[Suivi Lecture] Mirmont

 
  • Widukind

    Espoir de la lecture

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    #191 18 Avril 2018 23:29:21

    Merci à tous pour avoir pris la peine de répondre à ma question. Je me renseignerai sur les revues que vous avez citées et que je ne connais pas pour la plupart d'entre elles.
  • Mirmont

    A la découverte des livres

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    #192 23 Avril 2018 17:59:14

    Oui, merci pour vos réponses (et merci pour ta question digne d'intérêt Widukind) !

    Trois derniers livres lus...

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    Mémoires de Raymond Aron (1983) - Parues l’année même de sa mort, ces mémoires compilent plus de 50 années d’analyses du “spectateur engagé” libéral. Cet aspect est bien la limite majeure de l’ouvrage : il n’y est que très rarement question de sa vie personnelle (quelques pages sur sa famille au début, une rapide et douloureuse évocation de la mort de sa fille Emmanuelle au milieu, quelques autres sur l’embolie subie en 1977 à la fin) ou même de ses influences intellectuelles et philosophiques initiales (rapidement amalgamées au bref récit de ses études) - autant de sujets qui auraient pu être intéressants mais qu’il semble délaisser (sans doute du fait, s'agissant de ses proches, d'une très honorable pudeur qui correspondrait bien au personnage). Au lieu de cela, ces mémoires consistent en une présentation chronologique des différentes analyses et positions défendues tout au long de sa vie, évoquant les articles et les engagements tenus, rappelant les louanges reçues et les critiques endurées ; une sorte de sempiternelle justification de ses (certes avisés) commentaires d’actualité. Je m’attendais à un peu plus de hauteur et de recul, mais cela ne m’a pas empêché d’être intéressé du début à la fin. Ma sympathie et mon estime envers Aron en sont sorties globalement renforcées. 12/20.

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    La Tragique Histoire du Docteur Faust de Christopher Marlowe (première publication en 1604) - Contemporain de Shakespeare dont il fut l’une des influences directes (et même parfois le co-auteur), au talent d'ailleurs non moins inférieur et figure centrale du très prodigue théâtre élisabéthain, Marlowe décela très rapidement le potentiel de l’histoire du magicien et alchimiste Faust (avec qui il partage nombre de traits communs), portée à la connaissance du public lettré anglais peu de tant auparavant. Tragique et burlesque, la pièce péche par son caractère disparate et déséquilibré qui s’explique aisément par les nombreux remaniements* subis après la mort de Marlowe en 1593, à seulement 29 ans. Elle conserve toutefois toute sa force et son intérêt, et l’on comprend aisément la fascination que cette interprétation de la légende de Faust a pu avoir sur Goethe et - de Heine à Butor - sur de nombreux écrivains depuis lors (sans parler de la musique et du cinéma - je me réserve d’ailleurs les films de Murnau et de Sokourov une fois lue la version gothéenne). À noter l’avantage non négligeable de l’édition dans laquelle j’ai lu le texte - dans la collection Classiques en poche des Belles Letres, des “Budés” mais en moins chers - qui met en regard la version originale et la traduction, pratique et agréable pour ce type de textes. 14/20.

    * La version de 1604 ne semble d’ailleurs plus avoir la faveur des philologues


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    Opuscules philosophiques choisis de Gottfried Wilhelm Leibniz (première publication en 1684 pour le plus ancien) - Ce petit volume regroupe six textes rédigés en latin et publiés entre 1684 et 1710, complémentaires des oeuvres majeures de Leibniz : Causa dei (La cause de Dieu) s’incrit dans la suite de la Théodicée et De ipsa natura (De la nature en elle-même) préfigure la Monadologie. On y trouve par ailleurs une réfutation serrée et parfois acerbe, article par article, des Principia philosophiae de Descartes (que je n'ai pas encore lus par ailleurs), aussi bien d’un point de vue métaphysique que strictement physique. Se lit - comme tout le reste de l’oeuvre du génial allemand - avec une intense jubilation intellectuelle. 16/20.

