Chimère - Peur primale et autres récits

 
    • cnslancelot

      Espoir de la lecture

      Hors ligne

      #1 23 Août 2019 10:10:13

      J'étais parti dans les rocheuses, dans les grandes forêts qui bordaient la chaîne de montagnes. j'avais fait tout ce voyage depuis la France car j'avais entendu parler d'une créature si horrible qu'elle vous faisait faire des cauchemars pendant des jours et des jours. certains avaient affirmé avoir aperçu la bête alors qu'ils se promenaient dans les bois, d'autres avaient découvert des traces de pas qu'aucun animal connu à ce jour n'aurait pu laisser.
      J'avais pris l'avion direction New York et de là un train pour me rendre jusque dans l'Idaho. J'avais sur moi tout le matériel nécessaire pour filmer la créature. J'avais entrepris mon ascension vers six heures de l'après midi et avais atteint une hauteur considérable. J'aperçus un peu plus haut comme une caverne surplombant la corniche; je décidai d'y installer mon campement.
      Une fois la tente ainsi que tout le matériel montés, je me hâtai d'installer les caméras dans cette forêt qui de là où j'étais paraissait aussi grande qu'une ville, si ce n'est plus. j'avais à peine atteint les sous-bois qu'il commençait déjà à faire noir. Sot comme j'étais, j'avais oublié ma lampe de poche et devais avancer tout en douceur pour éviter de tomber. J'avançais tant bien que mal à travers les taillis et devais faire bien attention à ne pas me prendre les pieds dans une des nombreuses racines qui jonchaient le sol.
      Arrivé à un coin convenablement dégagé, j'installai les caméras, les réglai sur vision nocturne et détecteur thermique. une fois les caméras en place, je m'empressai de remonter vers le campement en plaçant une dernière sur le chemin au cas ou la bête passerait par là. De retour à mon site d'observation, je me faufilai sous ma tente, sous ma couette t allumai l'ordinateur que j'avais pris soin de brancher sur une batterie de secours. Et j'attendis là que la créature passe.
      Les heures défilèrent les unes après les autres et aucune apparition du monstre. Le soleil s'était depuis longtemps caché derrière les montagnes mais l'on pouvait encore sentir sa chaleur à travers le fin tissu de la tente, une chaleur étouffante qui me plongea petit à petit dans une certaine somnolence. Je finis, après quelques minutes, par piquer du nez et m'endormis devant l'écran encore allumé.
      Trois heures plus tard, je me réveillai d'un horrible cauchemar incluant la plus terrible des terreurs, une terreur sans nom et à l'appétit féroce. La crainte m'avait envahi et me bouffait maintenant de l'intérieur. Je sentis comme une boule se former au creux de mon estomac. Soudain l'angoisse se fit plus forte, sans savoir pourquoi je me sentais anxieux. Puis au bout d'un moment je réalisai pourquoi cette panique avait pris place en moi. Je regardai les caméras de surveillance surtout celle que j'avais placé sur le chemin menant jusqu'ici. Aucune trace d'aucun animal que ce soit. Je poussai un soupir de soulagement puis repris mon observation.

