Souvenirs à partager

 
  • brijoudu93

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    #21 02 Février 2024 18:21:30

    DEUIL

    j'ai eu la chance de ne pas avoir été confrontée trop tôt par des deuils qui m'ont anéantie !
    certes j'ai perdu mon grand père maternel à 11 ans, je ne le connaissais pas trop (il vivait ds un pays étranger et je ne le voyais pas souvent) puis ensuite ma marraine à 14 ans et là c'est le chagrin immense de ma grand mère (qui perdait un enfant) qui m'a énormément perturbée !
    ensuite j'ai enfoui tout çà au fond de ma mémoire et je n'y ai plus trop pensé !
    Ensuite (beaucoup plus tard) j'ai perdu mon père et là çà a été un anéantissement total et irrémédiable !
    Je me souviens d'un chagrin profond et horrible à gérer ! d'un sentiment de vide épouvantable et du chagrin de ma mère qui ne s'est jamais remise de la perte de son compagnon de vie !
    Puis exactement (jour pour jour) 4 ans plus tard le chemin de vie de ma mère s'est arrêté et cette fois ci il a fallu que je gère tout seule parce que ma soeur n'y est pas arrivé (et je ne lui en veux pas du tout !), cette fois ci je n'étais plus l'enfant de personne et çà a été hyper flippant !
    Je ne trouve d'ailleurs pas de mots pour écrire ce que j'ai ressenti exactement !
    C'est un vide abyssal !
    Le temps, bien entendu, a adouci mon chagrin et heureusement mais ces moments si durs à gérer me bouleversent à chaque fois que j'y pense et je crois que c'est pour cela que cette fois ci mon texte sera relativement court !
  • Claire C

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    #22 03 Février 2024 15:47:17

    Merci pour ce beau partage brijoudu93 ! Tes mots résonnent très bien avec mes ressentis. Cela me touche cette expérience douloureuse écrite en commun.
    Merci encore pour ton texte !
  • Claire C

    Passionné du papier

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    #23 09 Février 2024 16:10:38

    Un petit texte pour aujourd'hui sur un WEEK-END

    ***

    A cette époque, j'étais étudiante au coeur de Paris. Je vivais dans une minuscule chambre de bonne tout en haut d'un bel immeuble, j'étudiais le jour et j'étais serveuse le soir. J'avais appris à connaître d'autres travailleurs du quartier, et c'était toujours une joie d'échanger un sourire et quelques mots. Nous étions trois à discuter régulièrement ensemble : un serveur d'un petit bouiboui d'à côté, Hilel, algérien ; un veilleur de nuit du bowling du coin, Demba, sénégalais, et moi. Trois couleurs, trois cultures, trois destins très différents, et nos échanges restaient riches, légers et joyeux.

    Un jour, Demba, qui habitait Sarcelles, nous a invité, Hilel et moi, à passer le week-end chez lui. Nous étions tout heureux à l'idée de cette sortie hors des murs parisiens, en début d'été. Je me souviens du RER, de la marche jusqu'à l'immeuble de Demba, on se sentait entourés et l'ambiance me semblait chaleureuse. Arriver chez lui, c'était ouvrir la porte sur un autre monde. Ils étaient 5 sénégalais à se partager l'appart, au rez-de-chaussée d'une barre d'immeubles.

    On arrive, on dit bonjour, on en croise certains, un était enfermé dans une chambre avec sa copine qu'il venait d'accompagner pour un avortement, un autre devant la télé, un autre allongé sur le canapé, et le dernier la guitare à la main, Demba nous guidait. Je n'ai que des impressions floues de ce week-end, mais je me souviens qu'on a discuté, ri, chanté autour de la guitare dans l'herbe au centre des barres d'immeubles, au milieu des fenêtres ouvertes et des salutations de tous les voisins.

    L'un d'eux était footballeur et venait tenter sa chance en France, il avait le ballon collé au pied, et a passé une bonne partie du week-end à jouer sur cette herbe avec tous les gamins du quartier. C'était un plaisir à regarder. Un autre d'entre eux travaillait aussi dans la sécurité, il avait été infirmier et s'était occupé de blessés dans plusieurs combats, il avait une sagesse qui forçait le respect, et était un peu plus âgé et plus en retrait que ses quatre autres colocataires, plus jeunes, encore pleins de rêves d'avenir.

    Ces deux jours sont restés dans ma mémoire comme un moment hors du temps. Je ressens encore cette atmosphère d'échanges, de partages, de vie commune, pleine du respect de chacun. Et je suis reconnaissante à ces amis d'un autre temps de m'avoir fait vivre à moi, petite blanche isolée, la chaleur humaine d'un week-end.

