#392 08 Janvier 2022 18:58:32
Oups un peu de paresse récemment . . .
Sans passer par la case départ de Camilla Lackberg
Une nouvelle qui se laisse lire, ce que j'ai fait d'une traite ! Car cette soirée de la veille du jour de l'an est plutôt spéciale, bien arrosée évidemment, mais aussi pleine de rebondissements. Au départ les protagonistes, filles et fils de riches blasés, conservent les apparences mais des fissures apparaissent, les masques tombent et la vérité, même douloureuse, perce les carapaces. Mais que feront-ils d'elle? L'auteure dépeint sans concession ces jeunes désœuvrés pervertis par leurs richesses et graduellement expose leur humanité ce qui les fait paraître sous un autre jour. Et ce ne sera peut-être pas le réveillon auquel on s'attendait . . . Pas de quoi écrire à sa mère mais c'est efficace, plutôt original, le récit est bien maîtrisé et le dénouement à la hauteur.
La sorcière dormante de Michael Moorcock
Dans ce cinquième tome de la saga, Elric poursuit le sorcier Theleb K'aarna afin de se venger, mais son ennemi forme des alliances qui lui donneront du fil à retordre . Sa quête lui pèse de plus en plus et on le retrouve même suicidaire à un certain moment; seule la haine viscérale de son adversaire le motive. L'auteur poursuit son exploration de l'esprit tourmenté d'Elric, nous ouvre les yeux sur son désarroi, sa lassitude, son mal être: “Seule le violence peut venir à bout de ma mélancolie” dira-t-il. Pourtant il n'y a rien de foncièrement déprimant ici: les jeux des divinités pour qui les humains ne sont que des pions se complexifient, Elric renoue avec de vieilles connaissances, l'amitié de Tristelune est indéfectible et, même si c'est in extremis, les pires crises se résolvent. L'atmosphère reste oppressante, la quête d'Elric singulière et le personnage hors norme. Le tout possède un charme indéfinissable, un ton unique, une complexité envoutante. J'aime.
Flots de Patrick Senécal
Construire un roman de plus de 350 pages presque exclusivement autour du journal intime d'une fillette de huit ans ne doit pas être une entreprise facile. Pourtant Senécal relève le défi avec brio; ce roman d'horreur est captivant et nous rive à notre siège de lecteur. Le récit est bien pensé, la montée de la tension habilement dosée, les personnages assez bien campés et c'est glauque à souhait. Plusieurs scènes sont d'une violence dérangeante et certaines réflexions de la petite Florence glacent le sang. Comme à son habitude l'auteur beurre épais et tombe un peu dans la surenchère mais cela fait partie intégrante de son style et c'est aussi pour cela qu'il connait tant de succès.
J'ai toutefois deux petits bémols. L'écriture utilisée est crédible pour un enfant de huit ans mais à la longue l'enchainement de phrases courtes, au vocabulaire limité, comportant d'assez nombreuses répétitions m'a lassé un peu et j'attendais d'enfin émerger dans les courtes sections où l'action est décrite autrement. Ensuite je me suis lassé des gnangnans enfantins genre t'est pus mon amie, tu redeviens mon amies et non t'es pus mon amie etc. Mais ce sont de bien faibles réserves pour un livre que j'ai très apprécié et qui dans son genre est d'une efficacité remarquable.
Le premier quartier de la lune de Michel Tremblay
Dans ce cinquième opus des “Chroniques du plateau Mont-Royal' Tremblay condense tout son récit sur une seule journée, mais toute une ! En cette première journée d'examens de fin d'année, les enfants sont agités et les parents songeurs. On dirait que tous les personnages sans exception sont à l'heure des bilans ou confrontés à des surprises désagréables. J'ai été triste pour plusieurs d'entre eux particulièrement Marcel qui voit son univers chimérique s'écrouler et prend conscience de la vacuité de son avenir mais aussi pour Albertine qui n'est plus capable de se mentir à elle-même. Et la gang de chums de la rue Fabre qui se disloque, et la grosse femme qui se sent de plus en plus encarcanée, et son jeune fils qui doit payer son émancipation du prix de la trahison; il n'y a rien de joyeux dans cet épisode, aucun espoir auquel se raccrocher, la guigne a rejoint cette belle tribu. Malgré le coté sombre de l'histoire, Tremblay réussit à nous émerveiller par une écriture d'une justesse incroyable, en ciselant les émotions les plus fortes, en faisant vivre le désespoir le plus total. Un excellent livre, mais combien douloureux . . .