[Roman] Dimitri K. - Extrait

 
    • Sanslavect

      Livraddictien débutant

      Hors ligne

      #1 08 Mars 2016 16:56:49

      Bonjour !

      Je profite de ce topic pour partager avec vous un extrait d'un roman que j'ai écrit.

      Je pense qu'il reflète assez bien "l'ambiance" de l'histoire. En ce qui concerne la curiosité qu'il suscite, je vous en laisse seuls juges...

      Si vous avez des remarques, je les entendrai avec plaisir !

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      EXTRAIT - "VILLIAM"


      Spoiler (Cliquez pour afficher)

      « Armes de poings, blanches, grenades ou même véritables armes de guerre. Peu lui importait que ses yeux oscillent ostensiblement entre le mur et Villiam, il ne pouvait s’empêcher de regarder toutes ces machines à tuer qu’il n’avait vues jusqu’alors que dans des films.

      Il avait affaire à de véritables mafieux. Du délire à l’état pur.

      Villiam, lui, valait tout autant le coup d’œil tellement son look tranchait radicalement avec son arsenal. On aurait cru un déguisement improvisé, à voir comme le mélange des genres était fort sur lui. Il avait la peau légèrement bronzée et des dreadlocks mal fagotées lui tombaient sur les épaules. Il était vêtu d’une chemise violet foncé à manches longues, mais ce qui frappait le plus au premier regard, c’était l’immense chapeau duquel il était coiffé et qui maintenait la partie supérieure de son visage dans une constante pénombre. D’un diamètre véritablement excessif, il ressemblait à ceux que les travailleurs des rizières portent en Chine pour se protéger du soleil.

      Le personnage tout entier était une véritable caricature, mais personne n’aurait su dire de quoi.

      Après avoir digéré la vision d’horreur des armes, Dimitri fixa ses yeux dans ceux de son hôte, qui le dévisageaient depuis que la lumière s’était allumée. Le sourire que Villiam arborait n’augurait rien de bon. Celui d’un gamin de dix ans, fixé sur le visage d’un homme qui devait en avoir pas loin de quarante. Ainsi, après quelques dizaines de secondes d’un silence plus que pesant, Dimitri se décida à poser la seule question qui lui venait à l’esprit. Tellement simple et à la fois résumant toutes les interrogations qui jonchaient son esprit :

      —  Vous voulez quoi ?

      Villiam ne répondit pas, comme s’il savourait un moment attendu depuis très longtemps.

      —  Suis-je censé craindre quelque chose ? relança Dimitri.

      Les yeux de Villiam ne clignaient pas et son sourire enfantin restait inflexible. Il s’avança en s’appuyant sur la table, enfonçant encore plus son regard dans celui de Dimitri, puis prit le temps de répondre. Comme s’il réfléchissait et pesait sa prochaine parole avec la plus grande précaution.

      —  Non, finit-il par répondre.

      —  Ah… Parce que vous savez dans ce genre de situation, il est possible de mal comprendre le…

      —  Oui, le coupa Villiam. Je comprends.

      Son accent était indéfinissable pour Dimitri. Pas très éloigné du russe, à la première écoute, il roulait tellement les r que la compréhension de son discours en était largement affectée.

      —  Abraham ! appela soudain Villiam en faisant sursauter Dimitri.

      La porte s’ouvrit aussitôt. Abraham, puisque c’était son nom, s’avança avec un immense narguilé déjà allumé entre les mains. Il le posa sur la table et tendit le tuyau à Villiam. Sans quitter Dimitri des yeux, celui-ci inspira une immense bouffée. En recrachant la fumée par le nez, il ne fit que renforcer l’aspect inquiétant qu’il dégageait. Abraham se planta dans le dos de Dimitri et ne bougea plus. Sa présence restait toutefois palpable pour lui, qui aurait fortement apprécié que le colosse quitte à nouveau la pièce.

      —  Que voulez-vous ? répéta Dimitri en tâchant de contrôler les tremblements dans sa voix.

      —  Ton nom, répondit cette fois Villiam.

      —  Mon nom ?

      —  Donne-moi ton nom.

      Etait-il sérieux ? Cet homme, qui à priori avait ordonné son kidnapping, venait-il réellement de lui demander son nom ?

      —  Je pense que vous connaissez déjà mon nom, monsieur.

      Abraham s’avança aussitôt d’un pas et posa si lourdement ses mains sur les épaules de Dimitri que l’osier de la chaise craqua sous la pression exercée.

      —  Je t’ai donné le mien, donne-moi le tien, dit Villiam sur un ton bien plus insistant.

      —  Dimitri, lâcha-t-il à contrecœur.

      —  Dimitri ?

      —  Dimitri Klaxon.

      —  Dimitri… Klaxon… répéta Villiam en savourant chaque syllabe.

      Comme s’il était temporairement satisfait, Villiam tendit le tuyau du narguilé à Dimitri.

      —  Ah… Euh, non, merci, vraiment je…

      —  Tu n’en veux pas ?

      —  Disons que je ne suis pas sûr, là, dans l’instant, de l’apprécier à sa juste valeur…

      Les mains d’Abraham manquèrent de broyer les épaules de Dimitri. Il parvint, par un effort prodigieux, à arrêter son cri de douleur au bord de ses lèvres.

      —  Tu n’en veux pas ? répéta Villiam avec un immense sourire.

      —  Si.

      La première bouffée lui arracha les poumons, mais il sut trouver en lui le savoir-vivre de ne pas tousser. Villiam sembla même lui donner un petit instant pour reprendre consistance, en tripotant d’un air distrait le charbon qui rougeoyait au sommet de la chicha.

      —  Tu as apprécié ?

      —  Oui… répondit Dimitri d’une voix rauque.

      —  Les larmes qui coulent le long de tes joues disent le contraire… Reprends.

      Sans discuter, Dimitri respira à nouveau. En écoutant le bruit des bulles qui s’agitaient dans le réservoir, Villiam scrutait le visage de Dimitri. Cette fois, celui-ci soutint son regard sans broncher.

      —  Ce sont toujours des circonstances curieuses qui conduisent les hommes à se rencontrer, Dimitri Klaxon.

      En recrachant la fumée, Dimitri ressentit une immense chaleur envahir son corps.

      —  Il est un proverbe qui dit que l’on n’a pas le choix de sa famille, mais que l’on a celui de ses amis, poursuivit Villiam. J’aimerais fortement que tu en sois-un.

      Les paroles de Villiam lui paraissaient maintenant comme provenant du fond d’une caverne.

      —  Un ami ? questionna Dimitri qui entendait maintenant sa propre voix comme émise par quelqu’un d’autre.

      —  Parfaitement, ajouta Villiam dont le sourire s’étirait anormalement.

      Celui-ci se leva et se mit à contourner la table. La pièce tout entière dansait. Dimitri entendit le tuyau tomber sur la table sans pour autant avoir eu la sensation de l’avoir lâché.

      —  Les jours qui vont suivre te paraîtront énigmatiques, ils seront même incontestablement les plus curieux de toute ta vie. Mais tu devras les employer de toute ton âme à cette seule question : veux-tu être mon ami, Dimitri Klaxon ? »

      Dernière modification par Sanslavect (09 Mars 2016 15:14:44)