[Suivi lecture] Miyuki_

 
  • Telesia_

    Lecteur glouton

    Hors ligne

    #31 18 Avril 2020 10:16:56

    Toi aussi tu as tendance à déserter ton suivi lecture ! Bon courage avec son entretien. J'essaie aussi de reprendre le miens. J'espère qu'on tiendra toutes les deux nos objectifs =)

    Je ne lis pas beaucoup de Fantasy, mais je serai heureuse de découvrir de nouveaux titres s'y référant en lisant ton suivi. Bonnes lectures :)
  • Miyuki_

    Gastronome littéraire

    Hors ligne

    #32 20 Avril 2020 09:56:38

    Cendre : D'habitude, je ne me concentre que sur un seul livre. Ou alors sur un seul roman que j'entrecoupe par la lecture d'illustré. Non pas par peur de mélanger les histoires mais, parce que pour un livre, j'aime consacrer mon temps et mon énergie qu'à une seule et unique histoire. Mais ici, c'était un peu différent …

    Telesia : Bienvenue ici ! Oui, j'ai déserté mon suivi lecture pendant quelques temps. Je l'ai aussi créer à une période pas super opportune (j'aurai dû y penser, à deux mois d'un stage et l'écriture d'un mémoire qui allaient me faire passer l'envie de rester longtemps devant un ordinateur !) J'essaie de le reprendre doucement en main, sans pression et je dois dire que ça fonctionne pas mal à mon goût !




    On l'attendait mais j'ai terminé Le Prieuré de l'oranger ! Et je vais donc donner mon avis attention, pavé en vue !

    <image>Le Prieuré de l'oranger, Samantha Shannon, Ed. De Saxus

    "Un monde divisé. Un reinaume sans héritière. Un ancien ennemi s'éveille. La maison Berethnet règne sur l'Inys depuis près de mille ans. La reine Sabran IX qui rechigne à se marier doit absolument donner naissance à une héritière pour protéger son reinaume de la destruction, mais des assassins se rapprochent d'elle... Ead Duryan est une marginale à la cour. Servante de la reine en apparence, elle appartient à une société secrète de mages.
    Sa mission est de protéger Sabran à tout prix, même si l'usage d'une magie interdite s'impose pour cela. De l'autre côté de l'Abysse, Tané s'est entraînée toute sa vie pour devenir une dragonnière et chevaucher les plus impressionnantes créatures que le monde ait connues. Elle va cependant devoir faire un choix qui pourrait bouleverser son existence. Pendant que l'Est et l'Ouest continuent de se diviser un peu plus chaque jour, les sombres forces du chaos s'éveillent d'un long sommeil...
    Bientôt, l'humanité devra s'unir si elle veut survivre à la plus grande des menaces."


    Etant un peu accro à Instagram et suivant pas mal de comptes littéraires, je n'ai pas pu manquer l'annonce de la traduction d'un chef d'œuvre de la fantasy, ledit Prieuré de l'oranger. Je n'ai pas pu m'empêcher de penser que les comptes littéraires en faisaient des caisses, avec ce ton que je peux parfois ressentir comme hautain en mode : quoi vous lisez pas VO ? Mais il y a tellement d'avantages à la VO, la VF ceci, la VF cela. Personnellement, je n'aime pas lire en VO. Ca peut paraitre bizarre car j'ai le niveau pour comprendre le texte mais passer du temps à traduire mentalement les phrases, ça m'énerve. J'ai l'impression de prendre trois lunes à lire, à passer davantage mon temps à traduire que à m'accrocher aux personnages, à découvrir l'histoire, etc... Bref, je m'égare. Il n'empêche que voir passer ce livre partout a planté une graine dans ma tête et que l'idée à germé. D'autant que quelques mois plus tard, je me retrouve dans une de mes librairies préférées, spécialisée dans les graphiques et les romans de l'imaginaire, à payer ce gros bouquin.

    Je laisse le temps passer, histoire que tout le bruit autour de ce livre se calme enfin. Et les filles du challenge de la guerre des clans ont proposées une lecture commune, que j'ai rejoint. Et on va enfin se le dire, pour moi, Le Prieuré de l'oranger a été un coup de cœur. Je ne sais pas si ça aurait été plus rassurant de voir un avis mitigé, voir négatif, histoire qu'on se dise oui, ce livre est pas aussi parfait qu'on le prétend et donc, je peux abaisser mon niveau d'exigence.

    Loin de moi de dire que Le Prieuré est parfait. Mais, il a vraiment résonné en moi.

    Ce qui m'a tout d'abord beaucoup plu, c'est l'histoire en elle-même. Rien n'y fait, j'adore les complots politico-religieux. J'adore on démarre dans un monde sur le fil du rasoir, au bord de l'explosion. Avec de la tension, des soupçons à chaque fois qu'un personnage fait tel ou tel action, où tout le monde se méfie de tout. J'aime cet équilibre dangereux dans lequel il est si facile de basculer du mauvais côté de la force.

    J'aime aussi la richesse des lieux proposées. L'autrice nous propose un univers où tout à son utilité ! Vous pouvez regarder la carte se situant au début du livre, vous verrez qu'en fermant le livre, vous vous rendrez compte que chaque endroit a été exploité. Avec plus ou moins de développement. Mais en aucun cas, le monde créé est là pour faire joli, pour faire genre que le monde est trop complexe alors qu'il ne l'est pas et au final est simplement là, inutilisé, inexploité. Avec Le Prieuré de l'oranger, on voyage. On va de l'est à l'ouest, au Sud, au Nord, au milieu des océans. Bref, l'univers est exploité au maximum de son potentiel.

