[Suivi lecture] domi_troizarsouilles

 
  • Grominou

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    #131 03 Août 2021 09:06:20

    Si jamais ça t'intéresse, je vais organiser une LC sur La Mer sans étoile; ça devrait être fin octobre.  Ce serait super de t'avoir avec nous! ;)
  • domi_troizarsouilles

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    #132 11 Août 2021 01:00:47

    Grominou a écrit

    Si jamais ça t'intéresse, je vais organiser une LC sur La Mer sans étoile; ça devrait être fin octobre.  Ce serait super de t'avoir avec nous! ;)


    Coucou,

    Ouiiiiiii! je me suis inscrite entre-temps... ;)

    Je continue de mettre mes lectures à jour... je suis en congé actuellement et je lis moins que d'habitude, du coup je vais peut-être enfin réussir à combler mon retard? et que ce suivi devienne plus "naturel" au lieu d'essayer de rattraper le temps...

    Voici donc une lecture du mois passé:

    Marko de Matthieu Biasotto
    Que 14/20... Je ne suis pas spécialiste de cet auteur, mais ce n'est franchement pas son meilleur livre!

    <image>

    Synopsis : Pour Gina, regagner le Panama avec sa sœur est une question de vie ou de mort. Le mot est faible quand on a sa tête mise à prix par le cartel. En dépit de ses efforts, cette jeune fugitive ne quittera pourtant pas la Colombie. Car « Marko » en a décidé autrement…
    Kidnappée avec la brutalité des narcos dans ce sous-sol sombre, elle se demande où est sa sœur mais surtout ce que ce type aux yeux verts compte lui faire ? Son ravisseur est secret, Marko est méthodique, déterminé. Mais ce malade n’est pas là que pour la cocaïne…
    De toute évidence, ce type la connaît, c’est un homme qui ne recule jamais. Marko ira jusqu'au bout, quitte à se brûler, ou à jouer avec le destin auquel Gina cherche à échapper.


    Mon avis :
    Déçue… c’est le premier mot qui me vient quand je pense à ce livre terminé ce matin du 29 juillet, et c’est même pire : je suis déçue d’être déçue !
    En fait, j’avais lu un premier (et jusqu’à présent unique) livre de cet auteur, « Noan », en plein milieu de ma « période romance », en novembre dernier… et même si depuis lors j’ai un peu oublié de quoi ça parlait, j’ai gardé le souvenir que j’avais adoré ! Dès lors, quand j’ai vu passer une proposition de LC pour son dernier opus, je ne pouvais qu’y participer. Mais décidément, l’enchantement n’était plus au rendez-vous…

    D’emblée l’histoire est sombre, on s’y attend car on sait que l’auteur mêle habilement thriller et romance, donc ça commençait bien. Mais ça s’étire, s’étire, s’étire… et j’étais aux 30% que je ne comprenais toujours rien à rien ! Frustration… Un mystère épais entoure l’histoire de Gina, la personnage principale au féminin, et n’est dévoilé que très lentement. Trop lentement à mon goût : je n’ai pas cette patience d’attendre les révélations qui vont enfin expliquer clairement les choses, surtout que cela le brouillard ne se lève vraiment qu’à plus de la moitié du livre, et le lecteur arrive à comprendre le principal des tenants et aboutissants de l’histoire à plus de 70% de l’ebook, alors que seuls quelques rares éléments s’étaient laissés deviner. Or, si certains passages se lisent à la vitesse d’un page-turner, d’autres chapitres m’ont semblé longuets, sans intérêt. Mais surtout, j’ai eu l’impression persistante que l’histoire n’avançait pas vraiment, qu’on tournait en rond sans avancer davantage que le héros masculin, notre tenant du titre Marko, et franchement c’est le genre de suspense pour le suspense qui m’agace au bout d’un moment. Comme son héros précité avec Gina, l’auteur souffle le chaud et le froid avec son lecteur ; hélas, si j’ai accéléré ma lecture pour en savoir plus lors des moments « chauds »… ou pour profiter des trop rares scènes un peu sensuelles ;) , je me suis ennuyée lors des  moments « froids ».

    Il faut dire aussi que, au fil de ces révélations qui ne sont distillées qu’au fil d’un compte-gouttes hyper-lent (et sans doute maîtrisé, mais pour le coup je n’ai pas pu l’apprécier), je n’ai pas réussi à m’attacher à certains personnages, et notamment à Gina. Du début à la fin, je l’ai ressentie comme l’archétype de la « pauvre petite fille riche » : comme toutes les petites filles au monde, elle grandit dans l’environnement qu’elle connaît et ne se pose pas trop de questions sur le contexte de sa vie, car c’est sa vie point, mais l’opulence dans laquelle elle vit malgré une certaine absence d’amour fait d’elle une petite fille sûre d’elle et sans complexe, au caractère bien trempé qui ne va cesser de durcir… et qui, au fil du temps, et notamment de sa facilité dans les études, développe une espèce d’arrogance, de condescendance même par rapport aux autres, et notamment par rapport à ce Marko qu’elle croise ici ou là, mais aussi un côté capricieux, qui n’en fait qu’à sa tête quel que soit le contexte. Sa vie semble une suite de mauvais choix qu’elle fait constamment pour de pseudo-bonnes raisons… mais quand on creuse un peu, on se rend surtout compte qu’elle passe son temps à refuser de voir la vérité vraie en face, ou de la transformer pour la rendre acceptable à ses yeux, quel que soit le prix à payer. Elle n’en reste pas moins le genre de fille que je n’aurais jamais choisi pour amie, et dont je me serais méfiée si elle s’était approchée un seul instant… et je n’ai pas réussi à ressentir de la compassion ou quoi que ce soit du genre quand elle est kidnappée et séquestrée. La situation semble trop improbable, sa fierté mal placée et ses réactions pathétiques. Oh bien sûr, je n’ai aucune idée de comment je réagirais moi-même dans une telle situation… mais il est aussi hautement improbable que ça m’arrive !

    Marko est beaucoup plus intéressant, beaucoup plus vrai dans ses réactions, beaucoup plus abordable et dès lors humain. On comprend très vite que ce côté si sombre que nous vend le synopsis n’est qu’une armure, qu’il enfile néanmoins à diverses reprises avec grande conviction. Son histoire à lui nous est dévoilée beaucoup plus rapidement que celle de Gina, aussi, ce qui aide sans aucun doute à cet attachement. Dès lors, on comprend mieux ses motivations et on y adhère plus facilement quand on a réussi à les décrypter… même si certains de ses choix, qu’il a faits soi-disant par amour, continuent de poser question. J’ai un peu de mal à concevoir que l’amour puisse tout excuser, même certaines décisions extrêmes. A-t-on vraiment le droit (ou le devoir ?) de sauver l’autre malgré lui/elle, même au nom de l’amour ?...

    Le tout est emballé dans une alternance de chapitres à la 1re personne du singulier donnant la parole à Gina ou à Marko, parfois un même chapitre passe de l’un à l’autre avec juste quelques astérisques les séparent, ou bien encore un certain nombre de passages en italique nous emmènent dans leurs souvenirs personnels – dont quelques souvenirs croisés, qui offrent ainsi le regard de chacun sur des éléments communs, mais bien sûr ils ne sont alors jamais présentés à la suite l’un de l’autre. Présenté ainsi, ça semblerait presque aléatoire et déroutant, mais non, au contraire ! On sait toujours très bien qui parle, et on comprend rapidement l’alternance de ces points de vue, on fait les liens entre les différents éléments du passé, et peu à peu on comprend… sauf que, comme je le disais, l’ensemble traîne en longueur dans le mystère. Cette alternance donne indéniablement une certaine dynamique à l’histoire, dans ce style inimitable que j’avais déjà tant apprécié lors de ma première découverte de cet auteur. On déplorera quelques fautes d’orthographe – et qui ne sont pas dues à l’orthographe réformée que l’auteur cite en remerciements, ce sont bel et bien des erreurs ! – ce qui reste (hélas) un danger récurrent des autoéditions… même si j’en ai repéré quelques-unes aussi dans un autre livre que je viens de terminer, paru à compte d’éditeur celui-là ! Rien de bien grave cela dit, j’ai déjà vu tellement pire que la lecture en était rendue pénible, ce qui n’est donc pas du tout le cas ici !
    Et j’ai souri d’un « régionalisme », moi à qui on peut certainement reprocher çà et là l’un ou l’autre belgicisme ;) ; Ainsi, quand on voit apparaître « minot » en plein milieu d’une phrase tout à fait correcte par ailleurs, je tique ! Oh ! je ne veux pas dire qu’utiliser un terme régional soit une erreur, au contraire ! mais ça surprend quand même… Je cite donc « minot », mot que je n’avais jamais entendu – réellement ! - avant de le percevoir un jour dans Plus belle la vie (eh oui !) dans la bouche du personnage de Roland (le seul acteur local de la série, en plus !), et même s’il est aussitôt compréhensible, j’avais quand même voulu connaître sa définition exacte, voilà. ;)

    Bref, pour moi ce livre ne confirme hélas pas le talent que j’avais perçu de cet auteur lors de ma lecture précédente : le côté sombre assaisonné de romance est bien présent, et continue de produire ses effets… mais ici ils sont supplantés par les longueurs, l’incompréhension persistante du roman, ce voile de mystère qui semble ne jamais vouloir se lever, et qui plombe ainsi l’impression générale.





    Pour mieux comprendre ma déception, et parce que je l'avais promis ;) , j'ai été rechercher (et j'ai trouvé!) le commentaire que j'avais fait au moment de ma lecture de ma découverte de cet auteur. C'était début novembre 2020, peut avant que je rejoigne LA...

    Noan de Matthieu Biasotto
    ... et quand j'ai encodé ma lecture sur LA, je lui ai mis 19/20!

    <image>

    Synopsis : Elle n’était pas prête. Personne ne peut l’être.
    En prêtant serment après son doctorat, Ellyn ne pensait pas un jour avoir besoin de tout arrêter, ni son cabinet, ni sa vie de couple. Médecin de campagne au sud de la Grèce, elle ne s’imaginait pas devoir fuir la violence de son conjoint. Encore moins accepter un dernier patient sous la contrainte et éponger le sang d’un inconnu blessé par balle.
    Un intrus étrangement calme, même dans la douleur. Silencieux, mais redoutable. Aussi inquiétant que ses yeux ambrés, un regard tourmenté et orageux. Celui d’un animal à l’instinct de prédation évident, un reptile. Un python. Victime ténébreuse ou gangster peu loquace, tout chez lui transpire la menace. Qui est-il ? Que compte-t-il faire d’elle ?
    Ellyn voulait simplement échapper à son existence. Pourtant, sa vie, tout comme celle de ce patient, ne tient plus qu’à un fil. Une suture dont elle ignore l’issue, tant sur le plan médical que pour sa propre survie dans les minutes qui vont suivre…
    Définitivement, elle n’était pas prête. Personne ne peut l’être. Ni elle, ni lui.
    Des Cyclades, au Péloponnèse, d’Athènes jusqu’aux reliefs les plus reculés, plongez dans une romance hors normes au parfum sombre et au suspense envoûtant.


    Mon avis - écrit le 08/11/2020 :
    Lu en lecture commune sur le groupe Facebook « Aly’s New Romance », lancée le 06/11… moi j’ai commencé le 07 et plus pu lâcher jusqu’à le terminer le 08/11, les enfants à peine couchés !
    Ellyn, médecin par vocation depuis l’enfance, s’apprête à quitter son mari violent après la dispute de trop, et dans la foulée laisser derrière elle son cabinet de campagne et sa vie sans relief, lorsque deux hommes, dont l’un, mystérieux et glaçant, blessé par balle, exigent son intervention sous la menace…

    Pour moi qui ai été longtemps lectrice de polars et autres thrillers, on « sent » immédiatement la maîtrise de ce genre en arrière-plan de ce qui est bien davantage qu’une romance. On se laisse happer par cette ambiance plutôt sombre. On ressent d’emblée une sympathie presque coupable pour ces deux hommes mystérieux, surtout ce fameux « Python » qu’on ne sait pas trop si on doit classer parmi les « méchants », ou les victimes d’un complot, d’une machinerie … dont l’ampleur ne sera dévoilée que petit à petit, dans toute son horreur. On vibre à chacun de leurs (nombreux) coups durs, alors que les différents pièges qu’ils tendent pour faire enfin tomber les vrais méchants, ne cessent de se retourner contre eux d’une façon ou d’une autre… J’ai appris autrefois dans un atelier d’écriture que le clou d’un roman se trouve dans le « pire du pire », sauf qu’ici cette spirale ne s’arrête jamais, on va de pire du pire en toujours pire, laissant à peine le temps au lecteur de se reprendre avant la débâcle suivante.

