[Riboldi, Carolane] A l'abri des regards

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Résumé :

A l'abri des regards, un couple se déchire.
A l'abri des regards, une malédiction s'abat.
A l'abri des regards, des randonneurs disparaissent sans laisser de trace.
A l'abri des regards, une poignée de main scelle un contrat.
Nombre d'événements se déroulent dans l'intimité, à l'abri des regards indiscrets...

Cinq récits au cœur desquels cohabitent le réel et le fantastique, entraînant leurs protagonistes face à des situations périlleuses auxquelles forces occultes et monstres du quotidien ne sont pas étrangers.

A l'abri des regards

Mon avis :

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Il y a des œuvres où l’on désire malheureusement qu’elles soient plus courtes. Et d’autres on l’on paierait cher pour en lire plus. Fort heureusement ce recueil se situe dans la seconde catégorie.

La grande force de l’auteure est de pouvoir avoir un style différent pour chacune de ses nouvelles, ce qui donne l’impression qu’elles furent toutes écrites par une personne différente. Carolane Riboldi réussit ainsi l’exploit de faire naître cinq univers distincts, tous ancrés dans leur propre histoire, et surtout dans un amour de la région Charente qui s’exprime sans détour. Il est bon de lire une auteure qui accorde de l’importance aux lieux, et à l’univers qui les entourent. L’écriture de l’auteure est également à la fois poétique, théâtrale, elle emmène son lecteur entre l’horreur, la pitié, la terreur, et parfois un sentiment de justice. Chaque nouvelle qui compose ce recueil sait parler à différents lecteurs, différents genres, et peut ainsi attirer de multiples personnes. Ce fait me laisse bien sûr espérer lire d’autres histoires écrites par l’auteure, en ne doutant pas qu’elle saura à nouveau jongler avec tout son talent pour attirer entre les griffes de son imagination un lectorat divers.
J’ai également adoré le petit clin d’œil fait dans la dernière nouvelle à la seconde.

- Potentiel spoil des différents thèmes abordés dans les nouvelles, sans pour autant dévoiler leur contenu (J’éviterais ainsi de noter les titres) -

Première nouvelle :
Le sujet, fort malheureux, des femmes battues est ici abordé avec beaucoup de vérité, dans toute sa violence et sa réalité. Il peut être délicat de « mettre en scène » un tel sujet, tant il résonne fort malheureusement aujourd’hui. Pourtant Carolane Riboldi réussit à construire sa nouvelle autour de celui-ci sans jamais faire d’un sujet réel une simple historiette. Ici la violence des mots vient accompagner celle du thème, et des évènements. Le style est plus dur, plus rapide, plus violent. Plus cru également. Il est adapté à la nouvelle en elle-même, et j’ai apprécié les entrées comme celle du journal ou l’audition.

Deuxième nouvelle :
J’avoue avoir été particulièrement surprise par celle-ci. Comme une sorte d’épouse de « Barbe-Bleue », j’ai succombé à la curiosité et ai voulu jeter un œil derrière la petite porte. Je ne fus pas déçue. Ici le ton, et le sujet, sont complètement différents. Le titre ne laisse foncièrement rien deviner avant l’ultime révélation, et bien que l’auteure nous prenne par la main pour nous laisser deviner que l’horreur se cache derrière la porte, elle a le génie de réussir à nous surprendre. Cette révélation finale, dans ce qu’elle a de purement horrifique, était vraiment repoussante, bravo à l’auteure pour avoir réussi à me clouer le bec face à mes propres suppositions.

Troisième nouvelle :
Merci pour le flash de film d’horreur qui m’a consumé à la fin de ma lecture. De cette nouvelle et de la suivante je veux en savoir plus, en lire plus, avoir un développement entier et cinématographique autour de l’univers, du sujet, de l’histoire. J’ai un véritable coup de cœur pour cette nouvelle, qui bien qu’étant très courte est potentiellement celle que j’ai préféré. L’auteure utilise ici, encore, un autre ton, une autre vision des choses, une toute nouvelle écriture. Quelle beauté pour une amatrice d’horreur comme quoi de lire cette nouvelle ! Tout y est : c’est dur, c’est violent, ça claque, ça gicle, et on grimace sans pouvoir en détourner les yeux !

Quatrième nouvelle :
Nouvelle histoire, nouveau ton, nouvelle écriture, même auteure. Encore une fois je veux en savoir plus, j’ai besoin d’un développement à la King (compliment suprême venant de moi, au même niveau qu’une comparaison à Dante). J’ai besoin d’en apprendre plus sur la malédiction, sur ses conséquences, l’après-le pendant-l’avant. Tout à l’envers, en même temps, mais toujours plus. Peu importe les conséquences, je succombe une fois encore au désir d’en apprendre plus cette histoire.

Cinquième nouvelle :
La plus longue, et celle qui dévoile le plus le travail de l’auteure. Ici encore le lecteur est placé face à une histoire qui a son propre langage, ses propres questions, tout cela étant bien sûr teinté agréablement par cet amour du pays, de la région. (Si l’auteure dans ses futurs travaux met aussi bien en avant son amour des lieux, je ne doute pas qu’elle se fasse quelques admirateurs dans lesdits lieux) Ici on aborde une légende bien connue, qui reste de façon assez surprenante, mais d’autant plus terrifiante, toujours dans l’ombre. La tension qui vient à naître tout au fil du récit ne peut prendre place que grâce à l’écriture de l’auteure qui sait rendre ses personnages attachants avant de les envoyer au plus profond du Cocyte gelé. Encore une fois l’on est amené à s’interroger, à douter, à espérer. L’auteure nous tient par la main pour mieux nous lâcher, pour nous abandonner avec ses personnages, pour nous faire vivre ce qu’ils vivent. Il est souvent dur d’écrire sur la peur, et encore plus de réussir à la faire naître chez le lecteur. Je pense que Carolane Riboldi a le génie de réussir.