    Alors oui, Le Prieuré de l'oranger a ses facilités, ses scènes déjà courus d'avance. Je savais comment ça allait se terminer, je pouvais parfois deviner les évènements à l'avance. Il n'empêche que je me suis laissée prendre au jeu, que je me suis laissée bercer par les péripéties les yeux fermées. J'ai savouré chaque passage de l'histoire, parce que j'y étais. J'étais dans cette cour Inyssienne, puis auprès des dragons, et l'instant d'après en pleine mer naviguant dans la nuit. Et j'ai parfois pas besoin qu'on me surprenne, que l'autrice me sorte des retournements de situation de malade, sorti d'on ne sait où et sans aucune logique. Le Prieuré est cohérent et parvient tout de même à apporter des moments de surprises, des moments de tension, de suspense avec cette sensation d'être un funambule. Avec la sensation de savoir que même si on va arriver à l'autre bout de la corde, on peut basculer d'un instant à l'autre.

    Et même s'il reprend des classiques du genre, par exemple le Sans-Nom qui peut-être directement associé à Sauron du Seigneur des anneaux, les voyages initiatiques, la volonté de réaliser ou d'échapper à son destin (comme Le seigneur des anneaux ou Game Of Thrones), et bien ça ne m'a pas empêché de profiter du voyage. J'ai eu beau savoir ce qui allait se passer, cela ne m'a pas empêché de découvrir ce que l'autrice avait à m'offrir, à me plonger toute entière dans l'histoire. On a beau savoir comment se termine Harry Potter, on le relit et on le revisionne sans cesse. J'ai beau connaître par cœur le Seigneur des anneaux, ça ne m'empêche pas d'avoir envie de le redécouvrir régulièrement. Le Prieuré de l'oranger, c'est pareil.

    Le point fort de cette histoire c'est quand même les personnages. Il n'y a pas un personnage dont je n'ai pas fini par m'attacher. Certes, au début, c'était un peu compliqué avec certains. Notamment Sabran qui m'horripilait. Sauf qu'elle a le droit à un traitement très réussi et qui fait d'elle un personnage humain. Parce que c'est ce qui qualifie tous les personnages. Aucun d'eux n'est parfait. Même Ead qui a l'air d'être parfaite peut se montrer impulsive ou imprudente, elle fait des erreurs. Et parfois, leurs erreurs, elles sont grosses comme des maisons. Pourtant, c'est une réflexion que je me suis faite au cours de ma lecture du Nom du vent de Patrick Rothfuss, je n'ai pas besoin de personnages parfaits. Oui, quand un personnage se comporte vraiment pas comme il est censé faire comme Loth, pour ne citer que lui, j'ai envie de les secouer, de leur crier : Mais fait pas ça, tu vas avoir des emmerdes à la fin. Et pourtant, c'est ce qui les rend plus attachants, plus humains, plus proches de nous et éloignés de ce statut de personnages livresques. On fait tous des erreurs. Je sais parfaitement que je dois pas boire du café à 23 heures parce que je n'arriverai pas à fermer l'œil avant un bon bout de temps. Je sais parfaitement que si je joue jusqu'à 3 heures du matin à Animal Crossing, je vais pas assumer. Et est-ce que je le fais ? Et bien oui. Pourquoi les personnages des livres devraient être comme frappé par une lueur divine sous prétexte que ce sont des personnages littéraires ? Qu'ils n'existent que via le papier (ou l'écran) et les signes alphabétiques ? J'ai besoin des personnages qui font des erreurs et qui en puisent leurs forces pour évoluer. Parce que de l'évolution dans le roman, on est servi. Faut s'imaginer qu'au début de l'histoire, les protagonistes sont des petits salamèche et qu'à la fin, ils deviennent des dracaufeu. Ils apprennent de leurs erreurs, ont leurs travers, pour certains sont plus sur le fil du rasoir que d'autres mais, ils évoluent.

    Et bon sang, ça c'est tellement important à mes yeux.

    Le plus important avec ce genre de livre, ce n'est pas la destination mais le voyage qu'on fait. Et ce voyage, il était exceptionnel. Je ne voulais pas qu'il prenne fin et pourtant, j'étais happée. Du début, jusqu'à la fin. J'ai dévoré les pages sans même m'en rendre compte à certains moments, étant donné que je peux vite m'arrêter pour faire mille et une chose différente, reprendre ma lecture, lire trois pages et recommencer à faire mille et une autres choses, ça relève de l'exploit. J'y étais en Inys, en Seiiki, à Mentendon, au Lasia. J'étais en dehors de mon monde et je trouve ça génial. Certes, ce livre ça m'a pris du temps mais je ne regrette pas. Je sais que je pourrais le relire, encore et encore. Je sais que je pourrai le conseiller autour de moi.

    Et je voudrai que chaque livre représente une telle évasion hors de son quotidien. Même si oui, c'était pas parfait. Mais à mes yeux, Le Prieuré de l'oranger est un coup de cœur.

    Désormais, je lis, enfin je relis Les fleurs du mal de Baudelaire. Et avant de m'attaquer à ma PAL pour le challenge des fouilles, je vais relire La langue des bêtes de Stéphane Servant, ce qui sera l'occasion parfaite pour vous faire part de tout mon amour envers ce livre.

