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  • domi_troizarsouilles

    Propriétaire d une PAL boulimique

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    #251 02 Mars 2025 16:40:48

    Bonjour,

    Me voici avec deux autres livres lus récemment, et commentés entre-temps. Je mets certes quasi-toujours une appréciation dans la limite des 400 caractères prévus par Livraddict, mais parfois c'est un peu difficile d'y exprimer tout ce qu'on a ressenti à la lecture d'un livre!
    Ainsi, plutôt que vous renvoyer systématiquement vers Babelio (où j'encode de toute façon tous les commentaires que je prends la peine de rédiger), je vais essayer de les noter ici aussi, et y ferai référence dans l'un ou l'autre challenge si nécessaire.

    Bonne lecture!




    On commence par

    Matrices de Céline Denjean,
    lu en broché, acheté d'occasion je tiens à le préciser - 17/20

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    Synopsis : En plein mois de décembre, une terrible tempête se déchaîne sur les Pyrénées. Sous la pluie battante, une jeune femme enceinte qui court à perdre haleine est percutée par une camionnette. Avant de mourir, elle murmure quelques mots en anglais : « Save the others ». Qui est cette femme sans identité ? Que cherchait-elle à fuir ? Que signifie la marque étrange sur son épaule ? Et qui sont ces autres qu’il faudrait sauver ? Les gendarmes Louise Caumont et Violaine Menou se lancent alors dans une enquête hors-norme.
    Au fil de leurs investigations, elles réalisent qu’elles sont sur la piste d’un trafic de femmes extrêmement organisé. Dès lors, les enquêtrices comprennent que l’horloge tourne pour d’autres femmes, sans doute prisonnières quelque part, et dont la vie ne tient plus qu’à un fil.


    Mon avis :
    J'ai acheté tout récemment le roman « La mue », dont le résumé m'attirait particulièrement… sans savoir à ce moment-là qu'il s'agit d'un quatrième opus dans lequel apparaissent quelques personnages récurrents, dont la gendarme Louise Caumont et sa subordonnée et amie Violaine Menou. Or, ceux qui me suivent le savent : je n'aime vraiment pas commencer une série autrement que par le tome 1, du moins quand c'est possible. Il me restait donc à acquérir sans tarder ce fameux premier tome, en l'occurrence ce livre-ci, qui sera sans doute très vite suivi par les deux autres avant d'arriver à « La Mue ».

    À peine était-il arrivé à la maison, je l'ai commencé, et j'ai été séduite, même si la construction du roman m'a laissée quelque peu perplexe. C'est que l'on suit, en quelque sorte, deux affaires en parallèle, et on sait d'évidence qu'elles sont liées. Cependant, si l'une de ces deux « affaires » est l'enquête même menée par la gendarmerie, l'autre est une histoire familiale, plus précisément l'histoire d'une espèce de secte ultra-catholique bien implantée dans la vie de quelques-uns, jusqu'au drame, mais le lien avec l'enquête principale, qui existe réellement, reste assez ténu.
    Pour le dire autrement : on n'a pas ici le point de vue de la gendarmerie avec l'enquête et tout et tout d'un côté, et le point de vue des criminels et leurs actions de l'autre côté, non ! On a plutôt, à côté de l'enquête menée par la gendarmerie, comme une histoire annexe, voire anecdotique, certes importante et révélatrice de l'état d'esprit des « méchants ». Mais en tout cas cette histoire dans l'histoire n'a pas le même poids final que l'enquête, et ne rejoint que partiellement la résolution de l'enquête… tandis que le sort des criminels fait l'objet d'un épilogue un peu rapide et pas ultra-convaincant !

    Cela dit, à part cette petite réserve de départ, qui m'a titillée à plusieurs reprises lors de ma lecture mais sans réellement gêner – après tout, c'est un choix de l'autrice, alors pourquoi pas ? - ; bref, à part ce point inhabituel, qui a le mérite de casser une quelconque linéarité dont cette enquête aurait pu souffrir autrement, le roman est bien construit, avec des personnages tout à fait crédibles (même dans cette histoire « à côté ») et, surtout, développe un sujet que j'ai rarement vu exploité même dans des polars, et qui fait froid dans le dos !
    C'est que l'autrice aborde ici, à travers une première victime, femme inconnue et enceinte jusqu'aux yeux qui s'est vraisemblablement échappée…mais d'où ? comment ?; bref, l'autrice aborde ici le thème sensible de la GPA – autrement dit des mères porteuses – strictement interdite en France ! (En Belgique, je le signale parce que c'est chez moi, la loi semble plus floue, et plus permissive, mais je ne suis pas spécialiste du sujet et ne vais pas m'attaquer à ça dans le cadre de ce commentaire !) Pour revenir à la France : non seulement le sujet est ultra-sensible car, outre son interdiction, il soulève indirectement le drame de tant de couples en mal d'enfants… mais ici, il est aggravé par le fait qu'il s'agit de mères porteuses « forcées » ! Je le mets sous spoiler pour ne pas divulgâcher :

