[Suivi lecture] Errant

 
  • Errant

    Bookworm

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    #371 21 Novembre 2021 23:10:35

    Tiohtia:ke de Michel Jean

    Banni par sa communauté, Élie, un innu, se retrouve à Montréal et vit dans la rue avant de s'en sortir graduellement. En soi le sujet est brûlant d'actualité, le portrait que dresse l'auteur de ce cheminement est intéressant et ce livre se lit très facilement. Les chapitres courts vont  à l'essentiel, le style est très dépouillé, tout en respectant une certaine pudeur, une certaine retenue ce qui constitue, bizarrement,  à la fois une force et une faiblesse. Force car rien ne braque le lecteur malgré un certain regard manichéen (autochtones plus ou moins toujours victimes des méchants blancs) et en même temps convient parfaitement aux nombreuses évocations de la culture innue, présentée ici, à juste titre, comme une bouée de sauvetage. Par contre cette réserve occulte la rudesse des conditions de vie des itinérants; oui on mentionne prostitution, piqueries et beuveries mais sans s'attarder au quotidien souvent conflictuels des rapports avec le société ni sur la violence omniprésente au sein des sans abris.

    Mais ces bémols sont mineurs par rapport aux plaisirs que m'ont procuré cette lecture. J'ai particulièrement aimé l'effet apaisant du retour en nature, l'idée centrale que malgré des obstacles énormes on puisse reprendre en main sa destinée et que même si la complicité qui transcende l'appartenance à une race est complexe à établir, elle donne de bon résultats lorsqu'on y parvient. En somme un livre qui vaut vraiment la peine.


    Sans âme de Gail Carriger

    Ce livre introductif d'une série présente une héroïne atypique, drôle, incisive et tout en verve: cela la rend terriblement attachante d'autant plus que son statut de vieille fille lui permet son lot d'auto-dérision. Condition d'ailleurs à laquelle elle serait toute prête à mettre fin, mais pas à n'importe quel prix et surtout pas avec n'importe qui . . . Coté intrigue autant loups-garous que vampires solitaires disparaissent alors que d'autres apparaissent mystérieusement; que se passe-t-il ?  L'univers créé implique un fragile équilibre entre créatures surnaturelles et humains; les tensions inhérentes à cette coexistence sont bien illustrées. L'insertion d'un coté “scientifique” propre à cette époque ajoute une touche inhabituelle à ce genre et contribue à l'originalité du bouquin qui nous présente déjà une femme qui bouscule les conventions de l'époque par sa curiosité et son impétuosité. Autant de raisons de poursuivre la lecture de cette série qui s'annonce pétillante, tout comme Alexia !


    Les enragé-e-s de Valérie Bah

    D'emblée je voudrais remercier les Éditions du remue-ménage et le site Babelio d'avoir mis gracieusement ce livre à ma disposition dans le cadre de l'opération “Masse critique”. Cette douzaine de courtes nouvelles , où l'on retrouve quelques personnages récurrents, met en scène les tribulations de personnes racisées qui occupent généralement des emplois considérés comme subalternes comme gardien de nuit, préposés de centre d'appel, intervenantes en milieu communautaire, quoique dans ce dernier cas l'appartenance à cette catégorie me semble incorrecte.

    Sur le fond, les idées avancées ne m'ont pas convaincu, loin de là. Dès la première histoire une fillette vole régulièrement des livres à la bibliothèque scolaire. Convoquée avec sa mère par le directeur, elle informe ses camarades qu'elle “luttait contre des racistes” ! J'ai espéré quelques instant un deuxième niveau d'autodérision mais ça ne semble pas le cas . . . Au fil des récits, les petites allusions mesquines, le dénigrement systématique des blancs et la complaisance envers les copin-e-s m'ont lassé. Comme si tout était dû à cette clique du seul fait de leur existence. Les laissés-pour-compte vous intéresse ? Passez votre chemin, allez voir Jonh Fante, Iain Levison et autres.

    Quant à la forme j'avais été attiré par le quatrième de couverture qui annonce une écriture iconoclaste, à l'emporte-pièce;  encore ici déception car ce sont les seules lignes du genre, le reste demeurant plutôt conventionnel. À moins bien sûr que l'on considère l'utilisation du “iel” et autres néologismes comme étant révolutionnaire.. Bref rien dans ce livre ne m'a rejoint et si cela n'avait pas été dans le cadre d'un engagement envers Babelio je l'aurais abandonné très tôt.
  • Grominou

    Administratrice

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    #372 21 Novembre 2021 23:54:51

    Sans âme, j'ai trouvé les personnages et l'univers sympa mais j'ai trouvé certains éléments de l'intrigue trop «faciles», ça m'a fait décrocher.  Une déception pour moi.
  • LebazardElora