    Un dernier petit mot concernant mes lectures en cours : je retourne en partie aux "pavés" (j'y ai pris goût avec Platon et Proust dernièrement !) avec un volume de Gide en version Pléiade et un de Simone Weil en version Quarto. Un petit mot sur le premier dans lequel j'ai lu pour le moment les 8 premiers romans/récits du volume : si j'ai trouvé les Nourritures terrestres en deçà de leur réputation et quelques petits récits peu enthousiasmants (style mis à part), en revanche Le voyage d'Urien, Le Prométhée mal enchaîné et surtout Paludes (auquel, noté individuellement, j'aurais surement attribué un 18 sur 20) m'ont beaucoup plu. À suivre.

  • Widukind

    Espoir de la lecture

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    #193 24 Avril 2018 23:56:41

    Bonsoir Mirmont,

    Quelle oeuvre tu conseillerais pour rentrer dans l'oeuvre de Leibniz ?
  • Mirmont

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    #194 25 Avril 2018 15:35:58

    Bonjour Widukind. Ces opuscules présentés juste au-dessus me paraissent justement constituer une bonne introduction à son oeuvre. Les textes sélectionnés couvrent une grande période (1684 pour le premier, 1710 pour le dernier) et un large éventail de thèmes et d'idées qui ont été ensuite (ou avant en fonction) été systématisés et traités plus en profondeur dans le Discours de métaphysique, la Monadologie et la Théodicée ; aussi ces opuscules qui se lisent relativement facilement peuvent constituer une aide utile pour une lecture ultérieure de ces oeuvres. À défaut, il existe de nombreux livres de vulgarisation sur Leibniz et par ailleurs un bon cours de Bouveresse au Collège de France entre 2008 et 2010. De mon côté, j'ai débuté avec Les Nouveaux essais sur l'entendement humain et le Discours de métaphysique sans préparation aucune, ce que je ne conseillerais pas : c'est un peu ardu pour une toute première prise de contact avec le système leibnizien.
  • Widukind

    Espoir de la lecture

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    #195 27 Avril 2018 23:49:45

    Mirmont a écrit

    Bonjour Widukind. Ces opuscules présentés juste au-dessus me paraissent justement constituer une bonne introduction à son oeuvre. Les textes sélectionnés couvrent une grande période (1684 pour le premier, 1710 pour le dernier) et un large éventail de thèmes et d'idées qui ont été ensuite (ou avant en fonction) été systématisés et traités plus en profondeur dans le Discours de métaphysique, la Monadologie et la Théodicée ; aussi ces opuscules qui se lisent relativement facilement peuvent constituer une aide utile pour une lecture ultérieure de ces oeuvres. À défaut, il existe de nombreux livres de vulgarisation sur Leibniz et par ailleurs un bon cours de Bouveresse au Collège de France entre 2008 et 2010. De mon côté, j'ai débuté avec Les Nouveaux essais sur l'entendement humain et le Discours de métaphysique sans préparation aucune, ce que je ne conseillerais pas : c'est un peu ardu pour une toute première prise de contact avec le système leibnizien.


    Je te remercie pour cette réponse détaillée. En effet, je pense que je vais lire avant tout un ouvrage d'introduction pour rentrer dans la pensée Leibnizienne et ensuite commencer ses oeuvres dans l'ordre chronologique comme j'en ai l'habitude.

  • Mirmont

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    #196 30 Avril 2018 16:12:08

    > Joyce

    Désolé pour la réponse tardive Joyce, je n'ai pas eu accès à mon ordinateur ces derniers jours. J'ai été évidemment séduit par ce recueil, par l'élégance (néo-) classique des vers, véritable travail d'orfèvre et comme toujours par l'intelligence et la sensibilité extrêmes de Valéry. Néanmoins, La Jeune Parque que j'ai lu il y a quelque temps m'a semblé (mais je suis loin d'être un expert en poésie, c'est à vrai dire le genre avec lequel je suis le moins familier) peut-être formellement supérieur à Charmes que j'ai découvert ici (mais également un peu plus hermétique).

