[Suive lecture] Widukind

Belle année livresque (entre autres) à toi, Widukind. Je vois que le programme est particulièrement dense et intéressant, et je suis sensible à une bonne partie des auteurs et thèmes cités ; ce sera donc encore une fois un plaisir de suivre tes lectures cette année !

Compte-rendu de lecture N°9 : The Hate U Give de Angie Thomas

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Nouveau compte-rendu pour démarrer une série de lectures consacrée au racisme et à ses pourfendeurs. Commencer par un roman d'actualité ne me paraissait pas être une si mauvaise idée. Le sujet du livre est très simple : Dans un quartier pauvre majoritairement noir, un policier blanc va tirer et tuer un jeune au cours d'un contrôle d'identité sous les yeux de son amie d'enfance qui va essayer de prouver l'innocence du garçon et la culpabilité du policier accusé de crime raciste.

Plusieurs remarques au sortir de cette lecture : Le marketing des maisons d'édition américaines est toujours aussi aguicheur. On nous promet un chef d'oeuvre de la littérature en passe de devenir un classique. Je regrette de me mettre en porte à faux mais nous sommes bien loin d'un véritable style littéraire.  Il pourrait s'agir d'une chronique journalistique avec tous les bons ingrédients pour séduire un public adolescent. Beaucoup d'action et un accent mis sur les émotions ressenties par la narratrice. Il faut y ajouter un haute dose de paragraphes mélodramatiques où toutes les 3 pages environ les personnages se disent combien ils s'aiment et combien ils tiennent les uns aux autres. Sur la quatrième de couverture on nous annonce un film à venir. Gageons que la grande industrie Hollywoodienne saura en tirer des litres de larmes des spectateurs.

Le sujet est assez bien traité (d'où mon 9/20) dans l'ensemble même si nous avons seulement le point de vue des gens du quartier. Il eût été intéressant de savoir ce qu'il a bien pu se passer dans la tête du policier blanc avant de tirer, de son point de vue à lui. Il est vrai que les blancs dans ce livre sont souvent des naïfs progressistes. Les explications distillées ici ou là dans le livre sur la cause de l'infériorisation des noirs et de l'existence de ce qu'il faut bien appeler des ghettos ne me convainc pas tout à fait. Comme beaucoup de gens de gauche, l'auteur a tendance à utiliser le mot racisme un peu à tort et à travers. Il faudrait plutôt parler d'ignorance. C'est particulièrement frappant dans les conversations des jeunes du lycée de la narratrice. En effet, Starr la personnage principale est une fille noire scolarisée dans un lycée à majorité blanche. Ses camarades n'ont pas la moindre idée de ce qu'il se passe dans son quartier ni des difficultés de la population qui y vit. Faut-il y voir du racisme ?
Le problème est que l'auteur semble adhérer à l'idéologie selon laquelle il faut se débarrasser de tous les stéréotypes et même les traquer jusque dans les blagues. Cela me paraît être annonciateur d'un nouveau puritanisme et d'une chasse au sorcières sont personne ne sortira vainqueur. J'aurais préféré un véritable roman social sur les causes économiques réelles du fossé entre noirs et blancs. Pour voir le pendant de ce livre il est sans soute intéressant de lire le dernier livre de Bret Easton Ellis intitulé White sur les origines de la colère des petits blancs WASP. On aura alors un panorama intéressant des diverses colères qui s'expriment au pays de l'oncle Sam.

Pour résumer un livre pas fondamentalement mauvais mais qui manque de profondeur et de qualités littéraires. Plus de style, moins de pathos la prochaine fois Mme Thomas.

Compte-rendu de lecture N°10 : Guérilla (Tome II) : le temps des barbares de Laurent Obertone

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Après la sortie du très remarqué Guérilla il y a quelques années, Laurent Obertone revient à la charge et publie le deuxième opus, et la fin de celui-ci appelle probablement une suite.
On y retrouve les grandes lubies de l'auteur et son légendaire pessimisme. Obertone a beaucoup lu de livres américains sur la psychologie évolutionniste. L'homme est avant tout instinctuel et se comporte comme un chasseur.
Le livre est divisé en très courts chapitres narrant les péripéties d'individus éparpillés aux quatre cons de la France où chacun tente de survivre après l'effondrement. Obertone est assez bon dans la description psychologique de ses personnages, il avait beaucoup travaillé sur Breivik à l'époque dont il reprend les traits pour les attribuer à un des personnages du roman. Le début du livre ressemble étrangement à Ravage de Barjavel (le côté onirique en moins) mais avec un soupçon de réalisme qui n'existait pas dans Ravage. Il est dommage qu'Obertone tombe parfois dans la facilité et décrit beaucoup de personnages comme des zombies idiots et possédés; un effondrement ne se produirait sans doute pas de manière aussi caricaturale. Il s'en prend aussi aux gauchistes culturels, ce qui est réjouissant (les amateur d'écritures inclusives et d'idéologies postgenrées n'apprécieront sans doute pas) mais au bout d'un moment cela devient répétitif et lassant. Le personnage de Vincent Escard, politicien cynique, est particulièrement réussi tout comme la fin de l'histoire. Le dernier chapitre reflète bien la puissance de la propagande et de l'image dans la société moderne.
En résumé, ce tome II est moins bon que le premier quant au style d'écriture, L'auteur nous avait habitué à mieux. Gageons qu'il revienne en forme pour le tome III.