    Dernière modification par Claire C (09 Février 2024 16:11:54)

  • brijoudu93

    Lecteur professionnel

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    #24 09 Février 2024 18:28:46

    week end

    quand je travaillais, j'attendais avec une immense impatience le WEEK END, synonyme de liberté et de farniente !
    Traîner sans but, faire ce qu'on n'avait pas le temps de faire la semaine, se promener ! prendre le temps et laisser le temps au temps !
    Très vite comme au travail çà n'était pas la joie, j'ai commencé à détester le dimanche soir et j'ai vécu avec intensité le stress du dimanche soir ! au point d'avoir un vilain mal de tête qui me pourrissait la vie TOUS les dimanches soirs et ce de plus en plus tôt !
    A la fin de ma carrière à la banque je commençais à être contrariée dès 14 h et j'avais beau me raisonner, garder pour le dimanche après midi des choses très agréables à faire, je n'arrivais pas à en profiter !
    J'ai tenté un tas de choses positives :
    - aller me promener dans ma belle ville de Paris
    - aller au musée
    - aller au cinéma
    - prendre un livre agréable à lire
    - recevoir des amis ......
    je n'éprouvais aucune joie, aucun plaisir à partir de 14 h le dimanche, j'ai même dû être insupportable pour mon entourage (que je remercie d'avoir accepté si chafouine !)
    Heureusement dès que j'ai changé de travail, le week end est redevenu un moment agréable ! doux et sympathique !

    ps : Claire : merci pour ton expérience si jolie ! (presque trop lol) moi qui vis ds un quartier dit compliqué le melting pot n'y est hélas pas si joyeux !
  • Claire C

    Passionné du papier

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    #25 09 Février 2024 19:00:31

    Merci pour ce partage brijoudu93 ! Intéressant ce stress du dimanche soir lié au travail, c'est beau cette écriture qui donne à sentir les difficultés du quotidien !
    Quant à moi, j'étais dans un souvenir qui frôle le merveilleux je suis d'accord avec toi, j'ai une capacité à m'enthousiasmer facilement, et même si ce souvenir est loin de la réalité quotidienne des cités je n'en doute pas, ce moment a existé pour moi, je le garde précieusement dans ma mémoire, et je suis contente de l'avoir partagé !

    Je te propose pour la suite quelques épisodes d'anecdotes de VOYAGE, qu'en dis-tu ?
  • Claire C

    Passionné du papier

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    #26 11 Février 2024 14:43:52

    Finalement, j'ai opté pour un autre thème : TRAVAIL.
    Je suis touchée par la sincérité de tes textes et j'ai envie de réagir sur un thème dont tu parles, j'aime ces dialogues littéraires et je te remercie brijoudu93 pour cet échange !

    ***

    A chaque nouvelle connaissance, il est difficile d'éviter la question : "qu'est-ce que tu fais comme travail ?" Quand elle finit par arriver, je prends mon courage à deux mains, et, la tête haute, je réponds : "je suis maman au foyer". Là, mon interlocuteur baisse les yeux et ne sait plus trop quoi dire, souvent des banalités, ou change carrément de conversation.

    Oui, je suis maman au foyer, je passe mes journées noyée dans la petite enfance, et je n'ai droit à aucune reconnaissance sociale, à aucun respect de la plupart des hommes et des femmes que je croise : "quoi ? Tu ne gagnes pas ta vie ? Et ton indépendance ?" Ou carrément : "comment ? Tu ne fais rien de tes journées ?".

    Je n'en veux à personne, mais je me sens cruellement seule et j'enrage de ne pas être entourée de plus de compréhension. A qui confier combien mon quotidien est difficile ? Comment dire que parfois je me lève la nuit pour pleurer et décompresser de mes journées qui ne s'arrêtent jamais ? Jour et nuit, nuit et jour, je suis là, je veille, j'encourage, je cadre, je nourris, je soigne, je guide, je parle, je crie, je console, je cours, je porte mon petit être vers son avenir de grand garçon.

    J'ai la pleine et entière responsabilité de son bien-être, de sa santé, de son développement, et ce n'est pas léger. Et je n'ai pas appris à être maman, je suis aveugle sur bien des sujets et je fais de mon mieux, sans mode d'emploi. J'ai appris à écouter mes ressentis, à faire confiance à mon intuition, à aiguiser mon sens de l'observation, l'empathie est tellement forte que je ne sais plus rien de ce que je vis moi, dans ma tête ou dans mon corps.