    Doctelecteur

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    #373 22 Novembre 2021 10:48:52

    La saga avec Sans âme m'a longtemps tentée. Mais j'hésite beaucoup car ce n'est pas mon genre.
  • Errant

    Bookworm

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    #374 25 Novembre 2021 13:44:18

    Le cirque des rêves de Erin Morgenstern

    Quelle belle découverte! Le terme littérature fantastique prend ici tout son sens. J'ai été enchanté par cette histoire d'une grande originalité portée par une écriture juste et aérienne. On y parle d'un cirque oui mais qui ne renvoie pas du tout à la conception classique, ni même celle du Cirque du soleil; justement ce cirque des rêves est-il lui-même un rêve? Sauf les deux inquiétants initiateurs d'un jeu, d'un défi, que ni nous ni les protagonistes ne réussissent à bien saisir, les personnages sont mystérieux, d'une belle naivité, sans malice, attachants quoi. Le récit se déroule lentement, additionnant les touches subtilement floues, mais menant graduellement vers une compréhension des enjeux véritables. Malgré des passages plus désolants l'ambiance reste féérique, l'omniprésente magie s'insinue en nous et on souhaite devenir un rêveur . . . Le ton de ce livre est inoubliable, le monde dans lequel il nous plonge mémorable et c'est le cœur léger mais tristounet qu'on le referme. Un coup de cœur retentissant.


    Le grand huit de Janet Evanovich

    Vous avez un coup de blues? Rien de tel qu'un épisode de la vie turbulente de Stéphanie Plum pour vous remonter le moral ou, à tout le moins, oublier momentanément vos soucis. Ici notre pitoyable chasseuse de prime réussit à perdre un demi douzaine de paires de menottes. . . aux mains de ceux qu'elle devait arrêter ! Entretemps les malfrats lui explosent trois voitures, déposent un cadavre dans son appartement, l'inondent de serpents et d'araignées. Qu'importe il y a toujours des cookies chez maman, le beau Morelli et l'affriolant Ranger sont toujours prêts à sauver la belle en détresse . . . La faune habituelle du Bourg s'élargit avec le retour à la maison de sa sœur Valérie, la parfaite sainte nitouche, écorchée vive par un divorce catastrophique et l'apparition de Khloune, l'avocat le plus collant de l'univers. Action incessante, situations loufoques en abondance, personnages plus excessifs les uns que les autres, héroïne aux réflexions farfelues, le recette est connue puisqu'elle fonctionne depuis déjà huit tomes. Je ne m'en lasse jamais, en autant que cette fréquentation soit bien espacée dans le temps



    Made in Sweden de Anders Roslund et Stefan Thunberg

    Cette histoire de braquage est basée sur des faits réels, ce qui donne froid dans le dos tellement la violence est omniprésente, de façon surprenante, pas vraiment lors des braquages mais dans le quotidien de la famille des braqueurs. Bien que ce soit ici un roman policier qui respecte toutes les règles de l'art, avec notamment un suspense bien entretenu, cette lecture m'a fait penser à “De sang froid” de Truman Capote où il suivait le parcours macabres de deux meurtriers. On y voit dans les deux cas de l'intérieur le cheminent des malfrats, leurs raisonnements et leurs excuses. Mais il y a plus ici, et c'est un atout majeur; l'auteur nous ramène à la source de la violence et de la solidarité de cette famille en explorant minutieusement sa dynamique aberrante. Tout cela donne un roman policier où il n'y a pas grand chose à deviner puisqu'on suit autant les tribulations des criminels que celles de l'inspecteur principal chargé du dossier. Mais l'implacabilité des destins des uns comme de l'autre m'a hypnotisé et j'ai dévoré avec avidité cette narration.
  • LaurentVo

    Dompteur de pages

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    #375 25 Novembre 2021 16:59:49

    Tu me donnes envie de sortir Made in Sweden qui traine dans ma PAL depuis sa sortie en grand format. Faut que je me lance :lol:
  • Grominou

    Administratrice

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    #376 25 Novembre 2021 17:03:18

    Oh je suis contente que Le Cirque des rêves t'ait plu!  Et j'ai encore plus aimé La Mer sans étoiles, je te le recommande!
  • Errant

    Bookworm

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    #377 25 Novembre 2021 18:30:19

    @Laurent 49 Le moindrement que tu aimes ce genre je crois que tu ne peux pas être déçu. Bonne lecture

    @Grominou J'ai vu que tu étais enthousiaste et je compte bien suivre ta recommandation, merci.
  • LaurentVo

