[Pierre Bondil] Discussion avec un traducteur de polars

  • Amethyst

    Constructeur de PAL

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    #31 29 Septembre 2010 20:56:47

    Bonsoir et bienvenue sur Livraddict Mr Bondil.
    Merci de nous accorder un peu de votre temps :)
    je vais suivre cette discussion avec beaucoup d'intérêt.
  • Pierre Bondil

    Traducteur

    Hors ligne

    #32 29 Septembre 2010 21:00:24

    Je crois en être à la "question" 15, j'espère que je ne vais pas en oublier. Là, j'ai du mal à tenir le rythme.
    Si les deux écrivains sont Hillerman et Bruen, non Hillerman je ne connaissais pas, on me l'a proposé en même temps qu'un autre auteur et on m'a laissé le choix. J'ai lu Là où dansent les morts, j'ai eu l'impression au début que je ne comprenais rien, ça s'est arangé, j'ai senti qu'il y avait quelque chose derrière etj'ai foncé en dépit des difficultés. Je suis ravi d'avoir tarduit presque tous ses livres. Un grand monsieur, vraiment. Ken, je ne connaissais pas non plus, la série avait été commencée chez Gallimard par d'autres traducteurs, le nouveau responsable de la Série Noire n'était pas content de leur travail, il m'a appelé (je n'avais pas enconre traduit pour cette amison) il m'a proposé un bouquin vraiment superbe, Le Martyre des Magdalènes en me laissant 18 mois pour le traduire, ce qui m'a permis de le glisser dans mes projets.

    Pour rendre l'atmosphère (des pueblos ou autre), il n'y a pas trente six méthodes. Quelques-unes quand même. La mienne, et ça marche presque toujours consiste à faie confiance à l'écrivain. Si j'ai aimé son livres, c'est que j'ai aimé son style. Au maximum, j'essaye de le copier. Pour le vocabulaire c'était un problème, mais avec le glossaire à la fin, ça permettait au lecteur de ne pas être bloqué dans sa lecture et de se laisser porter. De toute faàon, l'Américain moyen ne sait pas non plus ce qu'est une kiva.

    Très bien well read kid, un joli pseudo pour un forum de lecture. Comment on devient traducteur ? A l'époque où j'ai commencé, essentiellement par copinage car il n'y avait pas de formation universitaire à la traduction. Aujourd'hui, toujours par copinage (c'est un peu comme au cinéma, la scripte essaye de faire engager son copain comme photographe de plateau ), ce qui n'est pas toujours idiot ou immoral : un directeur de collection qui connaît quelqu'un et sait que cette personne est sérieuse a tout intérêt à tenter l'aventure. Après, il faut que le travail rendu soit bon. Mais de toutes façons tous les éditeurs disent du mal de leurs traducteurs.
    Au niveau universiraire il y a maintenant des formations, notamment l'institut Charles V à Paris (il paraît qu'ils vont déménager, d'ailleurs) et d'autres peu nombreux, en province. Mais nous touchons autre chose qu'un simple apprentissage, et quelqu'un qui ne sait pas lire un texte, deviner qu'il y a des sous-entendus, des choses écrites sous les mots ou derrière eux, ou quelqu'un qui est prétentieux et qui va vouloir metter son empreinte sur le texte (il y en a beaucoup) ne seront jamais de bons traducteurs à mon avis. (Cela mériterait d'être davantage développé).

    V.
    Bonjour. Si je choisis les livres. Moi, oui, j'ai beaucoup de chance. Vous imaginez aisément que quelqu'un qui veut se lancer dans la traduction et qui auarit réussi, sans connaître personne, à faire reconnaître le bien fond de sa candidature, ne pourra pas refuser un travail. Dans mon cas, j'ai comencé auprès d'un ancien condisciple de fac, François Guéruf, qui dirigeait une collection (chez Pac) et qui a bien voulu me confierun texte. François est quelqu'un d'intelligent et l'un des rares dès les années 1980, qui avait compris 1° que le traducteur fait du bon travail s'il aime le livre qu'il traduit
    2° qu'il vaut mieux, si c'est possible, que les livres d'un même auteur (et surtout d'une même série, avec les mêmes personnages, soient traduits par la même personne.
    Evident, mais encore aujourd'hui, tout le monde est très loin de se soucier de pareils paramètres.

    J'ajoute que si François me propose un livre et que je lui dis non, il ne me plaît pas beaucoup, ou si je lui explique pourquoi je ne me sens pas bien dans ce texte ou avec cet auteur, il l'accepte, lui, et ce n'est pas pour ça qu'il ne me donnera rien par la suite.


