#69 23 Décembre 2011 08:47:32
Découvert récemment, et adoré malgré quelques appréhensions. Le personnage d'Emma, en particulier, m'a énormément plu parce que j'avais l'impression terrible de la comprendre et de me retrouver dans certains traits de son caractères, dans certains de ses choix. Son histoire est bouleversante; totalement incomprise par son entourage, elle se détruit à petit feu jusqu'au coup d'éclat final.
En prime, voici une version raccourcie de mon billet sur le sujet (présence de spoiler si jamais vous ne savez pas comment tout cela se termine):
[...]Les sentiments, les pensées d’Emma Bovary sont merveilleusement analysés et transmis au lecteur. Flaubert réussit à la rendre terriblement vivante et bouleversante. Une telle justesse dans la complexité du caractère de ce personnage est juste merveilleuse et c’est avec un peu d’effroi que je me suis au fil des pages, énormément reconnue dans ses traits. Le drame d’ Emma Bovary est d’autant plus terrible qu’elle n’a extérieurement aucune raison de se plaindre : un mari sage, tendre et aimant, une jolie petite maison, une charmante enfant, des revenus lui assurant un certain confort… Mais cette vie est trop étroite pour elle, elle y suffoque, elle qui se nourrit de romans et de chimères. Elle a besoin de rêve, de grandeur, d’émotions fortes. Le quotidien l’étouffe et la tue à petit feu. Alors, elle le fuit de toute son âme, de toutes ses forces pour se sentir vivante, à la recherche d’un bonheur qui ne sera à chaque fois que de courte durée. Eternellement insatisfaite, Emma Bovary s’enlise peu à peu dans les soucis, refusant d’abord de les voir et se trace un destin funeste. Alors que la raison l’entoure, elle est incapable de changer et se dirige inexorablement vers une fin terrible et spectaculaire, à l’image de ses rêves, de la violence de ses émotions, de son goût du spectacle. Elle met sa vie en scène, croyant ainsi la maitriser, mais elle se retrouve prise au piège, et la mort est effectivement la seule délivrance qu’elle peut espérer. Seulement même cette dernière se fait attendre et sera l’occasion de nouvelles souffrances. Ce passage est à la fois magnifique et terrible.
Emma Bovary est une écorchée-vive, incomprise par son entourage et utilisée puis jetée par les hommes qu’elle a aimé. Elle se nourrit d’illusions, ce qui rend ses chutes encore plus brutales et douloureuses, mais personne ne le voit. Elle est terriblement seule malgré ce ballet de personnages l’entourant et sa détresse m’a profondément émue.
D’ailleurs, peu importe que l’on sache avant même d’ouvrir le livre comment tout cela termine, c’est le cheminement qui compte. Et dieu, que celui emprunté par Emma Bovary est tortueux ! Mais il n’aurait pu être autre. Et c’est ce qui fait toute la beauté, la force, la violence de ce roman. Pendant ma lecture, j’avais en tête, cette phrase d’Oscar Wilde Dire d’un livre qu’il est moral ou immoral n’a pas de sens. Un livre est bien ou mal écrit – c’est tout. Elle convient parfaitement à ce roman. C’est vraiment un ouvrage terrible dont on n’a aucun mal à comprendre qu’il ait fait scandale. Oui ce livre est immoral, sulfureux et tout ce que l’on veut, mais peu importe ! Cela ne nous dit rien de lui, ça n’a pas de sens. Il est juste puissamment beau et bouleversant. Et c’est cela qui compte !
[...]
Quant à le faire étudier au collège, et bien pourquoi pas? Je dévorais les classiques à cette époque là, même si je n'en saisissais pas toute la portée. Mais peu importe, cela ne m'a pas empêchée de faire de très belles découvertes littéraires, de former mes goûts. Après comme toujours, c'est aussi une question de maturité de l'élève. Tout le monde n'est pas prêt à faire la même lecture au même moment. Et c'est un peu le problème des lectures communes imposées, mais cela n'a pas grand chose à voir avec ce titre en particulier.