Merci Gaspard-de-la-Nuit et ravi de vous voir ici ! N'hésitez pas à venir discuter si vous le souhaitez. Je serais par exemple très curieux de savoir ce que vous avez pensé, comme vous n'en avez pas encore fait mention dans votre blog, du Millet que vous avez lu dernièrement - je cherche une bonne porte d'entrée dans l'oeuvre de cet auteur, que je connais hélas plus pour ses prises de position politiques que pour son (pourtant réputé) travail littéraire.
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Trois derniers ouvrages lus<image>-
Lettres I,
Arthur Schopenhauer (entre 1803 et 1850 pour la rédaction des lettres). Je désirais depuis longtemps acheter la correspondance complète aux éditions Alive, et suis tombé par hasard sur cette nouvelle édition moins onéreuse et tout juste sortie (novembre dernier) dans la collection Folio Essais. Petite déception, pour tout dire, qui s'explique par les mots de Schopenhauer lui-même :
"ces lettres ne contiennent pas de nouvelles pensées, que je ne gaspille pas dans des correspondances privées". Pas ou peu de philosophie, donc, mais beaucoup de chicaneries sur ses multiples héritages, de commandes de livres, de demandes d'emploi, d'un procès intenté par une femme qu'il a violenté - seuls les échanges avec Goethe sur sa théorie des couleurs et l'arrivée tardive de lecteurs passionnés réhaussent quelque peu l'intérêt de cette correspondance. Celle-ci a toutefois le mérite de dresser en creux un portrait psychologique fouillé du grand pessimiste de Francfort, portrait qui ne contredit en rien sa légende : un misanthrope très conscient de sa propre valeur et vitupérant contre le monde en attendant que ses travaux soient reconnus (je suis sévère : il est tout de même attachant et l'on voit vite que ce n'est pas un si mauvais bougre). J'achèterai le deuxième volume de cette correspondance, qui se lit malgré tout très agréablement, avec toutefois moins d'excitation qu'avant de commencer ce premier volume. 12/20.
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L'Art d'aimer,
Ovide (an 1 ou 2 après J.-C. ?). Brève compilation de conseils pratiques destinés aux hommes pour séduire les femmes (livre I), pour faire perdurer l'amour (livre II) et aux femmes pour captiver - au propre comme au figuré - les hommes (livre III), le tout agrémenté de force exemples issus de la mythologie (n'oublions pas qu'Ovide est l'auteur des immenses
Métamorphoses). Le texte est charmant, souvent drôle (à quel degré a-t-il été écrit ?), presque intemporel dans son thème et ses conseils tout en étant bien de son temps : on y devine aisément la relative nouvelle liberté de moeurs et les raffinements de la civilisation de la Rome d'Auguste. Mais il s'agit d'un texte qui m'a semblé relativement anecdotique, sans grand intérêt ; idem pour les deux petites oeuvres qui étaient pertinemment ajoutées à mon édition (
Les remèdes à l'amour &
Les produits de beauté pour le visage de la femme). Dispensable, mais le plaisir de lecture est tout de même bien présent. 13/20.
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La Nuit obscure,
Saint Jean de la Croix (1618). Ma lecture préférée, parmi les trois dernières. Il s'agit d'un traité à la frontière du théologique et du mystique, organisé autour de l'explication d'un poème mystique de l'auteur. Trois strophes (sur huit) y sont décortiquées (le reste est hélas perdu) : il s'agit d'expliquer, étape après étape, épreuve après épreuve, purification après purification, comment l'âme peut monter les barreaux de l'échelle la séparant de Dieu, dans une sorte de nuit spirituelle - d'où la métaphore de la nuit obscure - jusqu'à l'union parfaite. Il n'est pas besoin d'être chrétien ou même croyant (je ne suis ni l'un ni l'autre) pour apprécier la grande profondeur et la beauté poétique du texte (mais une connaissance basique des Evangiles et de l'Ancien Testament est toutefois conseillée). Je complèterai cette lecture par celle d'un autre traité de l'auteur souvent rattaché à celui-ci,
La Montée du Carmel, d'ici quelques temps. 16/20.