[Suivi Lecture] Zorba

 
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    #31 02 Janvier 2020 22:31:07

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    L'essai de Hartmut O. Rotermund porte sur la construction du Japon pendant l'ère Meiji à travers sa vision de l'occident. Cet occident est caricaturé, observé à la fois comme une menace, mais aussi comme une opportunité. L'auteur fait un panorama de tous les aspects sociétaux du Japon, grâce aux différents discours qui s'établissent toujours dans une analogie envers ce "petit cap d'Asie" (cf Paul Valéry pour désigner l'Europe). De la mode féminine aux nombreux changements religieux, tout y passe, se fait et se défait en fonction de cette image de l'altérité; même la coiffure devient un moyen d'affirmer sa position politique vis-à-vis l'occident : ainsi une coiffure demie rasée désigne un japonais traditionaliste; une tête chevelue est la marque d'un monarchiste; et des cheveux coupés à la militaire sont l'illustration d'une ouverture à l'occident . Finalement, l'ouvrage souligne l'image d'un Japon divisé envers une Europe civilisatrice, mais aussi  critiquée, avec son lot de nouvelles mœurs, parfois  opposées à celle de la piété filiale qui régit encore le Japon de cette époque.

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    #32 09 Janvier 2020 17:02:17

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    Un manuel comme on les aime,  à  la fois concis et éclaircissant, mais, qui en réalité, ne nous apprend pas grand chose. J'ai l'impression que l'art de retranscrire des écritures obscures est plus aisé à apprendre en présence d'un professeur qu'avec ce simple manuel, puisque les écriture de la France moderne variaient grandement selon ceux qui écrivaient. Un livre insuffisant mais qui peut-être pratique quand on cherche des termes, abréviations et des permanences orthographiques du français écrit de l'époque.

    Dernière modification par Zorba (09 Janvier 2020 17:02:56)

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    #33 20 Janvier 2020 18:04:32

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    Après m'être intéressé de prêt aux livres de Gershom Scholem tel que  Les Grands Courants de la mystique juive et Sabbataï Tsevi : Le messie mystique, je souhaitais en connaître d'avantage sur le mouvement mystique juif du frankisme et la figure de Jacob Frank, qui, selon les mots de Scholem : "est le plus effrayant phénomène de l'histoire juive, un chef religieux qui fut un individu fondamentalement corrompu et dégénéré à travers toutes ses actions." . Ce mouvement mystique et nihiliste prend ses racines dans le sabbatéisme, qui bouleverse profondément les fondements théologiques de la diaspora juive du XVIIe siècle. 
    Sabbataï Tsevi est l'un des personnage les plus énigmatique de l'histoire juive; aidé de son prophète Nathan de Gaza, il réussit à convaincre presque toute la diaspora juive (du Yemen à la Pologne) qu'il incarne le messie annonçant la fin des temps. Bien-sûr, cette propagande apocalyptique se révèle être un échec, puisque les autorités turques le contraignent à apostasier. Néanmoins, il émane une sorte de fascination face à ce dogme qui mélange intelligemment  des idées apocalyptiques populaires avec de la cabale messianique. Jacob Frank, né 50 ans après la mort du faux messie, s'affirme comme le continuateur de cette déviance du judaïsme, reprenant l'antinomisme de Sabbataï, lui faisant atteindre un niveau tel que la communauté juive s'empresse de l'excommunier.    Alors que Sabbataï Tsevi, après son apostasie à l'Islam, avait enjoint ses disciples à se convertir à la foi musulmane, il semble que Jacob Frank ait - de même que Sabbataï Tsevi avec la religion musulmane - ordonné la conversion de ses partisans au catholicisme. Le livre de Paweł Maciejko permet alors de comprendre les héritages  du sabbatéisme et les innovations qu'ajoute Jacob Frank au dogme hérétique à travers la relation ténue qu'il entretient avec le catholicisme.
    Que retirer de ces 250 pages d'une incroyable densité ?  Paweł Maciejko réussit à résumer un phénomène ardu par l'étendue géographique et idéologique de son sujet.  L'auteur veut sortir de la prison de l'antinomisme frankiste qui fit fantasmer nombres de savants comme Gershom Scholem avec son premier ouvrage Redemption through sin écrit, en 1936. Il nous permet de comprendre l'essence du mouvement à travers le XVIIIe siècle polonais, période ambiguë de l'histoire où se côtoie mysticisme et philosophie des lumières. L'ouvrage nous permet aussi de démythifier Jacob Frank, personnage haut en couleur, vu par les complotistes comme l'origine du mal incarné (il suffit de faire une simple recherche sur youtube, c'est assez effrayant). Néanmoins, le livre est peut-être trop ambitieux n'aborde pas assez certains points comme la théologie frankiste et le lien que le dogme entretient avec les loges maçonniques. Ce fait est peut-être dû à une mauvaise traduction de ma part, mais il n'est pas aisé de résumer la vie d'un mouvement et de son prophète en à peine 250 pages.
    Je viens de découvrir que Olga Tokarczuk, prix nobel de littérature, a écrit un roman historique sur Jacob Frank intitulé Les Livres de Jakob Frank. Je suis trop peu avancé dans le roman pour me faire un avis définitif, mais je trouve qu'elle fait ,à travers la fiction,  un travail intéressant en cherchant à retrouver l'homme et non la légende, de manière à inscrire cet étrange phénomène dans la mémoire collective polonaise.

