[Americanah - Mai 2022] - Parlons du roman

  • Julie27

    Administratrice

    En ligne

    #1 28 Mai 2022 10:31:05

    Bonjour,

    ► Dans ce sujet, vous pouvez discuter de vos impressions sur le livre Americanah, de Chimamanda Ngozi Adichie.

    Des pistes pour donner votre avis (si besoin) :
    (ce sont juste quelques pistes de réflexion, vous n'êtes pas obligé·e·s d'y répondre - et évidemment pas de répondre à tout - et n'hésitez pas à aller plus loin :))

    → Qu'avez-vous pensé des personnages? D'Ifemelu et d'Obinze? Mais aussi des personnages rencontrés au fil de leurs expériences?
    Avez-vous aimé leurs interactions et leurs évolutions?

    → Qu'avez-vous pensé de l'intrigue? Vous a-t-elle embarqué·e / touché·e?
    Et de son évolution?

    → Qu'avez-vous pensé du rythme et du style? De la narration?

    → Qu'avez-vous pensé du décor?
    Avez-vous trouvé ça bien rendu et immersif? Et ce que vous avez aperçu de la culture nigériane?

    → Et la façon de traiter les différentes thématiques ? (racisme, préjugés, intégration, identité, ...)
    Avez-vous été touché·e? Vous ont-elles fait réfléchir?

    → De façon globale, avez-vous aimé ce livre? Ou qu'est-ce qui vous a plu / déplu?
    Le recommanderiez-vous?


    N'hésitez pas à donner votre avis, mais aussi à réagir à ceux des autres participant·e·s et à leur poser des questions !
    Le but du Book Club est d'avoir une discussion interactive :)

    Attention aux spoilers ! Si vous souhaitez révéler un aspect important, merci d'utiliser les balises suivantes :

    Code:

    [spoiler]Le texte à cacher[/spoiler]

    Merci pour celles et ceux qui n'auraient pas encore fini ce livre ;)

  • gnout

    Néophyte de la lecture

    Hors ligne

    #2 28 Mai 2022 11:59:25

    Bonjour les gens,
    Je vais avoir beaucoup de mal à parler d’Americanah, mais je me lance quand même.

    J’ai un avis un peu étrange sur ce livre… Quand mon chéri m’a posé la question : « Il est bien ton livre ? », j’ai répondu : « Il est bien mais il est chiant. ». J’ai mis une éternité à le terminé. Je l’ai trouvé long, je pense que ça doit être lié à l’écriture. Pourtant l’histoire et le propos sont très intéressants, et c’est ce qui m’a fait tenir jusqu’au bout.

    J’ai l’impression d’avoir abordé cette lecture sous un angle inhabituel. J’ai aimé les personnages d’Ifemelu et Obinze, mais j’ai le sentiment qu’ils ne sont pas les personnages principaux de l’histoire. Le personnage principal est plus abstrait, j’aurais tendance à dire que c’est la culture Nigériane, à moins que ça ne soit le sentiment de se sentir chez soi, ou le fait d’être noir, ou tout ça à la fois (c’est le propos du livre en fait).

    J’ai vécu ce livre avec mes tripes, comme un choc des cultures. Je n’aime déjà pas beaucoup les US, là je peux dire que je les ai détestés. On a un petit aperçu de comment ça se passe aussi au UK. La différence principale se trouve dans la hiérarchisation « raciale » beaucoup plus présente aux US où les communautés ne se mélangent pas pour ainsi dire.
    On se rend compte que ce n’est parfait nulle part mais qu’il peut y avoir malgré tout un endroit où on se sent chez soi.

    De façon globale c’est une lecture qui ne m’a pas laissée indifférente.
  • ellalecrivain

    Explorateur de librairies

    Hors ligne

    #3 28 Mai 2022 13:28:27

    gnout a écrit

    Bonjour les gens,
    Je vais avoir beaucoup de mal à parler d’Americanah, mais je me lance quand même.

    J’ai un avis un peu étrange sur ce livre… Quand mon chéri m’a posé la question : « Il est bien ton livre ? », j’ai répondu : « Il est bien mais il est chiant. ». J’ai mis une éternité à le terminé. Je l’ai trouvé long, je pense que ça doit être lié à l’écriture. Pourtant l’histoire et le propos sont très intéressants, et c’est ce qui m’a fait tenir jusqu’au bout.