    Dernière modification par Noemie.lsth (20 Avril 2020 09:57:52)

  • Telesia_

    Lecteur glouton

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    #33 20 Avril 2020 17:46:07

    Hello !
         J'ai enfin eu le temps de lire ton avis en entier.
         C'est marrant ce que tu dis pour la VO, parce que je pensais beaucoup comme toi avant. Finalement, je me suis lancée, simplement par défi personnel. A force, la traduction se fait naturellement, et je ne m'en rends même plus compte. C'était quand même un gros effort : des mois et des mois à persévérer tandis que mon rythme de lecture s'en voyait impacté... Mais je suis très contente du résultat, et je prévoie même de réitérer l'expérience avec d'autres langues que j'ai étudiées (entre autres l'allemand, l'espagnol). Enfin je comprends tout à fait celles et ceux qui n'en ont pas envie. L'effort de lire et/ou parler une autre langue est toujours un effort, et il ne plaît pas à tous. Chacun ses goûts !



    Loin de moi de dire que Le Prieuré est parfait. Mais, il a vraiment résonné en moi.


    Vous avez tous et toutes des avis nuancés. Que je n'ai pas lus dans le détail, à l'exception du tiens. Et je ne suis généralement jamais convaincue si facilement. La preuve, la LC a plané longtemps au dessus de ma tête avant que je ne me lance. Mais c'est à force de lire des phrases comme celle que je cite qu'on se laisse aller. Il résonne. Il marque un esprit. Quelqu'un a parlé de voyage de l'imaginaire... Ce sont des ressentis qu'on n'a plus vus à l'unanimité comme ça depuis si longtemps ! Les véritables chefs d'oeuvre contemporains, on les cherche toujours, non ? Alors voilà, je suis contente que ça en vaille la peine, et j'ai tout l'espoir du monde d'être conquise à mon tour par ce récit.



    J'aime cet équilibre dangereux


    Tu as raison ! c'est le summum de la tension que ce genre d'équilibre précaire...

    Et même s'il reprend des classiques du genre


    Les "classiques du genre", c'est aussi ce qui fais la beauté des classiques, non ? La littérature contemporaine aime les brouiller, ces genres. Les mélanger. Mais à la base, de la fantasy reste de la fantasy, et un thriller reste un thriller. Connaître le dénouement n'est pas un soucis. Certains de mes proches me diront "Gngngn tu te contredis ! tu détestes les films où tout est couru d'avance." Oui, mais. Mais dans ces films, les protagonistes sont généralement vides de sens. L'environnement, l'univers, est fade. La trame est terne. Ici, dans Le Prieuré de l'Oranger, règne comme un enchantement ; il vous emporte loin de chez vous, vous transporte auprès des protagonistes. Et tu en parles merveilleusement bien dans ton message.



    Ton avis est incroyable, il me fait rêver de choses que je n'ai pas encore lues... Mais j'ai déjà parcouru les 100 premières pages. Merci pour ton retour si détaillé, c'est formidable :pink:

  • Cendre

    Gollum littéraire

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    #34 20 Avril 2020 18:12:01

    Un reinaume sans héritière


    Je savais meme pas que ce mot existait... J'ai appris un truc.

    J'ai un très bon niveau en anglais, je le parle tous les jours au travail mais comme toi je n'aime pas plus que ca lire en VO. La raison étant que j'ai bcp plus de mal à voir la "beauté" d'une plume en VO, en sentir toutes les subtilités, comme c'est le cas en VF. Je suis bcp plus axée sur le fond que sur la forme quand je lis en VO car je ne suis pas biligue et ca reste tout de meme un effort de compréhension dans certains cas. Du coup j'ai l'impression de louper une partie de ce que peut offrir le livre.
    J'ai qd meme prévu 3 livres en VO cette année (déjà dans ma PAL). On verra ce que ca donne.

    Et on va enfin se le dire, pour moi, Le Prieuré de l'oranger a été un coup de cœur. Je ne sais pas si ça aurait été plus rassurant de voir un avis mitigé, voir négatif, histoire qu'on se dise oui, ce livre est pas aussi parfait qu'on le prétend et donc, je peux abaisser mon niveau d'exigence.


    Je me suis fait la meme réflexion avec le Nom du Vent. En fait il y a plein de points que tu as soulevé dans ton avis qui s'appliquent aussi à ce livre.

    J'ai bcp aimé ton avis. J'aime bien quand tu nuances en disant qu'on y retrouve certaines facilités du genre. Mais en meme temps, qd tu écris de la Fantasy, tu as beau créer un univers à part, tu vas forcéement finir par cocher des cases "typiques" du genre, c'est inévitable.

    Le plus important avec ce genre de livre, ce n'est pas la destination mais le voyage qu'on fait.


    Alors là je te rejoins totalement ! Il me semble meme avoir écrit un truc similaire récemment en parlant d'un bouquin sur Discord ;)

    J'ai Siriu dans ma PAL de Stéphane Servant. As tu lu celui là ?

  • Aryia

    Correctrice

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    #35 20 Avril 2020 20:35:02

    Coucou toi !

    Pour l'instant, j'aime bien Les animaux fantastiques, même si clairement, c'est plus pour le plaisir de découvrir la richesse de l'univers qu'autre chose ! Je pense que la version illustrée doit être plus sympa, car elle permet de voir les créatures au lieu de seulement lire la description ! Je te dirais un peu plus ce que j'en pense quand je l'aurai fini !