    Ce serait presque désespérant, sauf que l’auteur a réussi un véritable tour de force malgré tout : c’est d’y avoir greffé ce brin d’espoir, cette lueur d’un avenir meilleur, qui ne cesse jamais de briller (parfois très faiblement certes) à travers le personnage solaire qu’est Ellyn ; c’est d’avoir mis l’accent sur une romance certes dure mais forte et intense, qui sonne toujours « vrai » même quand rien ne va plus. Il y a presque un petit côté biblique dans tout cela… eh oui, même au travers des quelques  scènes de sexe qui allient un érotisme vibrant à une grande finesse. Et au-delà de ce côté romance, il y a aussi la « gnaque » encore et toujours, quels que soient les coups durs, le fait que les personnages se relèvent à chaque fois, portés d’une façon ou d’une autre par cet amour ou son rayonnement, transcendés par une cause plus vitale que leur propre vie – cause à laquelle le lecteur ne peut qu’adhérer à 200% !

    Bref, on l’a compris : ce livre est un vrai coup de cœur, porté par une très belle plume, qui n’a rien à envier à certains canons de la littérature contemporaine « sérieuse » ! Les personnages sont fouillés et attachants, y inclus les personnages secondaires (coup de cœur pour Echo et Java, et au final aussi pour Mona sur qui je n’aurais pourtant pas parié à la base !). Le jeu psychologique qui se tisse entre eux tous, et particulièrement entre Ellyn et son mystérieux ravisseur, est extrêmement bien maîtrisé, ce qui rend le tout très addictif. C’est un roman profondément humain qui laisse croire que même les parts les plus sombres en nous peuvent conduire à la lumière.




    Mais revenons maintenant à plus récent, l'une de mes dernières lectures de juillet, et surtout un énorme coup de coeur!
    J'ai lu ensuite des critiques çà et là, disant que tout n'était pas vraiment crédible, et c'est vrai, quoique... mais peu importe de toute façon, moi j'ai été infiniment touchée, même si j'ai passé la plus grande partie de ce livre un mouchoir à la main tant les larmes coulaient, il est juste magnifique! 20/20

    Dans tes pas de Jessi Kirby

    <image>

    Synopsis : D'après son compte Instagram, Mari a tout pour être heureuse : une vie saine et équilibrée, un copain très amoureux, des amis attentionnés...
    Mais la réalité est bien différente et, à la veille de ses 18 ans, Mari se sent plus seule que jamais.
    Même sa mère est obligée de s'absenter le jour de son anniversaire pour rejoindre sa soeur et la soutenir après le décès brutal de sa fille, la cousine de Mari...
    Bri, la cousine jumelle, née à quelques secondes d'intervalle seulement, et dont elle était si proche avant l'adolescence.
    Bri qui devait fêter son anniversaire sur les sommets de la Sierra Nevada...
    Le coeur alourdi par les regrets, Mari décide de reprendre le projet interrompu de sa cousine. Équipée des affaires de randonnée de Bri, elle va commencer un périple de plus de 350 kilomètres. Et, peut-être, découvrir sur le chemin l'espoir d'une vie nouvelle...


    Mon avis :
    Magnifique !
    C’est drôle : il y a des périodes où je vais de déception en déception dans mes lectures, et puis d’autres, où je saute d’un coup de cœur à l’autre ! C’est peut-être un état d’esprit… ou pas, car quelques autres livres lus à cette même période se sont révélés moins enthousiasmants, mais là, j’ai mis un 20/20 à « Alabama 1963 » pas plus tard qu’hier, et me voici avec un nouveau maximum, sans aucune hésitation !

    Ce livre est pourtant dans un style très différent et propose une histoire qui n’a rien à voir avec la précédente. C’est un roman beaucoup plus personnel, un voyage dans un décor magnifique mais tout autant vers l’intérieur de soi-même, à tel point que j’ai cru à un moment (quand Mari fait ses premiers pas là où Bri aurait dû les faire) qu’on avait là un énième roman feel good à tendance développement personnel. Mais finalement non, on comprend vite que ce n’est rien de tout ça !

    C’est un roman assez simple en fait : Mari suit les pas de sa cousine Bri dont elle n’a pas vraiment fait le deuil, un deuil teinté d’une certaine culpabilité d’avoir gâché l’amitié profonde de toute une enfance, pour entrer dans une vie devenue tellement superficielle ! et le lecteur suit les pas de Mari.
    Ce voyage, d’emblée, ne pouvait que me plaire : certes je n’ai jamais fait de rando aussi « prestigieuse » que le John Muir Trail, mais à une époque de ma vie j’ai moi aussi marché en montagne, y compris en autarcie avec un petit groupe pendant 2 x 5 jours loin de toute civilisation, avec ravitaillement au milieu… Et je ne parle pas de quelques randos plus courtes, mais tout aussi mémorables et pour toujours, comme le tour des Dents du Midi (dans les Alpes suisses) avec celui qui deviendrait mon mari :heart: ou, quelques années plus tôt encore, un « trek touristique » jusqu’au Machu Picchu (qu’on ne présente plus) avec un petit groupe improvisé bien sympathique, car j’avais choisi de le découvrir sous cette forme de (courte) randonnée organisée, qui permettait d’y arriver en marchant sur la route des Incas, une route certes fréquentée mais un peu moins que les boulevards touristiques de visite d’une journée.

    On l’a compris : ce roman peint la nature et en particulier la montagne, comme j’ai rarement eu l’occasion de lire dans une simple histoire, au point de ne pas avoir eu l’envie ni le besoin d’aller « vérifier » par des photos sur Internet. Tous les paysages présentés par l’auteure sont tellement bien décrits, tellement justes, qu’on vibre comme si on y était, sans même avoir besoin de les voir. Tout simplement magique !

    Cela seul aurait sans doute suffi à rendre ce livre excellent, mais on a en plus un concentré d’émotions. Tant et tant d’émotions, même, qu’à un certain moment j’ai été chercher une boîte de mouchoirs à garder près de moi, tandis que ma fille me regardait d’un air inquiet, et m’a demandé ce soir : « Tu l’as bientôt fini, ce livre qui te rend si triste ? » Comment lui expliquer que ce n’était pas de la tristesse, mais quelque chose de bien plus profond, peut-être pas hyper-agréable certes, mais qui rendait cette lecture d’autant plus précieuse ?

    Le chemin que Mari entreprend vers elle-même résonne d’une telle justesse, d’une telle vérité, d’une telle détresse parfois aussi, qu’il faudrait être de pierre pour y rester insensible ! Son chemin est ainsi ponctué, par ailleurs, de quelques brèves rencontres qui soulignent ces rapports cordiaux que l’on peut retrouver spontanément entre randonneurs (il faut l’avoir vécu pour le comprendre, je crois), mais aussi d’une véritable histoire d’amitié avec ce petit groupe d’amis qui va croiser sa route, et avec qui elle va faire une bonne partie du chemin finalement. Cela donne le petit côté amitié-presque-romance bien agréable, qui n’était sans doute même pas vraiment utile, mais qui embellit l’histoire d’une légèreté sans laquelle on serait sans doute carrément dans le drame.
    Bref, j’ai adoré, et je recommande vivement ce livre à tout qui aime la montagne et les belles histoires toutes simples mais pleins d’humanité !





    Et je termine ce soir par ma dernière lecture de juillet dernier, à peine moins coup de coeur que le précédent (je n'ai mis "que" 19/20), une petite perle de la littérature mexicaine, qui semble plutôt se cantonner à la dénonciation des problèmes liés à la drogue... Ici, rien de tout ça, et c'est magique!

    Umami de Laïa Jufresa

    <image>

    Synopsis : «Tenter de dire qui était ma femme est aussi indispensable qu’impossible à expliquer, comme l’umami, ce goût imprégnant les papilles sans pour autant se laisser saisir, naviguant tranquille entre salé et sucré. Un titre parfait parce qu’incompréhensible ; d’ailleurs, je n’ai jamais totalement compris Noelia Vargas Vargas. Voilà peut-être pourquoi je ne me suis jamais lassé d’elle. Peut-être que c’est uniquement ça l’amour.»

    Mon avis :
    Un nouveau coup de cœur !
    Comme je le disais tout juste hier : de jour en jour, je vais de coup de cœur en coup de cœur. Et à nouveau, on a ici un roman qui n’a pourtant rien à voir avec les deux précédents (en l’occurrence : « Alabama 1963 » de Ludovic Manchette et Christian Niemiec, et « Dans tes pas » de Jessi Kirby). Ici, par ailleurs, on n’a même pas vraiment d’histoire, c’est plutôt le récit du quotidien des différents habitants d’un petit lotissement au cœur de la ville de Mexico. Après le terrible et tristement célèbre tremblement de terre de 1985, le propriétaire du lieu, Alfonso Sementiel, a aménagé ce qui était autrefois une maison face à un champ avec une cloche au milieu, en ce lotissement de quelques maisons, qui sont réparties et nommées en fonction de l’emplacement théorique des différents goûts dans le palais, avec la cloche effondrée dont le sommet dépasse au milieu de la cour centrale.
    Et on croise ainsi le quotidien de ces quelques familles, en plusieurs parties, et dans chacune de ces parties le quotidien est raconté par une voix différente façon roman choral, dans un ordre chronologique inverse, qui surprend bien un peu au début.

    2004 – maisons acide et salée : les deux sont occupées par une famille de 4 enfants, l’une comme habituation, l’autre comme « atelier musical » pour désigner l’école de musique organisée par les parents, tous deux musiciens à l’Orchestre national de Mexico. Ana, la fille aînée, 12 ans à ce moment-là, s’exprime à la 1re personne du singulier. C’est l’intello de la famille, un peu trop boulotte à son goût, qui a décidé d’échapper cette année à la tradition des vacances chez sa grand-mère maternelle aux États-Unis (car, aussi bizarre que ça puisse paraître, sa mère est bien originaire de ce puissant et indécollable voisin, et immigrée au Mexique, détricotant ainsi toutes les images traditionnelles d’une émigration dans l’autre sens !) ; bref, Ana est restée à Mexico et s’est lancée dans la végétalisation de la cour centrale, avec notamment une milpa, ce type de culture combinée telle que déjà pratiquée par les Aztèques.

    2003 – maison amère : la jeune Marina, vue par un narrateur omniscient mais vraiment très, très proche d’elle, est une artiste peintre en devenir. Elle a quitté sa famille, on ne comprend pas très bien si cette dernière était toxique ou si la jeune fille est quelque peu dérangée, mais clairement elle se cherche. L’une de ses obsessions est de renommer toutes les couleurs au plus juste, ce qui fait d’elle une poète bien davantage d’une peintre, avec des trouvailles absolument géniales soit dit en passant ! Je retiens par exemple le noiréctrique, c’est le noir des grandes villes illuminées (telle qu’on peut les voir la nuit, et c’est tellement ça !). Ou, plus piquant : le verdage, c’est la couleur du discours écologiste : le vert de chantage (n’oubliez pas qu’on est au Mexique, mais est-ce bien différent ailleurs ?).

    2002 – maison umami : c’est Alfonso Sementiel, le propriétaire des lieux. Docteur en anthropologie, spécialiste des cultures indigènes précolombiennes (dont l’amarante, ou la fameuse culture en milpa), il a été mis en espèce de retraite anticipée à la mort de sa femme (qui était quant à elle docteure en cardiologie), et il apprivoise son veuvage à mesure qu’il apprivoise son tout nouvel ordinateur (on devine un portable dernier cri) sur lequel il écrit ce qui est à mi-chemin une ode à sa femme disparue qu’il a tant aimée malgré tous ses défauts, au point de s’y perdre lui-même parfois (ce passage où il explique que c’est lui qui cuisinait, dans le couple ! soulignant à quel point c’est insolite dans un pays aussi machiste que le Mexique, et ce n’est pas moi qui le dis, mais l’autrice, bien mexicaine !), et ses mémoires de plus en plus personnelles, qui finiraient presque à s’opposer à cette femme qu’une part de lui vénérera pourtant à jamais.

