Voici un roman que certains seront peut-être surpris de voir dans cette catégorie. Mais, primo, il est sorti chez Rivages / Noir et, secundo, pour moi, c'est même carrément un thriller. Bienvenue dans l'enfer de ce qu'on appelait il n'y a pas si longtemps encore les asiles d'aliénés, avec une trame romanesque, des anecdotes historiques authentiques et une réflexion profonde sur la psychiatrie et sa pratique.
<image>Louis et Louise Dantezzi ont 90 ans, ou pas loin. En cette année 2010, des journalistes viennent les voir pour leur faire parler de leur fils et de leur petit-fils, tout deux politiciens en vue. Mais les deux vieillards vont raconter une toute autre histoire, celle de leur jeunesse, de leur rencontre, de ces événements qui ont considérablement changé leurs vies à l'un comme à l'autre : leur internement en hôpital psychiatrique...
En 1937, quand Louis y arrive, on dit encore asile d'aliénés. Il y découvre la violence quotidienne, des conditions de réclusion qui n'ont rien à envier aux prisons traditionnelles, les sévices, les brimades, les menaces d'autres fous qui font régner leur loi, les trafics, les influences, la servilité des gardiens, la folie d'un directeur illuminé, les faveurs sexuelles... Bref, un vrai petit paradis dans lequel, un jour de 1941, débarquera Louise... Coup de foudre immédiat. Mais rien qui ne modifie l'objectif principal : s'évader et ne jamais remettre les pieds dans ce bourbier...
Une évasion incroyable, élaborée pendant près de 5 ans au cours desquelles Louis va creuser patiemment son trou dans la structure de l'hôpital. Mais il va aussi devoir composer avec des changements incontrôlables : le statut d'hôpital psychiatrique qui remplace le vieil asile, à la trop mauvaise image, et des gardiens devenus... infirmiers. La guerre aussi, qui va changer la donne, puisque l'HP de Murmont va accueillir à la fois des résistants, des collabos et des soldats de l'armée nazie...
On se laisse prendre par cette histoire et par la personnalité de Louis, bien moins lisse et bien plus nuancée qu'on ne pourrait le croire au départ. Les fous sont partout, même aux commandes de l'établissement, semble-t-il, mais, au milieu de tout cela, l'intelligence et la culture de Louis vont ressortir de façon plus éclatante. Ses zones d'ombre aussi...