    Lecturevv
    Le contart généralement stipule que la traduction devra répondre à des exigeances de qualité stylistiques etc, et de sérieux, etc, et que l'auteur et ses ayants-droit disposent d'un droit de regard et d'acceptation du texte français. C'est pour moi une clause abusive mais comme il y a d'autres chats à fouetter et d'autres problèmes plus importants, en général je signe. Je viens de faire biffer cette mention sur un roman de 1933. De toute façon, tous les écriavants ne sont pas Nancy Houston ou Milan Kundera, capables d'écrire dans notre langue et donc effectivement d'être d'accord ou non. Mais cela est hyper rare et si le traducteur n'est pas trop mauvais, si le responsable de collection et les différents relecteurs et correcteurs ont trouvé le texte bon, ce n'est pas quelqu'un qui ne connaît pas bien notre langue qui va améliorer les choses au contraire. Je pourrais développer longtemps.

    Nathalie, il me semble avoir répondu, succintement hélas, aux questions de Eljc sur les piueblo, de V; et de lecturevv. S'il y en a d'autres, je suis prêt. Si je ne l'ai pas fait, peuvent-ils les reformuler légèrement différemment ?

    Merci de votre présence, A propos de livres et Améthystes.
    Pour rebondir sur tout à l'heure, ce n'est pas uneplaisanterie, l'anecdote sur A l'Ouest rien de nouveau. Je précise, mais ça n'a pas de rapport précis, que j'aime infiniment Il était une fois dans l'ouest. Et Dire Dtraits, Once upon a time in the west.
  • Blabbermouth

    Lecteur averti

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    #33 29 Septembre 2010 21:01:30

    Bonsoir et un grand merci de votre présence parmi nous ce soir !

    Auriez-vous, par hasard, quelques petits conseils susceptibles d’aider une traductrice d’anglais-espagnol fraîchement diplômée à trouver un emploi ? :P
  • Caro Bleue Violette

    Rat de librairie

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    #34 29 Septembre 2010 21:03:31

    Re-bonsoir. Je pose ma question parce qu'elle se rapproche de celle de Blabbermouth.

    Alors voici ma question (intéressée je dois dire !) : j’ai fait des études d’anglais, je suis titulaire d’un master. Aujourd’hui  je suis journaliste pigiste mais à la fac, j’adorais la traduction et c’est un domaine qui continue à m’intéresser. Ma question est la suivante : quels conseils donneriez-vous à quelqu’un dans mon cas, qui n’a aucune formation spécifique en traduction (bien que bilingue et  capable d’écrire dans un français correct =)), mais qui aimerait quand même se lancer là-dedans ?  Pensez-vous déjà que ce soit possible ? Et si oui, auriez-vous des conseils sur comment s’y prendre ?


    Merci d’avance pour votre réponse !
  • Vozrozhdenyie

    Super-Livraddictienne

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    #35 29 Septembre 2010 21:03:52

    Merci beaucoup pour votre réponse! :D
  • Nathalie

    Ex-Team

    Hors ligne

    #36 29 Septembre 2010 21:10:22

    Pierre Bondil a écrit

    Nathalie, il me semble avoir répondu, succintement hélas, aux questions de Eljc sur les piueblo, de V; et de lecturevv. S'il y en a d'autres, je suis prêt. Si je ne l'ai pas fait, peuvent-ils les reformuler légèrement différemment ?


    Non c'est parfait !  J'ai fait ce petit récapitulatif avant de recevoir votre dernière réponse qui vient seulement de s'afficher. 

    Pour plus de facilité (pour vous), vous pouvez également répondre aux questions une par une dans des messages plus courts si vous le souhaitez.  Mais ne vous inquiétez pas pour le temps de réponse ni pour les fautes de frappe : ce sont des maux nécessaires sur un forum et nous en sommes tous conscients. La discussion reste malgré tout beaucoup plus intéressante et agréable pour nos membres qu'une interview classique. Prenez donc tout le temps qu'il vous faut, c'est un véritable plaisir de lire vos réponses !

  • Tessa

    Bookworm

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    #37 29 Septembre 2010 21:14:35

    Bonsoir Monsieur Bondil, je viens d'arriver sur la discussion et vos réponses sont très intéressantes! Merci de nous accorder de votre temps :)
  • lecturevvv

    Improvisateur de marque-pages

    Hors ligne

    #38 29 Septembre 2010 21:14:54

    Wouhaou, merci pour les reponses ! Detaillées, je trouve moi !

    quelqu'un qui ne sait pas lire un texte, deviner qu'il y a des sous-entendus, des choses écrites sous les mots ou derrière eux, ou quelqu'un qui est prétentieux et qui va vouloir metter son empreinte sur le texte (il y en a beaucoup) ne seront jamais de bons traducteurs à mon avis.


