Je me réveille doucement, l’hiver a été long, très long cette année ; et ce matin, le soleil me chatouille doucement le corps. Comme c’est agréable, ce soleil m’avait manqué.
Tout l’hiver, j’ai dormi. Il a fait un froid glacial. C’est la première fois que j’apercevais les copains tout givrés, ils étaient beaux comme ça : grands, nus mais givrés. Le temps paraissait s’être arrêté et quand j’essayais de me réveiller, je sentais en moi que ce n’était pas le moment, j’ai juste eu le temps d’apercevoir la neige, une énorme couche de neige, c’est beau, c’est blanc, mais c’est lourd et froid. Mais là, tout ça, c’est fini. Il faudra attendre quelques mois pour revoir tout ça. Mais en aucun cas je ne suis pressé que l’hiver revienne.
Le printemps est enfin de retour. Le soleil pointe son nez, il me chatouille, me caresse mais comme c’est agréable comme réveil. Un doux réveil. Je sens déjà que je vais recommencer à grandir, je sens en moi que ça bouge. Humm, j’adore sentir que ça circule dans tout mon corps. Enfin, je ressens que ça coule entre mes cellules, c’est agréable, très agréable. J’aime le printemps.
Oh tient ! Voilà des oiseaux. J’aime les entendre chanter, c’est agréable. Un couple d’oiseaux qui chante son amour… Ils vont surement faire leur nid près de moi. Ils sont si petits par rapport à ma grande taille, et je sais que je n’ai pas fini de grandir, ni de grossir…
Chaque année, je prends des centimètres et des kilos en plus, pour le plus grand plaisir des visiteurs qui viennent nous voir les copains et moi. Bon certes, on ne bouge pas beaucoup mais on fait ce qu’on peut pour être beau et majestueux. Surtout moi, je suis un des plus jeunes, on m’a amené ici, il y a quelques années mais par rapport aux autres, je fais figure de gamin malgré mon âge respectueux. Mais bon, je ne peux pas mentir sur mon âge, ça se voit que je suis le plus jeune.
Ah les oiseaux, les revoilà. Ils font leur nid. Mais comme l’an dernier, ils ne seront pas près de moi, je ne suis pas encore à leur goût. Ils préfèrent aller voir les copains, dans quelques années, ils me choisiront.
Le printemps avance, les jours passent et ne se ressemblent pas. Aujourd’hui, il pleut à verse, je n’aime pas être trempé. Ça coule, ça dégouline, et la terre sur laquelle je suis, devient de la vraie boue, je vois les minuscules insectes se cacher sous ce qui peut leur servir d’abris, mais on est trop mal situé pour eux : le terrain est en pente. Alors souvent, il y en a qui se retrouvent en bas… Les copains et moi, on n’aime pas que les minuscules insectes se retrouvent en bas de la pente, on a besoin d’eux… Et je ne parle pas des choses qui grouillent mais qu’on ne voit pas, ces choses, nous sont nécessaires, sans elles, je suis un peu perdu, moi, plus que les copains qui ont leurs habitués bien installés à leurs cotés… Moi, j’ai du mal à avoir un environnement proche intéressant pour ces toutes petites choses. Mais pour me consoler, j’ai une flopée de champignons à mes cotés. Ils sont encore plus petits que les oiseaux, et ils ne chantent pas, mais en automne, quand les couleurs deviennent orange, ils donnent parfois des choses à mes pieds mais les visiteurs me les prennent. Heureusement, ils repoussent tous les ans, ils sont trop fort ces champignons. En plus, ils sont sympathiques, ils apportent plein de bonnes choses et ils me tiennent compagnie. Ils sont géniaux ces champignons, ils m’aident à trouver à manger et donc m’aident à devenir plus grand et plus fort. Grâce à eux je vais dépasser les copains, enfin du moins je l’espère.
Ah le printemps est fini, il fait une de ses chaleurs aujourd’hui. Le soleil ne brille pas il tape. Ce matin, j’ai mal. Je ne sais pas ce qui se passe. J’ai très mal. Mais c’est quoi cette chose qui me cogne et qui n’arrête pas de faire « toc toc toc toc » ? Mais pourquoi je coule ? Mais il faut qu’il s’en aille ce truc. J’ai mal… Les copains me font comprendre que c’est un pic … Le genre d’oiseaux qui ne chante pas mais qui fait mal. Ah ! Il s’est arrêté enfin ça faisait assez mal comme ça. J’aime pas les pics, je ne veux plus en entendre parler, ni en sentir. Ça n’a pas duré, mais c’était suffisamment horrible pour ne pas vouloir renouveler la chose.
Ah ! Encore un nouveau jour. Il fait beau, il fait chaud, et une petite brise me chatouille. Je me sens fort. Les copains soufrent de la chaleur, mais pour une fois, c’est moi le « petit jeune » qui ai de la chance parce que je suis bien exposé et je compte bien en profité pour grandir un grand coup avant l’hiver et le long sommeil.
Par contre, je ne comprends pas, les visiteurs sont passés il y quelques jours, et ils ont fait des traces sur certains des copains… Puis ils sont revenus le lendemain et ont pris les copains marqués depuis. C’est pour ça que j’ai une bonne exposition. Je suis en plein dans une trouée où le soleil me chatouille plus facilement et où la brise peut m’atteindre. Je ne sais pas ce qui s’est passé mais je ne veux pas partir comme les copains. La façon dont les visiteurs les ont pris devait faire encore plus mal que le Pic qui m’a attaqué la dernière fois. J’ai peur mais je suis si jeune par rapport aux copains qui sont partis.
Mais grâce à ça, je sens que je vais pouvoir mieux grandir au printemps prochain. Enfin mes racines vont pouvoir découvrir des zones de sol plus lointaines non occupées par les racines des copains. Mes branches vont enfin pouvoir s’étendre et mes feuilles seront heureuses de pouvoir danser sous la brise de l’été. J’aime enfin avoir de la place au détriment des copains… Mais moi aussi j’ai besoin d’espace…
