[Suivi Lectures] Aealo

Passez un bon week-end! ;)

Pas grand chose de neuf dans les lectures :

- Je pense avoir fini Jekyll & Hyde (oui je fait la version courte) ainsi que Hotaru (Shimazaki) d'ici la fin du week-end.

- Mon avis sur La femme et le pantin devrait lui aussi arriver d'ici la fin du week-end (il est déjà entamé).

Mais surtout ce we : BC pour Dans la forêt! :yeah:

Portez-vous bien!

Une belle semaine et de belles lectures!

Je t’aime, fuis-moi

Que tu m’as bien battue, mon cœur ! Que c’était doux.

<image> J’ai beau réfléchir, je ne me souviens plus du tout d’où je pris connaissance de La femme et le pantin de Pierre Louÿs ! Malgré son nombre d’adaptations cinématographiques, je sais que ce n’est pas par là… Mais passons…
Avant de jouer, il faut connaître les règles du jeu :
Durant le Carnaval de Séville, le Français André Stévenol, tombe sous le charme d'une jeune andalouse, Concepción Pérez. Ils échangent un rapide signe prometteur et cherchent aussitôt à se revoir. André confesse cette situation auprès de son ami don Mateo qui sursaute et qui se décide, afin de le mettre en garde, à lui faire le récit de sa douloureuse aventure avec la jeune femme dont il fut le pantin.
Je sais qu’il est considéré souvent comme un « classique » (mais bon la définition de « classique » est tellement vague en elle-même, mais c’est une autre question). Je n’en connaissais rien donc j’étais plutôt curieux.

Il va être très compliqué de parler de certains problèmes sans divulgâcher… Disons que mon avis se limitera aux grandes lignes. En somme, je vais faire au mieux…

Avec un tel titre, je ne vous divulguerai rien si je vous dis que qu’y sont centraux les clichés de la femme fatale et de l’homme pantin, on ne les présente plus tant ceux-ci ont été utilisés au point d’en être usés jusqu’à la moelle. On peut d’ailleurs trouver quelques points communs entre ce livre et d’autres comme Carmen (1875) dont certains thèmes et traits de personnages sont plutôt similaires.
Alors qu’est-ce que celui-ci à de particulier me direz-vous ? Et bien c’est probablement l’un des originaux, de ceux desquels ces stéréotypes sont partis puisque ce livre date quand même de… 1898.

<image>J’ai essayé de me renseigner et de comprendre mais visiblement ce Pierre Louÿs semble avoir été quelqu’un de très complexe… a qui on attribue bon nombre de penchants divers et variés… mais je ne me lance pas là-dedans…

Il faut savoir que le titre de ce livre est directement inspiré d’un tableau de Goya : « Le pantin ».

Même s’il est indéniable que ce livre pose un malaise (et vous allez comprendre pourquoi), il est plutôt compliqué de le juger pour ses mœurs avec les 120 ans le sépare de nos propres mœurs…

- Monsieur, il ne faut jamais aller au premier rendez-vous que donne une femme.
- Et pourquoi ?
- Parce qu'elle n'y vient pas.
André, à qui ce mot rappelait un souvenir particulier, ne pût s'empêcher de sourire.
- C'est quelquefois vrai, dit-il.
- Très souvent. Et si, par hasard, elle vous attendait en ce moment, soyez sûr que votre absence ne ferait que déterminer son inclination pour vous.

Nous commençons donc avec un personnage (André) qui durant ce carnaval va se trouver charmer par une certaine Conchita. Mais son ami don Mateo, qui a vécu un chemin de croix avec cette Conchita, veut en dissuader André, pour cela il lui raconte alors cette histoire… 
Jusque là pas de soucis… mais dés qu’il raconte son histoire, et si on décompte le nombre d’années en question, on se rend compte que Conchita a cette époque a alors aux alentours de 14 ans… Et toute l’histoire de don Mateo, sur plusieurs années, ne parle que d’une fille de moins de 18 ans…
Premier malaise donc : cette « pédophilie » qui, malgré qu’elle « semble normale », dans le livre pour l’époque, ne passe vraiment vraiment pas bien…

Je voulais bien croire qu’elle était femme, puisqu’elle-même nous l’avait dit ; mais elle dormait, Monsieur, comme un enfant de six mois. (…) je m’attardai jusqu’à l’aube sur cette bouche singulière, tellement enfantine et sensuelle ensemble, que je doutais parfois si ses mouvements de rêve appelaient le mamelon de la nourrice ou les lèvres de l’amant.