    C'est vrai partout, je suis bien d'accord ;)
    Mais dans quelle mesure ne faut-il pas malgré tout avoir soi-même de bonnes qualités de rédaction (ma question est plus ou moins intéressée, je fais beaucoup de traduction technique, U=RI2, ca demande pas trop de qualité littéraire :lol: mais "c'était à Mégara faubourg de Carthage"... un peu plus ;) )
    Comment dose-t-on ?

  • Pierre Bondil

    Traducteur

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    #39 29 Septembre 2010 21:22:00

    Tiens, mon écran vient de changer. Pour l'instant je n'ai pas de questions visibles, juste mes propos narcissiques et désordonnés.
    L'atmosphère (je complète un peu, El jc), c'est une question de fidélité au style, si c'est possible encore une fois, de fidélité au rythme des phrases (il y a peu de relatifs en anglais par exemple), de fidélité à l'environnement culturel (ne pas traduire Safeway par Carrefour), de fidélité aux lieux décrits, à la faune, à la flore. Un de mes chevaux de batailles, beaucoup de livres traduit de l'américain parlent de cèdres, de daims, de merles etc. Soit le traducteur n'a jamais franchi l'Atlantique ( ce qui n'est pas une tare) soit il se contente de travailler avec un dico anglais (en Angleterre la faune, la flore etc sont quasiment identiques aux nôtres) Ce n'est pas pareil en Amérique, pas plus qu'en Australie, bien sûr.

    Conseil pour une jeune diplômée. Oui, mais pour ce qu'ils valent. Ne s'adresser qu'aux directeurs de collection, ce sont eux qui choisissent, pas les éditeurs. Essayer de proposer ses services, peut-être traduire quelques pages (un chapitre d'une dizaine de pages, ce sera sûrement du travail "perdu", mais ça peut être un placement), les envoyer avec CV à plusieurs éditeurs avec les références du texte d'origine (il pourra vérifier qu'il existe bien, qu'il n'a jamais été traduit, que le travail n'a pas été inspiré d'un boulot pré-existant ou n'a pas été pompé sur internet. Pour l'espagnol, essayez par exemple des éditeurs "spécialisés", Anne-Marie Métailié par exemple. Allez dans les salons littéraires s'il y en a (il vient d'y avoir America à Vincennespour celles/ceux qui n'habitent pas loin. Peut-être aussi tenter des traductions d'articles pour la presse. Ne pas être difficile, surtout, si on vous propose quelque chose, les éditeurs reçoivent plusieurs propositions/demandes  par jour et, même si'ls disent du mal de leurs traducteurs, ils rechignent à engager des gens qui n'ont pas d'expérience. Et puis, si être humble est une grande qualité chez un traducteur, ça l'est moins chez quelqu'un qui cherche un emploi. Courage. Une petite visite aussi sur le site de l'ATLF pour trouver des renseignements...

    Autre question sur le même thème pour l'anglais (déjà compris dans la précédente). C'est très difficile. Faire connaître un auteur à un éditeur en prouvant qu'on est capable d'en traduire plusieurs pages, c'est bien mais je crains que ça ne suffise pas.
    Si, il y a un bon truc, mais qui ne marche que rarement. Aller en bibliothèque, lire Livre-Hebdo, voire les créations de maisons d'édition et proposer ses services (si possible comme je l'ai dit plus haut) Ils n'auront peut-être pas beaucoup d'argent, peut-être ne pourront-ils faire paraître que peu de livres par an, mais ça vaut le coup d'essayer. Ils n'ont pas forcément une longue liste de noms de traducteurs chevronnés sous le coude.

    Bien sûr, pour être traducteur, il faut avoir beaucoup lu et, si possible, c'est encore mieux écrit, et bien écrit pas langage texto bien sûr. Un traducteur qui fait des fautes de Français, ça agace quand il travaille chez un éditeur qui est capable de les trouver ! Et un traducteur qui cionnaît mal sa langue ne pourra de toute façon pas rendre la variété (elle n'est pas toujours là, mais bon, quand même) que l'écrivain étranger aura mis dans son livre. Je vais être méchant (mais ça fait circuler le sang. Et ne me demandez pas de points de précisions supplémentaires, ce serait trop long et il faudrait que je quitte mon clavier pour me reporter à mes livres... Ce que je vais dire n'a rien à voir avec le plaisir de lecture que vous pouvez avoir. Si vous avez du plaisir à lire tel ou tel livre, il faut continuer et vous avez raison. Mais moi, je ne peux pas lire plus de cinq pages du Da Vinci Code traduit en français, et même chose pour Millenium...
  • El Jc

    Guide touristique des librairies

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    #40 29 Septembre 2010 21:23:30

    D'excellentes réponses ,merci à vous.
    Je cède mon tour à mes petits camarade et reviens vers vous plus tard dans la soirée. D'ici là je continue de vous lire avec attention