    Dernière modification par Zorba (20 Janvier 2020 20:07:03)

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    #34 25 Janvier 2020 20:15:04

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    J'ai trouvé ce premier tome des oeuvres en prose de Charles Péguy un peu longuet et à mois d'être un admirateur invétéré du personnage ou historien, il n'y a pas vraiment d'intérêt de lire cet ouvrage.  Le livre se compose des premiers travaux et ses multiples interventions dans les Cahiers de la Quinzaine qu'il a créé, en 1900 et s'arrête, en 1905. Je note quand même un beau panégyrique de Jaurès. L'ouvrage s'avère intéressant pour étudier l'affaire Dreyfus; il faut, néanmoins, une maîtrise solide de la  période (que je n'ai pas) pour comprendre tous les enjeux des thèses de Péguy.

    Dernière modification par Zorba (25 Janvier 2020 22:08:34)

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    #35 27 Janvier 2020 23:08:20

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    La guerre ne se limite pas au champs de bataille, elle imprègne les esprits, s'instrumentalise, et comme les ondes d'une pierre jetée dans l'eau, s'atténue au fil du temps. Naoko Shimazu nous offre ainsi une vue d'ensemble du conflit russo-japonais, à travers l'instrumentalisation qu'en fait le gouvernement japonais (qui ira jusqu'à inciter au suicide les épouses dont les soldats sont partis au front, un comble...) avec ses commémorations et sa propagande permise par l'apparition de nouveaux médias comme le cinéma . Elle fait ainsi le parallèle avec les mémoires des soldats, qui loin d'être des samouraïs sans peur et sans reproche, sont, en grande majorité, des petits paysans effrayés par une mort loin de leur foyer, et par le poids de la piété filiale dont ils ne peuvent plus respecter les codes.  Le gouvernement japonais s'approprie la mémoire des défunts pour en faire des quasi-martyrs, qui deviendront des figures iconiques pour les guerres à venir. Cette ouvrage reste une étude approfondie et passionnante pour comprendre la lente marche vers une civilisation guerrière qui connaîtra son apogée avec la seconde guerre mondiale.

    Dernière modification par Zorba (27 Janvier 2020 23:14:41)

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    #36 04 Février 2020 09:43:54

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    Je connaissais Georges Nivat pour ses traduction d'Andreï Biély et de Soljenitsyne; je le découvre journaliste dans Russie-Europe, la fin du schisme écrit, en 1993. Bien-sûr, Georges Nivat dans la grande majorité de ses articles parle de littérature, mais aussi de politique et d'historiographie. Il s'intéresse à la naissance des études slaves, en France, qui sourdent sous la plume d'Astolphe de Custine, en 1843. Ce dernier se veut le Tocqueville de la Russie, mais n'est, selon Nivat, n'adopte qu'un point de vue biaisé; et il faut attendre Anatole Leroy-Beaulieu pour que la France connaisse son premier slaviste, publiant des articles dans la Revue des deux Mondes, à la fin du XIXe siècle.
    Russie-Europe, la fin du schisme permet de découvrir le nombre infinis d'écrivains soviétiques minorés ou oubliés, mais aussi du développement des idées en Russie tsariste et soviétique, qui comme le Japon sous l'ère Meiji, cherche à trouver son originalité à travers les nombreuses influences intellectuelles occidentales.