    > Widukind

    Je t'en prie. Bonne découverte !
  • Mirmont

    A la découverte des livres

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    #197 03 Mai 2018 18:37:25

    Trois derniers livres lus...


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    L’Homme pris au piège de Léon Chestov (textes écrits entre 1899 et 1908) - Ce petit ouvrage regroupe trois études - deux publiées de son vivant, une retrouvée dans ses papiers après sa mort - sur Pouchkine, Tolstoï et Tchekov. Au-delà de la simple critique littéraire biographique, Chestov cherche ici à définir la manière dont ces trois monstres sacrés de la littérature russe ont pu répondre - dans leur vie et leur oeuvre, qui pour lui ne font qu’un - aux questions qui hanteront Chestov toute sa vie et qui peut se résumer (à mon sens), à celle-ci : comment, malgré les plates promesses d’un positivisme tromphant et naïf, doit se comporter l’Homme face à l’apparente absurdité de l’existence, aux limites trop évidentes de sa raison et à son absolue solitude ? En creux, il nous aide à mieux comprendre la séduction qu’exerce cette littérature russe qui, bien que tardive, maladroite et imparfaite, a dépassé pendant un siècle par ses ambitions philosophiques toutes les autres et a même subjugué les plus fins lettrés français. Et, nous dit Chestov : triompher de l’esprit français, c’est triompher du monde entier. Une lecture intéressante, plus sans doute pour les prémices de la philosophie existentielle chrétienne qu’elle laisse entrapercevoir que pour son sujet proprement dit. 13/20.


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    Poésies de Paul Valéry (première édition dans cette collection en 1929) - Constitué de Charmes (dans lequel figure le très célèbre Cimetière marin), d’Album de vers anciens et de trois pièces pour opéra (qui furent jouées), ce recueil est idéal pour sa familiariser avec la poésie exigeante de Valéry. Il faut savoir passer outre l’hermétisme quasi-mallarméen parfois déconcertant des poèmes (“mes vers ont le sens qu’on leur prête”, disait-il) pour admirer l’harmonie générale des poèmes, la prosodie finement structurée et l’élégance formelle quasiment irréelle des vers - rien n’y est à jeter. Je préfère le Valéry prosateur - comme je l'ai laissé entendre à Joyce, je ne suis pas un très grand amateur de poésie en général - mais j’ai tout de même une admiration sans borne pour le poète. 15/20.

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    Trans-Atlantique de Witold Gombrowicz (première édition en 1952) - Comment décrire ce court récit ? Comment en rendre compte les paradoxes ? Autofiction burlesque est le qualificatif qui me semble le mieux caractériser cette oeuvre très particulière. Pamphlet contre le mythe national polonais, contre les hiérarchies et idées traditionnelles de sa vieille terre (ce livre a évidemment beaucoup choqué en Pologne - jusqu’à très récemment), Gombrowicz raconte en un récit absude, dans une langue mi-archaïsante (il s’inspire du gawęda, récit épico/folklorique traditionnel qui a notamment gagné ses lettres de noblesse chez le grand Mickiewicz, figure incontournable de la polonité que Gombrowicz pastiche) mi-novatrice, ses premières années d’émigration en Argentine dans les années 40. Une sorte de récit kafkaïen, en plus baroque et “foutraque” - absolument unique et génial. 18/20.

    J'ai par ailleurs un peu avancé dans ma lecture des oeuvres romanesques de Gide. L'Immoraliste et les Caves du Vatican, sans me déplaire, m'ont légèrement déçu (il faut dire que mes attentes étaient élevées). A contrario, La Porte étroite dont je n'attendais rien m'a complètement subjugué - avec Paludes, ce sont pour moi (pour le moment) les deux joyaux de ce volume.
  • Cachal_eau

    Espoir de la lecture

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    #198 11 Mai 2018 11:49:13

    Je possède ce recueil de poésies de Valéry dans ma PAL. Je l'avais acheté deux jours après avoir vu Le vent se lève d'Hayao Miyazaki au cinéma. J'ai lu quelques pages que je n'ai pas comprises et depuis il attend bien sagement que j'y revienne. Vu mon avancée dans les poésies d'Hugo dernièrement, c'est pas gagné.

