André Renard. Figure syndicale et combattant wallon
Marcel Bartholomi

André Renard (1911-1962) est un des personnages qui ont largement marqué le syndicalisme socialiste en Belgique. Comme leader des métallurgistes liégeois, il était la figure de proue d’un courant radical de gauche au sein de la FGTB qui prôna des réformes de structure économiques et l’instauration du fédéralisme. Dans la mémoire collective, il est surtout connu comme le leader charismatique de la grève de 1960-61 et comme défenseur d’une plus grande autonomie pour la Wallonie. En 2005, Pierre Tilly a consacré une biographie monumentale à ce personnage exceptionnel. Le livre de Marcel Bartholomi, André Renard, Figure syndicale et combattant wallon, est d’un autre ordre. Le livre suit les grandes lignes de la vie syndicale d’André Renard, mais il n’y a pas vraiment une approche scientifique. En tant qu’ancien co-président de la Fédération syndicale des Métallurgistes de Liège-Luxembourg, Bartholomi voue une admiration sans bornes au personnage de Renard et l’hagiographie n’est parfois pas loin. Sur le plan du contenu, le livre n’apporte pas grand-chose. L’auteur n’a pas fait une recherche originale des sources : il cite abondamment, et parfois intégralement, les articles qu’André Renard a publiés. Il n’est pas toujours évident de savoir où se termine la citation de Renard et où commence le commentaire de Bartholomi. La littérature consultée est également assez limitée : la biographie de Tilly reste la principale et souvent unique référence de l’auteur. L’étude de Rik Hemmerijckx sur Le Mouvement Syndical Unifié et les débuts du renardisme (1986) n’est même pas mentionnée. Il faut également souligner que l’auteur est parfois très tendancieux : ses commentaires sur la collaboration économique des entrepreneurs flamands (p. 384) laissent supposer que les entrepreneurs wallons n’ont pas collaborés. En consultant le livre de John Gillingham (Belgian Business in the Nazi New Order, 1977) on parlerait autrement.

Néanmoins le livre de Bartholomi a une certaine importance car il peut être lu comme une critique de la pratique syndicale contemporaine, qui ne dépasse guère celle du syndicalisme alimentaire. L’auteur se concentre sur la doctrine syndicale d’André Renard telle qu’elle s’est développée à partir des années 1930. L’influence du planisme d’Henri De Man ; les idées sur le contrôle ouvrier et les principes développés dans “Pour la Révolution constructive”, la déclaration de principes du Mouvement Syndical Unifié (MSU) ; les textes des grands congrès de la FGTB de 1954 et 1956 avec leur critique des holdings et du conservatisme industriel sont tous présentés en détail et doivent soutenir un plaidoyer afin de remettre en évidence la dimension économique au sein du programme de la FGTB. Sans en occulter les dérives (affaires Publifin et Nethys), l’auteur préconise une initiative industrielle publique plus offensive et la réactivation du modèle coopératif comme moyen de parvenir au contrôle des travailleurs et à la démocratisation des entreprises. Marcel Bartholomi est lui-même le moteur de la coopérative Socomef qui gère une entreprise de construction métallique à Theux depuis 1990. L’idée renardiste comme moyen de réactiver le syndicalisme contemporain : “Renardisme, relève-toi !”