[ Dion, Cyril] Imago

 
    • CLia

      Néophyte de la lecture

      Hors ligne

      #1 02 Octobre 2017 11:20:56

      Bonjour à tous!

      J'ouvre cette discussion pour vous parler de ma dernière lecture: IMAGO de Cyril Dion

      <image>

      Voici le résumé:

      « Parce que son frère s’apprête à commettre en France l’irréparable, Nadr le pacifiste se lance à sa poursuite, quitte la Palestine, franchit les tunnels, passe en Égypte, débarque à Marseille puis suit la trace de Khalil jusqu’à Paris. Se révolter, s’interposer: deux manières d’affronter le même obstacle, se libérer de tout enfermement, accéder à soi-même, entrer en résilience contre le sentiment d’immobilité, d’incarcération, d’irrémédiable injustice. »

      Mon avis:

      « Imago : désigne le stade final d’un individu  dont le développement se déroule en plusieurs phases (en général œuf, larve et imago). » C’est cette construction fragile et complexe, cette quête d’identité, qui apparaît en filigrane dans le récit des quatre personnages de ce roman, quatre trajectoires de vie qui sont reliées par un lien intime et destructeur.

      Nadr et Khalil sont demi-frères et vivent en Palestine. Nadr est l’aîné, né en France, et revenu en Palestine avec son père alors qu’il n’avait que quelques semaines. Il n’a jamais connu sa mère française. C‘est la mère de Khalil, amour de jeunesse du père des deux garçons qui les a élevés. Si Nadr, enfant, aimait se battre pour défendre son frère chétif, quelques années plus tard c’est tout le contraire. Khalil est attiré par les armes et la violence et Nadr se réfugie dans la lecture de poèmes. Les deux frères sont dorénavant orphelins (père et mère furent tués) et vivent dans un camp.

      Fernando Clerc est marié avec deux enfants, englué dans une routine quotidienne. Fonctionnaire au « Fonds » (le FMI n’est pas nommé), il décide des sommes à verser pour aider les Palestiniens bien installé dans son confortable fauteuil de bureau . Ses certitudes vont être bousculées lorsqu’il devra se rendre en Palestine et voir de visu l’impact que peuvent avoir ses décisions sur la situation politique et le quotidien des Palestiniens.

      Il y aussi Amandine, la soixantaine, mère de trois enfants nés de trois pères différents. Paumée, pas à sa place dans une vie d’apparences, elle a préféré se réfugier dans la forêt ne supportant plus la vacuité du quotidien.

      Ces quatre destinées sont l’expression de la souffrance. Tous ont été amputés d’un être cher,  furent rejetés, et ont dû essayer de se construire malgré ces blessures. Amandine a vu son bébé arracher de ses bras juste après sa naissance, Nadr n’a jamais connu sa mère, Fernando a été rejeté par la sienne qui ne l’aimait pas.

      A travers ce roman, l’auteur éveille les consciences sans pour autant donner de jugement. Peuple d’ici ou d’ailleurs, qui est le coupable ? Qui est la victime ? La question ne se pose pas ainsi,  la guerre est présente partout que ce soit au Moyen-Orient ou en Occident avec un même point d’orgue : la vengeance. Venger son pays, venger son peuple; le leitmotiv est toujours le même.

      Imago est réaliste, traite de l’actualité avec des personnages sombres et complexes. Ce roman questionne et montre des personnes qui cherchent à se libérer de leurs trajectoires. La fin du récit est d’ailleurs significative, le triangle fraternel s’achève; la mort du martyr et de sa victime entraînent la libération et le renouveau pour le frère rescapé.

      Je conseille ?

      J’ai eu du mal à entrer dans l’histoire durant la première partie du roman. Je ne voyais pas du tout quel pouvait être le lien entre ces personnages. Une fois le lien établi, les pièces du puzzle s’imbriquent: l’évolution et la complexité des protagonistes sont très intéressantes.  C’est un roman déroutant, qui fait réfléchir et qui agit comme un véritable « coup de poing ». A découvrir!
    • theunamedbookshelf

      Livraddictien débutant

      Hors ligne

      #2 14 Novembre 2017 16:45:04

      J'ai beaucoup aimé ce roman également, j'étais déjà une grande fan de Cyril Dion et de toutes les belles choses qu'il fait dans la vie réelle - son roman ne m'a pas déçue.