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    #37 08 Février 2020 12:23:37

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    Jan Retsö est un historien et un linguiste norvégien, dans cet ouvrage, il cherche à définir ce que le terme arabe représentait dans l'antiquité. Cela passe par une liste chronologique de sources étudiées méthodiquement et analysées grâce à la linguistique, ce qui se révèle très fastidieux à lire, puisqu'il utilise l'alphabet phonétique international pour retranscrire les signes d'autres alphabets.  On remarque alors que la notion d'arabe est surtout utilisée pour désigner un groupe et une ère géographique  par des auteurs ou des sources extérieures à la communauté arabe (s'il en existe une à l'époque). La notion se trouve associée au nomadisme, élevage de dromadaires etc. Néanmoins, Jan Retsö déconstruit ces images, il ne voit pas  les arabes des origines  comme une ethnie, mais comme une sorte de caste de militaires, sorte de "police" utilisée par les assyriens dont la notion glissa sémantiquement. En outre, le mot arabe reste assez flou dans l’historiographie grecque, il faut attendre l’arrivée de la religion musulmane et la montée en puissance des Arabes dans l’espace méditerranéen pour qu’une recherche (auto)étiologique soit opérée ; bien-sûr, les Arabes veulent rapprocher leur origine à celle du prophète et vont revendiquer cette appartenance grâce à la tribut Quraysh qui, selon les sources musulmanes, naît dans l’Araba (Yemen du nord actuel). Ainsi cette appellation d’Arabe est utilisée pour désigner les premiers convertis face aux prosélytes (Mawali), ils deviennent une forme de classe d’élite au sein de la société musulmane.

    Je ne conseille pas ce livre aux prosélytes comme moi, il n'est pas clair, mal construit, je n'ai vraiment pas compris grand chose avant le dernier chapitre dans lequel l'auteur dévoile sa thèse. De plus, il existe une autre oeuvre parue la même année :  Arabia and the Arabs: From the Bronze Age to the Coming of Islam  qui selon certains critiques seraient plus limpide et concise que l'essai de Jan Retsö et disponible en pdf sur le net; il ne me reste plus qu'à trouver le temps.

    Dernière modification par Zorba (10 Février 2020 21:02:39)

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    #38 10 Février 2020 21:20:51

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    Olga Tokarczuk nous offre une épopée sur la vie du mythique Jacob Frank, elle tente de nous faire revivre l'intensité de la fièvre messianique qui toucha la Pologne du XVIIIe siècle, tout cela à travers une myriade de personnages : du simple clerc chrétien à la mémé juive. Mais à mon humble avis, la sauce ne prend pas, l'écrivaine s'est astreinte à respecter à la ligne l'historicité des événements, limitant un peu trop son roman à une "narrativisation" de l'essai historique de Paweł Maciejko. Ce qui m'a donné une impression de manque, surtout dans la construction des personnages. Je ne demande pas de faire du Dan Brown, mais elle aurait pu se permettre certaines libertés, sans faire du conspirationnisme anti-juif pour autant. C'est la qu'on sent que le sujet et sensible, je ne connais pas la réception du frankisme en Pologne, or rien qu'en France, il est une sorte de tête de turc de certains "historiens des marges" qui l'accusent de tous les maux de notre société.

    Dernière modification par Zorba (11 Février 2020 09:50:49)

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    #39 17 Février 2020 20:11:13

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    Une lecture essentielle pour tous ceux qui veulent comprendre le fonctionnement de la religion romaine. A travers, un lexique et des définitions nombreuses, John Sheid ressuscite une religion longtemps incomprise, souvent jugée inférieure et absconse au regard de la vérité chrétienne. Après ça ne reste qu'un manuel, qui n'en est pas moins  une bonne introduction au dogme civique romain.



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    C'est toujours un réel plaisir de lire Lucien Jerphagnon, surtout quand il réussit à synthétiser 2000 ans de l'histoire de la pensée humaine. Sa prose est sans ambages, chaque période est analysée à travers les personnages marquants de l'histoire : de Platon à Thomas d'Aquin. Je pense que l'objectif de cette vulgarisation est avant-tout de donner l'envie de découvrir tous ces vieux messieurs dont le poids des oeuvres effraie.

    Dernière modification par Zorba (17 Février 2020 22:56:42)