    Spoiler (Cliquez pour afficher)

    on parle (un peu) des « usines à bébés » quelque part au Nigéria, où des jeunes femmes africaines sont violées à tour de bras jusqu'à une éventuelle fécondation, et le bébé leur est retiré dès la naissance pour être « vendu » à de plus riches familles, soit localement, soit à des Européens qui veulent bien d'un petit Noir – ce côté-là est assez peu développé, restant comme une menace pour une autre catégorie de filles ! Ce sont celles qui ont déjà enfanté au moins une fois et qui, dès lors considérées comme fertiles, se voient implanter un foetus alors qu'elle n'ont rien demandé, rien accepté, rien signé, et sont ensuite envoyées en Europe – ici en France – où elles porteront le bébé d'un couple qui n'a pas réussi à avoir d'enfants ni naturellement ni par FIV, comme un ultime moyen d'avoir « leur » enfant en y mettant le prix ! Et bien sûr, après avoir donné naissance à ce bébé qui n'est pas le leur, ces filles se retrouvent dans les réseaux de prostitution, toujours sous la menace d'être renvoyées dans une « usine à bébés » au pays si elles tentent de se rebeller.


    Fiction ou réalité ? On voudrait que ce soit une fiction poussée un peu à l'extrême, mais l'autrice ne manque pas de signaler çà et là dans sa narration des « vrais cas » semblables qui ont eu lieu en France, ce qui rend les choses encore plus dures ! Ainsi, même si ça termine bien pour au moins une des victimes, c'est une victoire (de la gendarmerie) qui a un goût extrêmement amer…

    Je ne peux terminer ce commentaire sans m'attarder un moment sur les acteurs de cette histoire, et certainement sur la personnage principale. Ça semble immanquable dans les romans policiers : notre Louise est une flic cabossée, blessée par un épisode dur de son passé, si bien qu'elle a choisi de rester célibataire et sans enfants – ce qui n'empêche pas cette enquête très dure de la toucher profondément, et j'étais toute réjouie (dans les limites de ce qui peut être réjouissant dans un tel roman) d'avoir compris pourquoi avant que ce soit expliqué !
    Elle est dure avec elle-même, limite asociale, et très froide envers ses subordonnés, dont un jeune marié qui a réellement peur d'elle ! Heureusement, et ça c'est plus rare dans ce genre de roman, le côté sombre de Louise est (très largement) compensé, "équilibré" par le personnage positif, sympathique et tout autant travailleuse qu'est sa collègue Violaine, apportant une touche très humaine avec en plus son mari (qu'on voit assez peu, cela dit) et son gamin dont Louise est la marraine. Un vrai bol d'air dans une ambiance autrement très tendue !

    Le tout est servi par une écriture efficace, sans trop de fioritures inutiles et sérieusement documentée – pour preuve, ces références à des cas réels, comme j'ai mentionné plus haut. Toutefois, l'émotion n'est jamais bien loin, même à travers le personnage dur mais finalement bien fragile de Louise, ou même dans l'histoire que je ne peux m'empêcher de désigner comme « à côté » : si le personnage du père et fondateur de cette espèce de secte ultra-catho est réellement détestable, on ressent une vague pitié pour son fils trop mou qui ne cherche rien d'autre que plaire à ce père qui ne le comprend pas !
    Et pour ne rien gâcher, toute l'histoire se déroule dans cette partie de la France que j'ai appris à aimer au fil des ans : c'est que Louise appartient à la brigade de Tarbes, petite ville méconnue mais où vit l'un de mes plus grands amis au monde, et où j'ai été à de nombreuses reprises depuis notre rencontre en 1995 ! Dès lors, même si je ne maîtrise certainement pas la géographie de cette région-là, plus d'un lieu évoqué ne m'était pas inconnu, que ce soit de nom ou parfois parce que j'y ai mis les pieds à l'une ou l'autre occasion, ça a toujours un petit côté "satisfaisant" !
    Inutile de dire que j'ai bien commandé les deux livres suivants (avant « La mue ») et que je ne manquerai pas de m'y plonger dès que j'aurai terminé les quelques autres livres que j'avais déjà, d'abord prévus pour ce début de mois de mars.