      Voici mon avis, que j'ai posté sur mon blog : lien supprimé

      Deux frères palestiniens : l’un habité par son désir de vengeance, l’autre seulement désespéré devant la souffrance infligée à son peuple. Un petit fonctionnaire du Fonds (Monétaire International), fier de sauver des vies depuis son bureau gris. Une femme, recluse au milieu de la forêt, n’aspirant qu’à un peu de calme. Quatre personnages qui se débattent avec ce que la vie leur infligent, sans arriver à retourner la situation.
      Nadr poursuit son frère Khalil, décidé à se sacrifier dans un attentat à Paris. Fernando Clerc est pourchassé par un dossier palestinien, lui qui avait toujours refusé le moindre contact avec le Moyen-Orient. Amanda retrace le fil de son histoire, les naissances successives de ses enfants, nés de pères différents, pas forcément tous choyés de la même manière.
      Imago n’est pas un roman sur le terrorisme, c’est un roman sur l’humanité. Sur la stupidité profonde des hommes, dans leur système militaire qui prône le « œil pour œil, dent pour dent », dans leur poursuite absurde de la consommation, dans leur incapacité à apprécier ce qui est. Cyril Dion nous montre l’absurdité du monde, l’incohérence des institutions toutes puissantes, et l’escalade inévitable de la violence. Mais aussi, nous retrouvons dans ce livre quelques personnages à prendre en exemple : Ali, l’Egyptien désintéressé qui aide Nadr à passer en France, les Bédouins accueillant qui sauvent Fernando dans le désert notamment. Des exemples pour montrer que le monde n’a pas à être tel qu’il est, et qu’il suffit de quelques uns pour changer les choses – on retrouve ici la philosophie du Mouvement Colibris, dont Cyril Dion est le cofondateur.
      J’ai personnellement été très touchée par ce récit, autant pour l’histoire que pour les réflexions propres aux personnages, dans lesquelles je me suis énormément retrouvée. Cyril Dion met des mots sur des sentiments, des ressentis que j’ai depuis longtemps et que je n’ai pas su exprimer avec autant d’exactitude. C’est un livre qui amène à s’interroger sur notre façon de concevoir notre vie, sur notre façon de nous adapter à la société (plutôt que d’essayer de la façonner à notre image), sur notre ambition de ne pas avoir une vie redondante (alors que souvent, ce sont les petites choses du quotidien qui constituent le véritable bonheur).
      Un superbe premier roman !

      Edit Speech : il est interdit de poster des liens vers vos blogs dans cette section. Un topic de publicité existe déjà dans "Blogs : publications et entraide".
    • CLia

      Néophyte de la lecture

      Hors ligne

      #3 25 Novembre 2017 22:25:53

      theunamedbookshelf a écrit

      J'ai beaucoup aimé ce roman également, j'étais déjà une grande fan de Cyril Dion et de toutes les belles choses qu'il fait dans la vie réelle - son roman ne m'a pas déçue.

      Voici mon avis, que j'ai posté sur mon blog : lien supprimé

      Deux frères palestiniens : l’un habité par son désir de vengeance, l’autre seulement désespéré devant la souffrance infligée à son peuple. Un petit fonctionnaire du Fonds (Monétaire International), fier de sauver des vies depuis son bureau gris. Une femme, recluse au milieu de la forêt, n’aspirant qu’à un peu de calme. Quatre personnages qui se débattent avec ce que la vie leur infligent, sans arriver à retourner la situation.
      Nadr poursuit son frère Khalil, décidé à se sacrifier dans un attentat à Paris. Fernando Clerc est pourchassé par un dossier palestinien, lui qui avait toujours refusé le moindre contact avec le Moyen-Orient. Amanda retrace le fil de son histoire, les naissances successives de ses enfants, nés de pères différents, pas forcément tous choyés de la même manière.
      Imago n’est pas un roman sur le terrorisme, c’est un roman sur l’humanité. Sur la stupidité profonde des hommes, dans leur système militaire qui prône le « œil pour œil, dent pour dent », dans leur poursuite absurde de la consommation, dans leur incapacité à apprécier ce qui est. Cyril Dion nous montre l’absurdité du monde, l’incohérence des institutions toutes puissantes, et l’escalade inévitable de la violence. Mais aussi, nous retrouvons dans ce livre quelques personnages à prendre en exemple : Ali, l’Egyptien désintéressé qui aide Nadr à passer en France, les Bédouins accueillant qui sauvent Fernando dans le désert notamment. Des exemples pour montrer que le monde n’a pas à être tel qu’il est, et qu’il suffit de quelques uns pour changer les choses – on retrouve ici la philosophie du Mouvement Colibris, dont Cyril Dion est le cofondateur.
      J’ai personnellement été très touchée par ce récit, autant pour l’histoire que pour les réflexions propres aux personnages, dans lesquelles je me suis énormément retrouvée. Cyril Dion met des mots sur des sentiments, des ressentis que j’ai depuis longtemps et que je n’ai pas su exprimer avec autant d’exactitude. C’est un livre qui amène à s’interroger sur notre façon de concevoir notre vie, sur notre façon de nous adapter à la société (plutôt que d’essayer de la façonner à notre image), sur notre ambition de ne pas avoir une vie redondante (alors que souvent, ce sont les petites choses du quotidien qui constituent le véritable bonheur).
      Un superbe premier roman !


      Je suis tout à fait d'accord avec toi, c'est un livre qui nous propose une interprétation mais ne donne pas de leçons.