[Suivi lecture] Genesis

 
  • Genesis

    Bookworm

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    #21 13 Octobre 2023 10:17:38

    Lolita est un des romans les plus controversés dans la littérature moderne par son sujet absolument immoral : son personnage principal est un pédophile qui décrit sur 500 pages son emprise sur Dolores, une enfant de 12 ans.
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    Le roman ne va donc jamais décrire Humbert Humbert comme un personnage immoral puisque celui-ci s’adresse à la première personne dans une partie du récit mais va aussi se décrire, come s’il avait une personnalité autre, en dehors de lui, à la troisième personne. Ce livre est donc éminemment intéressant par bien des aspects, surtout celui de la représentation. Comment représenter ce qui n’est pas moralement représentable ? Humbert Humbert dès le début décrit son coup de foudre pour Lolita qu’il qualifie de « nymphette », le lecteur assiste choqué et sans voix à son plan qui se déroule pour posséder l’enfant dans tous les sens du terme. De mon point de vue de lecteur, j’ai eu beaucoup de mal à avancer rapidement dans ce livre, déjà et surtout parce que sont sujet est immensément rude et cru, mais aussi parce que l’écriture de Nabokov est magnifiquement belle, il faut prendre le temps de la digérer, de la contempler. Après ma lecture, j’ai une admiration sans faille pour cet auteur qui a réuni des témoignages de victimes pour en faire un récit plus vrai, qui se veut percutant et qui pour moi, bien que ce livre commence à dater, a été le plus bouleversant sur ce sujet. Je pense qu’il ne faut absolument pas classer Lolita comme un livre immoral, tout comme son auteur, les sujets le sont, mais la démarche est admirable, surtout dans cette écriture si particulière durant tout le récit. Tout le livre est fait pour bouleverser le lecteur, qui se prend souvent de pitié pour Humbert et a honte de s’attacher à ce personnage ensuite. On a aussi honte de s’émouvoir des paroles d’amour du personnage, qui sont magnifiques mais sont destinées à une enfant, on a envie de détester ce personnage mais on n’y arrive pas et on ne veut que l’oublier. La création de ce sentiment de contradiction est pour moi ce qui fait que Lolita est une œuvre magnifique, qu’il faut absolument lire (en étant averti de sa cruauté). On referme le livre avec un   de sentiment passionnel, ce sentiment coupable d’avoir adoré et détesté ce roman tout comme son personnage.
    « Je t’aimais. J’étais un pentapode monstrueux, mais je t’aimais. J’étais haïssable et brutal et abject – j’étais tout cela, mais je t’aimais, je t’aimais ! Et parfois je devinais ce que tu éprouvais et c’était pour moi un supplice infernal, mon enfant. Petite Lolita. Dolly Schiller. »