    J’ai l’impression d’avoir abordé cette lecture sous un angle inhabituel. J’ai aimé les personnages d’Ifemelu et Obinze, mais j’ai le sentiment qu’ils ne sont pas les personnages principaux de l’histoire. Le personnage principal est plus abstrait, j’aurais tendance à dire que c’est la culture Nigériane, à moins que ça ne soit le sentiment de se sentir chez soi, ou le fait d’être noir, ou tout ça à la fois (c’est le propos du livre en fait).

    J’ai vécu ce livre avec mes tripes, comme un choc des cultures. Je n’aime déjà pas beaucoup les US, là je peux dire que je les ai détestés. On a un petit aperçu de comment ça se passe aussi au UK. La différence principale se trouve dans la hiérarchisation « raciale » beaucoup plus présente aux US où les communautés ne se mélangent pas pour ainsi dire.
    On se rend compte que ce n’est parfait nulle part mais qu’il peut y avoir malgré tout un endroit où on se sent chez soi.

    De façon globale c’est une lecture qui ne m’a pas laissée indifférente.


    Hello ! Je partage ton avis sur la longueur du texte. Je l'ai trouvé trop long. Il y avait trop de péripéties à mon goût. Les nombreux sujets évoqués sont vastes et l’auteur avait visiblement beaucoup de choses à dire.

    Je vous partage mon avis que j'avais publié il y a quelques années sur mon blog

    Ouvrir un livre et se voir, ouvrir un livre et retrouver le connu…
    J'ai pris plaisir à entrer dans ce livre parce que j'ai été étudiante dans un pays qui n'était pas le mien. J'ai débarqué dans une civilisation différente de la mienne et il m'a fallu m’adapter, m’intégrer.
    Americanah montre comment il peut être tentant de vouloir être une autre personne quand notre singularité dérange, combien rester soi est une lutte, comment notre terre d’intégration peut changer notre mode de vie, notre mentalité et même changer notre regard sur notre terre d’origine quand nous rentrons au bercail.
    Americanah montre comment les contraintes de l’immigration peuvent nous pousser à faire n’importe quoi.
    J’ai aimé Americanah pour sa critique et sa réflexion profonde et puissante sur des clichés portant sur la race.
    Americanah évoque également l'amour de soi, l'amour pour les cheveux crépus. Je suis moi-même revenue au "nappy hair" il y a quelques années. Les cheveux sont difficiles à coiffer mais on les protège de tous les produits chimiques.

    Que dire de ces multiples personnages qui en mêlant leurs vécus forment une belle charpente ?

    J’ai beaucoup admiré Obinze pour sa candeur, sa droiture de cœur ; il m’a attendrie, m’a fait rêver.
    J’ai beaucoup aimé Curt pour son caractère idéaliste et lisse : j’entre dans ta vie et je la transforme, je la peins d’un blanc pur.
    J’ai apprécié Ifemelu pour sa franchise, sa fraîcheur d’esprit, son côté pragmatique.

  • Grominou

    Modératrice

    Hors ligne

    #4 28 Mai 2022 20:57:31

    Coucou les aminches, je devrais finir le roman d'ici ce soir, je reviens donc soit ce soir tard ou demain!;)
  • domi_troizarsouilles

    Enfileur de mots

    Hors ligne

    #5 28 Mai 2022 22:53:25

    Hello,

    Je n'osais pas trop commencer à participer à ce BC, alors que j'ai fini le livre il y a 2-3 jours, et que j'ai écrit mon commentaire entre-temps (mais pas encore publié, enfin si, mais sur Babelio uniquement, tandis que je suis encore très en retard sur mon suivi...).

    Je vous rejoins gnout et ellalecrivain, sur le fait que ce livre est très dense. En revanche, je ne lui ai pas trouvé de longueurs!
    Certes, oui, il est long: près de 700 pages, même quand on aime bien les briques, ce n'est pas rien quand même! mais cette "longueur" ne m'a jamais paru ennuyante, ou à survoler, comme c'est généralement le cas avec des longueurs qu'on voudrait voir supprimées d'un livre - si vous voyez la différence?

    Merci aussi pour ton témoignage indirect ellalecrivain... :pink:

    Bref, je ne vais pas suivre le canevas proposé par Julie, car j'ai écrit mon commentaire de façon presque spontanée (je l'ai relu après hein ;) ) et je crois qu'il couvre tous les points abordés,  mais peut-être pas de façon aussi structurée par contre. Je vous laisse voir...