    Dompteur de pages

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    #378 26 Novembre 2021 07:23:16

    Errant a écrit

    @Laurent 49 Le moindrement que tu aimes ce genre je crois que tu ne peux pas être déçu. Bonne lecture


    Merci. Ca sera la prochaine. ;)
    A suivre sur mon suivi de lecture.:D

  • Errant

    Bookworm

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    #379 01 Décembre 2021 12:09:31

    Il y a longtemps que je n'avais enchainé trois lectures aussi satisfaisantes :trinquent:



    Meurtre au 31e étage de Per Wahlöö

    Ce premier roman d'un diptyque étonne par son style et son propos social. L'enquête du commissaire Jensen porte sur une menace d'attentat à la bombe contre une multinationale qu'on devine omnipotente au fil des pages. Pas de travail d'équipe ici, ni de collaborateurs; Jensen donne des ordres, les autres obéissent au doigt et à l'oeil sans poser de questions ni, surtout, faire de commentaires. Car ceci se déroule dans une société autoritaire où crise du logement, criminalité et désordre de tout ordre ont été pratiquement éradiquées au prix cependant d'une augmentation spectaculaire de suicides et un taux galopant d'alcoolisme. On pense facilement dans ce contexte à “1984” ou à “Fahrenheit 451” et, à sa manière, ce livre  s'inscrit aussi brillamment dans cette veine en exploitant la puissance des média. L'enquête en soi est intrigante, son déroulement atypique, son dénouement étonnant, tout cela dans un univers cauchemardesque. Vivement la suite.


    Du balai de Ed McBain

    Ce coup d'envoi d'une très longue série, il y aura plus de cinquante tomes, m'a paru très réussi compte tenu de l'époque où il a été écrit. L'ambiance fait songer aux séries télévisées policières des années 60, préférablement en noir et blanc, du temps où les moyens techniques à la dispositions des enquêteurs étaient à leurs balbutiements, ce qui fait que ces derniers devaient faire leur travail en s'appuyant sur l'art de l'enquête plutôt que sur les éléments scientifiques. La vedette du roman n'est pas tellement l'enquêteur principal, quoiqu'il tienne une grande place, mais la vie du commissariat qui donne son nom à la série. On a chaud avec cette équipe, on tâtonne avec elle, on se demande bien jusqu'à la fin qui est le fameux tueur de flics Nous sommes loin ici des thrillers modernes avec leurs rebondissements constants, des avancés technologiques étonnants et des héros flamboyants. Mais l'atmosphère du commissariat, la détermination des enquêteurs, les intéressantes incursions dans leur vie privée et le rythme général m'ont donné le goût de poursuivre cette série d'époque.


    Prisonniers du ciel de James Lee Burke

    Impliqué par hasard dans une embrouille, Dave Robicheaux devra faire des pieds et des mains pour s'en tirer et protéger, en autant que faire se peut, les siens. L'histoire met en scène la faune locale brillamment illustrée: flics du patelin débordés, roitelets du crime amoraux, les fédéraux qui magouillent en arrière-plan, les belles créoles envoûtantes etc. Le récit n'a pas de temps mort, la tension monte progressivement, la violence explose et le dénouement ne saurais convenir à tous; déjà à ce niveau nous sommes en présence d'un très bon opus.

    Le personnage comme tel de Robicheaud dévoile ici une facette fondamentale de sa personnalité. Déchiré entre ses démons, alcoolisme et une rage intérieure qui le consume, il reste cependant fidèle à ses valeurs en aidant une amie aussi tourmentée que lui, en prenant d'énormes risques pour protéger une fillette innocente et en poursuivant son rêve chimérique d'une vie “rangée”. Cette tension perpétuelle permet à Burke d'y aller de réflexions sur la quête existentielle qui m'ont fait songer, dans un tout autre contexte au Wallander de Henning. Et surtout, l'auteur se fait presque poète lorsqu'il évoque avec un amour évident sa Louisiane adorée; on sent les odeurs du bayou, on visualise les couchers de soleil, on salive devant les écrevisses, crevettes et riz brun . . . En somme une série qui s'annonce plus profonde qu'elle n'y parait de prime abord tout en restant très bonne du coté strictement policier. On en redemande.
  • LaurentVo

    Dompteur de pages

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    #380 01 Décembre 2021 13:08:57

    Je note sur ma liste le Per Wahloo.
    Les deux autres je l'ai est lu il y a longtemps. Et pour le moment Prisonnier du Ciel reste mon Burke préféré.
    Quant à la série au long cours de Ed McBain c'est un classique dans son genre. Difficile à trouvé par chez nous à l'unité mais de gros intégrale sont parues et sont trouvables un peu partout ;)