    La langue des bêtes ! Ca avait été un véritable coup de coeur, quel livre magnifique, je comprend que tu le relises ! Bonne relecture, du coup :heart:

  • Miyuki_

    Gastronome littéraire

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    #36 22 Avril 2020 12:55:08

    Cendre : Oui, j'ai lu Sirius et je te conseille fortement ! C'est un magnifique roman sur fond de road-trip qui dresse un tableau réaliste et alarmant sur notre monde et l'écologie. Stéphane Servant est un auteur très attaché à la nature et on retrouve ça dans La langue des bêtes ou encore dans Le cœur des louves. Même son dernier roman Félines y fait état. C'est d'ailleurs par ce livre que je l'ai découvert, même si l'étincelle et l'amour que j'ai pour son œuvre est venu plus tard avec La langue des bêtes. Mais Sirius y a contribué et je compte le relire.

    Aryia : C'est le même principe pour Les contes de Beedle le Barde ; prolonger le plaisir Harry Potter par une découverte plus approfondie de l'univers. J'ai d'ailleurs adoré le film Les animaux fantastiques même le deux que la plupart trouve moyen.






    Et c'est parti pour le suivi de lecture !

    <image> Les fleurs du mal, Charles Baudelaire, Ed. Le livre de poche

    "« Plonger au fond du gouffre, Enfer ou Ciel, qu'importe ? / Au fond de l'inconnu, pour trouver du nouveau ! »
    Ces vers du « Voyage » éclairent à eux seuls l'entreprise du poète. Esprit vagabond, toujours mobile, Baudelaire explore les dédales de la conscience. Il atteint tantôt à l'extase, tantôt se perd dans les abîmes du péché. À travers ses poèmes, il nous fait partager le drame qui se joue en lui et qui n'est autre que la tragédie humaine. Baudelaire, premier poète moderne, donne à la poésie sa véritable dimension : exprimer, par-delà les mots, ce vertige absolu qui s'empare de l'âme. Tout chez lui, en lui affirme la nécessité de la souffrance, la fatalité du péché. Tout traduit en lui une âme profondément troublée mais charitable. Baudelaire fait des Fleurs du Mal un immense poème de la vie et du monde."


    Quand j’étais petite, je n’aimais pas la poésie que j’ai trop souvent associé à des devoirs. Apprendre par cœur des poésies enfantines et les réciter devant son instutrice/teur, c’était vraiment pas mon truc. Pourtant, je le faisais et ça ne m’a pas, non plus, empêché de participer à un concours de poésie.

    Cependant, j’ai un lien particulier avec cette forme d’art. Je me suis souvent réfugiée dans l’écriture. J’en reparlerai peut-être ici quand l’occasion se présentera. Et à mes dix-sept ans, j’ai découvert un de mes premiers amours littéraire : Les fleurs du mal de Charles Baudelaire. Il faut se remettre dans le contexte, j’avais donc dix-sept ans, j’étais dans ma dernière année d’études secondaires et au mois de janvier, la prof de français que j’aurai dû avoir toute l’année est revenue. Une nouvelle prof arrive et parvient à me redonner goût à cette matière, que j’avais tant affectionnée (avant d’être totalement dégoûtée par une étude de l’œuvre de Dom Juan qui a duré des mois, des mois et des mois, d’avoir été en échec par ce rejet de la matière et pour plein d’autres raisons encore, j’avais envisagé de devenir, à mon tour, prof de français mais, breffff !). Et alors que je m’épanouis dans le programme de français arrive l’étude de la poésie. J’ai clairement eu beaucoup de chance d’avoir côtoyée une prof qui a rendu ce sujet passionnant, qui m’a donné les clefs pour aimer cet art et me donner envie de continuer mon exploration dans le genre (on faisait des cadavres exquis, on parlait de la poésie de manière désacralisée, etc.). Encore un petit détour avant de revenir au sujet qui nous intéresse, c’est grâce à cette personne que j’ai découvert un des livres qui a changé ma vie : La plus que vive de Christian Bobin.

    Tout ça pour dire que c’est grâce à ces cours que j’ai découvert Charles Baudelaire et son fameux recueil Les fleurs du mal.

    Trois ans plus tard, j’achète mon édition juste avant un examen oral. Et encore deux ans plus tard, je relis ce livre.

    Et ça a été une relecture agréable mais, étrange. Au cours de ces dernières années, j’ai lu beaucoup de poésie, j’ai découvert d’autres poètes tels que Rupi Kaur, Paul Valery, etc. J’ai plus de référence qu’autrefois et si je ne peux nier que les poèmes que renferment Les fleurs du mal sont sublimes, j’ai désacralisé le livre. Comme enlevé de son piédestal où il était depuis toutes ces années. C’est une impression qui est difficile à expliquer et c’est comme si je me rendais compte que Baudelaire est un poète de génie, certes, mais que je n’arrive pas à déterminer ce qui le rend si unique.

    Evidemment, son recueil est un lieu qui démontre sa maîtrise et sa technique ; rimes embrassées, sonnets, il y a peut-être des alexandrins (j’ai beau adorer la poésie et connaître quelques aspects techniques, je n’ai jamais réussi à compter correctement les syllabes des poèmes et quand je lis à l’heure actuelle, ça n’a plus de grande importance qu’il y ait x pieds dans ce vers, que la forme soit un sonnet, etc).

    Sa plume est sans aucun doute magnifique, emprunt d’un travail acharné. Un mythe plane autour des poètes qu’ils seraient comme frappés par le talent et que l’écriture viendrait toute seule. Pour Baudelaire, c’est faux. C’était un travailleur acharné, quelqu’un qui pouvait rester pendant des heures devant sa feuille de papier à la recherche de la meilleure combinaison possible. Et ça se voit. Il y a aussi nombre de références à la mythologie (généralement grecque), un vocabulaire des plus complets. Je me souvenais plus de toute cette richesse dans sa  plume.

