( Hier après midi j'ai fait une sieste, et durant cette sieste j'ai rêvé de la fin de monde. Il fallait que ça sorte^^. N'hésitez pas à me dire ce que vous en pensez! Bonne journée à tous!)
Sur une musique d'Amarante:
One Last TimeUn bruissement dans les branches. Une feuille mordorée se détache et s’envole, tourbillonnant dans les airs et jouant avec la brume qui nappe les bois. Les éclats du soleil transpercent doucement les frondaisons, nimbant de leurs lueurs pâles la végétation endormie. Les oiseaux s’observent et se mettent à chanter cette nouvelle journée, se poursuivent et se font la chasse tandis que la nature lentement s’éveille. Une biche se promène nonchalamment, accompagnée de son jeune faon, à la recherche d’un petit coin où prendre le petit déjeuner, croisant au passage quelques écureuils se dépêchant de finir les récoltes de graines pour cet hiver. Douce quiétude que ce matin d’automne, chargé en humidité de la veille, qui voit les habitants de ses bois sortir et animer de vie la forêt.
Un rugissement de moteur apparaît au loin. La biche relève la tête, les oiseaux se taisent. La voiture file à toute vitesse, projetant tout autour d’elle cailloux et gravillons qui rebondissent sur l’asphalte. Suivie de près par une seconde. Et une troisième.
Les hommes se sont levés aujourd’hui encore. Mais quelque chose a changé. La nature le sait, le sent. De la racine à la cime des arbres. La biche et son petit se sont enfuient depuis longtemps. La pénombre envahie les alentours, recouvrant les oiseaux d’un voile sombre qui atténue peu à peu leur envie de chanter.
Elles se succèdent sur la route. Affolées. La limitation de vitesse n’existe plus. Il faut se hâter. Le temps c’est de l’argent. Non. Le temps. Tic tac. Le temps est compté…
Ils l’ont annoncé dans la nuit. Chasse et pêche et autres programmes d’insomniaques se sont arrêtés pour laisser la place à des alertes sur toutes les chaînes télévisuelles et radiophoniques du monde. A quatre heures du matin, la moitié de la population mondiale est au courant. Les appels ont fusés de partout avant que les compagnies de téléphonie abandonnent. Même à 00h01 le premier de l’an, les lignes ne sont pas tant saturées. Facebook, Instagram, snapchat… Le monde se connecte dans un sursaut de panique. Tic tac…. Internet rame, les cheveux s’arrachent, le café déborde et s’échoue sur le sol. On a oublié d’éteindre les machines.
Partout les fenêtres s’ouvrent, les portes sont à moitié arrachées tandis que les gens sortent dans la rue pour observer le ciel. Le mascara est laissé à l’abandon sur le rebord du lavabo. Les cravates oubliées avec la chemise. Personne n’a vraiment pris le temps de s’habiller. Tic tac. On s’alpague, on se questionne. On en oublie les rancœurs de la veille, les guerres entre voisins, la haine de quartier, Rachid discute avec Jean-Bertrand. Est-ce vrai ? Les larmes coulent, des cris de désespoir naissant dans les gorges. On prend sa voiture pour aller rejoindre ses parents, ses oncles, ses amis. Sa famille. Plus de temps à perdre. Tic tac.
Les fréquences défilent sur l’autoradio, et toujours le même message tourne en boucle. Dans 74h le monde n’existera plus. Une météorite a prévu de faire exploser la Terre pour polluer un peu plus l’espace. Il s’en remettra. Il a tout le temps pour vivre Lui. Tic tac. Quelques petites stations locales et quelques théories du complot. L’armée américaine a sûrement une solution ? Elle va bien trouver avec la Chine et la Russie un moyen de détourner cette météorite ? Où est Bruce Willis ? On rit jaune, on s’étrangle et les larmes coulent de plus belles.
