> MyFloXyBabY
C'est vrai que c'est un argument passe-partout que l'on entend régulièrement
Oui, cela en est même devenu un poncif : pour vraiment apprécier et embrasser une oeuvre littéraire, il serait forcément nécessaire de la lire plusieurs fois. Dans le cas de la Recherche, j'ai déjà lu ou entendu cela à 5 ou 6 reprises, la citation de Sagan en étant l'expression la plus condensée et définitive. Or, je ne doute pas qu'une relecture d'oeuvres un peu obscures, contournées, à plusieurs strates de signification puisse être bénéfique, mais enfin la Recherche est suffisamment fluide et claire (bien qu'abondante en infimes nuances et en "replis") pour qu'une seule lecture soit suffisante pour bien la comprendre et l'apprécier. J'aimerais lire des arguments en sens inverse, car quelque chose manifestement m'échappe.
et qu'une œuvre dense et nuancée comme celle de Proust en particulier résonne différemment selon la période de sa vie dans laquelle on la lit
Oui, très juste. C'est le vieil adage de la philosophie scolastique : quidquid recipitur, ad modum recipientis recipitur - tout ce qui est reçu est reçu en fonction de la nature de celui qui reçoit. On est pas le même à 50 ans qu'à 20 ans, et une seconde lecture de bons livres à un âge plus avancé fait sans aucun doute apprécier l'oeuvre de manière plus profonde peut-être, ou en tous cas différente. De mon côté, j'ai encore un peu de mal à relire des ouvrages que j'ai lu plus jeune pour plusieurs raisons (la plus importante étant la conscience aiguë de tout ce que je n'ai pas encore lu) ; cela sans viendra sans doute plus tard.
> Ada
C'est assez étrange de dire ça, oui... et un peu condescendant aussi
Condescendant, je ne sais pas et même si cela l'était cela ne me dérangerait pas véritablement. Mais ce me semble assez péremptoire, surtout venant d'une personne (Sagan) qui - même si je n'apprécie guère son oeuvre - avait un goût littéraire assez sûr et fin. Il doit y avoir des raisons évidentes à cette assertion, mais qui m'échappent vraisemblablement.
c'est surtout très personnel
Oui, tu as raison ; c'est d'ailleurs l'un des grands charmes de l'expérience littéraire - ce rapport intime et personnel à une oeuvre et un auteur.
> Cachal_eau
Merci pour ta visite !
De ton efficace résumé, je n'ai lu que la pièce d'Ibsen qui fait partie des mes auteurs de référence avec notamment sa pièce Le canard sauvage
Résumé très subjectif et faiblement argumenté hélas - je comprendrais d'ailleurs facilement qu'on puisse avoir un avis fort différent du mien. J'ai justement ajouté Le Canard sauvage (ainsi que Les Revenants et Peer Gynt) à ma liste de souhaits Amazon ; je les commanderai et les lirai, je pense, dans l'année. Je suis certain qu'Ibsen vaut infiniment mieux que ce que m'a première approche m'a laissé entrapercevoir.
Concernant tes 4 livres préférés de 2017, j'ai Pessoa et Burton dans ma WL.
Tu l'auras compris, je ne peux que te les recommander chaudement. Deux petites remarques pratiques à leur sujet :
- L'éditeur Christian Bourgois sort une nouvelle traduction de l'oeuvre de Pessoa dans trois jours, sous le titre modifié de Livre(s) de l'inquiétude - je ne sais si des changements majeurs à la composition du texte et à la langue seront apportés. Mais la traduction et l'agencement de la première traduction me parait déjà très convaincante ;
- En ce qui concerne l'Anatomie de la Mélancolie, il y a deux volumes (ce ne sont pas des tomes : c'est un seul livre séparé par commodité en deux). Par erreur de mon "fournisseur" (il s'agissait ici de la FNAC) je n'ai reçu que le deuxième, mais je conseillerais de ne pas suivre mon exemple et de commencer par le premier au vu des thèmes abordés.
il est vrai que pour certaines lectures, il n'est pas possible de faire sans un minimum de calme autour de soi.
C'est juste, le niveau de calme nécessaire varie en fonction de la qualité/difficulté du livre ; aussi, j'emporte rarement un ouvrage de philosophie ou de science quand je prends le train, par exemple, me les réservant pour la lecture à mon domicile.
> Souffledevent
Après, faisant des études de lettres,
Modernes, anciennes, à quel niveau, ou ? Je veux tout savoir ! (Désolé pour la curiosité, et ne répond pas si tu trouves cela par trop indiscret)
Je connais des gens qui lisent non seulement avec de la musique, mais pas n'importe laquelle : du métal ! Je ne sais pas comment ils font...
Je dois confesser que j'aime énormément le metal et qu'il m'est arrivé, plus jeune, de faire d'immenses sessions de lecture avec du Black Metal à fond dans les oreilles - ce que j'évite de faire dorénavant. Mais il fallait que ce soit des albums parfaitement connus de moi pour pouvoir m'extraire de la musique ; souvent, c'était par que j'étais à l'extérieur et que le bruit de la rue/de l'université/du bureau m'aurait bien plus dérangé que celui de ma musique, me permettant de créer une sorte de "bulle". Je peux comprendre tes amis, du coup.
Proust est tellement un mythe qu'il sert souvent j'ai l'impression de discriminateur de classe, certains lettrés prenant un malin plaisir à dire qu'ils relisent la Recherche (le chic ultime). Mais il ne faut pas écouter ces gens-là, dont la distinction n'a d'égale que leur orgueil...
En parlant de distinction sociale, je ne compte plus les remarques glanées ici et là du type : "relire Bourdieu". Clin d'oeil à part, c'est une question intéressante et il est vrai que ce qui est considéré comme de la "grande" littérature - Proust en étant un exemple parfaitement typique - sert souvent à marquer une appartenance de classe ou du moins (revenons à Bourdieu) un habitus culturel plus élevé que la moyenne des gens. C'est hélas une marque de fatuité très commune, quasiment universelle ; et je dois avouer que (bien que fils d'ouvrier - ou plutôt parce que fils d'ouvrier) j'étais extrêmement fier à l'adolescence d'avoir des lectures de "lettrés", très au-dessus de ma condition sociale de base - j'espère être aujourd'hui guéri de ce type d'approche.
La littérature, en tant que marqueur social particulièrement fort objectivement tel qu'il s'est construit depuis la deuxième moitié du XIXème Siècle est propice à ce genre de comportement, mais c'est le cas plus généralement de toutes les activités humaines : je suis persuadé que la vanité et son exploitation à des fins de distinction est l'explication centrale de bien des engagements, bien des goûts, bien des intérêts, bien des activités. Une fin qui d'ailleurs ne se connait pas elle même. Humain, trop humain comme dirait l'autre.