    Et malgré tout, je ne peux m’empêcher de me dire : oui, mais. Cette impression de déjà-vu chez d’autres poètes, cette exécution si millimétré des règles du symbolisme (qui est par ailleurs le courant poétique qui me fascine le plus), ça enlève quelque chose de sacré chez ce poète. J’éprouve toujours de la nostalgie à la lecture de L’albatros, de l’émerveillement en lisant L’invitation au voyage, etc … Mais quelque chose n’y est plus et je n’arrive pas à définir quoi.

    La dernière fois avec Telesia et Cendre, on a eu un petit échange sur la lecture VO. Et c’est assez drôle parce que je ne me souvenais plus qu’il y avait un poème en latin. Quand je l’ai redécouvert, j’ai lâché un ah quelque peu résigné parce que je n’ai fait qu’un an de latin quand j’étais âgée de 11 – 12 ans (qui était, par ailleurs, obligatoire). J’ai très vite lâchée l'affaire parce que chanter des déclinaisons (même si ça s’ancre bien dans le cerveau et que je peux encore les chanter maintenant), c’est pas mon truc. Donc, je ne pète pas un mot de latin. Enfin, je mens. De par mes études, je connais des termes latins mais je ne crois pas que Baudelaire ait eu l’idée un jour d’écrire un poème sur les contrats intuitu personae, sur la culpa in contrahendo ou encore sur le ius variendi. D’ailleurs, je n’utilise jamais ces termes au quotidien, c’est dire l’utilité ! J’ai essayé de traduire un peu mais, j’ai très vite laissé tomber cette idée. Même si on voit plus de subtilité de la plume de l’auteur, même si les traducteurs peuvent parfois faire des textes bizarres (et je veux bien le croire), ce n’est pas un temps que je veux consacrer pour le moment. Mais pourquoi pas progressivement.

    Tout ça pour dire que Les fleurs du mal c’était une lecture transitoire qui a été vraiment chouette à faire. En dépit de toutes mes réflexions sur ce livre. Et que ce n’est pas grave de désacraliser des œuvres de la littérature. Dernièrement, j’écoutais un super podcast que m’a conseillé un membre de Livraddict (Redpanda) nommé les couilles sur la table et dans lequel on déconstruisait, ou du moins on désacralisait le roman Les liaisons dangereuses de Laclos. Et c’est une démarche que j’ai trouvé extrêmement intéressante.

    J’avais dit que j’allais relire La langue des bêtes de Stéphane Servant. Et bien, figurez-vous que j’ai changé d’avis à ce sujet ! Je considère ce livre comme mon préféré et j’ai envie de lui donner toute l’attention qu’il mérite. Je ne veux pas offrir quelques heures grappillées par ci, par là.

    Donc, pour le moment, je pars sur la découverte des Hauts de Hurlevent que j’ai acheté un peu avant le confinement. Ou alors, je tente de terminer Déracinée que j’ai mis en pause … Pour le moment, je ne suis sûre de rien.

    Dernière modification par Noemie.lsth (22 Avril 2020 15:47:34)

  • Mypianocanta

    Livraddictien de l'espace

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    #37 22 Avril 2020 16:38:18

    J'ai toujours trouvé étrange cette idée de "sacraliser" des œuvres ; et pourtant mes deux parents enseignaient le français … ou peut-être est-ce à cause de ça : on parlait autant des auteurs classiques que de la dernière chanson à la mode à table et ado j'ai lu énormément de romans à leur sortie parce qu'ils passaient à la maison avant de rejoindre le "CDI" (qui ne s'appelait pas comme ça à l'époque).
    Mais comme je suis une inconditionnelle de Baudelaire, je trouve ce que tu en dis fort intéressant.

    Bon après-midi :)
  • Cendre

    Gollum littéraire

    Hors ligne

    #38 22 Avril 2020 18:14:24

    J'ai Félines dans ma PAL, j'avais pas fait gaffe que Servent était l'auteur :goutte:

    J'ai bien aimé les films Les animaux fantastiques. L'acteur joue très bien le gars à moitié autiste XD Il y a des facilités scénaristiques mais à côté d'autres films, je trouve qu'on est loin du pire qui existe :)
    J'ai passé un bon moment détente mais j'ai du mal à me dire que c'est le même univers que HP. Les acteurs qui jouent Dumby et Grindelwald sont très bons mais tellement différents de ce qui est décrit dans les livres que j'ai du mal à faire le lien...
    Par contre c'est en visionnant les films qu'on se rend compte qu'Ariana, la jeune soeur de Dumby, est surement un obscurus (jamais dit clairement dans les livres).

    La poésie est un genre que je n'ai jamais vraiment exploré et qui ne tente pas plus que ca. Contrairement à toi mes profs de francais au lycée étaient juste passables et ne m'ont donné envie de rien. J'ai dû lire les fleurs du mal par devoir. Et même si je reconnais le génie, je garde un souvenir dépressif de cette lecture. Elle illustre très bien le spleen : entre nostalgie, romantisme et désillusion. Bref, une lecture qui donne des envie un peu suicidaires =) Surtout quand on fait comme moi : pour me débarrasser je me suis englouti le bouquin en qq jours alors j'étais en overdose. C'est marrant parce que j'aime bien lire un poème de temps en temps et la beauté du texte peut résonner en moi mais c'est vraiment un plaisir "à petite dose". Un poème c'est bien et ça fait rêver. Dix, j'étouffe. Les poèmes, il faut les laisser décanter et les relire plusieurs fois pour se rendre compte de toutes leur force.
    Peut être que je pourrais retenter certains recueils maintenant mais j'ai envie de qq chose de plus enjoué. De mémoire Verlaine et Apollinaire me "parlait" plus. Il y a des textes d'Aragon mis en chanson que j'adore : Que serais je sans toi ou aimer à perdre la raison. En fait, je crois que les poèmes mis en chanson me touchent plus facilement.

