Spoiler (Cliquez pour afficher)
Depuis un moment je vois passer des avis très positifs sur ce livre. Intriguée et entraînée (très volontairement !) dans une lecture commune, je le tente donc à mon tour…
Ainsi, la première chose qui me saute aux yeux – moi lectrice pas chevronnée mais quand même assez bien habituée à ce genre souvent considéré comme mineur -, c’est que ce roman est terriblement classique dans sa trame romantique. Entre les je t’aime mais je ne veux pas (parce que j’ai peur) d’un côté, et les je t’aime mais je ne peux pas (parce que je suis un monstre) de l’autre côté, c’est du déjà-vu et revu dans tant d’autres romances ! En d’autres termes, on a là les personnages habituels du genre : la jeune femme forte et faible à la fois (mais quand même bien nunuche par moments ! c’est affligeant), et l’homme fort, ténébreux, rassurant, sexy mais chez qui on devine des blessures malgré tout. Je dois bien dire que ça m’agace un peu, moi, ce parfait profil du prince charmant un peu abîmé par la vie, mais qui a toutes les clés, face à la pauvre petite princesse qui a beaucoup souffert et ne comprend trop rien à son nouveau destin… Et de ces invraisemblances ! Dans les premiers chapitres, par exemple, Phèdre prend tant et tant d’anxiolytiques en peu de temps, qu’on se demande comment elle y survit et qu’on a envie de l’emmener fissa aux urgences pour une désintoxication ! Bref, si on ne considère que ces aspects-là, ce livre est vraiment très cliché. Pire : la fin m’a fait penser, car elle est quasi similaire à part le décor, à celle de « Mystérieux » d’Amandine Ré, lu il y a quelques mois – à se demander qui a copié qui ou, plus probablement, c’est qu’on a là une fin récurrente à un certain nombre de romances, sans grande recherche…
Dès lors, pourquoi ce livre rencontre-t-il un tel succès ? et pourquoi en suis-je déjà, au moment où j’écris ces mots, à 40% du tome 2 après avoir également avalé le tome bonus au 1er ?
Je pense que cela tient à deux éléments essentiels qui, ensemble, créent l’addiction à l’histoire.
D’une part, on a tout le décor : l’Écosse et plus particulièrement les Highlands, cette région et ces îles sauvages peuplées d’hommes rudes. Si la région même n’est pas trop exploitée dans les descriptions (certes, on parle quelquefois des paysages, mais à peine et de telle façon que ça pourrait être n’importe quel paysage d’une quelconque côte sauvage), elle imprègne tout le roman, et notamment à travers tout ce qui concerne les Clans, leurs codes archaïques et profondément machistes, leurs haines ou alliances ancestrales, le fait que tout cela reste un brasier qu’une simple flamme vacillante suffirait à rallumer. Mais alors, le tour de force de l’auteure, c’est que, au lieu de se servir de ce décor géographique et surtout humain pour une jolie romance historique, elle parvient à y placer des personnages de notre époque, qui ont télévision et wi-fi, qui portent des jeans sous leur tartan, qui se déplacent en voiture, qui fréquentent des pubs ou qui profitent d’échanges linguistiques bien modernes avec EF. Et ainsi, cette presque-guerre des Clans prend une toute autre dimension ; par moments on ne sait plus trop bien dans quelle période on se situe, on se demande si cette puissance (cachée mais bien présente) des Clans est bien réelle encore de nos jours… et au final on l’accepte, on se dit que c’est crédible, on y adhère sans plus trop se poser de questions ! Après tout, l’Écossais ne représente-t-il pas ce dernier homme libre, ce Celte qui, contrairement à « nos ancêtres les Gaulois » (y inclus les Belges ;) , même s’ils étaient, « de tous les peuples de la Gaule, les plus braves ») , n’a jamais plié sous le joug romain, et aujourd’hui encore, continue de se battre face à l’ennemi anglais ? (avec d’autres armes qu’au Moyen-Âge, certes, mais pour ne citer qu’un exemple : toute l’Europe continentale s’est demandée si l’Écosse allait proclamer pour de bon son indépendance au moment de ce Brexit qu’elle avait rejeté… et rien n’est encore joué !). Si en plus ce même Celte est un peu mauvais garçon mais séduisant tout la fois, avec en prime des secrets qu’on devine pleins de fêlures, il ravive le souvenir du méchant ogre, qui a terrorisé autant qu’il a attiré des générations de petites filles, le soir au fond de leur lit…
D’autre part, l’auteure nous propose tout cela dans une prose extrêmement fluide et agréable, avec des dialogues piquants. Elle nous livre juste assez d’éléments sur le passé douloureux des deux personnages principaux, pour qu’on ait envie d’en apprendre davantage, tout en avançant dans l’histoire. Elle les rend attachants, aussi bien l’un que l’autre car, malgré leur côté très stéréotypé que je citais plus haut, ils paraissent aussi parfaitement humains : on a envie d’aider et/ou encourager Phèdre autant que Caleb ; on a envie de provoquer et/ou aimer Caleb autant que Phèdre. De plus, ils sont entourés de toute une galerie de personnages fort bien typés : que ce soit l’Irlandais sur qui on voudrait pouvoir compter, les hommes de Caleb qu’on apprivoise petit à petit, ou les vrais méchants qu’on déteste d’emblée.
Bref, ce livre est un peu trop estampillé romance-cliché pour que ce soit un vrai coup de cœur, mais au-delà de ce point un chouïa faible, c’est une jolie réussite bien addictive !