    Je ne sais vivre les choses que très intensément, alors cette expérience me prend toutes mes tripes. Je fais le choix de donner tout ce que je peux à ce petit, tout l'amour dont je suis capable, toute la patience, toute la joie et tout l'émerveillement que je ressens quand je vis. Mais mes forces sont limitées, j'arrive souvent au bout de mes limites, et il faut tenir encore.

    Je n'ai pas le moyen d'aller chez un médecin et de me faire diagnostiquer un "burn-out", et prendre quelques jours de pause. Non, les journées s'enchainent, pleines à craquer, et les nuits arrivent, entrecoupées, à tel point que je les vois maintenant comme toute une aventure à vivre. Je n'aurais jamais cru ceux qui m'auraient dit que cette expérience était si dure. Comment ? Mais un petit ça dort beaucoup, et puis ça s'occupe tout seul, non ? Heu, non, la réalité est autre, et c'est quelque chose d'avoir mis le pied dedans.

    Et ce petit, centre de toutes mes attentions, comme j'aimerais qu'on le regarde aussi, qu'on cherche à le comprendre et à échanger avec lui, ne serait-ce qu'un tout petit peu ! Mais non, quand je suis avec lui et que je croise des adultes, c'est comme s'il n'existait pas, qu'il n'était qu'un parasite dérangeant. Je ne sais jamais comment me comporter avec ces gens.

    J'aime ce petit, cet être rempli d'énergie et de joie de vivre, et je le traite avec considération et respect autant que j'en suis capable, je ne peux pas faire comme s'il n'était pas là quand je suis avec d'autres. Même si j'apprécie quelques minutes d'échanges avec des adultes (ô combien !), je ne peux pas pour cela mettre mon petit entre parenthèses. Que la société des adultes est difficile ! Qu'il est dur de tracer son chemin sans accepter de piétiner sur nos valeurs !

    Dernière modification par Claire C (15 Février 2024 14:54:54)

  • Claire C

    Passionné du papier

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    #27 14 Février 2024 14:00:04

    Je continue maintenant avec un souvenir de voyage : BOSTON

    ***

    Dans une de mes précédentes vies, j'ai participé à une école d'été au sein du prestigieux MIT (Massachusetts Institute of Technology) aux Etats-Unis. J'étais logée dans une petite chambre d'hôtel à une quinzaine de minutes à pieds, et j'avais une petite colocataire. C'est cette rencontre pétillante que je voudrais partager.

    Enya était beaucoup plus jeune que moi, taïwanaise, étudiante dans une grande université américaine de la côte ouest. Je ne sais pas très bien pourquoi elle avait débarqué dans cette école d'été, elle n'était même pas là pour toute sa durée. Etait-ce pour avoir un aperçu d'un domaine de mathématique au niveau recherche ?

    Les cours étaient intenses, chacun venait d'un horizon différent, nous prenions des notes, et il y avait des bagels aux pauses. Nous avions quelques après-midi libres. J'étais noyée dans le magma scientifique, et mes nombreuses expériences semblent me permettre de conclure que c'est un ressenti normal pour la plupart des auditeurs de ces cours dont le rythme n'est adapté qu'à celui qui les écrit et qui les a travaillés, compris et digérés. Hélas, sur le moment on se sent toujours désarçonné et un peu perdu, et on a le réflexe de s'isoler de peur d'être mis à découvert.

    Enya était pleine d'énergie, c'est elle qui m'a appris le mot "picky" qui la traduisait à ravir. Nous marchions ensemble et j'essayais de lui donner les grandes lignes du domaine du cours, mon domaine de recherche chéri et préféré. J'avais par chance un peu plus de recul qu'elle sur le sujet avec les années, et j'étais ravie et très fière de pouvoir lui dégrossir les grandes questions qui se posaient alors (heureusement qu'il n'était pas question d'entrer dans plus de détails entre nous !).

    C'était comme une petite soeur, et c'est bizarre le rôle d'aînée posée que j'avais auprès d'elle. Je trouve merveilleux les facettes de notre personnalité qui se révèlent selon la compagnie dont nous jouissons. Un jour que nous rentrions à l'hôtel, elle a tenu à faire un détour, et à ce que je l'accompagne. Je l'ai fait de bonne grâce, j'adore quitter les sentiers battus (même si là, mon cerveau était en ébullition et j'avais plus besoin de me poser pour réfléchir et reprendre les cours du matin que d'autre chose...).