Mais continuons en mettant, si c’est possible, ceci à part quelques instants pour parler de la suite… don Mateo, qui se présente en coureur de jupons, tombe éperdument amoureux de Conchita, il est follement épris d’elle et se manifeste auprès d’elle pour le lui montrer. Très polie, la jeune fille (souvent présentée jeune femme dans le livre) va jouer de ses charmes pour manipuler abondamment don Mateo par des fausses promesses, des contradictions, des entourloupes en tous genres et en profiter pour fuir plus d’une fois comme par magie lorsque don Mateo règle des dettes de sa mère ou les installe financièrement…
Alors, à ce stade, on pourrait encore se dire, c’est une bonne leçon pour un personnage pouvant être macho par instant…
Mais ce jeu de "manipulation" en devient vite un jeu de "chauffe intense" qui va très très loin… Trop loin… Pour moi, on dépasse le stade du "jeu" et ça en devient un piétinement de cœur, un massacre des sentiments de l’autre…
Autre malaise : un jeu pervers et malsain

Quiero est un verbe étonnant qui veut tout dire. C'est vouloir, désirer, aimer, c'est quérir et c'est chérir. Tour à tour et selon le ton qu'on lui donne, il exprime la passion la plus impérative ou le caprice le plus léger. C'est un ordre ou une prière, une déclaration ou une condescendance. Parfois, ce n'est qu'une ironie.

<image>
Alors certes, il faut se méfier de ce qui est trop parfait. Conchita reste insaisissable : montrons deux visages qui se contredisent mais semblant tout aussi naturels l’un que l’autre. En tant que lecteur, même si le jeu de Conchita est très vite visible, je n’ai jamais réussi à la comprendre… Oui il y a un jeu des apparences mais où est la vérité au final ? Elle me semble être une des absentes de ce livre…
Oui j’ai eu mal pour don Mateo… Dans un premier temps… Et puis ça en devient trop, ce n’est plus de la servitude amoureuse, c’est du sadisme et du masochisme pour ne pas dire de la bêtise…
Je n’ai pu m’accrocher à ces personnages trop opaques pour moi et leur destin a fini par me semblait presque absurde arrivé à un certain stade…
Autre malaise : en arriver à une certaine "indifférence" de leurs douleurs à cause de l’incompréhension et de la surabondance de celle-ci…

Car oui, au centre de ce livre, c’est bien de servitude amoureuse qu’il est question, et elle est poussée loin (pour moi)… Un point, où j’ai fini par lâcher…
D’autant que lorsque tout semble s’arranger surgit un changement qui semble tellement radical et abrupt que s’en est interloquant et même difficile à croire… Dans ce "switch" c’est une fois encore le masochisme qui a la part belle… Mais là encore, c’en était trop pour moi… J’étais perdu, comprenant moins que jamais Conchita et don Mateo…
Autre malaise : le masochisme poussé à un stade très en décalage à nouveau par rapport à notre époque.

Désormais, je voyais clair dans cette petite âme de rouée.
J'avais été mystifié comme un collégien, et j'en restais confus encore plus qu'affligé.

Et lorsqu’on pense être sorti de cette situation, que le livre arrive à sa fin, on se dit qu'enfin toute est fini.
Nous avons alors droit à une fin qui n’en est pas vraiment une… Non non pas une fin ouverte (pas complètement du moins)…
C’est en effet le moment, dans les dernières phrases, que l’auteur choisit habilement de nous placer un petit élément, pas grand-chose, qui montre et fait comprendre que cette situation est sans issue et sans fin, puisque celle-ci n’en est alors plus une et fausse ainsi la potentielle conclusion qu’on aurait pu tirer juste avant.

Une fois le livre refermé, j’étais encore plus paumé que durant ma lecture… C’est dire…

Mais plus je repense à ce livre, plus il me met mal à l’aise…