[Chevillard, Eric] Oreille rouge

 
    • Sia

      Super-Livraddictienne

      Hors ligne

      #1 16 Janvier 2012 19:46:53

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      Editions de Minuit, 2005.
      158 pages.




      Cet écrivain aime sa chambre, sa table, sa chaise, dans la pénombre : on l'envoie en Afrique où sont les lions, dans le soleil. Que va-t-il chercher là-bas ? Un grand poème, dit-il. Ou ne serait-ce pas plutôt l'inévitable récit de voyage que tant d'autres avant lui ont rapporté ? On l'a lu déjà, et relu. L'auteur va prétendre que des indigènes l'ont sacré roi de leur village. Il aura percé à jour les secrets des marabouts et appris de la bouche d'un griot vieux comme les pierres quelque interminable légende avec métamorphoses. Le pire est à craindre. Par bonheur, l'aventure tourne court. L'hippopotame se cache. L'Afrique curieusement ne semble guère fascinée par le courageux voyageur. En revanche, celui-ci prend des couleurs : est-ce le soleil ou la honte ? Nous l'appellerons Oreille rouge.


      L'écrivain est casanier. C'est le moins que l'on puisse dire. Celui qui nous occupe n'a pas de nom, ou plutôt, il pourrait s'appeler aussi bien Léon qu'Alphonse ou Jean-Henri. Peu importe. De toute manière, c'est un cliché.
      Invité en Afrique, il hésite, balance, se pose des questions... mais ne résiste pas à la tentation d'en parler à tout le monde. Alors il finit par partir, avec ses préjugés et ses convictions.
      Eric Chevillard nous livre la non-aventure de l'anti-héros parfait: sa quête d'ailleurs n'est rien d'autre qu'une quête de soi. Son voyage est lu au travers du prisme de convictions et de son égocentrisme. Il est supérieur, et n'en fait pas mystère.
      Vous avez sûrement déjà croisé ce personnage au moins une fois dans votre vie, à un repas ou ailleurs: il a tout vu, il a tout fait, il a réponse à tout et la plume féroce d'Eric Chevillard nous le dépeint ici tout entier.
      C'est un roman à la fois drôle et juste, à lire et à relire sans modération.