#814 06 Octobre 2024 11:50:14
La griffe du chien de Don Winslow
Pour qui s’intéresse le moindrement à la guerre contre la drogue menée par les États-Unis, ce livre est un incontournable. Il s’agit d’un roman, mais tellement documenté, collant souvent à une vérité que les politiciens, corrompus ou pas, voudraient bien garder secrète. Winslow insuffle une dose massive de réalisme dans ce thriller de grande envergure où politiciens, trafiquants, policiers et putes se livrent à un ballet d’une rare violence, qui pour s’enrichir, qui pour se venger, qui pour éradiquer ce fléau, qui juste pour survivre.
Au long de ces huit cents pages, il y a une foule de personnages, autant du côté des cartels que des politiciens ou des forces de l’ordre, mais c’est relativement facile à suivre, car les caractères sont bien campés et l’auteur entrecroise les intrigues sans qu’on s’y perde pour autant. Au fil des pages, le lecteur s’imprègne dans ce milieu implacable où la moindre erreur devient fatale, découvre peu à peu que sous des dehors vertueux, cette lutte à la drogue sert des desseins moins glorieux et que le nombre de victimes collatérales ne semble pas préoccuper personne. Plusieurs protagonistes sont fascinants, à défaut de devenir attachants, leur cruauté empêchant toute sympathie à leur égard. La longueur de ce roman ne devrait pas vous rebuter, vous ne verrez pas le temps passer!
Les cerfs-volants de Romain Gary
C’est un tour de force qu’a réussi l’auteur à nous faire traverser la deuxième guerre mondiale de façon si sereine et originale tout en pointant les horreurs de celle-ci et les faits d’armes de la Résistance. On est loin ici des tueries en série, des exploits militaires ou du mythe des héros guerriers. Au contraire, tout est en subtilités et allusions et, surtout, l’approche est très originale. Par exemple l’obstination de Duprat à maintenir ouvert le Clos Joli malgré vents et marées, au risque de passer pour un collaborateur, oblige le lecteur à réfléchir à cette position tout en constituant en soi une jolie histoire. Quant au fil principal du récit, l’amour de Ludo pour Lila, en plus de prendre différentes formes, du réel au rêvé, du platonique au sexuel, il reste en arrière-plan même lorsque les protagonistes sont à des milles de distance, occupés qu’ils soient à survivre. Une relation particulière, charmante, qui confère au bouquin une aura un peu magique.
Au-delà du récit, il y a une foule de sujets abordés ici : fidélité, trahison, pardon, résilience, etc. Les cerfs-volants en eux-mêmes occupent une place importante et significative dans l’histoire, au point quasiment d’en devenir un personnage. Lila, complexe à soi, devient de plus en plus sympathique au fil des pages, comme la plupart des autres acteurs d’ailleurs. Et comment oublier la réservée sagesse d’Ambroise...Bref ce roman m’a comblé par l’originalité de la trame, ses personnages attachants et la fluidité de l’écriture.