sonnerie si reconnaissable, de l'arrivée d'un message sur son téléphone.
Alors, dans un souffle de délivrance et d'espoir, Elle lut :
"Arrêtes de stresser : tu es magnifique!... J'arrive vers toi!...".
[ Petit texte sorti tout droit de mon imagination... ou de mon vécu... Va donc savoir!... ;) ]