    2001 – on quitte le lotissement, pour se retrouver auprès d’une autre habitante des maisons acide et salée, mais chez la grand-mère US : c’est la voix de Luz, la petite dernière de la famille, en vacances comme chaque été chez cette grand-mère très « seventies » qui laisse les enfants très libres dans sa propriété non loin d’un lac, ou qui consomme des champignons hallucinogènes au dessert… La voix de Luz est elle aussi rendue à la 1re personne du singulier, avec une imitation très réaliste mais jamais gnangnan du point de vue d’une jeune enfant de 5 ans, qui découvre peu à peu les différentes choses de la vie, au contact de ses aînés, de la nature, tout en gardant un pied dans les mondes enchantés qu’on lui raconte. Luz, quelques jours semble-t-il avant sa mort par noyade, alors qu’elle savait nager…

    2000 – la dernière maison, la sucrée. C’est là que vit Pina, née quasi en même temps qu’Ana des maisons acide-salée, et bien entendu sa plus proche amie, au point de pouvoir rester côte à côte sans rien faire lorsqu’elles boudent l’une sur l’autre, avant de se réconcilier d’un simple mot. Pina est l’image presque caricaturale, mais tellement réaliste et touchante, de cette enfant – unique, qui plus est – qui voit ses parents en train de se déchirer jusqu’à la séparation sans retour et qui, sans trop comprendre si elle est « coupable » ou pas, se fait de plus en plus invisible, espérant ainsi retarder, voire effacer, ce qu’elle sait pourtant déjà inéluctable.


    Spoiler (Cliquez pour afficher)

    Il est à noter que le livre se finit sur cette terrible année 2001 avec la voix de Luz, dans un final que certains commentaires ont relevé comme « abrupt ». Moi je l’ai trouvé bien pire que ça : il est en fait extrêmement violent, car on comprend très brutalement, sans que ce soit dit mais c’était amené depuis le début en fait, pourquoi / comment une fillette qui savait nager a bien pu se noyer dans un lac sans histoire ! C’est là aussi qu’on comprend toute la culpabilité de la mère, qui ne parvient pas à faire son deuil, ce qui est montré, là aussi sans jamais être « expliqué » outre mesure, à travers les mots d’Ana qui crée sa milpa quelques années plus tard… Mais aussi violent, abrupt si vous voulez, que ce soit, c’est aussi magistral !



    A travers ces quelques vies presque banales, il n’y a donc pas vraiment d’histoire extraordinaire ou haletante que l’on suivrait façon page-turner. C’est même « pire » : plus d’une fois je me suis retrouvée au bout de l’un ou l’autre chapitre et à reposer ma liseuse, pour intégrer ce que je venais de lire, et sans aucune envie d’aller plus loin tout de suite… mais ces pauses ne duraient jamais bien longtemps ! Car on a bien autre chose qu’un page-turner, j’ai envie de dire plus que ça : dans chacune de ces histoires, par un petit bout ou l’autre, on peut retrouver un quelconque proche, un voisin, un cousin, un ami, et certainement un bout ou l’autre de soi-même, car ces histoires traitent de sujets universels, tels que le deuil - que ce soit celui d’un adulte après la mort de son conjoint ou d’un enfant, celui d’un enfant après le départ définitif d’un parent ou d’une soeur, ou encore celui d’un adulte, ce deuil du ou des enfant.s qu’il n’a jamais eu.s ; mais aussi l’amitié, ou plutôt les amitiés – de celles qui perdurent à travers tout depuis l’enfance, de celles qui se défont à cause d’un malentendu, et de celles qui se créent, par exemple à cause d’un intérêt commun pour la milpa.
    Dans la foulée, l’autrice dénonce aussi quelques autres problèmes de société assez typique de la ville de Mexico ou du Mexique plus généralement, l’air de les effleurer à peine mais ils n’en sont pas moins présents : l’énorme pollution de la ville, que Pina décrit de façon tellement juste quand elle parle de « s’engouffrer sous la croûte » alors qu’elle revient vers la capitale après des vacances sous un ciel plus frais ; mais aussi ce syndrome très mexicain de n’oser se définir qu’à travers les yeux des États-Unis – comme Alfonso, qui est présenté comme le premier scientifique mexicain à avoir introduit le concept d’umami au Mexique dès la fin des années 1970, sans doute le premier sur le continent américain, peu après sa découverte par un Japonais… mais sa thèse serait alors passée tout à fait inaperçue, avant que ce nouveau concept fasse le tour du monde par d’autres voix (oui, oui, avec un x : d’autres voix que la sienne !), soit reconnue aux US, et vienne alors seulement, vraiment percer au Mexique… Et ce ne sont là que quelques exemples, mais je ne vais pas raconter tout le livre, j’en ai déjà beaucoup dit !

    L’umami, ce goût indéfinissable qui est venu s’ajouter récemment aux 4 classiques, dont j’avais déjà entendu parler sans trop savoir le définir, et s’il est bien expliqué ici, il n’en reste pas moins difficile à cerner ; cet umami, donc, se trouve essentiellement dans la langue de l’autrice. Elle est, à travers tout le roman, sans jamais faiblir, d’une délicatesse infinie, d’une justesse incroyable. Elle est travaillée, recherchée, très certainement poétique, sans jamais tomber dans les travers d’un académisme qu’on aurait pu redouter. Elle est légère et pétillante même dans les moments tristes, elle ne manque pas d’un certain humour aussi, mais alors un humour délicat (au risque de me répéter) qui ne fait pas hurler de rire sur le moment, mais qui laisse une impression persistante de petit bonheur simple.
    Alors bien sûr, je suis bien consciente que ce livre est une traduction : eh bien, quel que soit le niveau de fidélité à l’original, je ne peux que dire un tout grand brave à cette excellente traduction !
    Et malgré cette excellente traduction (ou peut-être à cause de ?), j’ai désormais bien envie de découvrir ce livre en version originale – d’une part pour voir si je suis encore capable de lire tout un livre en espagnol certes, mais d’autre part et surtout pour me délecter de ce petit bijou si savoureux !
  • domi_troizarsouilles

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    #133 16 Août 2021 00:29:55

    Bonsoir à tous,

    Quelques titres de plus pour combler mon retard... qui ne cesse de s'agrandir, même si j'ai assez peu lu ces derniers temps...

    On commence par un livre terminé il n'y a pas  jours, et heureusement que j'ai écrit mon avis assez rapidement, car je me rends compte que, sans relire le synopsis, je ne savais plus du tout de quoi ça parlait! :O je lui ai pourtant donné 15/20...

    L'antidote mortel de Cassandre Lambert

    <image>

    Synopsis : Trois adolescents, trois destins liés par leur désir de rébellion et de vengeance.
    Whisper, princesse surprotégée par le Roi, n’a jamais franchi les portes du Palais. Personne ne doit connaître son existence depuis qu’un mystérieux mal s’est emparé de la Reine. Lorsque son père la condamne à un mariage forcé, la jeune fille s’enfuit et cache sa véritable identité.
    De l’autre côté du royaume, Eden, fougueuse jeune femme au caractère bien trempé, est chassée d’un orphelinat. Son seul désir : venger la mort de son père, un brillant inventeur tué par le Roi. Quand elle rencontre Whisper, elle saisit l’opportunité de s’introduire au Palais par son aide.
    Jadis, paysan, se voit remettre par sa tante un précieux antidote, le seul capable de sauver la Reine. Sur sa route vers le Palais, il croise celle d’Eden et de Whisper…
    Trois personnages, et trois destins aussi liés qu’opposés.
    Au bout de leur route périlleuse, il faudra que justice soit rendue.


    Mon avis :
    Et voici un nouveau choix de bibliothèque en parcourant le catalogue… comme si je n’avais pas déjà assez de livres à lire dans ma PAL ! sans même parler de ma WL, dans laquelle ce livre ne se trouvait pas davantage, mais voilà : parfois le hasard fait bien les choses !

    Je n’avais aucune attente particulière en entamant ce livre, et que du bonheur après l’avoir terminé, même si ce n’est pas non plus la révélation du siècle. C’est une lecture agréable sans être fracassante, un très agréable moment sans prise de tête.
    L’histoire est un concentré de choses déjà vues un peu partout ailleurs, mais rassemblées ici de manière plus ou moins originale dans un monde tout à fait spécifique :entre la princesse fragile et ultra-protégée promise à un homme dont elle ne veut pas, l’orpheline devenue guerrière et qui n’avance plus que grâce à son inébranlable besoin de vengeance, et le gars un peu paumé également orphelin qui se découvre des dons exceptionnels, on ne peut pas dire que ce soit hyper-original.

    Je dis cela sans vouloir dénigrer : chacun des personnages est bien typé, parfois à la limite du cliché mais sans tomber dedans ; l’histoire de chacun est présentée à petites doses sans que ce soit jamais indigeste en étant trop, ni lassant car il ne faut jamais attendre trop longtemps pour recouper les morceaux, et au final ça les rend bien crédibles dans ce monde particulier, qui est quant à lui bien posé également. C’est un univers bien construit, avec ses particularités bien crédibles, tout se tient. Mais (car il y a un mais…) peut-être suis-je déjà blasée des univers Fantasy, du moins certains : malgré ses qualités, pour ça aussi j’ai eu le sentiment de retrouver du déjà-vu, par petits bouts trouvés ailleurs et quelque peu différents, rassemblés ici tous ensemble pour former un énième monde cohérent certes, mais qui n’en devient pas exceptionnel pour autant, je n’ai clairement pas eu l’impression de découvrir un monde insolite et fabuleux.
    Par ailleurs, les personnages secondaires sont eux aussi bien travaillés, certains se glissant là-dedans comme des pièces d’un rouage bien huilé, et ensuite sacrifiées… ou au contraire revenant inlassablement dans leur rôle de méchants. Si le fameux Roan est détestable d’emblée, le dénommé Alistair est intriguant depuis le début, et on devine assez vite (sans pouvoir connaître tous les détails toutefois) son rôle dans l’histoire… A noter que, parmi ces personnages sacrifiés, on notera une brève allusion au drame des migrants qui risquent tout pour pouvoir quitter un pays où ils ne peuvent / veulent plus vivre, et prennent alors tous les risques pour aller vers un improbable eldorado, remettant leur vie entre les mains de qui se révèlent de véritables escrocs… mais ce n’est qu’un passage, qui est assez vite effacé au profit de la suite du mouvement.
    Enfin, pour continuer dans les doléances sur ce livre : la langue est fluide et agréable, mais là non plus rien d’exceptionnel, ni recherché ni excessif dans un quelconque sens, c’est du tout simplissime visant à servir l’histoire de façon efficace, et ça marche, mais ce n’est pas ça qu’on retiendra.

    En revanche, tout ce qui fait l’attrait de ce livre et qui ne s’est pas démenti une seule fois, c’est le rythme endiablé de l’action ! Les passages plus ou moins tristes et/ou explicatifs ne sont jamais longs, et à côté de ça on a une action qui ne faiblit jamais : à peine nos trois héros sont sortis d’une galère, et paf ça recommence, ça s’enchaîne, il n’y a pas un seul temps mort. L’autrice a de l’imagination à revendre, ça secoue et ça entraîne, et comme je disais plus haut : c’est cette écriture aisée sans fioritures qui permet un tel déchaînement, allant de rebondissement en rebondissement à un rythme soutenu, et dans de nombreux cas c’est surprenant, et quand ça l’est moins, quand on devine plus ou moins les choses, ça n’en reste pas moins entraînant !

    Pour autant, on n’est pas non plus « noyé », peut-être parce que, malgré le rythme soutenu de l’action, l’alternance de trois narrateurs – nos trois personnages principaux - qui s’expriment à tour de rôle à la 1re personne du singulier, généralement le temps de deux chapitres, et facilement identifiables car leur nom est tout simplement mis en tête de chapitre, permet d’avancer en ayant les différents points de vue qui, sans être tout à fait opposés, sont quand même bien distincts. J’ai même été (presque désagréablement) surprise quand, dans les chapitres de la fin, la parole est donnée quelquefois à l’un des personnages secondaires, certes un récurrent, mais tout à coup ça donnait presque l’impression de casser le rythme très soutenu mais donc bien régulé que l’autrice nous proposait depuis le début. Quoi qu’il en soit, je suis très curieuse de découvrir la suite… qui ne sortira que dans quelques mois, me permettant ainsi de ne pas enchaîner deux tomes à la suite - ce que je ne fais que très rarement, pour le coup j’ai un vrai prétexte !




    Après cela, il était temps de renouer avec mon genre de prédilection, que je délaisse un peu trop souvent désormais (heureusement, ça n'empêche pas les bonnes surprises!): et c'est un bon 16/20!

    Ne crains pas la faucheuse d'Alexis Aubenque

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    Synopsis : Le corps d'un jeune homme est découvert dans sa salle de bains, atrocement mutilé. Sur le miroir, une signature énigmatique : Ne crains pas la Faucheuse. Tout juste débarqué dans le commissariat de Pacific View, le lieutenant Gregory Davis n'a pas le temps d’apprécier les joies de la Californie, il faut trouver l'assassin. Second par le sergent Veronica Bloom, ils traquent le moindre indice. Mais l'affaire prend une toute autre envergure lorsque les soupçons s'orientent vers un des notables de la cite balnéaire. Journaliste au San Francisco Chronicle, Faye Sheridan s’intéresse de près a ce meurtre. D'autant que le nom de Gregory Davis lui rappelle une affaire troublante a laquelle il avait été mêlé...

