#273 24 Septembre 2018 08:58:09
Bonjour !
<image>Bien que je l'ai fini dans l'après-midi d'hier, j'ai préféré laisser passer la nuit avant de venir vous parler de American Psycho de Bret Easton Ellis (Fiche BBM) dans l'espoir que mes impressions en profiteraient pour s'organiser un peu (pas sûre que cela ait fonctionné) et surtout pour laisser le temps à la tension de retomber.
Avis : Pour commencer, bien que cela ait peu de rapport avec le texte en lui, j'aime beaucoup cette couverture de 10/18, plus en tout cas que celle des autres éditions que l'on voit présentées sur LA, car elle mélange deux aspects de ce roman : une certaine classe de la caste financière dans laquelle évolue Patrick Bateman et un mystère inquiétant qui met mal à l'aise dès l'entrée. Voilà pour l'introduction, rentrons dans le cœur du sujet.
Avec un thème comme le sien, il s'agit évidemment d'un livre dérangeant, mais avec les choix de l'auteur qui ne nous épargne aucun détail, cela devient un roman écœurant. Les dernières 100-150 pages ont été difficile à lire. C'est extrêmement rare qu'un roman m'atteigne à ce point mais je les ai lu avec un début de mal de ventre et le corps tout tendu dans l'attente de la prochaine scène de viol/torture/meurtre, choisissez la perversion qui vous convient le mieux (et je n'ai pas encore mentionné l'infanticide et le cannibalisme). Je commence par cela bien que cela ne soit pas l'essentiel du roman car c'est ce que les gens en retiennent surtout (à en juger les différents retour qui m'en avait été fait et les commentaires présents sur la fiche BBM) et pour prévenir les personnes que de tels passages (décrits en détails, je le souligne une nouvelle fois) rebuteront définitivement. Ce paragraphe fera office de Trigger Warning, je crois que c'est comme cela qu'on dit.
Car pour ceux qui se sentent aptes à dépasser ces passages, cela reste un roman que je conseillerai volontiers. Je le trouve extrêmement bien construit. Une construction qui sert la montée en puissance dans la perversion mais surtout dans la compréhension de la personnalité du personnage de Pate Bateman. Il aura été souligné la description systématique des vêtements et effectivement, elle est tellement systématique que cela en devient ennuyant, voir irritant. Pourtant, dans ce roman narré à la première personne du singulier, cela fait partie intégrante de la construction du personnage dont la personnalité obsessionnelle le fait se raccrocher à des repères (l'habillement de luxe, l'électronique audiovisuel de luxe, les restaurants de luxe). Oui, il est beaucoup question de luxe. Nous sommes dans la "haute" société financière new yorkaise qui brasse des millions et ne sait qu'en faire. Une société déjà pervertie à la base qui s'amuse à agiter des billets de banque sous le nez des SDF avant d'y mettre le feu par exemple. Une société qui englobe des individus fats et dont la vie est déjà vide de sens. Bateman ressent la vacuité de ce mode de vie même s'il l'exprime clairement que vers la fin du roman et qu'attendre d'une psychologie instable d'autre qu'elle prenne au pied de la lettre la considération des femmes comme des morceaux de viande ? Il ne s'agira plus seulement de les "baiser"... En réalité, tous les passages où il se comporte socialement avec ces amis paraissent tellement vide intellectuellement, tellement creux, qu'au début on attend presque avec impatience qu'il se passe quelque chose. Que quelqu'un fasse quelque chose de sa vie. Or il faut faire attention à ce que l'on souhaite car quelqu'un va faire quelque chose et ce sera l'horreur. J'ai l'impression, surtout vers la fin quand il commence à manger n'importe quoi (cela commence avec du sable puis...) que Bateman cherchait à se remplir, à combler un trou, un vide énorme dans sa vie. Ce n'est absolument pas une justification, juste une tentative d'explication à un comportement hors norme.
C'est vraiment un personnage intéressant, symptomatique de son monde. Egocentrique (particulièrement bien amené avec leur incapacité à tous à reconnaître les gens autours d'eux, comme si l'identité de l'autre n'avait finalement pas grande importance), fasciné par l'apparence (on a déjà parlé de la question de l'habillement) et consumériste. J'allais oublié raciste et homophobe. En réalité, Bateman ne fait que traduire la perversion de son monde de manière plus... littérale (et littéraire ^^).
Je terminerais avec ce qui m'aura (narrativement) déstabilisé. Dans un premier temps, les "chapitres" concernant des groupes de musique dont je n'ai pas vraiment perçu l'intérêt dans l'histoire (même si je me suis écouté l'album Duke de Genesis après qu'il en ait été fait un tel éloge) et dans un second temps : la fin qui me laisse la très désagréable impression d'être passée à côté de quelque chose. Fantasme ? Je trouve ça un peu décevant. Mais de l'autre côté, il n'est guère crédible qu'il ne soit pas plus inquiété que cela. Il faudrait sans doute que je relise cet ouvrage avec plus d'attention sur la fin mais je ne m'en sens pas le courage maintenant. Dans quelques année peut-être. Comme je ne me sens pas le courage non plus de visionner son adaptation tout de suite. Tant pis pour Christian Bale. J'essayerai plus tard quand l'impression du livre sera moins grande sur mon esprit.
En conclusion, c'est un très bon roman à ne pas mettre entre toutes les mains. Et je crois que je ne suis pas encore prête pour Sade. Oui, il y a peu de rapport mais je les rapprochais dans mon esprit...
Ah ! J'allais oublier le détail qui m'a fait sourire et grincer des dents à la fois ! Bret Easton Ellis donne, en 1991, date à laquelle est sorti American Psycho, une idole à son personnage principal : ... Donald Trump. L'actuel président américain suscitait l'admiration d'un psychopathe - de fiction certes, mais quand même...
Mon dieu (celui que vous voulez), cet avis est encore plus long que je ne l'avais prévu mais le livre le méritait je pense. J'ai totalement changé de registre avec ma nouvelle lecture et pour rompre avec lui, j'ai donc décidé de me plonger dans La compagnie blanche de Arthur Conan Doyle dont j'ai énormément aimé la préface qui m'a appris que Conan Doyle se désolait du succès de Holmes et Watson car ils jetaient une ombre sur ses ouvrages qui lui tenaient réellement à cœur.
Bravo à ceux qui auront lu mon avis jusqu'au bout. Il faut vraiment que j'apprenne à ne pas m'étendre.
Bonne journée, bonne semaine et bonnes lectures à tous !
Dernière modification par Alhweder (24 Septembre 2018 09:44:51)