    Ce livre a été choisi pour le book club (sur Livraddict) du dernier week-end de mai, sur le thème « un.e auteur.e africain.e », parmi plusieurs autres propositions très intéressantes. Je ne me rappelle plus si c'était mon premier choix, avec un thème si vaste en plus ! et le livre n'était même pas dans ma (pourtant bien longue) PAL… mais j'ai quand même craqué !
    Et ce n'est pas (du tout) un regret !

    Il est difficile de résumer ce livre très dense ; ce n'est même pas un risque de trop dévoiler, car il se passe tant de choses ! sans qu'il y ait pour autant une intrigue ultra-prenante, on est plutôt dans une (longue) « tranche de vie » - et c'est narré d'une telle façon qu'on croirait par moments que l'autrice raconte sa propre expérience, à travers son héroïne principale. On rencontre ainsi la jeune Ifemelu. Issue d'une famille d'une classe moyenne éduquée mais peu aisée, surtout après la perte d'emploi de son père, elle poursuit de études comme tous les jeunes de son âge, rejoint une université de son choix, mais peu à peu ouvre aussi les yeux sur les réalités de son pays (le Nigéria, faut-il le préciser ?) : un pays où le pouvoir militaire ne paie pas ses enseignants, où le népotisme règne au su et au vu de tous, etc. Dans ces conditions, fatigués de passer plus de temps à faire grève qu'à pouvoir suivre des cours de qualité, de nombreux jeunes gens rêvent de partir à l'étranger, même sans raison économique, même sans guerre, « pour avoir le choix » de leur propre vie – et, en top du classement des pays de rêve, les États-Unis !

    Avec un brin de chance, Ifemelu obtient le visa tant convoité, ainsi qu'une bourse partielle pour aller étudier dans ce pays rêvé. Mais, une fois arrivée sur place, elle déchante : pour la première fois de sa vie, elle « découvre » qu'elle est Noire et que ce n'est pas un avantage – du tout ; qu'elle est une femme, trop jolie pour trouver un boulot simple qui lui permettrait de compléter sa bourse. Peu à peu pourtant, elle va traverser les difficultés et affronter son destin, qui est peut-être bien au Nigéria quand même… et se (re)trouver elle-même, en assumant totalement son africanité.

    Mais tout ce livre est aussi une immense histoire d'amour, entre Ifemelu et son amour de jeunesse Obinze, fils d'universitaire, mais dont le chemin sera bien différent. S'étant vu quant à lui refuser un visa pour les États-Unis (qui rejettent alors tous les hommes un peu trop basanés, potentiels terroristes !), il se retrouve à Londres, sans papiers, marginal, n'ayant accès qu'à des emplois manuels grâce à magouille et compagnie… Expulsé sans ménagements, il se construit une nouvelle vie au Nigéria, sans jamais pouvoir oublier Ifemelu…
    Évidemment, raconté ainsi, on croirait presque à une mauvaise romance, mais c'est bien plus que ça ! Certains moments touchent certes à une narration de romance classique ; mais la plupart du temps, leur histoire est « juste » sous-jacente, comme un leitmotiv dont l'importance est louvoyante, mais qu'on n'oublie jamais tout à fait, peut-être aussi parce que nos deux protagonistes sont présentés de façon tellement réaliste et proches de nous, qu'ils en deviennent profondément attachants.

    Outre cette histoire d'amour omniprésente même quand elle est en sourdine, l'autrice aborde tout un tas de thèmes potentiellement polémiques dans ce livre : le racisme (ordinaire, et ses particularités américaines), le sexisme (aggravé ici par la couleur de sa peau, mais on a aussi un exemple d'un couple bien blanc où tout n'est pas rose…), l'immigration en général, la vie en Afrique et en particulier dans son Nigéria qu'elle n'hésite pas à critiquer mais qu'elle chérit malgré tout, l'immense espoir qu'a représenté l'élection d'Obama pour tant et tant de gens – parmi bien d'autres sujets abordés. Elle secoue véritablement le lecteur, qui se trouve ainsi confronté à ses propres pensées, à ses convictions, à ses espoirs ou à ses déceptions.