    Nous sommes tombées devant un club de canoë. Son sang n'a fait qu'un tour, et en un clin d'oeil nous voilà toutes les deux pagayant joyeusement sur la Rivière Charles en plein Boston ! Ma montre n'a pas survécu aux éclaboussements, et je suis rentrée fourbue quand elle sautillait encore partout, mais je garde une place particulière dans ma mémoire pour ce souvenir improbable. Nous avons bu aussi du thé aux perles, boisson de chez elle, dans un petit magasin du quartier chinois de Boston, où elle m'a bien fait sentir la tension entre son pays et la Chine, que j'ignorais.

    Enya appelait en vidéo sa famille tous les soirs sans aucune exception, ils faisaient leur prière tous ensemble. Elle était consciente des réalités de la vie, et savait que son avenir était de se marier à un étudiant brillant pour rester aux Etats-Unis ensuite. Mais elle voulait essayer d'étudier autant que possible par elle-même, pour voler le plus possible de ses propres ailes avant de rejoindre ce destin programmé. J'ai appris à estimer cette raison froide enfermée dans un petit corps pétillant, cet esprit libre et foufou prêt à s'enfermer dans des chaînes pour une grande partie de la vie.

    Notre contact n'a pu se poursuivre au delà de cette école pour la simple raison qu'Enya n'envisageait pas possible une correspondance par email où elle pourrait parler librement, en vertu du contrôle exercé par les autorités de son pays, elle avait appris à être prudente. Néanmoins, je pense de temps en temps à elle et j'espère qu'elle est toujours là, vive et brillante, quelque part sur un autre continent.

    Dernière modification par Claire C (15 Février 2024 14:57:55)

  • brijoudu93

    Lecteur professionnel

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    #28 14 Février 2024 21:59:48

    super tes deux derniers posts !
    j'aime bien te lire !
    merci de te livrer ainsi régulièrement (plus régulièrement que moi !)
  • Claire C

    Passionné du papier

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    #29 15 Février 2024 10:21:46

    Merci pour ton gentil mot qui me touche ! Je t'ai écrit un petit texte en réponse : ECRIRE

    ***

    J'ai toujours écrit. Aussi loin que je me souvienne, et sur des supports très variés, j'ai écrit. Les mots m'obsèdent jusqu'à trouver une porte de sortie, et ceux-là me réveillent parfois en pleine nuit. J'ai besoin d'écrire pour donner du sens à ma vie, pour ordonner le fouillis, pour prendre de la distance par rapport à mes souffrances. Sans l'écriture, je n'aurais pas trouvé de chemin au milieu des cauchemars de mon quotidien.

    Avant aujourd'hui, cette écriture jaillissante, facile, volubile est restée toujours silencieuse et personnelle. Je n'ai jamais aventuré mes textes en dehors de ma solitude avant de le faire ici. J'avais besoin de me protéger de la honte et du mépris. J'ai même jeté tous mes écrits avant ceux-ci. Une fois que les mots paraissent sur le papier, une fois que je peux ordonner mes pensées, ma tension s'apaise, une partie de moi trouve un temporaire repos, et je suis soulagée.

    Ma vie a beaucoup changé depuis, j'ai appris à contenir mes mots depuis des années, et voilà que deux amies de ce forum, tombé du ciel pour moi, me remettent sur la voie, Alice et toi, et je vous en remercie. Mes mots se bousculent à nouveau dans ma tête, des parties de ma vie veulent se faire jour et quitter mon silence. Pour la première fois, ils s'en sont allés, il sont partis vivre leur vie, indépendamment de mes pensées, et désormais libérés.

    C'est une émotion très forte pour moi de voir ces souvenirs me quitter. A la légèreté que je gagne de ces mots que je ne dois plus porter, suivent les remises en question douloureuses. Suis-je importune ? Est-ce correct de se livrer ainsi ? Devrais-je plutôt garder le visage retiré du silence ? Et quoi, avoir vécu toutes ces vies pour ne faire que les ravaler ? Pourquoi ne pas les ouvrir au partage ? Je souhaite de tout coeur donner à d'autres le courage et les couleurs qui m'ont parfois manqués dans ma vie. Tes mots et tes partages sont pour moi un signe d'encouragement sur cette voie, sois en remerciée chaleureusement.
  • Claire C

    Passionné du papier

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    #30 20 Février 2024 14:52:49

    Coucou ici !

    Tes textes me manquent un peu brijoudu93, voici quelques idées de thèmes : ACCOUCHEMENT, NUIT D'ORAGE, IMMIGRATION, est-ce que quelque chose t'inspire et te tente parmi ceux-là ? Ou un autre thème qui te viendrait ?