« Ca va aller. Ca ne peut que forcément aller, ils vont bien trouver une solution !!!????? ». Partout dans le monde on prie. On espère. On l’Implore qui qu’Il soit. Pourquoi ? Mais pourquoi donc ? Qu’avons-nous pu faire pour mériter ça ? On se tombe dans les bras, on s’enlace, on s’embrasse, on se repousse avant de s’effondrer par terre. Les églises, les mosquées, les synagogues, les temples sont envahis. Ne me laisse pas mourir. Pas aujourd’hui. Je suis mère, je suis frère, je viens de gagner au loto, je suis amoureux, j’allais devenir riche, je viens enfin d’acheter. J’ai des projets. J’ai une vie. Je suis.
Les démunis, les laissez-pour compte, les sans-abris, les malades en fin de vie, les vieillards sur leur lit sont oubliés. Les personnes qui sont seules, qui n’ont pas de famille, qui n’ont pas la possibilité de rejoindre les leurs à l’autre bout du monde, errent seules dans les rues. Elles se croisent, se regardent avec le même regard vide et morne. Seul. Je suis Seul. Nous le sommes tous. Puis l’un commence à aborder l’autre. Nous sommes seuls mais nous ne sommes pas obliger de mourir seuls. On se prend par la main, on trouve un moyen d’entrer dans le café du coin même si Gégé n’est pas là. Un verre. Voilà ce qu’il nous faut.
Les vitrines des magasins explosent. On pense aux abris souterrains. Au bunker. Aux caves aménagées. On espère, on y croit. On pille, on vole, on arrache, on défonce la mâchoire de celui qui a voulu nous arracher le charriot. On attrape les boîtes de conserve, on les balances sur les pères de famille, les mamans, les enfants. Encore un arabe ! Les français, toujours à vouloir tout avoir ! Les juifs, ces radins ! Tic tac. On se bouscule. On tombe à terre et l’on se fait piétiner, un pack de lait en poudre pour bébé coincé contre son corps que l’on ne veut lâcher pour rien au monde. Les télévisions s’explosent par terre alors que certains veulent : voir la fin du monde sur un écran high-tech en HD avec système home cinéma ; assurer au cas où les blancs auraient encore trouver un moyen de nous enculer, voir les derniers épisodes de Game Of Throne que l’on n’aurait pas vu car on animait un camp de vacances. C’est con. On ne saura jamais qui aurait gagné Koh Lanta…
Tic Tac. On berce son enfant, on le console et lui raconte qu’une vie meilleure l’attend après, et que papa et maman seront là. On se fait l’amour, on se caresse, on s’embrasse, on se mêle, s’emmêle et l’on tente d’oublier que le temps n’existe plus. On s’aime, encore, une dernière fois, juste un peu plus.
On se pardonne, on oublie. On a plus le temps de se haïr. Ni même de grandir. 48h pour vivre.
Plus que 48h… On jette un dernier regard attristé sur les livres qu’on a mis une vie à collectionner et que l’on n’aura pas le temps de lire. On caresse une dernière fois le chat avant de le relâcher dans la nature. On oublie les bibelots, les trésors, les ordinateurs. On prend quand même le temps de fermer la porte de l’entrée, les yeux pleins de larmes. Adieu chez moi.
On monte sur les toits, on établit des campements, on investit les hôtels de luxe, la campagne, les plages, la montagne. On ne sait plus trop. Que faire, quoi faire de ces dernières heures ?
On sort le saucisson, le vin, le pain. On casse la croûte, en famille dans les jardins. On se remémore les bons moments. Les mauvais sont oubliés. On sourit, on rit sous la pluie. On se dit qu’on s’aime, et l’on tente de graver en mémoire ce moment pour toujours. Tic tac. Au cas où…
La survie. La réincarnation. Le paradis. L’enfer….
Juste au cas où…
On s’aime une dernière fois….
Et toi… ?
Tu fais quoi ?
