#172 14 Septembre 2013 17:59:30
Je suis d'accord avec toi sur la dérive de la dystopie aujourd'hui notamment au travers de la YA qui développe plus des thématiques romance/recherche de soi dans un cadre contraignant que de réelles dystopie.
Sur le fait qu'il s'agit de régimes ouvertement autoritaires, je te rejoins aussi : ça ce n'est pas une dystopie, elles sont en générales bien plus subtiles que ça et il suffit de lire 1984 pour voir en quoi. :)
Mon chéri vient de compléter cette pensée en disant qu'une société dystopique doit pouvoir prétendre, en apparence, apporter le bonheur à tous. J'ai donc pondu un exemple qu'il a trouvé bon. Dans beaucoup de YA y'a une grosse partie de la population qui vit dans la pauvreté, la maladie, etc. Or une société dystopique serait plutôt : "merveilleux, on a réussi à faire en sorte qu'il n'y ait plus ni pauvre ni malade" et le héros (qui souvent y croit au début, c'est un bon citoyen) va découvrir qu'en fait on tue discrétos les pauvres et les malades pour garder cette impression de perfection.
Ceci dit, il y a quelques dystopies "à la mode" qui s'en tirent pas trop mal, mais elles restent souvent extrêmement classiques et ont d'autres thématiques of course (et très souvent une romance, plus ou moins bien intégrée).
La dystopie aujourd'hui n'a pas la cote. On est presque dans les prémices d'une vraie dystopie, avec les montées d'extrêmes partout dans le monde en régime démocratique (l'Europe n'est pas épargnée), c'est la crise, la foi en l'avenir est mise à mal, la foi dans les dirigeants n'en parlons pas, à force les gens sont blasés, on est hyper surveillés, la technologie est déjà là partout, etc. Difficile de faire lire aujourd'hui donc des dystopies aux gens. Honnêtement, je crois qu'une bonne dystopie aujourd'hui me foutrait des angoisses comme pas permis ou aurait des allures du présent. D'ailleurs 1984 a gardé sa force et ce n'est pas pour rien.
La YA ne parlant pas souvent d'aspects politique crédibles (notamment quand elle part sur du post apo ou du totalitaire tellement évident qu'il se pavane en rose clignotant), et se focalisant sur l'aventure et les rapports humains, elle réussit à percer alors qu'en adulte on n'en voit quasi plus. La dystopie made in YA n'est qu'un cadre, un prétexte, pas un but en soi. Même si, quand même, pour certains ados ça peut être un bon départ de réflexion, à condition d'approfondir avec d'autres titres (même en jeunesse, si on lit Le Passeur de Lowry par exemple).
Ceci dit, on en trouve encore des "vraies" aujourd'hui même s'il faut chercher et être patient. Zen City de Grégoire Hervier en est un exemple français. Ce n'est pas le roman du siècle mais il montre comment un système ultra automatisé/ultra dépendant de la technologie peut vite dévier et c'est pas mal foutu (en plus d'avoir une narration originale).
Ce qui m'énerve et que tu n'as pas noté, Lycandra, c'est aussi la façon dont les éditeurs surfent sur la vague. Pocket a osé présenter Chroniques de la fin du monde comme une dystopie... Euh, non, pas franchement. Ce n'est pas le coeur du truc. Et je peux le dire sans l'avoir lu. C'est plus de l'apo/post apo dans le traitement, clairement. Un cadre où il est impossible d'atteindre un équilibre, de fait.