    Ses doléances sur la situation des Noirs aux États-Unis sont dures, et on se demande comment c'est encore possible en ce XXIe siècle, parfois même on a envie de dire qu'elle exagère, et pourtant on sait que c'est (hélas) réaliste et réel, quand certains de ses exemples bien concrets nous éclatent en plein visage. Tout à coup on est presque heureux de ne pas être américain… même si l'Europe n'est pas forcément plus exemplaire ! La scène de l'expulsion d'Obinze d'Angleterre, par exemple, très réaliste elle aussi, est particulièrement dérangeante, et on se sent mal à l'aise… même si on se disait au chapitre précédent que le système « magouille et compagnie » pour avoir du boulot même sans papiers, ça ne pouvait pas marcher, et de se demander pourquoi il n'a pas plutôt exploré la voie légale ? (l'autrice restant assez évasive sur ce point)
    Et on a beau se dire que l'Angleterre, ce n'est plus tout à fait l'Europe, depuis le Brexit – dont on ne parlait pas encore au moment de la parution de ce livre, cela dit – j'ai quand même mal à mon Europe, quand je me rappelle ces images que l'on a pu voir notamment au Journal télévisé, il y a si peu de temps.

    Je revois ainsi le « Petit-Château », à Bruxelles, passage obligé pour tous les immigrés, car c'est là que peuvent s'enregistrer les sans-papiers avec tout leur espoir d'une vie meilleure. Chaque jour, des files de gens (femmes, hommes, enfants) de toutes les couleurs du monde stationnent dans l'attente d'être reçus. Et voilà : du jour au lendemain, une nouvelle file a été créée juste en face de la « traditionnelle » ; une file plus rapide, plus efficace, garantie d'office d'un accueil et de papiers certes temporaires, mais des papiers quand même… C'est une file strictement réservée aux Ukrainiens. Comme si les victimes de cette guerre-là méritaient plus d'attention que tous les autres… Ah mais oui ! regardez-les : ils sont caucasiens et/ou chrétiens et/ou blonds aux yeux bleus… et ils se battent contre le grand méchant Poutine.
    Oh, bien sûr, c'est une chance, et sans doute même une nécessité pour tous « ces gens-là », qui ont besoin de protection urgente : il fallait faire quelque chose, je ne discute pas cela une seule seconde !… Mais pourquoi eux (comme par hasard bien Blancs) avant tous les autres ? Même l'été dernier, lorsque la Belgique, en coordination avec d'autres pays de l'UE, a exfiltré ses propres employés (et ceux de l'UE) nationaux d'Afghanistan, car ils auraient été considérés comme trop occidentalisés et se sont ainsi trouvés en danger de mort dès la prise de pouvoir par les Talibans ; même ces Afghans-là n'ont pas bénéficié du même niveau de protection, d'accueil, de bienvenue tout simplement, quand ils sont arrivés devant ce même « Petit-Château »…

    Bref, j'en ai déjà trop dit, alors que je ne souhaite pas entrer dans un quelconque débat polémique après la lecture de « Americanah » - on est déjà bien assez bouleversé soi-même, un commentaire de livre n'est pas le lieu pour débattre de ces problèmes historiques graves… et malheureusement toujours d'actualité. S'il faut se confronter à l'avis des autres, je le ferai uniquement dans le cadre du book club, et avec des pincettes - pas parce que c'est le BC et que je me méfierais des autres lecteurs, ce serait le comble ! mais parce que ce sont des sujets extrêmement sensibles, qui peuvent provoquer des prises de position très tranchées (ou au contraire exagérément ouvertes, sans discernement), surtout en ces temps de repli identitaire que l'on observe un peu partout en Occident…
    Mais je crois avoir illustré ainsi, spontanément car j'ai laissé mes doigts écrire tout seuls, à quel point ce livre remue au plus profond, même si on n'est pas directement concerné !

    Avec ça, le langage est généralement de (très) bon niveau, on est à mi-chemin entre du courant (notamment dans les quelques dialogues, qui paraissent toujours tout à fait naturels) et du soutenu sans fausse honte, très maîtrisé.
    Je dois aussi souligner à quel point la traduction semble bien travaillée. Certes, je n'ai pas lu ce livre dans l'original, pas même un extrait. Mais pour ne citer qu'un exemple : l'autrice fait référence plusieurs fois à son accent étranger, elle qui parle pourtant aussi anglais au quotidien dans son pays, mais un anglais pas toujours compréhensible pour les Américains (et vice-versa). Or, sans jamais tomber dans le piège d'une quelconque exagération façon « imitation d'un accent » (ce qui me hérisse toujours un peu), la traductrice a réussi à faire passer cette dichotomie entre les deux (et même plusieurs autres) façons de parler une même langue – sans oublier d'autres particularités, les Nigérians parlant entre eux l'une ou l'autre langue locale (dont l'igbo, l'autre langue d'Ifemelu), tandis que les Noirs américains notamment parleraient un langage qui leur est propre, « l'ebonics », que ni les Noirs africains, et encore moins les Blancs américains, ne parviennent à comprendre réellement… Tout cela fascine la traductrice en moi, or c'est exposé (et traduit) avec un certain art didactique, que j'apprécie beaucoup.