    Mon avis :
    Ce livre est arrivé dans ma bibliothèque Kindle à la suite des offres régulières que fait la marque pour passer ses ebooks en promo. Cet auteur-là est l’un de ceux qui reviennent de façon régulière dans les offres, peut-être selon mes choix et autres recherches de lecture habituelle – il est vrai que je lis beaucoup de polars, donc c’est logique que les cookies (que j’accepte toujours sans sourciller, un peu trop naïvement peut-être) finissent par me proposer des trucs qui me plaisent !

    Et là je suis bluffée ! Le lecteur est embarqué d’emblée auprès de ce policier, Gregory Davis, et de sa famille qui vient de déménager dans la petite ville de Pacific View, grâce à un héritage inattendu qui joue un rôle mineur dans l’intrigue, même si ça crée d’emblée un certain climat : on sent qu’il y aura de la suspicion, des questionnements autour de ce lieu et de tout ce qui est lié à cette chance incroyable de se retrouver dans un tel manoir et avec autant d’argent – et en plus avoir un flic veuf et intègre qui veille bien sur ses deux enfants d’âges très éloignés, typiquement « en bon père de famille » comme on rêverait de croiser. Cela dit, l’auteur est assez habile pour mettre son personnage principal dans la poche du lecteur : quoi qu’il se passe ensuite, on se sent toujours de son côté, on a envie que tout aille bien pour lui, on tremble avec lui quelquefois, etc. Il faut dire, pour moi qui suis très sensible à cela : cet aspect famille, sur laquelle il veille en plus de son esprit consciencieux dans son travail, ça le rend particulièrement attachant, humain, « vrai ».

    Face à lui, la jeune journaliste, Faye Sheridan, un peu trop sous-estimée, au passé un peu trop malheureux, est à peine moins attachante. Si on n’adhère pas à tous ses choix, elle attache également le lecteur sur ses pas, et là aussi on a envie que tout se passe bien pour elle et qu’elle s’en sorte, et même davantage ! On regretterait presque que ces deux personnages, s’ils se croisent ici ou là, ne travaillent pas vraiment ensemble, ni même en opposition. Ils n’ont que très peu de contacts directs, alors que le synopsis m’avait laissé espérer autre chose : une vraie collaboration, ou une plus classique course à qui résoudrait l’affaire le premier, mais ici rien de tout ça, c’est beaucoup plus sinueux et plein de détours, et pourtant tout se tient, s’imbrique, et se révèle peu à peu au lecteur qui en reste bouche bée !

    A côté d’eux, les personnages secondaires sont vraiment bien travaillés, aussi bien la nouvelle coéquipière de Gregory Davis, que ses enfants – en particulier son fils Raphaël, très jeune adulte qui découvre la vie - ou la nounou un peu revêche qu’il finit par dégotter pour sa plus jeune ; de même, les « amis » de Faye, que ce soit ses collègues avec qui elle entretient des rapports proches d’une amitié piquante, ou ses rencontres plus ou moins provoquées, sont bien (a)menés et rendent l’ensemble réellement humain. Comme par ailleurs tous ceux-là ne sont pas trop nombreux, le lecteur a bien le temps de se familiariser avec chacun d’eux au fil de la lecture, et il n’y a aucun risque de s’y perdre : c’est un aspect que j’apprécie particulièrement.

    Quant à l’action, elle n’est pas trépidante, on n’est pas dans un policier où tout le monde court partout. C’est un savant (et pour moi heureux) dosage entre ce qu’il faut d’action qui donne son rythme à l’histoire, mais on a aussi ce qui ressemble à une analyse assez psychologique de ce métier de flic : les interactions dans un commissariat, les travers liés au fait que le shérif soit en fait un type élu et non un simple flic haut gradé, l’évolution particulière entre flics qui se côtoient au jour le jour. On n’échappe pas aux bavures, qui sont peut-être un peu cliché, typiques de ce qu’on imagine (depuis notre Europe qui se veut si « sage ») qui peut se passer dans un commissariat des US… alors qu’il faut être sourd et aveugle pour ne pas savoir que ça existe chez nous aussi ! et c’est d’autant plus tristement réaliste.

    S’il faut noter quelques petits bémols, et avant tout : j’ai relevé quelques fautes d’orthographe ! Pas des dizaines, mais suffisamment pour que ce soit choquant dans un livre publié à compte d’éditeur… Et un autre petit truc qui m’a gênée, mais c’est assez personnel : à un certain moment du livre, l’un des personnages fait référence à une affaire qui renvoie à une autre saga de l’auteur… Si j’apprécie ces petits trucs d’auteur de lancer des ponts entre ses différents livres, c’est plus embêtant que ça n’ait été indiqué nulle part avant cette soudaine note de bas de page ! moi j’aime bien lire les choses dans l’ordre, et je suis bien consciente que ceci n’est pas le premier opus de l’auteur, mais voilà… Cela dit, ce n’est pas demain que je vais me lancer sur les séries plus anciennes : le double épilogue (rien que ça !) en forme de cliffhanger donne trop l’envie de lire la suite, que j’ai achetée dans la foulée, et déjà lu les premières pages…

    Le tout donne ainsi un livre dynamique sans être survolté, où chaque petit détail a son importance. On se rend compte peu à peu qu’on est en fait devant un fameux puzzle, où chaque petite pièce va venir s’imbriquer dans le tableau final… même si on a mis de côté certaines de ces pièces sans trop y croire, ou parce qu’elles semblaient sans importance. Tout se tient, rien n’est perdu, rien n’est inutile. J’ai lu ici ou là que ce n’est pas le meilleur livre de l’auteur, mais pour moi qui le découvrais avec ce titre, c’est une jolie réussite !





    Pour terminer ce soir (car demain je reprends le boulot! :O et il est déjà tard...), un autre petit livre jeunesse pioché dans le catalogue de la bibliothèque, assez sympathique pour recevoir un 15/20

    Le code Vivaldi de Nathalie Somers

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    Synopsis : Lorsque son père lui propose de l'accompagner pour ses affaires à Venise, Emma King est aux anges. Fini le pensionnat de bonne famille ! Mais la jeune fille déchante vite face à l'indifférence paternelle... C'est alors qu'au Palais des Doges, elle surprend une conversation à propos d'un futur cambriolage. Emma veut en savoir plus, quitte à devoir mener l'enquête avec l'assistant de son père, l'insupportable et séduisant Kieran.
    Saura-t-elle faire tomber les masques ?


    Mon avis :
    Voici un énième livre que j’ai choisi dans le catalogue de la bibliothèque de ma commune, sans le chercher en particulier et sans trop savoir à quoi m’attendre. Mais la couverture est mignonne (sans être exceptionnelle), et puis Vivaldi quoi ! Je suis fan de ce compositeur depuis l’enfance – qui baignait dans une ambiance de musique classique, entre une maman elle-même musicienne et un papa mélomane. Je rêvais d’apprendre la flûte rien que pour pouvoir jouer Le Chardonneret… et puis finalement j’ai fait de la clarinette, l’une des nombreuses incohérences entre ma vie réelle et ma vie rêvée, sans drame pour le coup, et je ne garderai même pas de regret : je n’ai jamais été capable de sortir le moindre son des flûtes de ma maman ou de ma sœur !

    Mais je digresse… Vivaldi donc… Bien avant d’arriver au Prêtre roux, on passe par un pensionnat pour jeunes filles riches dans les Alpes suisses et c’est ainsi que, d’emblée, on comprend tout à la fois que l’histoire ne correspond pas à ce que nous laisse entendre le synopsis, et que en plus cette histoire sent très fort le cliché ! ce qui, hélas, ne va jamais se démentir…
    Ainsi donc, notre jeune héroïne, Emma de son prénom, est la fille d’un haut dignitaire de l’UNESCO très engagé dans la préservation des trésors de l’humanité, et orpheline de mère. Son père étant plus que pris par son travail et ses très nombreux voyages, la jeune fille de 16 ans a passé l’essentiel de sa vie (depuis ses 8 ans, année de la mort de sa mère), vacances comprises, dans ce pensionnat suisse (eh oui ! tout bon pour le 1er cliché donc) plus que huppé qui enseigne autant les langues à la perfection que le sport de haut niveau ou les bonnes manières que ces jeunes filles de la haute bourgeoisie de diverses origines doivent pouvoir maîtriser. Emma n’en est pas moins heureuse dans cette ambiance, elle qui ne connaît quasi rien d’autre et qui s’y est fait des amies qu’elle considère presque comme des sœurs, alors que son propre père est un parfait inconnu pour elle. Ainsi, quand il débarque tout à coup pour ses 16 ans, pour une raison qui est très vaguement évoquée et qui ne sera jamais développée de tout le livre, non elle n’est pas « aux anges » de quitter l’environnement aimé et rassurant de la moitié de sa vie, mais elle décide de donner une chance à une relation alors inexistante avec son père.
    Sauf que… non seulement la relation avec son père ne va jamais décoller, mais ce que son père lui montre n’est pas de l’indifférence, mais quelque chose qui s’approche du mépris ! En outre, comme je disais, la raison pour laquelle il a tout à coup été la chercher dans sa prison dorée des Alpes, est vaguement évoquée, mais jamais davantage développée, et ça reste une frustration tout au long du récit… au même rythme qu’Emma se sent de plus en plus mal face à cela, mais reste invariablement polie avec sa façade de jeune fille bien élevée. Et que c’est agaçant !

    Mais voilà : non seulement c’est agaçant, mais en plus ça reste le cliché absolu à travers tout le livre. On a d’une part la « pauvre petite fille riche » (pauvre car elle est orpheline et délaissée voire méprisée par son père qu’elle aimerait apprendre à connaître, le reste se passe d’explication), et le méchant garçon pauvre, personnage principal masculin du livre, le jeune Irlandais Kieran, qui travaille pour le père d’Emma, mais qui connaît trop bien Venise pour être honnête. Car c’est effectivement là que se passe l’action de ce premier tome des aventures d’Emma et de Kieran : la ville de Venise en toute fin d’automne, quand le froid est brumeux et le phénomène d’acqua alta apparemment au plus fort. Et en parlant de plus fort, c’est l’un des points essentiels du livre, qui fait que je ne donne pas une trop mauvaise note : l’autrice s’est très clairement bien documentée sur la Sérénissime, qui plus est hors de sentiers touristiques battus, et/ou elle l’adore et la connaît bien, toujours est-il qu’elle nous convie à une véritable visite guidée un peu inhabituelle de la ville. Elle nous présente certaines de ses attractions touristiques avec un œil original, et nous entraîne dans les rues moins connues, tout en distillant toute une série de connaissances, notamment artistiques, bien sympathiques à apprendre. Elle sensibilise aussi au problème que représentent certains types de déplacements motorisés, sans doute très recherchés par les touristes mais qui contribuent à détruire la ville. Un gros bon point pour cet aspect-là !

    Mais revenons-en aux personnages : ils sont eux aussi sympathiques, mais terriblement cliché et à la limite de l’incohérence, surtout en ce qui concerne Emma. Il y a ce vernis de bonne éducation qui lui colle à la peau dès qu’elle ouvre la bouche, malgré le fait que l’autrice insiste bien pour dire qu’elle pense autre chose… alors au début on peut comprendre que ce vernis tellement profond en fait, ne craquelle pas trop, mais à la longue on n’y croit plus ! On a vraiment envie de la voir s’énerver pour de bon ! De plus, ce serait plus cohérent avec son comportement, elle qui est en mal de mouvement et qui va prendre des risques de plus en plus insensés, pour les beaux yeux de Kieran que, par ailleurs, elle prétend ne pas supporter, d’autant plus qu’il la traite comme la petite fille capricieuse qu’elle est effectivement, mais qu’il voit surtout à travers ses nombreux préjugés à lui…
    Bref, autant l’approche de la ville était intéressante et agréable, autant les personnages sont terriblement cliché, et les interactions entre eux le sont tout autant, sans jamais vraiment évoluer. Certains parlent de romance, mais je ne vois nulle part une romance entre cette jeune fille ultra-naïve et trop bien éduquée qui se laisse manipuler pour les beaux yeux d’un jeune homme et parce qu’elle s’ennuie, et ce jeune homme qui joue avec les sentiments de la première et l’embrasse quand ça l’arrange pour mieux la rejeter ensuite. En fait, on est bien davantage dans un jeu du chat et de la souris, mais façon Tom & Jerry où l’un se joue de l’autre à tour de rôle en dépit de toute logique, pour finir par s’entendre dans l’adversité, avant de recommencer leur guéguerre sans queue ni tête.
    C’est vrai que les dialogues entre les deux protagonistes sont piquants, ce qui crée une ambiance sans doute attrayante pour les plus jeunes, mais pour moi c’est clairement trop cliché, avec trop d’incohérences et l’absence de réelle évolution dans la relation, si bien que cet aspect piquant n’est pas suffisant et finit même par lasser.

