[Riboldi, Carolane] Les Mémoires de Triana Wellinger

Les Mémoires de Triana Wellinger

Résumé :

« L'histoire que je m'apprête à vous narrer pourrait ressembler à s'y méprendre à une galéjade comme celles que l'on se raconte autour d'un feu de camp, un soir d'été ; pourtant, je vais vous la partager telle qu'elle s'est déroulée, sans filtre ni exagération des faits, alors que je n'étais encore qu'une étudiante, il y a de cela treize ans. »

Septembre 2009. À la veille de sa rentrée en cinquième année au pensionnat d'Arckéone, Triana Wellinger assiste impuissante à l'agression de son frère sur la berge de Plegtone. Tétanisée, elle se prépare à vivre ses derniers instants lorsque surgit de la pénombre son salut, sous les traits d'une jeune femme aux yeux d'or. Triana pense ne jamais la revoir ; toutefois, elle ignore avoir croisé le chemin de celle qui la précipitera aux portes de son destin.

Mon avis :

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Certains auteurs lancent au visage de leurs lecteurs une multitude de personnages en espérant que ledit lecteur ne portera pas attention aux détails, certains auteurs se lancent dans des univers qui les dépassent et pensent révolutionner l’écriture en « créant » leur propre monde. C’est le cas de certains auteurs, donc. Pas celui de Carolane Riboldi.
Ici, comme elle a pu le montrer auparavant dans son recueil de nouvelles, l’auteure met l’accent sur son amour de la langue française et se dévoile comme une narratrice hors-pair capable en l’espace d’un peu plus de 500 pages de construire un univers logique, assez complexe pour bénéficier de détails intéressants, avec des personnages agréables, appréciables, et qui ne servent pas à habiller les murs. La prose de Madame Riboldi sait se faire tour à tour acérée, piquante, douce, enveloppante, et démontre surtout d’un véritable amour de la langue. Les mots utilisés le sont par choix, et, je l’avoue sans rougir, m’ont surprise par leur rareté dans notre langage commun. Ici, dans cette œuvre, l’on se trouve face à une déclaration d’amour pour la langue française qui n’empêche en rien à la lecture d’être fluide, et la plume agréable.
Ce qui me fascine dans l’écriture de l’auteure est cette véritable capacité à pouvoir d’un côté utiliser des mots devenus presque rares, inusités, puis d’un coup lancer un dialogue qui se fait dans un français parlé qui n’est pas pompeux, loin de là ! L’aptitude de l’auteure de mettre en avant ce français écrit qui lui est cher, tout en utilisant également merveilleusement bien la langue parlée est l’un des points forts de ce roman.
Mais il ne se réduit, bien sûr, pas à cela. Au contraire.
Si ce roman est fort, c’est qu’il est bien construit, et ce à tous les niveaux. Par son histoire, il entraîne le lecteur dans un monde nouveau où tout semble, dirais-je, féerique. Par ses personnages, il développe un petit groupe bien formé, agréable, où chacun joue son rôle. Par son univers, il donne envie d’en savoir plus, d’en avoir plus. L’auteure maîtrise l’art du suspens, ainsi que de la construction de son propre monde. Si, dans son recueil de nouvelles, elle a su nous entraîner dans des histoires plus horrifiques, ici c’est le fantastique, la fantasy, qui prend le relais. En reprenant des légendes, pourtant déjà mille fois vues et revues de diverses manières, Carolane Riboldi fait le pari d’offrir quelque chose de nouveau à ses lecteurs. Cet univers du clair-obscur, comme elle le nomme, réussit ce pari haut la main. En effet, ici, les lycans, sorcières et autres créatures mystiques reprennent vie sans perdre de leur saveur. Elles ne sont ni des effets de modes scintillantes au soleil, ni de pâles copies de légendes cauchemardesques. Non. Ici elles ont une nouvelle vie, une nouvelle fonction, et elles bénéficient d’un nouveau souffle.
Ainsi, sur le plan de l’écriture en elle-même mais également de l’histoire, de l’univers, du monde et de ses personnages, l’auteure entraîne son lecteur dans un monde presque gourmand, tant on en redemande.
Ne bénéficiant d’aucun temps mort, et sans pour autant créer de crise d’asthme, ce roman est une petite pépite à découvrir d’urgence. Le travail et le talent se combinent ici pour laisser place à une aventure sans pareille, et je l’écris : j’ai hâte de lire plus d’œuvres de Madame Riboldi.