    J'ai entendu parler de Gombrowicz pour son livre Cosmos. D'assez bon retour d'ailleurs à mon souvenir. Je m'y intéresserais un peu plus lorsque ma PAL sera redevenu raisonnable. (Enfin, je dis ça mais ça m'a pas empêché d'acheter le livre de l'intranquillité de Pessoa dernièrement).

    Concernant Gide, j'avais lu L'immoraliste et je me souviens plus du tout de l'histoire. Et j'ai les faux-monnayeurs en attente.
  • honha

    Surfeur des couvertures

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    #199 11 Mai 2018 12:33:00

    Tiens, le Vent se lève. J'ai vu celui de Ken Loach. Deux titre identiques, c'est drôle.
    En ce qui concerne Gide, je ne peux que te conseiller Les faux-monnayeurs (avant ou après la Lettre au père, cela n'a pas d'importance :D). Son Retour de l'URSS est également très intéressant. Et puis Les caves du Vatican, dans un autre genre, vaut le détour !
  • Mirmont

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    #200 11 Mai 2018 15:58:42

    > Cachal_eau & honha

    Je suis justement en train de lire les Faux-monnayeurs et j'abonde dans le sens de honha : c'est une excellente lecture (à moins que le dernier tiers ne me démente tout à fait - ce qui a peu de chance d'arriver). Cependant, je mettrais - de manière parfaitement subjective - La Porte étroite et Paludes légèrement au-dessus. Les caves du Vatican en revanche m'ont laissé une impression assez faible : le propos, en dehors de la farce (de la sotie, pour parler gidien) et de la construction atypique et intéressante, m'a paru faible et assez mal exploité. En revanche, comme tout Gide, le style y est excellent - rien que pour cela ses oeuvres sont à conseiller sans réserve. Curieux également de lire Retour de l'U.R.S.S (qui n'est pas dans le volume que je lis actuellement, hélas).

    J'ai entendu parler de Gombrowicz pour son livre Cosmos. D'assez bon retour d'ailleurs à mon souvenir. Je m'y intéresserais un peu plus lorsque ma PAL sera redevenu raisonnable. (Enfin, je dis ça mais ça m'a pas empêché d'acheter le livre de l'intranquillité de Pessoa dernièrement).


    Si tu n'as que peu de place dans ton programme de lecture et que tu ne dois choisir qu'un ouvrage de Gombrowicz, alors Ferdydurke est surement à privilégier. J'ai préféré de mon côté Les Envoûtés et Trans-Atlantique (je n'ai pas encore lu Cosmos) mais Ferdydurke est une oeuvre (me semble-t-il) plus fondamentale.

    Je possède ce recueil de poésies de Valéry dans ma PAL. Je l'avais acheté deux jours après avoir vu Le vent se lève d'Hayao Miyazaki au cinéma. J'ai lu quelques pages que je n'ai pas comprises et depuis il attend bien sagement que j'y revienne.


    Je n'ai pas vu le film (pour tout dire, je n'ai vu que deux films de Miyazaki) et je ne comprenais pas pourquoi tu faisais ce lien - une recherche Google m'a rapidement renseigné ! En ce qui concerne l'absence de compréhension des vers de Valéry, c'est relativement normal : c'est une poésie assez hermétique. Vous parliez ailleurs à raison des innombrables interprétations de La Métamorphose en particulier et de l'oeuvre de Kafka en général : des oeuvres de Valéry en vers comme La Jeune Parque et même en prose comme Monsieur Teste en ont également donné lieu à beaucoup. Il faut accepter, je pense, d'être un peu perdu pour bien apprécier ce type de poésie : la musicalité et la prosodie ici priment.

    Merci en tous cas pour votre passage en ces lieux et belles lectures à vous deux !