    Il reste l’intrigue. Parfaitement intégrée dans la balade à travers la ville, elle est une occasion supplémentaire de découvrir de nouvelles choses : sur Vivaldi, sur Le Tintoret, sur Canaletto etc. Le tout reste très superficiel, certes, et l’histoire de « code Vivaldi » est assez basique une fois qu’on a compris, et on devine l’enchaînement bien avant les héros eux-mêmes, mais ça reste agréable, grâce à une écriture fluide qui ne tient pas forcément en haleine, mais qui se laisse lire sans souci. Malgré tout, ici aussi on reste dans le superficiel. Ainsi, je peux dire que ce livre me laissera une impression agréable mais pas inoubliable, et je ne suis pas certaine de jamais lire le tome 2.

  • domi_troizarsouilles

    Enfileur de mots

    Hors ligne

    #134 18 Août 2021 18:21:27

    Bonjour à tous,

    J'ai plein de lectures en cours à des degrés divers, mais je suis presque à jour dans mes lectures passées que je n'ai pas encore partagées ici!

    Parmi ces lectures, vous ai-je dit que, moi qui désespérais bien un peu d'obtenir un jour une Masse critique de Babelio, j'en ai eu deux coup sur coup, quasi en même temps, si bien que je dois rendre mes avis respectivement pour le 3 et le 5 septembre?
    (et, honnêtement, j'hésite entre :tetemur: et :pompom:)

    J'ai ainsi reçu un livre de la Masse critique non-fiction, "le" genre que je ne lis jamais! c'est malin... J'essayais "pour voir" après deux autres essais infructueux, et là donc, voilà: c'est La couleur de la justice. J'en suis presque à la moitié, le sujet est hyper-intéressant, mais je suis assez mitigée sur ma lecture jusqu'à présent: je ne suis pas certaine que l'approche de l'auteure soit toujours très opportune pour la cause qu'elle défend...

    Et dans le même temps donc, j'ai été invitée à participer à une Masse critique privilégiée, et ça a marché, j'ai ainsi reçu De silence et de loup. Ce livre correspond bien davantage à mes goûts - c'est un thriller! ;) - et pour l'instant, j'aime bien! Cela dit, je ne suis pas encore très avancée, seulement 16%, mais en tout cas le début est positif!

    Mes autres lectures en cours sont indiquées sur mon profil , que j'essaie de tenir à jour, pour m'y retrouver moi-même! ;)




    Mais passons maintenant à mes lectures passées, la première date d'un peu plus de 10 jours.
    Et c'est une déception - mais j'ai été gentille: 13/20

    Le sourire contagieux des croissants au beurre de Camille Andréa

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    Synopsis : Le bonheur c’est comme la pâtisserie, rien ne sert d’avoir les ingrédients si on n’a pas la recette…
    A quarante-quatre ans, le Chef français Pierre Boulanger a tout pour être heureux. Il possède le plus grand empire de pâtisseries surgelées des Etats-Unis, il est l’ami des stars, les plus belles femmes du monde croquent à pleines dents dans ses fameux croissants, et il a épousé une brillante avocate reconnue par le gratin new-yorkais qui lui a donné un adorable petit garçon. Jusqu’au jour où un vendeur ambulant lui propose un gobelet de café à un million de dollars. Un million de dollars, pas pour un simple café, bien sûr. Un million de dollars pour le meilleur café du monde, le café qui va changer sa vie…
    Cette rencontre magique avec un vieux vendeur de hot-dogs ambulant ébranlera à jamais les certitudes de Pierre Boulanger quant au pouvoir, à l’amour, et à la vie.


    Mon avis :
    J’avais eu un coup de foudre pour la couverture de ce roman, quand je l’ai vue pour la première fois en librairie ! Elle n’est pas particulièrement belle, et je ne suis pourtant pas particulièrement fan de croissants (d’ailleurs, tant qu’à faire cliché, je ne suis même pas française ! et le croissant n’a pas la même « valeur symbolique » en Belgique…), pour tout dire je préfère les pains au chocolat (ou chocolatines pour ne pas faire débat), mais c’est vrai que ce croissant a l’air réellement souriant et dès lors comme lumineux. Avec en plus le titre, il est très attirant, vraiment… Et puis, de toute façon, par définition les coups de foudre ne s’expliquent pas !
    Là-dessus, j’ai quand même vérifié son prix en Kindle plutôt qu’en broché : sans surprise, en format électronique il est plus de 3 fois et demie moins cher. Ainsi, sans avoir encore regardé le 4e de couverture jusqu’à présent, j’ai fait une chose que je n’avais jamais faite auparavant, et m’abstiendrai sans doute de faire à l’avenir : alors que j’étais toujours en librairie, au lieu de photographier ce livre « pour mémoire » comme je fais généralement et décider ensuite tranquillement de l’achat ou pas à la maison, je l’ai aussitôt acheté… en format ebook !
    Évidemment, depuis lors il est resté dans ma bibliothèque-PAL interminable, plus ou moins oublié ; il fallait un challenge en particulier pour que je le ressorte tout à coup. Et c’est seulement là que j’ai – enfin ! – regardé le synopsis, et commencé à déchanter…

    C’est que, bien loin de la littérature contemporaine telle qu’annoncée sur les divers sites de vente (ou dans ma librairie : il se trouvait dans ce rayon-là), ce livre est surtout un ouvrage de développement personnel aromatisé au feel-good, sous couvert d’un roman narrant les aventures d’un boulanger français, nommé bien à-propos Pierre Boulanger, devenu un richissime industriel, patron dans le domaine du croissant surgelé. Il achète usine sur usine, ne peut plus s’arrêter, amasse de plus en plus de fric, fortune croissant (sans mauvais jeu de mots) à mesure que s’approfondit sa déshumanisation. Une rencontre fortuite avec un vieux sage vendeur de hot-dogs va changer sa vie…

    On entre ainsi typiquement dans une histoire de cheminement intérieur, que ce vieux sage va servir à notre Boulanger à coups de maximes et autres théorèmes, syndromes et citations – c’est du vu, vu, vu et revu dans le genre, que ce soit dans la littérature ou au cinéma. La seule originalité (et encore), c’est que c’est concentré en une seule histoire plus ou moins crédible, que le personnage principal ne paraît jamais aussi antipathique qu’il pourrait l’être et que le vieux sage tout à fait improbable finit par devenir sympathique. Il y a en outre des touches d’humour çà et là, qui m’ont parfois fait réellement sourire malgré l’ennui sous-jacent, et clairement l’auteur assume les côtés ultra-cliché de son récit, il y a des allusions-clin d’œil à ce sujet, assez subtiles toutefois, ici ou là.

    Il n’en reste pas moins que c’est typiquement le genre de livre qui ne m’attire pas du tout normalement, et qui m’insupporte très vite si je le lis ou, au mieux, que je trouve très vite ennuyeux au possible. Celui-ci n’a pas dérogé à la règle, et seule l’intrigue centrale (à la recherche du meilleur café du monde) donne envie de tourner les pages, mais franchement sans précipitation ni réel enthousiasme ; c’est plutôt une espèce de curiosité : mais qu’est-ce qu’il va bien pouvoir inventer pour nous convaincre ? Vous pourrez me dire : peut-être ai-je ce sentiment plutôt négatif, parce que je n’ai pas besoin d’un tel livre à ce moment précis de ma vie, et qu’il y a peut-être l’une ou l’autre chose à en retirer quand même ? Mouais… Pourtant, dans des moments moins heureux de mes « quelques » années (presque un demi-siècle quand même), je n’ai jamais ressenti le besoin de lire ce genre d’ouvrage, et si l’une ou l’autre âme bien-intentionnée m’en mettait alors un entre les mains, ça m’a toujours très vite agacée. Ce n’est pas une littérature que j’affectionne, voilà tout, et ce récit à l’allure pourtant sympathique ne m’a pas réconciliée avec le genre.

    Et puis bon, soyons sérieux : c’est facile de prêcher que l’essentiel est ailleurs que dans l’argent, quand on a de l’argent à ne savoir qu’en faire et qu’il reste juste à se « recentrer » tranquille, puisque par ailleurs on peut vivre de ses rentes pour le restant de ses jours, ce que l’auteur souligne à plusieurs reprises. Oh ! on a aussi l’exemple du vendeur de hot-dogs, pauvre comme job et édenté (détail sur lequel on insiste beaucoup), mais qui se dit parfaitement heureux… sauf qu’il n’est pas convaincant un seul instant ! il n’est qu’un vieux sage (je sais, je me répète) que le lecteur considère comme tel, c’est-à-dire un peu illuminé, déconnecté de la réalité ; le vrai « héros » est l’industriel, pour qui les choses sont bien différentes, et qui peut se permettre d’être enfin « libre », puisqu’il a de toute façon déjà tout !
    Attention : ne croyez pas non plus que je serais jalouse de cet homme et que j’écris ce qui précède par dépit. Oh que non ! Si – comme tout le monde au fond – j’aimerais avoir de l’argent à ne plus savoir qu’en faire, je reste aussi trop bien consciente que ce n’est jamais qu’un rêve flou qu’on sait aussi improbable que gagner au Lotto (oui oui, deux t en Belgique ;) . Et, dans tous les cas, même si ce type de « réussite sociale » reste ce qui nous est tellement souvent présenté comme une voie royale pour arriver à cette richesse rêvée, eh bien tant pis : je n’envie en aucune façon la vie d’un chef d’entreprise détaché des réalités au point de ne jamais emmener son enfant unique à la crèche, de ne même pas connaître le nom de sa secrétaire, et de ne plus savoir sourire alors que c’est la marque de fabrique de ses croissants… Sérieusement, quels que soient nos rêves de richesse.s, qui a vraiment envie de devenir un robot vaguement humain à faire du fric ?...

    Quoi qu’il en soit, et malgré la sympathie qu’il finit par susciter, le personnage principal n’est pas représentatif du lecteur lambda, et ne m’a touchée à aucun moment. Certes oui, ce livre a le mérite de rappeler l’essentiel : l’argent ne fait pas le bonheur (du moins à partir d’un certain niveau de richesse), l’essentiel est ailleurs, à savoir dans un « vrai » bonheur qui est propre à chacun, et auquel on peut accéder lorsqu’on prend la peine de se retrouver soi-même et qu’on prend du temps pour ceux qu’on aime. En un mot : ce livre nous invite à nous recentrer, et propose même une pseudo-solution pour aider à sauver le monde.
    Mais justement : le bonheur est propre à chacun, et clairement, non seulement le cheminement de ce héros de pacotille (hum, pardon, je voulais dire : le héros de ce pseudo-roman) ne m’a pas touchée un seul instant, mais je pense être capable – grâce à l’amour de mes proches notamment – de trouver le bonheur, ou ce qui y ressemble mais qui me convient (même si un vieux sage venait tout à coup me prétendre le contraire), sans avoir besoin de lire ce livre qui m’a plus ennuyée qu’autre chose, malgré quelques qualités narratives.





    Les dames de Marlow enquêtent, tome 1: Mort compte triple de Robert Thorogood
    Un bon 18/20!

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    Synopsis : Dans la petite ville de Marlow, en Angleterre, Judith Potts, 77 ans, mène la vie qui lui plaît. Elle boit un peu trop de whisky et se baigne toute nue dans la Tamise, et alors ? Au pays des excentriques, elle est la reine !
    Un soir, elle entend, provenant de la maison de son voisin, un cri suivi d'un coup de feu. Elle en est sûre : un meurtre a été commis. Mais la police ne la croit pas. Pas d'énigme sans solution pour Judith Potts ! La vieille anglaise passionnée de mots-croisés va se lancer dans l'enquête avec, à ses côtés, Becks, la femme du vicaire, et Suzie, la promeneuse de chien et commère attitrée de Marlow.
    Vous reprendrez bien un nuage de crime avec votre thé ?