    Les liaisons dangereuses : c'était une lecture optionnelle de lycée. J'ai attendu d'avoir passé le bac pour tenter le coup et... j'ai adoré ! En fait quand il y a une contrainte j'ai du mal mais qd j'y vais moi même, ca passe bien. C'es mesquin comme histoire mais c'est ca qui est bon :lol: Une fois que tu l'auras lu tu pourras regarder "Sex Intentions" qui est une adaptation moderne du livre. Il en a gardé la sève.
    Je n'ai jamais autant lu de classiques que lorsque je n'avais plus de cours de français et aucune lecture imposée.  D’ailleurs, bien que j'ai bcp aimé Déracinée, je te conseille plutôt Les hauts de Hurlevent. Un de mes premiers classiques lus de moi même et que j'ai vraiment vraiment aimé. J'ai adoré cette lande anglaise et ces personnages tourmentés. Je l'ai préféré, et de loin, à Jane Eyre, qui a souvent la préférence (mais que je trouve personnellement bcp trop classique dans son intrigue).
  • Aryia

    Correctrice

    Hors ligne

    #39 22 Avril 2020 21:35:22

    Coucou toi !

    Les contes de Beedle le Barde ... Je crois que je les ai lu trop tôt, quand je n'étais pas encore assez "douée" en anglais, du coup, j'ai quasiment rien compris, ça m'a frustrée à mort, donc j'ai pas l'impression d'avoir exploré l'univers plus en profondeur. Je retenterai plus tard, et au "pire", on a la version illustrée en français, pour m'aider à comprendre un peu !

    J'adore les films Les animaux fantastiques, peut-être même plus que les Harry Potter en vrai ! J'aime beaucoup Norbert Dragonneau, je m'attache bien plus à lui qu'à Harry, l'acteur est juste merveilleux en plus. Mais c'est vrai qu'en plus d'être drôlement sympathique "en eux-mêmes", les films apportent une vision nouvelle sur le monde des sorciers, et sur Dumbledore aussi, et c'est sympa de mettre les deux époques en parallèle je trouve. J'ai hâte que le suivant sorte !

    Je ne suis pas très portée sur la poésie, car mes troubles autistiques m'empêchent de comprendre la plupart des images et autres sens cachés, du coup, ça me frustre, même si j'aime beaucoup lire des poèmes à voix haute pour le plaisir de sentir les sonorités glisser sur mes lèvres. J'aime la musicalité de la poésie, mais je ne la comprend pas.

    Du coup, je ne sais pas ce que tu as finalement décidé de lire, mais bonne lecture dans tous les cas !

  • Miyuki_

    Gastronome littéraire

    Hors ligne

    #40 28 Avril 2020 11:14:12

    My' : Je crois que c'est quelque chose d'inconscient. Et quand on te rabâche via tous les réseaux sociaux et canaux de communication que tel ou tel auteur, c'est de la grande littérature, et même si je crois qu'il y a aucune intention péjorative derrière, ça reste. L'imaginaire collectif, ça se déconstruit et heureusement !

    Cendre : Ah Félines :heart: (tu verras, j'ai un amour inconditionnel pour cet auteur et pour ses romans que j'ai lu). Dans les animaux fantastiques, j'aimerai comprendre comment Dumby est passé du costume trois pièces cliché anglais à la robe de chambre pour toute la journée ? I don't understand ?! :ptdr:

    Je comprends totalement ton impression sur Les fleurs du mal. Le symbolisme est un courant poétique qui ne respire aucunement la joie de vivre. Il y a toujours cette mélancolie poussée à son paroxysme, ces références à l'Azur, ce paradis où les poètes pourraient vivre comme des rois, et ces références au passé. Baudelaire ne cesse de faire référence à la Grèce Antique qu'il idéalise. Pas pour rien que l'appellation poète maudit plane sur la tête du gang Rimbaud, Verlaine et Baudelaire.

    J'adore la poésie de Verlaine et quand je l'ai découvert en classe, parce que forcément on a mis en lien avec Rimbaud, je me suis beaucoup intéressé à leur histoire. J'ai regardé beaucoup beaucoup de fois à la suite Rimbaud Verlaine qui sait retranscrire la passion dévorante et toxique qui unissait ces deux hommes. En tout cas dans la première partie. La seconde partie m'apparait bien plus flou. Les acteurs sont juste au top (David Thelwis pour Verlaine, je n'aurai pas imaginé mieux et puis Di Caprio pour Rimbaud, j'approuve également !). Par contre, je n'ai pas encore lu Aragon. Il fait partie de mes poètes à découvrir, notamment avec son roman Aurélien. Mais je t'avoue qu'une brique écrit en caractère 10, ça ne me met pas dans de bonnes dispositions livresques.