    Mon seul regret, finalement, est que les diverses allusions au pouvoir politique nigérian en place au fil des ans ne soit pas explicité – que ce soit en note de bas de page, ou plus intelligemment, dans une postface par exemple, c'est mon dada dès que je trouve un livre suffisamment « exotique » et que je voudrais en savoir plus, mais que le livre même ne me le permet pas. Certes, on trouve toutes les informations nécessaires (et facilement) sur Internet notamment, mais je continue de penser que c'est aussi le rôle du livre même de donner au moins quelques éléments, surtout quand il s'agit d'un roman comme celui-ci ! mais bon, c'est une remarque un peu « en passant », car cette absence d'un complément d'informations ne peut être imputée ni à l'autrice, ni à la traductrice.

    Bref, c'est un livre aussi dense que bouleversant, qui aborde de nombreux sujets potentiellement polémiques, comme le racisme (ordinaire, avec ses particularités américaines), l'immigration, le sexisme aussi, ou encore la vie dans un pays africain que l'autrice chérit tout en soulignant ses nombreuses failles, etc. Mais c'est aussi une immense histoire d'amour entre deux protagonistes attachants, et tout cela touche au plus profond, dans une langue de très bon niveau, et en plus très bien traduite.
  • atick

    Dompteur de pages

    Hors ligne

    #6 29 Mai 2022 02:15:04

    Je viens  tout juste de le terminer!

    Pour moi ça été une belle découverte!  J'ai beaucoup aimé ce roman et son sujet. Je trouve que c'était un récit qui démontrait bien tout le racisme, mais surtout tout ce qui est le racisme systémique. 

    Spoiler (Cliquez pour afficher)

    La chronique où elle explique qu'il est pratique d'avoir un ami blanc «qui sait» (je ne me rappelle pas exactement la formulation), ça ma fait sourire parce que je me disais qu'après la lecture de ce roman, on avait le potentiel de devenir cet ami blanc comme l'autrice donne plusieurs exemples qui peuvent paraître anodin de point de vue externe.



    J'ai bien aimé aussi les segments qui se passent au Nigeria, c'est un pays que je ne connais pas du toute, et voir comment les gens peuvent y vivre au quotidien. C'est exactement pour ça que j'aime lire des livres d'auteurs de différentes nationalités.

    Pour les derniers chapitres

    Spoiler (Cliquez pour afficher)

    j'avoue que je me suis questionner sur la pertinence de la tentative de suiide de Dyke. C'était tellement couvert de manière superficiel (en un seul chapitre) alors que c'est un évènement majeur. Je n'ai pas trop compris ce que ça apportait.

    Autrement, j'avoue que les deux derniers chapitres qui portent plus sur la romance m'ont moins emballé, mais ça c'est moi qui n'aime pas beaucoup des romances de manière générale. Je sais que leur lien était présent tout au long du roman et que c'était la fin prévisible, mais comparativement au reste du récit qui était plus engagé, j'ai un peu décroché.



    J'aurais été curieuse de le lire en VO. Certains passages de la traduction m'on fait rire (dire de quelqu'un que c'est un connard fait très américain), mais sans me donner l'impression que ça dénaturait le texte.

    Bref, bien hâte de pouvoir en discuter un peu plus avec vous1
  • Grominou

    Modératrice

    Hors ligne

    #7 29 Mai 2022 06:13:00

    Je viens de le finir moi aussi!  Voici quelques impressions à chaud, ensuite je vais lire vos commentaires.

    Les personnages: Je les ai trouvés bien développés, tant Obinze que Ifemelu, mais aussi plusieurs des personnages secondaire.  J'avais toutefois tendance à mélanger les amis africains, ceux qu'on voit d'abord durant l'enfance et qu'ensuite on revoit à la fin, mais je pense que c'est surtout à cause des noms aux consonances inhabituelles!  J'ai particulièrement aimé Ifemelu, sa solidité mais aussi sa fragilité, et surtout sa franchise et son franc-parler!