    Mon avis :
    Et voici un nouveau petit cosy mystery que j’avais pris en librairie à cette période pré-estivale où le genre a tout à coup fleuri de partout. Celui-ci m’avait séduite à cause de… ses quelques grilles de mots croisés à l’intérieur ! Il n’y en a pas beaucoup, je ne suis pas fan de mots croisés, et en plus je ne les ai même pas faits (parce que je ne voulais pas écrire dans un livre, par « principe », et je n’ai découvert qu’après coup qu’il y avait moyen de les trouver en ligne et donc de les télécharger pour les faire sur papier libre, bref…) ; néanmoins, ça donne un côté dynamique au livre ! D’ailleurs, c’est confirmé par les quelques lectrices avec qui j’ai lu ce livre en LC (bien que légèrement décalée) : les grilles de mots croisés permettent de faire le point à plusieurs moments et donnent ainsi un rythme indéniable à l’histoire.

    Outre ce petit « plus » dans le livre, je peux dire que c’est l’un des meilleurs cosy mysteries (à mon goût) que j’aie lu jusqu’à présent ! Les personnages sont bien campés, bien typés en évitant de plonger dans les clichés, tandis que l’intrigue tient vraiment en haleine, et le lecteur se fait son idée au fil de la lecture, échafaude ses hypothèses, dont certaines n’aboutiront à rien, et d’autres se révéleront vraies ! La fin se présentait de cette façon que je n’aime pas, où tout est révélé dans une espèce de rassemblement final… mais en fait non, c’est beaucoup plus subtil que ça, et carrément cinématographique même. Bref, l’ensemble est très bien mené, avec l’équilibre parfait entre enquête policière et étude de mœurs de la communauté d’un petit village anglais, avec la Tamise, une cinquantaine de km en amont de Londres, en personnage à part presque entière.

    On a donc ces trois dames qui vont entrer dans l’histoire de façon très directe, avec en premier lieu Judith, verbicruciste de plus de 70 ans, distinguée et cachant un secret qu’on va finir par découvrir, mais chut ! Elle va s’allier avec Becks, la femme du vicaire, autrefois pleine de vie et de dynamisme, mais tellement attachée à sa charge et légèrement obsessionnelle, avec un petit côté desperate housewife, et ensuite Suzie que l’on imagine bien davantage en fermière en train de pousser ses vaches, mais qui en fait promène les chiens des uns et des autres, et qui va ainsi s’attacher à Emma, la doberman de l’une des victimes de l’histoire. Elles sont complètement différentes, comme je disais elles sont très bien campées, très typées et parfois on croirait qu’on va plonger dans le stéréotype… mais elles ont chacune ce « petit quelque chose en plus », une part de mystère qui les rend humaines avant tout, et dès lors leur amitié naissante est tout à fait crédible et touchante ! quelles que soient leurs motivations pour résoudre l’énigme de ces meurtres qui vont se poursuivre…

    L’intrigue quant à elle est bien menée, le lecteur se laisse complètement embarquer, haletant sur les (nombreuses) (fausses) pistes. Comme nos trois héroïnes, on croit plusieurs fois être arrivé à une solution en leur compagnie, et puis non, toute la machine vient se gripper à cause d’un grain de sable imprévu. Ce que j’ai apprécié, aussi, dans la résolution de l’enquête, c’est que la police – la vraie police je veux dire – a une place très réaliste, et n’est pas une seule seconde mise de côté ou dénigrée. Au contraire : elle est mise en avant juste ce qu’il faut, avec ses faiblesses toutes humaines, et le fait que – comme partout ailleurs en Europe semble-t-il – les budgets qui lui sont alloués ne cessent de baisser, obligeant les policiers à assurer des tâches de plus en plus écrasantes avec des moins en moins de moyens. Le personnage de Tanika, l’inspectrice qui se retrouve à la tête de l’enquête qui dépasse largement ce que son grade devrait lui permettre de faire (mais son chef est en arrêt de travail et pas remplacé), est parfaitement présentée elle aussi, et définitivement la 4e mousquetaire du trio improbable composé des trois dames citées plus haut.
    Bref, j’ai vraiment passé un très bon moment de lecture !





    14-14 de Silène Edgar et Paul Beorn
    On réitère le 18/20 ;)

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    Synopsis : Hadrien et Adrien, deux garçons de 13 ans, habitent à quelques kilomètres l'un de l'autre en Picardie. Tous deux connaissent des problèmes à l'école, des troubles sentimentaux, des litiges avec leurs parents. Une seule chose les sépare : un siècle. Leurs destins vont se mêler et une faille temporelle leur permet d'échanger du courrier...

    Mon avis :
    Un livre épatant sur un sujet assez souvent abordé en littérature, mais je crois rarement d’une façon aussi accessible pour les jeunes ados, s’adressant à eux à travers une intrigue qui peut vraiment les intéresser, sans fioritures qui enjoliveraient les choses, mais sans non plus noircir le tableau outre mesure. J’en tiens pour « preuve » que, à peine l’avais-je fini, j’ai passé ce livre à mon fils de tout juste 14 ans… qui l’a terminé en une après-midi ! Bon, il n’a pas été très bavard, mais quand je lui ai demandé si c’était bien, il m’a répondu : « Oui c’était bien, et plus que ça. » Un jour peut-être en dira-t-il davantage ?... ;)

    On a donc une toute petite pincée de magie, par l’intermédiaire d’une sorcière peut-être (sur qui on ne s’attarde pas le moins du monde cela dit, le postulat de départ étant qu’on y croit), qui permet que deux jeunes garçons de 13 ans, Adrien en 2014 et Hadrien en 1914, se trouvent en correspondance et, après la superficialité quelque peu vantarde des débuts, développent peu à peu une réelle amitié. Ces deux dates, et surtout 1914, pourraient laisser croire que ce livre va parler de la guerre, sujet difficile et rébarbatif s’il en est ; certes, il va en être question, et même de plus en plus au fur et à mesure que les semaines avancent et approchent inexorablement de l’entrée en guerre de la France, mais ce n’est pas l’élément central du livre, car l’action se passe en grande partie avant le déclenchement des hostilités.

    On touche en revanche à des sujets beaucoup plus terre-à-terre, beaucoup plus parlants pour de jeunes collégiens, dans un équilibre fragile mais toujours bien dosé qui oppose autant qu’il rapproche ces générations au sortir de l’enfance, mais à 100 ans d’intervalle.
    Pour citer quelques exemples sans trop spoiler :
    c’est d’une part l’enfant pauvre, fils du fermier illettré, qui fait le maximum pour réussir brillamment le certificat d’études qui lui permettrait de décrocher une bourse pour aller au lycée de la ville voisine et pouvoir un jour faire des études ; et de l’autre, le jeune d’aujourd’hui, qui va au collège désormais accessible à tous, mais avec une motivation parfois vacillante – pourtant les deux ont leurs rêves un peu fous, et peut-être pas si impossibles qu’ils croient !
    C’est la vie au début du XXe siècle, quand on pouvait encore mourir d’une pneumonie, parce que le médecin, alors si cher !, n’était appelé qu’en tout dernier recours et se trouvait souvent impuissant ; mais en ce début de XXIe siècle, si cette maladie est facilement soignée grâce aux antibiotiques désormais découverts et disponibles presque trop facilement, et l’existence d’une sécurité sociale pour tous (malgré tous ses défauts), d’autres maladies – asthme ou scarlatine – restent virulentes et source d’inquiétude pour les proches de ceux qui en souffrent…
    Le harcèlement scolaire a pris d’autres formes de nos jours, mais il semble avoir toujours existé ; et la découverte de l’amour, paradoxalement, semble beaucoup plus compliquée en notre siècle qui regorge pourtant de moyens de communication inexistants un siècle plus tôt !

    Ce livre parle de tout cela de façon cohérente et parfaitement intégrée à la vie de chacun de nos deux jeunes héros, avec ces parallèles constants mais toujours subtils. En outre, on est clairement dans un contexte qui ne cesse de s’alourdir, surtout pour Hadrien, puisque la guerre approche de façon de plus en plus évidente ; par ailleurs, on pourrait croire que la vie d’Hadrien serait vraiment difficile en ce début de siècle qui semble désormais presque primitif, alors que celle d’Adrien serait facile avec tout au plus ce qui paraîtrait des humeurs d’adolescent… mais non ! C’est beaucoup plus subtil et délicat que ce jugement dans lequel j’ai eu la tentation de tomber dans les premières pages, mais ma lecture a très vite démenti une telle approche, et ce démenti ne s’est jamais relâché. Les émotions d’Adrien sont aussi réelles et profondes que celles d’Hadrien (qui, après tout, vivait dans son siècle comme il était, ce n’est que notre recul et notre vie moderne qui font paraître celle-là comme terrible !), et les conséquences de certains choix, certains actes des uns ou des autres, peuvent être tout aussi terribles, ou au contraire très belles, quelle que soit l’époque !

    Bref, on l’a compris : les deux personnages et leur entourage sont particulièrement et très vite attachants, mais clairement, les sujets abordés sont orientés « jeunesse » ; l’adulte en moi a apprécié avec peut-être un brin de nostalgie, mais ce n’est pas non plus une grande révélation. Néanmoins, si ce livre est définitivement destiné à la jeunesse, il n’en est pas moins d’une vraie qualité littéraire. Les auteurs n’ont pas cherché à « parler jeune » comme j’ai parfois vu (et en ai alors été atterrée) dans d’autres romans destinés au même public, au contraire ! Le vocabulaire, les tournures de phrase (notamment dans les lettres un peu « à l’ancienne » d’Hadrien), bref la langue utilisée en général est d’un très bon niveau et témoigne d’une réelle recherche du mot juste, de la bonne expression, qui soit accessible sans se prendre la tête, mais sans excès de facilité ou de familiarité non plus. En outre, le tout n’est pas exempt d’un humour délicat, pas cet humour qui ferait rire aux éclats (quoique… certains passages sont vraiment drôles !), mais qui donne une légèreté évidente à l’ensemble.





    L'anti-magicien (tome 1) de Sebastien de Castell
    17/20... et j'ai déjà emprunté le T2! ;)

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    Synopsis : Kelen, 16 ans, est l'héritier d'une des grandes familles qui se disputent le trône de la cité. Il prépare son premier duel pour devenir mage. Mais ses pouvoirs ont disparu. Il doit ruser... ou tricher, quitte à risquer l'exil, voire pire. Ses seuls soutiens, deux acolytes explosifs: Furia, la vagabonde imprévisible et Rakis, un chacureuil féroce et acerbe.

    Mon avis :
    Ce livre m’a beaucoup plu… car il m’a vraiment beaucoup surprise ! Même si je lis assez peu de Fantasy, je m’attendais quand même à un héros qui démarre mal dans la vie mais qui finirait par développer l’un ou l’autre talent propre à son monde, mais non, on n’a rien de tout ça. Le titre nous le laisse pourtant entendre, que c’est un anti-héros, et le synopsis est suffisamment évasif pour laisser croire à tout et n’importe quoi, si bien qu’on s’embarque sans trop savoir, mais on a la vague attente de se retrouver dans un récit assez classique de la Fantasy, avec son monde propre et ses héros particuliers, et pourtant…
    Peu à peu nos illusions s’envolent, car le héros restera « anti » du début à la fin : il va de catastrophe en déboire, c’est une chaîne sans fin chapitre après chapitre, et on se demande chaque fois comment il va pouvoir rebondir… Autant le dire, on s’en doute : comme ce anti-héros est bel et bien notre héros – ou du moins notre personnage principal – il trouve toujours l’une ou l’autre échappatoire, souvent de façon très improbable. En tout cas, il finit toujours par aller au-delà de ce qu’on attendait, même si ce n’est pas toujours « s’en sortir » en fait. Mais c’est aussi bien plus que ça…

    Ah ! c’est difficile d’expliquer mon ressenti sans spoiler. Pour tout dire, au début j’étais carrément agacée ! Tout au long des premiers chapitres et des vaines tentatives de Kelen, ce fameux (anti)héros très anti-magicien, d’exprimer sa magie, cette magie dont il devrait être doté, lui qui vient d’une des familles de magiciens les plus puissants, mais qui lui échappe encore et encore ; bref, je me disais que ce n’était pas possible, que ça allait effectivement sortir – et tant qu’à faire, de façon spectaculaire et inattendue, mais forcément il devait se passer quelque chose !... et effectivement il se passait quelque chose, mais jamais ce que l’on attendait, encore moins ce que l’on espérait, et on finit par désespérer pour Kelen, à se dire qu’il n’est vraiment rien de plus qu’un anti-héros devenu par hasard personnage principal sous la plume d’un auteur farfelu… et pourtant non ! Peu à peu les choses s’emboîtent, peu à peu les choses font sens, et on devine même certains petits éléments avant qu’ils soient tout à fait révélés.