      Je restai ainsi jusqu'au petit matin, la bête ne vint pas. Je pris alors la décision de changer l'angle des caméras et descendis les réorienter plus en direction du coeur de la forêt. je m'attelai à ma tâche et repositionnai les caméras dans le sens souhaité.
      Une fois le travail achevé, je retournai à mon poste continuer mes observations. je fixais l'écran, l'oeil alerte à tout mouvement mais rien ne semblait vouloir venir. Soudain quelque chose attira mon attention, quelque chose tapie derrière d'épaisses fougères. Une biche juste devant la caméra numéro 3. Je crus un bref instant qu'il s'agissait du monstre et mon sang ne fit qu'un tour. Je sentis mon coeur battre à toute allure comme s'il allait bondir hors de sa cage. Je rassemblai mes esprits puis repris mon observation minutieusement. Elle fut longue, si longue que je finis une nouvelle fois par m'endormir.
      Dans mon sommeil, la forêt se fut silencieuse et calme, perturbée seulement par les battements lourds de mon cœur qui résonnaient comme les tambours annonciateurs d'un funeste destin, un triste sort. Les tam-tams se firent de plus en plus fort et dans la pénombre, l'horreur qui ne portait pas de nom me fixait de ses terribles yeux luisant comme deux feux dans la nuit. La peur me glaçait les sangs et je me sentais figé, incapable de faire le moindre geste, attendant que le sort frappe. Mais le sort ne frappa pas. Il restait la sans bouger et c'était ça le plus inquiétant, le plus angoissant...ne pas savoir quand le mal allait agir. Je me réveillai de ce pénible sommeil, me frottai les yeux et regardai sur l'écran les différentes caméras.
      Soudain je fus pris de stupeur lorsque mes yeux se posèrent sur celle qui montrait le petit chemin qui menait jusqu'à moi. Là, cette bête répugnante issue de mes pires cauchemars, une chimère des créatures que seul le plus mauvais des rêves pourrait laisser entrapercevoir. La terrible bête, tout croc dehors, avançait d'un pas lent, pesant. La sueur gouttait abondamment et l'odeur pestilentielle se faisait sentir jusqu'ici et je devais lutter pour ne pas rendre.
      Effrayé qu'il me trouve, je sortis et décidai de partir plus loin, hors de portée de cet enfer à quatre pattes. Je courus pour me cacher ou fuir, je ne savais plus quoi faire tellement la peur me faisait perdre la raison. Je pouvais ressentir son souffle nauséabond sur ma peau, ses crocs sur ma nuque. Je désirais me retourner, voir où j'en étais mais impossible de regarder derrière moi. Je m'arrêtai, fermai les yeux et pris une grande inspiration. Puis rassemblant tout mon courage je risquai un léger coup d'œil. Le monstre ne m'avait pas suivi et je pus continuer ma route tranquillement, sans crainte.
      Je devais toute fois regagner mon équipement et donc affronter la peur de recroiser la bête. J'avançai alors d'un pas feutré, alerte à tous les bruits qui m'entouraient. Au bout de cinq minutes, j'arrivai enfin à ma tente, soulagé de ne pas avoir croisé ce démon, cet être semblant venir de mon pandémonium interne et qui n'attendait qu'une chose, me ronger l'âme.

      Je me dépêchai de ranger mon matériel ( cela me sembla une éternité ) puis pris la route. J'errai un bon moment dans cette forêt infernale à la recherche de la grande route quand soudain j'entendis un hurlement qui résonna jusqu'au plus profond de mes entrailles, un cri qui me fit hérisser le poil. Je sentis un léger frisson. Je regardai autour de moi et c'est là que je l'aperçus qui me fixait tendrement, la salive pendant de sa gueule béante. Elle commença à s'avancer dans ma direction et j'eus alors un mouvement brusque de recul. Je trébuchai sur une grande racine et me cassai la figure. La bête bondit alors vers moi et je me couvris les yeux, refusant de faire face à mon destin.
      Je crus d'abord mourir, partir pour je ne sais quel monde sombre mais quand je me risquai à ouvrir les yeux, je réalisai non sans une certaine surprise que j'étais encore en vie. Je jetai un coup d'oeil, la créature n'était plus là. Je m'enfuis sans me retourner.
      Quelques heures plus tard, j'étais dans l'avion pour la France. Douze heures passèrent avant que j'arrive enfin au pays. A Paris je pris un train gare du Nord puis rentrai chez moi. À la maison, je visionnai les vidéos prises du monstre mais à ma grande stupéfaction je réalisai qu'elles étaient toutes vide. Sur les bandes, aucune trace de la bête, cette chimère qui me répugnait encore il y a quelques heures de cela. Serais-je devenu fou ? Aurais-je perdu la raison ?
      Ce monstre, ce cauchemar m'avait semblé pourtant bien réel. Je pouvais encore sentir sa terrible odeur, son souffle chaud sur ma nuque. Tout à coup, l'angoisse me saisit à la gorgé et j'en eus le souffle court. Impossible de respirer, j'avais l'impression de suffoquer, de me noyer dans ma propre terreur.
      Je la sentais, là juste derrière moi. Je voulus me retourner, mais j'étais tétanisé. L'horreur qui me fixait poussa soudain un hurlement qui me sortit de ma torpeur et je me décidai enfin à affronter la chose. Je la regardai et elle s'évanouit dans la nuit, emportée par la douce brise.