    L'intrigue en elle-même ne m'a pas tant touchée, sauf quelques passages (bizarrement, j'ai eu les larmes aux yeux quand le groupe d'amis voient Obama gagner les élections, ça m'a rappelé combien j'avais moi-même été émue en regardant cette soirée d'élection à la télé, alors qu'est-ce que cela devait être pour des Noirs!).  J'ai surtout été passionnée par les idées développées: le choc des cultures, qui est double ici, ce que j'ai trouvé très original et bien décrit -- quand Ifemelu va étudier/travailler aux États-Unis, puis lorsqu'elle revient au Nigeria...  et bien sûr tout ce qui est dit sur les notions de race et de racisme.  J'ai été frappée par le passage où elle dit qu'elle ne s'est jamais sentie noire avant d'arriver aux É-U!  Les articles de blogues étaient vraiment intéressants.

    Les nombreux allers-retours dans le temps demandent une certaine concentration.  Heureusement qu'il était souvent question du petit Dike, cela permettait de voir combien de temps s'était écoulé durant le séjour aux É-U.

    Le décor: assez immersif, mais en même temps on sent bien que l'idée n'est pas de faire un roman pittoresque sur la culture nigériane!

    J'ai eu un peu de difficulté à m'adapter à la plume de l'auteure (je l'ai lu en VO), il y avait souvent des tournures de phrase un peu inattendues, tant dans la narration que dans les dialogues...  Je me demande si c'est typique de la littérature nigériane ou si c'est propre à l'auteure même.

    Globalement j'ai beaucoup aimé ce roman et je le recommanderais sans hésiter, en précisant toutefois qu'il ne faut pas le lire dans une période où l'on manque de concentration, et ne pas s'attendre à une petite lecture légère et doudou.
  • Cafrine

    Chercheur de mots

    Hors ligne

    #8 29 Mai 2022 06:49:11

    C’est ma 1ère participation au BC,  j’en appelle donc à votre indulgence de « coller » beaucoup au livre et peut être d être maladroite. J’espère en tout cas n’offenser personne dans mes écrits. (Merci de me signaler également les spoilers si certains ont échappé de votre point de vue à ma vigilance !)

    → Les personnages :

    En refermant le livre, je partais sur une distinction/opposition Femme/Homme, mais finalement, je poserai la personnalité  contrastée des personnages comme point commun.

    * Ifemelu prend en main son existence aléas ou pas. Elle apparaît comme celle partie à l’étranger, qui a réussi à s’en sortir et qui donc de retour au pays bénéficie d’une compétence assurée.   

    Spoiler (Cliquez pour afficher)

    Pourtant de façon contrastée, cela se fait au prix d’une déchéance de soi (le coach de tennis qui provoquera la dégradation de son état psychologique, de sa situation sociale (la fille assurant les inscriptions au bureau international des étudiants, la précarité financière, …), de son identité ( ôter ses tresses pour obtenir un job, se défriser les cheveux, … mais aussi conformisme de la pensée).


    * Obinze m’a dérouté aussi car

    Spoiler (Cliquez pour afficher)

    bien qu’il soit celui qui rêve d’Amérique qui est le plus disposé à la mobilité, bizarrement c’est le personnage qui m’est apparu le moins apte à « tenir debout ». De bout en bout du roman, il y a constamment des femmes (sa mère tout d’abord qui influence beaucoup la vie de son fils (culture, vie sexuelle), puis la fille anglaise Cleotilde pour obtenir des papiers ou encore Kosi, son épouse) qui influent sur son existence. Cela m’a donné pour le coup le sentiment d’un homme dont la complète réussite ne peut aboutir sans  l’intervention féminine alors qu’il le semble cocher toutes les cases du mec parfait ! (Milieu social, connaissances, réussite professionnelle au Nigeria) . Pour faire court, je n’ai pas su où placer le curseur entre la difficulté plus grande pour l’Homme noir de se frayer un chemin et sa dépendance des femmes qui semble l’inscrire dans une certaine passivité. Ifemelu le traite a un moment de « sale dégonflé ! » (p. 668) comme si il abandonnait la lutte.



    Les autres personnages fonctionnent sur ce même contraste :
    * Tante Uju

    Spoiler (Cliquez pour afficher)

    qui arrive à s’en sortir professionnellement mais qui s’enlise dans des relations vouées à l’échec (le Général qui en cadeau lui offre la joie de devoir fuir le pays (!) ou en encore Bartholomew (alors lui…)

    * Curt et Blaine marquent eux aussi le récit de mon point de vue.