    Tout cela se déroule dans un monde particulier, à mon sens extrêmement bien travaillé ; il ne se dévoile que petit à petit, mais chaque fois de façon suffisante, si bien qu’on s’en contente sans avoir besoin de plus ou, pour le dire autrement : on ne se rend compte de la complexité de ce monde que plus tard, quand un nouvel élément qu’on n’attendait pas, et qui modifie pourtant notre perception des choses, est révélé… Oui : ces révélations sont distillées au compte-gouttes, et retournent à chaque fois toutes les certitudes que Kelen (et le lecteur) pouvait tenir pour acquises…
    Il y a bien quelques clichés çà et là, récurrents à ce genre de monde : les méchants le sont dès le début, à la grosse louche, et quelles que soient les révélations, ils n’évoluent guère et leurs réactions sont carrément prévisibles. Ce sont bien sûr eux les magouilleurs dans les histoires politiques propres à l’univers créé, et leur credo est le pouvoir pour le pouvoir, bien plus que le pouvoir au service de leurs concitoyens / pour un monde meilleur… C’est surtout effarant que de se dire que, en fait, c’est très réaliste, comme dans notre vrai monde bien réel !

    Expliquée ainsi, cette histoire a l’air bien compliquée… et elle l’est effectivement !

    Spoiler (Cliquez pour afficher)

    Par moments, j’hésite à le dire mais l’idée tourne en boucle dans ma tête donc tant pis, je lâche la bombe : cette histoire m’a fait penser au conflit israélo-palestinien… je ne vais pas développer davantage, lisez-le pour vous faire votre avis ; d’ailleurs, en réfléchissant un peu plus loin, ce roman pourrait se rapporter à n’importe quel conflit lié à la spoliation de terres ancestrales… mais les ancêtres de qui au juste ?... c’est bien là toute la question ou, plus exactement, l’une des nombreuses questions ; et dans de telles histoires, imaginaires ou hélas vraies, il semble n’y avoir ni vérité simple, ni entente possible.


    Mais revenons à notre monde imaginaire : ce récit est aussi et surtout servi par une plume très fluide et bien un peu nerveuse, qui ne cesse de prendre le lecteur au dépourvu (comme son propre héros !), mais qui malgré tout se laisse lire avec une aisance déconcertante. Elle n’est pas exempte de traits d’humour : les réparties de Furia, cette étrangère aux dons particuliers (mais non magiques) qui semble s’être prise d’amitié pour Kelen, sont toujours piquantes et font mouche… même si les détenteurs du pouvoir ne s’en contentent jamais et cherchent à la rabaisser encore et encore. Quant à Rakis, le monstre chacureuil, qui se fera appeler « partenaire » (par opposition à toute notion d’animal de compagnie), il a un humour assez primaire mais tout à fait irrésistible, même dans les situations les plus périlleuses ; j’ai ri plusieurs fois lors de ses interventions ! Ces différents aspects rendent le récit beaucoup plus digeste que mon commentaire ;) , et font qu’on tourne les pages sans plus pouvoir arrêter.

    Ce livre est un bouleversement constant du système de valeurs, de toute la vie d’un héros malgré lui, sans pouvoir magique dans un monde qui ne vit que de la magie, et affublé de deux compagnons que son monde méprise – l’une parce que c’est une étrangère qu’on ne parvient pas trop à identifier et dès lors que l’on soupçonne du pire, l’autre parce que c’est un animal qui a toujours revendiqué sa liberté par rapport aux hommes et autres magiciens. Et pourtant c’est avec eux qu’il chemine, bon gré mal gré, apprenant peu à peu qu’il y a des valeurs plus importantes que cette magie, sans laquelle on lui a pourtant toujours appris qu’il n’était rien – et notamment la question qui revient quelquefois : qu’est-ce qu’être un homme ou une femme, dans un monde dont le but ultime est d’être un mage ? Une ébauche de réponse est bien sûr donnée, à travers les actes que Kelen va poser, et qui ne peuvent qu’entraîner l’adhésion du lecteur, qui est en quelque sorte lui aussi invité à se poser la question...
    Une vraie réussite, et pour une fois, je pense que je ne tarderai pas trop avant de m’attaquer au tome suivant.
  • domi_troizarsouilles

    Enfileur de mots

    Hors ligne

    #135 23 Août 2021 13:38:01

    Coucou,

    Je ne suis plus qu'à deux doigts d'être enfin à jour dans mon suivi!
    Voici trois lectures plus trop anciennes, et j'espère ajouter d'ici demain mes toutes dernières lectures, que j'ai terminées coup sur coup ce week-end... ;)

    Voici donc:

    La fileuse d'argent de Naomi Novik
    Un tout bon 18/20!

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    Synopsis : Petite-fille et fille de prêteur, Miryem ne peut que constater l'échec de son père. Généreux avec ses clients mais réticent à leur réclamer son dû, il a dilapidé la dot de sa femme et mis la famille au bord de la faillite... jusqu'à ce que Miryem reprenne les choses en main. Endurcissant son coeur, elle parvient à récupérer leur capital et acquiert rapidement la réputation de pouvoir transformer l'argent en or. Mais, lorsque son talent attire l'attention du roi des Staryk - un peuple redoutable voisin de leur village -, le destin de la jeune femme bascule. Obligée de relever les défis du roi, elle découvre bientôt un secret qui pourrait tous les mettre en péril...

    Mon avis :
    J’avais repéré ce livre depuis un moment… grâce à un swap pour tout dire, car il était dans la wish-list de ma swappée ! ;) Il m’avait beaucoup intrigué, à tel point que je l’avais choisi parmi ceux à lui envoyer, et je l’avais aussitôt mis dans ma propre WL. Il y a ensuite dormi (comme tant d’autres), jusqu’à ce qu’il soit proposé en LC dans plusieurs challenges auxquels je participe : c’était le moment de m’y lancer.

    On a là une histoire délicieusement hivernale, qui nous fait croiser quelques héroïnes fortes et intéressantes, dans ce qu’on pourrait croire – à première vue – une réécriture de contes et/ou légendes slaves, mais à mon avis c’est autre chose pourtant, et plus que ça ! D’ailleurs, cette histoire typiquement « fantasy » trouve des racines dans l’Histoire de la Lituanie, qui n’est donc pas slave, mais l’un des trois pays baltes (et donc de langue et culture baltes, qui ne sont pas slaves, malgré d’évidentes influences).

    Je vais commencer par cela, car c’est ce qui m’a interpelée en premier lieu, sans doute parce que j’ai participé à un voyage culturel organisé dans les trois pays baltes pour mon voyage de noces (eh oui !), il y a maintenant un peu plus de 15 ans, et même si je n’en ai plus que des souvenirs épars, certains choses m’ont sauté aux yeux. D’abord, les Juifs y prennent une grande place, eux à qui on réserve les métiers dont les bons chrétiens ne veulent pas (être prêteur notamment…), que l’on respecte s’ils sont riches mais que l’on ghetto-ise de toute façon – bon ok, ce n’est pas typique de la région, mais ça m’a quand même fait aussitôt penser à la Russie… ou un pays proche.
    J’en profite pour souligner que ce livre parle effectivement beaucoup des Juifs, mais jamais de façon partisane de quelque nature que ce soit. Les Juifs sont présentés sans concession, un peu cliché peut-être parfois : ce sont effectivement eux les prêteurs, et certains en sont devenus particulièrement riches… mais même ainsi leur maison reste ouverte – à la famille avant tout, mais aussi à ceux qui ont osé ne pas les juger sur leur seule judaïté et leur ont donné leur confiance et/ou leur amitié. Ainsi, j’ai eu le doux sentiment que l’autrice voulait faire passer un message de tolérance universelle : que l’on soit riche ou pauvre, que l’on soit juif ou chrétien ou autre, que l’on soit du Lithvas ou d’un autre pays, on a tous nos forces et nos faiblesses, nos rêves d’une vie meilleure aussi, et on est tous suffisamment humains pour pouvoir s’entendre avec un peu de bonne volonté. En dire plus serait du spoil…

    Mais revenons-en à mon identification de ce roman-fable et son ancrage dans l’Histoire de la Lituanie : cette impression n’a fait que se confirmer au fil des pages. Pour citer quelques exemples : le royaume qu’Irina veut protéger à tout prix, le Lithvas, quand on le lit à haute voix ça ressemble quand même follement à Lietuva (la Lituanie en langue originale). De même, le gros bourg de Vysnia évoque à s’y méprendre la capitale actuelle, Vilnius. Mais surtout, toutes ces magouilles politiques, organisées par le père d’Irina, un duc (c’est important), puis par Irina elle-même, pour préserver l’intégrité et la survie de ce fameux Lithvas, convoité tant par le puissant tsar que par un certain Ulrich… c’est l’histoire éternelle de la Lituanie (et de la Pologne, à qui elle a fini par s’unir, mais ceci ne fait pas partie de l’histoire) ; la Lituanie donc, qui soit dit en passant a été un Grand-Duché à une période de son histoire (tiens, tiens !), a été sans arrêt dans la ligne de mire entre ses trop puissants voisins la Russie à l’est et la Prusse à l’Ouest… Ce sont toutes les pièces d’un puzzle historico-fantastique qui s’emboîtent, avec çà et là des distorsions, mais après tout on est dans un roman-conte, pas dans une roman historique fidèle à la réalité. Et, après vérification, s’apercevoir que le père de l’autrice était lituanien (et sa mère polonaise) : bingo !

    Tout ça pour dire que, indépendamment de ces bribes de culture que j’ai l’impression d’étaler plus que de raison, j’étais infiniment heureuse de retrouver ces quelques éléments qui évoquent de beaux souvenirs – bien au-delà de l’aspect culturel d’ailleurs, c’était mon voyage de noces après tout ! – et une culture trop méconnue car trop souvent écrasée par ses voisins toujours affamés, avec lesquels elle aurait pu se perdre, et pourtant elle a toujours réussi à garder la tête haute, tout comme notre personnage principale-principale, en tout cas ma préférée : Miryem, qui serait peut-être bien la parabole de cette Histoire, avec tout ce que l’imagination de l’autrice lui a ajouté.

    Comme je laissais déjà entendre plus haut, j’ai beaucoup aimé ces trois personnages de femmes fortes, qui font leur chemin dans un monde dominé par les hommes (que ce soit le père et/ou le mari), et surtout qui le font sans que ça devienne un combat revendicatif, mais ça se passe tout en douceur et subtilité – que ce soit quand Miryem reprend les affaires de son père pour sortir sa famille de la misère, quand Wanda prend les décisions qui lui permettront d’avoir un avenir pour elle et ses frères, ou quand Irina arrange les choses à sa mode pour le bien du Lithvas. Chacune à sa façon est particulièrement attachante, et le fait que leurs voix s’entremêlent à tour de rôle, toujours à la 1re personne du singulier, rend les choses encore plus vraies, encore plus vibrantes !
    Je note au passage que, si le monde de notre Fileuse rappelle curieusement des pans plus ou moins réécrits de l’Histoire de la Lituanie, mêlée de légendes locales (qu’elles soient baltes ou slaves), ça n’en est pas moins un monde en soi, particulièrement foisonnant et extrêmement crédible. L’autrice ne nous épargne pas les détails, sans que ce soit jamais lassant, pour recréer ce monde sous nos yeux – car en plus c’est très visuel et on voit réellement ces routes scintillantes des staryk se dérouler au cœur de l’hiver, on voit les écureuils d’Irina, on vibre même lors de certaines scènes ! C’est une écriture envoûtante plus que cinématographique, mais avec un tel souci du détail visuel (et parfois aussi auditif) qu’on a réellement l’impression d’y être !

    Les hommes quant à eux ne sont pas écrasés pour autant, même si les deux plus grands « méchants » de l’histoire en sont bel et bien : entre le démon du feu et l’insaisissable Staryk, roi de l’Hiver, on saisit d’emblée l’antagonisme, qui ne va cesser de croître ! C’est là aussi la magie d’une lecture commune : ces deux personnages ont très vite réussi à susciter l’antipathie chez la plupart de mes co-lectrices, tandis que, pour ma part, j’ai de suite développé une aversion profonde envers le démon, tandis que le roi Staryk –qu’aucune des autres n’appréciait- me faisait penser au bad boy typique d’une romance type MC 1% (pour les non-initiés : ces romances qui parlent de motards borderline, ces « motor club » dont seul 1% serait hors-la-loi ou à la limite, mais même si leurs activités sont répréhensibles, de telles romances les présentent généralement comme en marge de la société certes, mais ayant leur propre code de conduite, leur propre système de valeurs fortes (et finalement pas tellement éloignées de nos valeurs idéales), auquel ils ne dérogent jamais. Bref, dès le début j’ai vu le roi Staryk comme un être mystérieux, à mi-chemin entre une version masculine d’Elsa de la Reine des Neiges et l’archétype glacé dans le style de ces bad boys des romances MC 1%, sur son cerf-monstre glacé en lieu et place d’une moto... autant dire qu’il me plaisait beaucoup, et que j’avais très envie de voir son évolution au fur et à mesure de l’histoire, et notamment envers Miryem, qu’il fait prisonnière certes et qu’il semble mépriser, mais qu’il respecte pourtant à sa façon !