    Je voyage seule de Samuel Bjørk,
    lu en broché (édition de 2015), emprunté en bibliothèque - je détaille dans mon commentaire ;) - 16/20

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    Synopsis : Elles n'avaient que 6 ans ...
    En pleine forêt norvégienne, une enfant est retrouvée pendue à un arbre. Sur son dos, un cartable d'écolière; autour de son cou, une pochette d'une compagnie aérienne avec ces mots : "Je voyage seule".
    L'inspecteur Holger Munch, chargé de l'enquête, fait appel à son ancienne coéquipière Mia Kruger, jeune policière de génie. Quand Mia découvre le chiffre 1 inscrit sur un doigt de la victime, la tension monte d'un cran : il y aura d'autres meurtres identiques, assure-t-elle. La suite lui donne raison... Jusqu'où ira le tueur ? Comment arrêter le massacre ? Une enquête terrifiante, qui frappera les deux policiers plus intimement qu'ils ne le croient...


    Mon avis :
    Deuxième livre « papier » que j’emprunte en bibliothèque, après des années loin des bibliothèques réelles (mais un certain nombre d’emprunts virtuels depuis le covid), c’était un choix au hasard, comme ça m’arrivait si souvent autrefois en déambulant dans les rayonnages ! Des livres qui ne sont pas ou plus à la mode, dont personne n’entend plus parler sur les réseaux sociaux ou sur les plateformes littéraires (si ce n’est par « accident »), et puis tout à coup une tranche attire l’œil – plus rarement la couverture même, puisque en bibliothèque, seules quelques rares nouveautés sont présentées de face.
    À vrai dire, c’est « Le hibou » qui avait capté mon attention, je ne saurais dire pourquoi ! Voyant qu’il y avait un autre livre du même auteur juste à côté, en l’occurrence celui-ci, j’ai quand même vérifié (merci Babelio et/ou Livraddict !) s’il ne s’agissait pas à tout hasard d’une série. Eh bien si ! Bien m’en a pris, et c’est donc le tome 1 de la saga policière dédiée à Mia Krüger et Holger Munch que j’ai donc finalement emprunté, alors que le titre me laissait quelque peu perplexe, et que la couverture désormais découverte de ce livre en édition brochée ne m’aurait certainement pas attirée…

    Je ne vais pas résumer ici une affaire dont le début est très bien exposé en quatrième de couverture, et pour cela je salue le travail de l’éditeur – ce n’est hélas pas toujours le cas !
    Ce qui est assez particulier ici, même si ça se retrouve d’une façon ou d’une autre dans bien d’autres romans policiers, c’est que l’auteur a construit tout son polar selon une méthode « de l’entonnoir », de façon distincte, mathématique, et certainement maîtrisée. Je ne sais pas si une telle technique peut s’appliquer en littérature, mais je ne saurais mieux l’exprimer que par ces mots ! En tout cas, les premiers chapitres ratissent large, et apparemment loin de l’enquête - même si, on s’en rendra compte plus tard, tous les éléments sont déjà là, disposés apparemment au hasard, pour arriver à la résolution finale.

    Avec une telle technique, l’auteur nous présente pléthore de personnages, qui donnent une première impression, quelque peu négative il faut bien le dire, de perdre un peu le lecteur. C’est que, comme dans plusieurs (bons) livres ou films policiers, il a choisi d’individualiser très fort chaque intervenant dans l’histoire, genre : on nous raconte tout un tas de détails sur le gars qui va découvrir le premier cadavre, on en fait un personnage à part entière avec sa description assez poussée, son contexte de vie, ses sentiments etc. alors qu’il va quand même complètement disparaître ensuite ! En soi, c’est très sympa de présenter l’un ou l’autre personnage ainsi, car ça le rend d’un seul coup très proche, on se dit qu’on pourrait être, nous, le malheureux témoin qui va découvrir une pendue (une enfant!) dans la forêt près de chez nous (si tant est qu’il y ait un quelconque espace vert dans notre voisinage, ce qui est bien le cas pour moi, même en pleine capitale !).
    Le problème, c’est que l’auteur utilise cette « technique » pour absolument tous les personnages, qu’ils soient principaux, secondaires, ou juste « de passage », et ce du début à la toute fin du livre ! Certes, après un moment, on a repéré l’astuce, même si un doute subsiste çà et là à propos de certains, mais ça donne une impression de confusion dans les premiers chapitres.

