#390 23 Décembre 2021 12:54:57
Document 1 de François Blais
Je soupçonne l'auteur d'avoir eu autant de plaisir à écrire ce livre que j'en ai eu à le lire. Car le moins qu'on puisse dire c'est qu'il y va à fond de train pour caricaturer les situations, pour lancer des piques énormes sur une certaine approche de la littérature, pour pointer du doigt des incongruences ou absurdités de la vie moderne. Tout cela autour d'un couple - de Tess en fait (la femme) car le gars fidèle à son image stéréotypée de B.S. ne fout presque rien – d'un couple donc qui fantasme d'aller faire une virée aux USA e qui représenterait un exploit car non seulement ils sont complètement fauchés mais ce sont de vrais lézards qui ne réalisent strictement jamais rien. Un plan astucieux pour financer leur chimère servira de toile de fond à cette comédie aux allures de critique sociale aussi virulente qu'agréablement subtile. Les personnages sont dépeints avec finesse, le ton rafraichissant, le récit captivant et sans temps mort. J'ai beaucoup aimé !
Mauvaises nouvelles de Donald Westlake
Il y a un bail que la série Dortmunder me faisant de l'œil et un peu par hasard cet opus m'est tombé dans les mains, pour mon plus grand plaisir. Le héros, et son groupe de collègues, ont un charme addictif, surtout pour une bande de voleurs. Peut-on vraiment parler de conscience professionnelle dans ce cas? Je suppose que oui d'une certaine façon car ils s'appliquent à bien faire les choses, respectent les codes du milieu, bref sont réglos avec qui l'est aussi. L'incursion dans ce monde particulier est captivante surtout dans le contexte d'une arnaque bien ficelée mais dont le déroulement ne sera pas sans surprises. Et c'est devant ces écueils que l'ingéniosité et la capacité d'adaptation du voleur et de son groupe se révèleront. Une intrigue bien montée, des rebondissements à profusion, des personnages colorés et parfois assez drôles, un ton léger malgré tout font de cette histoire un régal qui m'incite à entreprendre éventuellement l'intégrale de la série.
225 milligrammes de moi de Marie Sissi Labrèche
J'avais bien aimé “Borderline” de la même auteure, de même que le film éponyme qui en avait partiellement été tiré. Force est de constater qu'une vingtaine d'année plus tard la vie de son héroïne, aux connotations autobiographiques évidentes, n'est toujours pas facile malgré certains succès indéniables. Toujours rongée par de l'anxiété maladive, constamment en chicane avec mère et grand-mère, elles-mêmes atteintes de maladie mentales sévères, en proie après la mort de la première à une dépression majeure, elle avertit en prologue “ je gobe 225 milligrammes d'Effexor par jour. Ainsi j'arrive à la tenir en laisse, la fille déglinguée. Du moins, un peu.” Pourtant elle aura réussi à écrire des romans et de la littérature pour enfants, à co-produire un film et en assumer partiellement la promotion, avoir une relation relativement stable, enfanter et s'occuper décemment de son fils. Tout cela avec une tempête dans la tête et du goudron dans le cœur quand ce n'est pas une boule à l'estomac. Le témoignages de problèmes de santé mentale, même romancés, m'ont toujours intéressé non par voyeurisme mais parce que je trouve hallucinant tout ce que ces personnes peuvent endurer d'étrange et les trésors d'ingéniosité qu'elles doivent déployer pour survivre. Ce court roman, très bien écrit, illustre parfaitement cela.