    Aryia : Je comprends tout à fait. Parfois, dans les poèmes, il n'y a rien à saisir. Dans le cas de mon poète préféré, Rimbaud, j'ai beau essayer de comprendre son poème Couleur des voyelles, je n'y arrive pas. Il y a une jolie musicalité et c'est avant tout ce que je cherche dans la poésie. Le style, changer les mots de place, chercher des mots qui rime. C'est surtout ce que je cherche quand je lis un recueil de poésie et ne pas en analyser le moindre vers parce que je trouve que ça fait perdre tout son charme.
    Et je suis complément d'accord pour Nobert Dragonneau, je le trouve bien plus attachant que Harry. J'ai toujours préféré Ron à Harry de toute façon

    !



    Hey,

    Avant de commencer à vous parler de la lecture que je viens juste d'achever, il faut que je parle top 5.

    Cette semaine, Mange-Nuages nous a concocté un petit thème où bien des avis divergent. Cette semaine, on parle des opinions impopulaires, ces livres que tout le monde a aimé et pas moi et le contraire. J'ai personnellement adoré confronter mes avis à ceux des autres lecteurs, voir sur quels points on se rassemblait et sur lesquels on était pas d'accord. Au programme de mon top 5, ces cinq livres que j'ai détesté et dont je n'ai pas compris l'engouement. Si vous voulez les voir, il suffit de cliquer >Ici<. Je suis également très curieuse connaître votre classement, ça pourrait donner de jolies conversations.




    Et maintenant, mesdames et messieurs, le suivi lecture ! Le suspense est à son comble car je ne savais pas quoi lire. J'ai tenté de lire Les hauts de Hurlevent mais, j'ai vite abandonné pour retourner vers ...



    <image>La langue des bêtes, Stéphane Servant, Ed. du rouergue.

    « Il était une fois un vieux chapiteau de cirque à l’orée d’une forêt sombre et profonde : c’est là que vit la Petite avec sa famille, une ancienne troupe de saltimbanques. Depuis très longtemps, ils ne donnent plus de spectacle, mais ils tissent autour de la gamine un cocon protecteur d’histoires et de légendes.

    Un jour, un chantier gigantesque vient tout bouleverser : le campement va être rasé et la Petite est envoyée à l’école du village. Elle va devoir faire appel aux forces obscures de la forêt pour tenter de sauver les siens. »


    Il est de ces romans dont on ne se doute pas un instant que leur lecture bouleversera notre vie. La langue des bêtes en fait tout simplement parti. Pour moi qui ait une mémoire visuelle et auditive assez développé, il est extrêmement frustrant de ne pas pouvoir raconter le moment où j’ai rencontré ce livre. Car je ne m’en souviens plus vraiment. A en croire Livraddict, j’ai acquis ce livre en 2017, je sais exactement où ; dans cette librairie d’occasion, dans la ville où j’ai fait mes études et qui est bordée par une grand route, où je passais des heures entières. Je revois sa place exacte dans les étalages mais, pourquoi est-ce que j’ai pris ce livre ? Outre le fait qu’il était pas cher du tout et en excellent état. Je crois avoir vaguement entendu parler de l’auteur dans une vidéo. Mais il m’est impossible de remettre des mots sur ce qui a traversé mon esprit à cet instant T. En revanche, je sais parfaitement comment j’en suis venue à le lire, comment après deux ans, il a quitté les rangs de ma pile à lire, quitté les étagères de ma bibliothèque. Parce qu’il m’a appelé. Je vois, derrière vos écrans, vos yeux s’écarquiller et vous dire, bon sang, elle n’est pas normale. Je ne saurai pas expliquer autrement. J’ai ignoré ce livre pendant un temps, jusqu’au jour où j’ai ressenti une sorte de magnétisme. Plus le temps passait, moins je pouvais ignorer ce livre. Ce qui fait très sorcière, je le conçois. Et un jour, en mars 2019, je l’ai lu et jamais, au grand jamais, je n’aurai pensé ressentir de tels sentiments. Ce livre, ça a été une claque, plus que ça même. Il m’a laissé le cœur en poussière, je ravalais difficilement mes larmes, jusqu’à éclater en sanglots. Je crois qu’aucun livre ne m’a fait ça depuis que j’ai commencé à lire assidument. Depuis que la lecture est une passion. Ce livre, ce n’est pas qu’un coup de cœur, c’est le livre de ma vie. Et je rabâche à qui veut bien l’entendre que ce livre est une pépite.

    Il n’a jamais cessé de quitter mes pensées depuis un an.

    Et l’appel, je l’ai à nouveau entendu il y a peu. Et il ne pouvait pas mieux tomber, au cœur de ces moments troubles, il a été une lumière. J’ai beau avoir une quarantaine de livres dans ma pile à lire, il fallait que je lise celui-ci. C’était comme vital. Comme si, si je ne lisais pas, il me manquerait quelque chose.

    Et puis, avec le challenge des fouilles littéraires qui commence dans quelques jours, je me suis dit qu’il était plus qu’opportun d’écouter cet appel et de le relire.

    Je crois sincèrement que les mots vont me manquer pour expliquer ce que je ressens pour ce livre. Tout l’amour que je lui porte. Mais, je vais tenter quand même de poser quelque chose sur le chaos de sensations.

    La petite vit dans les bois, à l’orée d’une forêt. C’est là qu’elle vit près de ce chapiteau qui tombe en ruines, de ces caravanes vieillies. C’est là qu’elle vit avec Le Père, cet ogre aux mains si immenses, Belle, sa mère dont la main tordue semble avoir touché le ventre des nuages et c’est pour cela qu’elle si mélancolique, Colodi, ce marionnettiste rongé par l’orgueil et les regrets, Pipo, ce clown qui par nature ne pourrait pas être triste, Franco, ce vieux lion sans dents et Major Tom, ce nain, qui donne vie aux chansons et qui rêve d’ailleurs.