Compte-rendu de lecture N°12 : Les Blancs, les Juifs et nous de Houria Bouteldja

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Je conseille la lecture de ce livre à tous pour se faire une idée du niveau intellectuel général dans le monde des études décoloniales. Houria Bouteldja est un modèle du genre. Dès l'introduction, elle nous fait état d'un nouveau concept brillant. En effet, elle précise que les Blancs sont une catégorie politique et sociale. Et moi qui croyait que c'était une couleur de peau donc que ça avait avoir avec la génétique... quel ignorant je fais. Elle va même sur sa lancée, sortir le concept de "races sociales" : comprenne qui pourra.

Dans ce livre le Blanc est perçu uniquement comme un oppresseur au sens large, tour à tour responsable de l'esclavage et de la colonisation puis du pillage de la décolonisation. Il n'y a qu'un seul et unique Blanc qui trouve grâce aux yeux de H.B, c'est Jean Genet car "il a trahi sa race". Même le brave J-P Sartre ne passe pas sous les fourches caudines de notre inquisitrice moderne. Il a en effet eu le tort de soutenir la création d'Israel et s'est donc placé sous le sceau de l'infamie.

Les prolétaires Blancs de tous pays apprécieront d'être perçu comme des oppresseurs encore aujourd'hui. Elle, en revanche voudrait fédérer le monde entier contre les Blancs ennemis. Tout le monde est le bienvenu, Noirs, Arabes et même Juifs à condition qu'ils "trahissent les Blancs pour passer du côté des opprimés". H.B développe donc sa vision racialiste du monde sur 150 pages et la maison d'édition La Fabrique situé plutôt dans la gauche radicale n'y voit rien à y redire... Drôle d'époque !

Sur la question de l'esclavage H.B feint d'ignorer que cette pratique était courante sur tous les continents à l'époque moderne et que ceux qui l'ont le plus pratiquée était les arabo-musulmans (17 millions de Noirs déportés entre les VIII et XXè siècles), donc des gens de ce qu'elle appelle elle-même "sa race".

Seules quelques idées intéressantes mais peu développées se font jour de temps en temps dans ce livre. Elle a le mérite de ne pas épargner la gauche et ses politiques sociales, de dénoncer l'hypocrisie de la bourgeoisie citadine sur la question identitaire.

Compte rendu de lecture N°13 : Pour les musulmans de Edwy Plenel

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Je me demande encore comment Monsieur Plenel peut trouver des lecteurs pour le lire. Ce livre fut publié en 2013 et les années qui ont suivi ont apporté un démenti cinglant à tout le contenu de ce livre. La thèse de Plenel est simpliste. Tout ce qui arrivé de mal à la France depuis des décennies n'est que le résultat de la sacro-sainte "extrême-droite". Que ferait Plenel si cette dernière n'existait pas ? Pas grand chose sans doute.
Tout au long de la centaine de pages de ce pamphlet, il nous abreuve de ses approximations, citations tronquées, analyses totalement manichéennes, ne prend aucun recul pour décrire la situation dans toute sa complexité.
Il ne parle qu'à mots couverts de l'islamisme qui s'est déployé en France ces 10 dernières années. Et de toute façon si une telle vision de l'islam existe c'est parce que la société française est bien trop islamophobe, raciste et primitive, elle refuse de s'ouvrir à l'Autre qui lui est totalement déifié par Plenel.
On imagine que si Daesh existe, c'est aussi la faute de J-M le Pen ??
Plenel vit sur une autre planète faite de cosmopolitisme, de cohabitation merveilleuse de toutes les minorités, de respect de toutes les différences. Il n'arrive jamais à penser ce qu'est réellement une culture, il n'arrive pas imaginer que l'anthropologie (un gros mot pour lui) puisse autoriser le conflit, la haine ou la guerre. Bref, il voudrait vivre dans un monde qui n'a jamais existé et qui n'existera que dans l'esprit de quelques rêveurs.
Les musulmans d'aujourd'hui sont évidemment comparés aux Juifs d'hier. La France serait en marche vers une sorte de néo-IIIème Reich anti musulmans. Bref, les camps ne sont jamais très loin dans l'esprit de Plenel. On ne l'entend d'ailleurs plus beaucoup depuis les attentats successifs contre Charlie Hebdo, le Bataclan, et les divers égorgements et décapitations qui ont ensanglanté les pays ces derniers jours.