    Spoiler (Cliquez pour afficher)

    Chacun est original, mais Ifemelu souligne encore une fois less raisons de l’incompatibilité : « Le problème avec les relations interculturelles c’est qu’on passe un temps fou à se justifier. (…) Je me demandais même parfois si nous aurions eu quelque chose à nous dire si nous étions originaires du même endroit ». (p.656).
    Par ailleurs, ces relations mettent à mon sens le personnage à l’épreuve : s’effacer ou être façonnée et j’ai trouvé cela particulièrement intéressant

    .
    L'intrigue :
    Ma précédente lecture  faisait bien la moitié de ce roman, mais m’avait paru plus longue. Cette fois-ci, tout l’inverse. J’en déduis donc que l’intrigue était prenante. Je n’ai pas particulièrement été gênée par les changements de temps, lieux, personnages ou la densité des propos pour ma part.

    Spoiler (Cliquez pour afficher)

    L’évolution de Ifemelu est intéressante à suivre même si à un moment je me suis dite qu’elle devait avoir trop de critères sur sa liste « Homme idéal », elle y arrivera jamais !


    → Le rythme, le style et la narration :
    Ce roman se lit facilement et j’ai particulièrement apprécié les insertions des articles du blog de Ifemelu dans l’histoire. Petite parenthèse, comme une incursion de la réalité dans la fiction, cette sorte de mise en abîme m’a clairement plu.

    Spoiler (Cliquez pour afficher)

    L’auteur fait de nous des « lecteurs dynamiques » (lisez, mais participez à la réflexion qui sous-tend l’histoire). Je retiens notamment p. 486 « Voyager quand on est noir » et p. 527 «  Comprendre l’Amérique pour le Noir non américain : quelques réflexions à propos de l’ami blanc très spécial » (Attik je rejoins ton point de vue sur cette chronique !). L’analyse concernant les époux Obama était très interessante aussi.

    Les extraits du blog viennent « piquer » votre attention  au fil des pages pour maintenir votre éveil. En tout cas c’est ainsi que je l’ai ressenti et cela donne du rythme au récit. J’ai trouvé cela finement fait ce qui témoigne d’une certaine maitrise de l’écrivaine et de la traductrice (je partage ton avis sur cet aspect Domi ainsi que tes remarques sur les langues locales sans les caricaturer dans le texte).
    Je n’en dirais pas plus sur ce point que je maîtrise peu.

    → Le décor :
    Je ne connais ni le Nigeria, ni les États-Unis, mais j’avoue que c’est moins les lieux qui m’ont marqués que les gens qui y résident. Souvent, transpire de leur personnalité les caractéristiques de leur lieu de résidence, milieu social, mode de vie. Voilà pour moi le décor de ce roman.

    → Les différentes thématiques ? (racisme, préjugés, intégration, identité, ...) :
    « Americanah » aborde des thématiques déjà visitées dans les romans. Son originalité (pour ma part en tout cas) réside dans le profil de celle qui analyse : une « noire non américaine ».

    Spoiler (Cliquez pour afficher)

    Cela donne donc une autre approche différente comme le fait de se sentir « noire », de ne pas être constamment dans le règlement de comptes tel que que je l’ai ressenti pour les afro-américains. Mais aussi, le décalage qui se crée lorsque vous revenez au pays. Je n’ai pas souvent vu ce thème abordé tout comme l’interculturalité. Quant à la place des cheveux dans l’histoire. Certes, c’est vu et revu mais je n‘ose imaginer un silence de l’auteure à ce sujet ! :)


    →  Avez-vous aimé ce livre? Ou qu'est-ce qui vous a plu / déplu?
    Le recommanderiez-vous?
    Oui j’ai bien apprécié cette lecture. J’ai lu que le Nigeria est une société patriarcale pourtant, le monde de Adichie m’est apparu lui comme matriarcal. Les femmes occupent le devant de la scène, agissent pour être maîtresse de leur existence et tenter de le rester malgré les aléas. L’auteure étant féministe ceci explique sans doute cela.
    Je relirai sans doute encore les insertions du blog car cela m’interpelle, me fait sourire, me bouscule. J’ai vraiment trouvé pertinent ce propos impertinent au milieu du récit.
    Pour la petite histoire, ce livre m’a été offert suite à une discussion sur le roman afro-américain. Aujourd’hui, je comprends pourquoi donc j’en ferai autant.