    C’est là que vit la Petite, entourée de sa famille et des histoires.

    Sauf qu’un jour, Petite ne croit plus. Petite voit la réalité telle qu’elle est. Et alors, elle réveille la Bête. Celle qui rôde dans les histoires qu’on lui a toujours raconté. Et cette Bête-là, elle est féroce, elle se nourrit de désespoir, de la tristesse.

    Et bon sang que c’est beau ce récit.

    Personnellement, j’aime beaucoup l’univers du cirque. C’est quelque chose qui m’a toujours fasciné. Et qui me fascinera encore longtemps. Alors avec un cirque abandonné et des histoires, vous trouvez une lectrice comblée. Je pense, en effet, que les histoires nous permettent d’apprendre beaucoup de chose sur le monde qui nous entoure et sont très révélatrices.

    La langue des bêtes est une invitation à croire aux histoires. A croire aux pouvoirs qu’ont les mots et les histoires, à cette magie qu’ils recèlent. Et moi, j’y crois. Je crois que les mots peuvent réparer, émerveiller, détruire, tuer, faire revivre. Comme Petite, je crois à cette Bête qui hante les bois et qui se nourrit de tristesse, dans les bras de laquelle on peut se laisser aller.

    J’ai beau connaître cette histoire car elle est restée gravée dans mon esprit, je me suis de nouveau laissée aller comme la première fois. Je redécouvrais ce pouvoir qu’on les mots et cette magie, Stéphane Servant la maitrise si bien.

    Je me suis laissée aller à découvrir le monde par les yeux de Petite. Petite qui a un si grand cœur, Petite qui est si naïve et si lucide, qui n’ignore rien et qui voit ce que les hommes, eux, se cachent. Petite qui a ce regard unique, magique et cruel. Magique et cruel. Toujours oscillant entre ombre et lumière. Un personnage si complexe et si attachant.

    Evidemment, les autres personnages ne sont pas en reste. Ils sont tous fabuleux, avec leurs joies et leurs peurs. Tous profondément humains et imparfaits. Tous ont leurs rêves, leurs désirs, leurs regrets, aussi. Et c’est tellement beau de suivre cette troupe, ce mélange de toutes ces personnes au travers des yeux de Petite et parfois, de leur propre regard.

    Evidemment, ce livre me laisse une nouvelle fois le cœur en vrac. J’ai pleuré plusieurs fois et encore maintenant, en écrivant ce suivi, j’ai envie de pleurer, tout en chantonnant Space Oddity de David Bowie – this is Ground Control to Major Tom… You’ve really made the grade … - . Tellement l’histoire m’a touché en plein dans le mile. Parce que Stéphane Servant a choisi les mots les plus à même de réveiller ces émotions chez moi. Et chez d’autres lecteurs, j’en suis certaine.

    Alors, ce livre, il va continuer de me hanter. Ce livre, je n’aurai jamais assez de mots pour lui décrire mon amour. Mais peut être que l’auteur, lui peut vous donner envie de passer quelques heures auprès de cette troupe, croire aux histoires et au pouvoir des mots.

    Parce que, si j’étais le genre de lectrice qui met des post-it à chaque citation qui lui parle, le livre en serait rempli. Si je tenais un cahier de citation, ce cahier ne contiendrait presque que des citations de ce livre. Mais, je préfère les graver dans ma mémoire et au plus profond de moi-même, comme un mantra …

    Toutefois, rien n’empêche que j’aille en pêcher par-ci, par-là, pour que vous puissiez voir la plume de cet auteur que j’aime tant. Cet auteur qui sait rendre chaque chose si belle et puis, par ses livres, parler au plus profond de mon être.

    « Une histoire, c'est comme une couverture de laine. Elle est faite de brins tissés. Personne ne sait qui a commencé à raconter. Mais on se passe la couverture et de jour en jour la couverture s'agrandit. Tout le monde peut venir se blottir en dessous, les vivants et les morts trouvent un endroit pour se réchauffer. C'est pour cela qu'il faut continuer à croire aux histoires et à les raconter. Parce que les morts vivent encore à travers les histoires. Avec les histoires, comme les brins de laine tressés, nous nous tenons la main. Avec les histoires, rien ne disparaît jamais. »

    « Soir après soir, nuit après nuit, le Cirque donnait ses représentations, et tous les gens du public, tous ces gens réunis sous le même chapiteau nous regardaient et nous applaudissaient et c’est comme si la piste avait été un miroir. Ils avaient entrevu pendant quelques heures qui ils étaient vraiment. Des hommes et des dieux. Et ils sortaient du chapiteau tous aussi étincelant que des étoiles. Et les rêves qu’ils faisaient une fois rentrés chez eux, avaient la saveur de la première gorgée de lait. »

    « S'il y a une seule vérité, une seule, elle est dans l'amour que l'on se donne. »

    « Lis, Petite, ne t'arrête jamais de lire. Les mots sont la soupe de l'âme. »

    « Celui qui sait lire peut comprendre le monde. Celui qui écrit peut le changer. »




    Même si j'ai encore très envie de relire ce livre, encore et encore. J'ai décidé de lire Long way down de Jason Reynolds. C'est un contemporain assez court et avec mes deux jours de congé, je suis persuadée de pouvoir le lire avant le 1er mai, soit le début du challenge des fouilles et l'annonce du thème provisoire de mon clan pour le challenge La guerre des clans.

    Dernière modification par Noemie.lsth (28 Avril 2020 11:15:22)