#26 11 Février 2024 14:43:52
Finalement, j'ai opté pour un autre thème : TRAVAIL.
Je suis touchée par la sincérité de tes textes et j'ai envie de réagir sur un thème dont tu parles, j'aime ces dialogues littéraires et je te remercie brijoudu93 pour cet échange !
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A chaque nouvelle connaissance, il est difficile d'éviter la question : "qu'est-ce que tu fais comme travail ?" Quand elle finit par arriver, je prends mon courage à deux mains, et, la tête haute, je réponds : "je suis maman au foyer". Là, mon interlocuteur baisse les yeux et ne sait plus trop quoi dire, souvent des banalités, ou change carrément de conversation.
Oui, je suis maman au foyer, je passe mes journées noyée dans la petite enfance, et je n'ai droit à aucune reconnaissance sociale, à aucun respect de la plupart des hommes et des femmes que je croise : "quoi ? Tu ne gagnes pas ta vie ? Et ton indépendance ?" Ou carrément : "comment ? Tu ne fais rien de tes journées ?".
Je n'en veux à personne, mais je me sens cruellement seule et j'enrage de ne pas être entourée de plus de compréhension. A qui confier combien mon quotidien est difficile ? Comment dire que parfois je me lève la nuit pour pleurer et décompresser de mes journées qui ne s'arrêtent jamais ? Jour et nuit, nuit et jour, je suis là, je veille, j'encourage, je cadre, je nourris, je soigne, je guide, je parle, je crie, je console, je cours, je porte mon petit être vers son avenir de grand garçon.
J'ai la pleine et entière responsabilité de son bien-être, de sa santé, de son développement, et ce n'est pas léger. Et je n'ai pas appris à être maman, je suis aveugle sur bien des sujets et je fais de mon mieux, sans mode d'emploi. J'ai appris à écouter mes ressentis, à faire confiance à mon intuition, à aiguiser mon sens de l'observation, l'empathie est tellement forte que je ne sais plus rien de ce que je vis moi, dans ma tête ou dans mon corps.
Je ne sais vivre les choses que très intensément, alors cette expérience me prend toutes mes tripes. Je fais le choix de donner tout ce que je peux à ce petit, tout l'amour dont je suis capable, toute la patience, toute la joie et tout l'émerveillement que je ressens quand je vis. Mais mes forces sont limitées, j'arrive souvent au bout de mes limites, et il faut tenir encore.
Je n'ai pas le moyen d'aller chez un médecin et de me faire diagnostiquer un "burn-out", et prendre quelques jours de pause. Non, les journées s'enchainent, pleines à craquer, et les nuits arrivent, entrecoupées, à tel point que je les vois maintenant comme toute une aventure à vivre. Je n'aurais jamais cru ceux qui m'auraient dit que cette expérience était si dure. Comment ? Mais un petit ça dort beaucoup, et puis ça s'occupe tout seul, non ? Heu, non, la réalité est autre, et c'est quelque chose d'avoir mis le pied dedans.
Et ce petit, centre de toutes mes attentions, comme j'aimerais qu'on le regarde aussi, qu'on cherche à le comprendre et à échanger avec lui, ne serait-ce qu'un tout petit peu ! Mais non, quand je suis avec lui et que je croise des adultes, c'est comme s'il n'existait pas, qu'il n'était qu'un parasite dérangeant. Je ne sais jamais comment me comporter avec ces gens.
J'aime ce petit, cet être rempli d'énergie et de joie de vivre, et je le traite avec considération et respect autant que j'en suis capable, je ne peux pas faire comme s'il n'était pas là quand je suis avec d'autres. Même si j'apprécie quelques minutes d'échanges avec des adultes (ô combien !), je ne peux pas pour cela mettre mon petit entre parenthèses. Que la société des adultes est difficile ! Qu'il est dur de tracer son chemin sans accepter de piétiner sur nos valeurs !
Dernière modification par Claire C (15 Février 2024 14:54:54)