    Il ressort cependant assez vite que les personnages les plus exposés seront Mia Krüger, isolée sur son île, en grave dépression après le décès de sa sœur jumelle et une bavure dont elle a pu ressortir blanchie, grâce à l’intervention de son chef et comparse Holger Munch (homonyme du célèbre peintre, même s’il se défend d’être de la même famille !), qui a été cru mais s’est quand même retrouvé quant à lui mis sur la touche.
    Il fallait bien une affaire de l’ampleur de celle qui vient de surgir, la mort de cette petite fille qu’on retrouve pendue avec l’étiquette « Je voyage seule » autour du cou, pour que les sphères supérieures de la police décident à leur corps défendant de faire appel à cette ancienne Unité spéciale, qui a résolu autrefois plus d’une enquête insoluble. C’est donc un Holger Munch satisfait de retrouver sa place, malgré diverses fragilités liées à sa vie de famille plus ou moins ratée malgré une petite-fille dont il est gaga, et une Mia Krüger pas vraiment bien dans sa tête ni dans son corps mais retrouvant ainsi une vague lueur de vie, qui vont tout faire pour arrêter le tueur, avant qu’il ne soit trop tard…
    Outre ces deux têtes de série et le reste de l’équipe, qui est bien mis en avant (un peu à la façon des collègues d’un commissaire Adamsberg, l’une de mes sagas policières préférées avant le dernier tome, où chacun est bien déterminé et a sa place dans une équipe soudée), on retiendra surtout le jeune ex-hacker Gabriel Mørk, recruté pour ses talents particuliers dans le cadre de cette affaire, en personnage secondaire un peu plus important que les autres, et très attachant à sa façon !

    Avec ça, non seulement les personnages, mais aussi toute une série de situations diverses – liées à ces divers personnages, bien évidemment -, à première vue sans lien les unes avec les autres, sont jetées dans cet entonnoir, tandis que la tension monte, car les victimes se multiplient, et tout à coup, parmi d’autres, un personnage découvreur de victime, qu’on croyait « de passage » comme plusieurs autres, revient sur le devant de la scène dans une autre situation que la sienne de départ !
    Je ne sais pas si je suis très claire, mais en tout cas, au fur et à mesure que l’entonnoir se rétrécit, les différents liens entre les personnages et les situations sont de plus en plus visibles et font sens, tandis que le tout se transforme peu à peu en véritable page-turner, d’autant plus que tous ces personnages sont devenus tellement « intimes » pour le lecteur, qui dès lors s’inquiète, a besoin de savoir que l’un ou l’autre (ou tous) va être s’en sortir, et le moins mal possible si l’auteur le veut bien !

    Et puis paf, d’un seul coup on arrive dans la partie inférieure de l’entonnoir, les choses se précipitent dans une fièvre que le lecteur ressent presque physiquement, tant l’ensemble donne une impression de chaos final mais où tout devrait se terminer bien, ou du moins le moins mal possible, on l'entrevoit, on le veut, mais l'action est tellement intense qu'on en est ébloui!…
    Il reste cependant une vague déception aussi car, si l’enquête même est résolue pour le mieux, certains détails annexes restent dans un certain flou. En effet, c’est comme si l’auteur, ayant enfin relâché la tension principale autour de ces petites filles assassinées, ne trouvait plus intéressant de développer jusqu’au bout les histoires des nombreux personnages secondaires qui étaient un peu plus que « de passage », alors qu’il a écrit des pages et des pages là-dessus quand on était plus haut dans l’entonnoir. Ce n’est pas à proprement parler une fin ouverte, puisque comme je disais, le cauchemar est terminé, mais un petit épilogue pour entourer ces personnages-là n’aurait pas été inutile, que le lecteur soit rassuré sur la fin de leur histoire à eux aussi, au lieu de rester avec le besoin de deviner que désormais tout ira bien pour tout le monde.

    Cela dit, je ne veux pas terminer sur une note négative : cette technique a aussi le grand mérite que tous les éléments étaient semés pour mener le lecteur presque lui-même à la résolution, que j’avais plus ou moins comprise avant la fin, y inclus l’identité du meurtrier (pour ma grande satisfaction !), et même si certains détails finaux semblaient sortir du chapeau de l’auteur, ils étaient cohérents et faisaient sens avec ce qu’on avait compris.
    Un bon polar donc, et je suis curieuse désormais d’aller emprunter ce fameux « Le hibou » qui m’attirait bien plus spontanément !