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« Dans quatorze minutes, je suis dehors, sans argent, et je n’ai plus qu’une seule cigarette. Il va falloir renflouer les caisses, aller faire la manche. La corvée. Récupérer une quinzaine d’euros : cinq pour les clopes, sept pour ce soir et trois pour demain. Je déteste mendier. Ce n’est pas tant le geste, la position humiliante qui me gêne. Non, ça, on s’y fait, avec le temps. Mais les regards… Mauvaise humeur, haine, pitié écœurante, terreur, tous les sentiments les plus dégueulasses y passent. Ce qui m’atteint le plus, c’est cette indifférence feinte, ce coup d’œil rapide, en coin, avant d’accélérer le pas, cette peur de me regarder dans les yeux, comme un des leurs. » Au métro Rome, au cœur de l’hiver, un clochard écrit son journal : il y raconte ses journées et ses nuits, les passants, les humiliations et les petites victoires quotidiennes contre le froid, la faim, contre les autres aussi… Parmi tous les visages qui défilent sur le quai de sa station et qu’il se plaît à observer, l’un se détache, relié à son passé, celui d’une jeune musicienne qu’il guette tous les jours, pour le simple plaisir de la voir passer. Au fil des pages, sa vie d’avant la rue ressurgit par bribes et prend une place de plus en plus importante. Il était pianiste, autrefois, plutôt doué, mais il n’a pas su saisir sa chance. Il est devenu l’accompagnateur d’Ariane, jeune violoncelliste prodige mais instable, et a fini par apprendre son lourd secret : depuis un malaise sur scène, elle ne ressent plus rien ; elle mène ses auditeurs à des émotions inouïes, mais elle-même n’en éprouve plus. Un événement tragique et mystérieux a fini par les séparer, de manière irrévocable, et c’est ce que le personnage cherche à oublier en dormant, en buvant de plus en plus, en s’enfouissant dans des musiques mentales.