    Dernière modification par Cafrine (29 Mai 2022 06:51:36)

  • Alhweder

    Restaurateur de livres

    Hors ligne

    #9 29 Mai 2022 11:01:30

    Bonjour bonjour,

    je savais que je serais peu disponible ce week end mais je tenais vraiment à participer à ce book club car Americanah m'était conseillé depuis un moment et m'avait même été offert en SWAP. Je fais vite car j'entends mes invités qui se réveillent mais c'est un roman qui effectivement, s'il est dense, est également très riche. Pour moi, il est à la croisée des chemin du roman, du témoignage et de l'essai. Un exercice assez casse-gueule (pardonnez le langage) de manière générale, mais là, je trouve l'équilibre bien maintenu, une fois les premières 100 pages passées, histoire de comprendre comment le livre va fonctionner.
    L'histoire d'amour d'Ifemelu et Obinze (deux très beaux prénoms ! Surtout le premier) est un fil rouge qui permet surtout de parler de tout autre chose. Je me suis plongée avec délectation dans le Niger de l'autrice. J'aime découvrir de nouvelles cultures et celles du continent africain ont encore pour moi une aura de mystère qui me fascine. Ensuite, alors que le sujet de la race est quelque chose dont je commence à être bien documentée, il est toujours différent de savoir et de ressentir quelque chose. En tant qu'européenne blanche, je suis consciente des biais racistes mais je n'en ai jamais expérimenté aucun. La force de ce livre pour moi est qu'il me fait vivre avec Ifemelu. Il m'a permi, très superficiellement bien sûr, et bien protégé dans mon cocon de lectrice, de ressentir un peu ce que vivent les personnes confrontés à ces discrimitations abjectes.
    Au delà de la race, il y a toute la notion de conscience de classe également. Je ne vis pas de bout de chandelles, je n'ai pas de coupures d'électricité d'une semaine, je ne dois pas corrompre l'administration pour obtenir des papiers, je n'ai pas à courir après l'homme qui subviendra à mes dépenses, ... Ce livre montre ça aussi. Le rêve d'ailleurs, que ce soit l'Amérique, le Royaume-Uni, ou la France, de tout un continent prend ses racines bien profondément...

    Vraiment très bonne lecture, merci au BC de m'y avoir pousser !
  • Julie27

    Administratrice

    En ligne

    #10 29 Mai 2022 12:30:55

    Coucou,

    Ma participation sera plus limitée cette fois car je l'ai lu il y a 5 ans et, même en ayant repris mes notes, je ne me souviens pas du détail, même si vos commentaires aident bien.

    Je confirme pour l'aspect assez dense (j'avais mis du temps à entrer dedans et j'avais du mal à m'y remettre, alors que, quand je le lisais, je trouvais ça vraiment bien) et très intéressant.

    Côté personnages, j'avais mis du temps à apprécier Ifem, alors que j'ai bien accroché à Obinze rapidement (malgré quelques points déjà soulevés).

    J'ai globalement bien aimé les passages du blog... sauf qu'à la fin, j'ai trouvé ça un peu redondant.

    Un petit bémol (et je rejoins atick) sur la place de la romance... J'avoue que ça m'avait un peu fait décrocher car ça m'intéressait nettement moins...

    J'ai adoré avoir un aperçu de la culture nigériane, même si ça avait un goût de trop peu =D
    Disons que c'est ce qui m'intéressait énormément en ouvrant le livre, donc, comme Domi notamment, j'aurais aimé en voir un peu plus.

    Si je me souviens moins de l'intrigue et des personnages, par contre les thématiques et réflexions apportées résonnent toujours en moi.

    Alhweder a écrit

    En tant qu'européenne blanche, je suis consciente des biais racistes mais je n'en ai jamais expérimenté aucun.


    J'ai trouvé ce livre intéressant et nécessaire, sur ce point.
    Disons que ça m'a vraiment remuée.
    Des phrases du type "Il n' y a pas de race, que la race humaine", j'en ai peut-être déjà dit.... Du coup dans mes dents "C’est exactement le privilège des Blancs, que vous puissiez faire ce genre de réflexion. La race n’existe pas véritablement pour vous parce qu’elle n’a jamais été une barrière. Les Noirs n’ont pas ce choix."
    J'ai vraiment trouvé l'approche immersive et instructive ! C'est ce qui m'a marquée.

    En tout cas, un livre que j'avais trouvé un peu long, mais marquant !