    Je pourrais encore beaucoup développer mon ressenti sur les personnages, mais on flirte désormais avec le spoil, donc je vais m’abstenir et passer plutôt à un autre aspect de ce roman aussi étonnant que réjouissant : j’ai beaucoup aimé la très belle plume de l’autrice, qui joue donc avec des images très faciles à visualiser (là je me répète), mais aussi avec une ambiance un peu mystérieuse – cette ambiance que l’on retrouve souvent dans les réécritures de contes slaves, d’où la confusion sans doute. Elle n’en reste pas moins toujours agréable à lire et, si la fluidité n’est pas le premier mot qui me vient à l’esprit pour la caractériser, elle est tout à fait abordable.
    C’est surtout le choix d’écrire tout ce roman entièrement à la 1re personne du singulier qu’il faut relever. Cela participe, de façon évidente, à l’attachement qui se crée peu à peu pour les héroïnes, même s’il est inégal parmi mes co-lectrices : je pense que Wanda a remporté l’unanimité, suivie de Miryem, tandis qu’Irina partageait davantage. Mais le fait de donner la parole à quelques autres personnages plus secondaires de l’histoire, tout en gardant cette 1re personne du singulier dans un tour de rôle aléatoire, donne à l’ensemble, tour à tour une profondeur particulière, de l’émotion en rafales (notamment quand la parole est au plus jeune frère de Wanda, enfant battu qui en présente toutes les caractéristiques, que l’autrice a rendues avec une justesse et une délicatesse carrément bouleversantes, sans pour autant tomber dans le mélo), et toujours une dynamique indéniable, prenante et je dirais même enivrante ! En outre, l’autrice a réussi ce tour de force de permettre de reconnaître à quel narrateur on a affaire en moins de 2-3 lignes dans la plupart des cas, plus rarement ça pouvait aller jusqu’à 5 lignes (en caractères agrandis sur ma liseuse cela dit), car il y avait chaque fois l’un ou l’autre détail qui indiquait sans risque d’erreur qui avait pris la parole à son tour.

    Bref, j’ai passé un tout bon moment de lecture, parfois « déstabilisée » par une lecture commune presque simultanée. En effet, même en déroulant les parties masquées seulement après avoir lus les passages concernés moi-même, la vision des autres m’interpellait peu ou prou, m’influençait au moins en partie, et décidément on ne lit pas de la même façon seule ou ensemble ! Certes ce n’est pas ma première LC, mais c’est la première fois que je ressens cela aussi fort – peut-être à cause du caractère particulier, à la limite de l’onirique, de l’écriture de l’autrice ? Quoi qu’il en soit, ni ma lecture de ce grand et beau roman, ni le fait de le lire ensemble, ne m’ont déçue un seul instant !





    Kiki la petite sorcière d'Eiko Kadono
    Une très jolie histoire... mais des choix éditoriaux qui lui font perdre des points! 15/20

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    Synopsis : Kiki rêve d’une vie normale : se faire des amies, s’habiller comme elle le veut, avoir l’insouciance de son âge… Mais la jeune fille n’est pas une adolescente comme les autres ?!
    L’année de ses 13 ans arrive et, comme pour toutes les sorcières, sa nouvelle vie est sur le point de commencer. À la fois excitée et nerveuse à l’idée du grand départ, Kiki enfourche son balai et met le cap loin, loin vers la mer… Aux côtés des habitants hauts en couleur de Koriko, un long voyage d’apprentissage démarre pour Kiki ?!


    Mon avis :
    Ce livre est un véritable déferlement de mignonnerie ! On craque pour l’histoire toute simple et très humaine dans ses aspects fantastiques, de cette petite sorcière qui doit partir de chez ses parents pour construire sa vie dans une autre ville ou village, en compagnie de son compagnon-chat avec qui elle a grandi. Ses petites aventures dans sa nouvelle ville non loin de la mer sont savoureuses dans leur simplicité, pleines de réalités quotidiennes traitées avec délicatesse et trouvant toujours une solution, et de petits bonheurs qui en résultent. Le synopsis prête d’ailleurs à confusion, car le point central n’est certainement pas le « voyage d’apprentissage », mais la découverte et la mise en place de sa nouvelle vie de sorcière d’une ville qui n’en avait pas encore, et qui découvre peu à peu de nouvelles amitiés, transformant au fil des jours la méfiance spontanée qu’elle peut susciter, en véritable acceptation de cette petite fille pas tout à fait ordinaire.

    Ce qui me pose un peu question, c’est l’âge – autant celui de la petite sorcière, que celui auquel s’adresse ce livre tout mignon. Treize ans, c’est quand même très jeune pour partir vivre sa vie loin de ses parents, mais soit : c’est ainsi dans ce monde où vivent des sorcières, certes de plus en plus rares, alors on l’accepte. Sauf que, pour moi, Kiki ne « fait » pas (du tout) ses 13 ans, ou alors les petites Japonaises ne sont pas aussi délurées que nos jeunes filles Européennes. C’est que, malgré le fait précité de prendre son indépendance à cet âge (ce qui est évidemment très improbable dans notre société normale), Kiki est encore très enfantine, avec une bonne dose d’innocence et de candeur, notamment quand elle doit transmettre le cadeau et la missive d’une jeune fille de son âge à un garçon… Ici, ma fille faisait déjà des petits cadeaux et les yeux doux à un gamin de sa classe à 10-11 ans, le temps d’une Saint-Valentin et c’était aussi en toute innocence, mais il n’y avait pas tout ce questionnement un peu naïf tout autour ! Dès lors, je pense que ce livre ne s’adresse pas à de jeunes ados, alors qu’on serait spontanément tenté (en tout cas je l’étais) de faire coïncider l’âge de l’héroïne à celui de ses lecteurs. De façon évidente, il est destiné à des plus jeunes… qui commencent peut-être à se poser ce type de questions (ou pas, en fait), mais sans avoir les « clés » que croit avoir un pré-ado, et qui pour leur part trouveront normal qu’un enfant de 13 ans s’envole vivre sa vie puisque « c’est vieux » de toute façon, dans les yeux d’un 6-ans par exemple !

    Mais alors surgit un autre problème, à mes yeux, sauf que ce dernier ne concerne pas l’histoire en tant que telle, mais la présentation qu’en a faite l’éditeur. D’abord, la couverture est tout mignonne, avec cette petite sorcière qui surgit au clair de lune sur un fond bleu nuit sombre-mais-pas-trop… hélas il n’est pas fidèle, il manque la fameuse petite radio rouge, qui a quand même son importance ! Mais surtout, il n’y a absolument aucune illustration à l’intérieur des pages : pas de dessins qui illustreraient tel ou tel chapitre (pourtant l’histoire s’y prête à 200% !), même pas une mini-sorcière avec son mini-chat voletant de page en page. Pour un livre jeunesse destiné à de jeunes / nouveaux lecteurs (vu ce que j’écrivais précédemment, je dirais 6-10 ans), proposer une briquette de plus de 200 pages sans le moindre dessin quel qu’il soit, c’est tout bonnement ahurissant… et très certainement rédhibitoire pour mon fils de 8 ans par exemple : c’est la première chose qu’il « vérifie » quand je lui propose l’un ou l’autre livre d’une certaine épaisseur, ou d’un autre format qu’une BD. Dommage, car ce défaut d’édition risque bien d’éloigner la cible réelle de cette si jolie histoire et, pour ma part, ça joue aussi sur la note un peu basse que je donne, car quoi qu’on en dise, « l’emballage » de l’histoire a son importance aussi dans le produit fini qu’est un livre.





    Les demoiselles d'honneur préfèrent les kilts de Betty Piccioli
    N'oubliez pas que l'on lit un livre avec ce que l'on est, l'âge qu'on a, ce que l'on a vécu, et ce que l'on ressent à un moment donné... Bref: 10/20.

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    Synopsis : La meilleure amie de Nelly, Cécilia, se marie dans quelques semaines ! Mais qu'est-ce qu'on organise comme enterrement de vie de célibataire, quand on est une bande de filles plutôt introverties et fans de littérature ?
    Nelly a la réponse ! Pour l'enterrement de vie de jeune fille de Cécilia, elle embarque ses demoiselles d'honneur, Louise et Maï-Lan, dans un road trip en Ecosse, sur les traces de leur saga fantastique préférée, Time Turners, à la rencontre du couple phare Calum et Katerine.
    Sur la route des Lochs, entre amitié, littérature, secrets et rires, les 4 jeunes femmes vont vivre un moment charnière à l'aube de leurs 30 ans, qui marquera leur vie à jamais…
    Un roman feel-good gorgé de sororité, à consommer sans modération !
    CONTENU EXPLICITE, LIVRE POUR ADULTES.


    Mon avis :
    Si vous avez plus de 30-35 ans et que, comme moi, vous êtes las.se du « politiquement correct » à travers tout, de la pensée unique à tendance féministe revendicative, ne vous arrêtez pas ici ! Sachez seulement que ça se lit très vite et qu’il y a du bon quand même, donc à vous de voir…

    Ce livre a été proposé en LC par quelques copinautes, le titre interpelle et la couverture est sympa, et pour ne rien gâcher le livre est dispo dans l’abonnement Kindle (auquel je souscris depuis plusieurs mois) : je pouvais donc me permettre de m’y lancer sans trop de risque… C’est même mieux (ou pas) : ça commençait plutôt bien ! Certes, la langue n’est pas éblouissante mais le ton est entraînant. Je la caractériserais comme quelque chose à mi-chemin entre la romance de gare superficielle (et souvent assez bas de gamme, mais ce n’est donc pas le cas ici), et ce qu’une bonne élève consciencieuse aurait écrit pour avoir la meilleure note possible à une rédaction. Il y a donc un peu de recherche çà et là, mais qui se perd très vite quand le naturel revient, un naturel sympathique et spontané, assez entraînant, qui manque toutefois encore de personnalité.
    Par ailleurs, c’est léger, ce qui permet d’aborder quelques thématiques sensibles de façon plutôt humaine tout en les dédramatisant gentiment – comme par exemple l’estime de soi que peut avoir une personne en surpoids, et son regard dans le regard des autres, même ses plus proches amis. Pour moi qui suis concernée, ça résonnait de façon tout à fait juste, vraiment rien à redire là-dessus, j’ai même été réellement touchée !

    Cependant, dès le début, certains petits points me gênaient aux entournures, sans que j’arrive à bien les identifier, c’était juste une impression générale. J’ai d’abord mis ça sur un problème générationnel : nos héroïnes ont la petite trentaine, voire seulement la fin de la vingtaine, et clairement ce livre s’adresse à cette génération-là… On le voit à travers des références, des allusions à certaines personnalités connues parmi les chanteurs / instragrammeurs etc., qui à moi m’échappent complètement, avec mon presque-demi-siècle… Un exemple ? L’autrice mentionne la saga Harry Potter comme « les livres de son enfance ». Sachant que le 1er tome est sorti en 1997 en français, ça correspond effectivement à une génération qui aurait grandi avec Harry, et qui aurait donc autour de 30 ans aujourd’hui. Moi, en 1997, je travaillais déjà, j’avais largement passé l’âge de lire Harry Potter, en tout cas pas en tant que « livre de mon enfance » ! (Rassurez-vous : j’ai découvert Harry Potter quelques années plus tard, par curiosité, et j’ai beaucoup aimé !).
    Cela dit, la répétition de telles références très ancrées dans une époque particulière et liées à une génération précise, même si on ne les connaît pas toutes, ne gêne pas la lecture. Non, c’est autre chose…

    Et peu à peu, j’ai compris, et les choses explosent aux 63% du livre, même si ça a commencé bien avant ! En fait, tout ce livre a été écrit dans un souci de « politiquement correct à tendance féministe revendicative » - c’est moi qui invente l’expression, j’explique ci-dessous ; mais en tout cas, pour moi, c’est rédhibitoire.
    D’abord, ces 4 jeunes femmes sont trop sages : ça commence par insister beaucoup sur le fait que ces filles ne sont pas trop fêtardes et ne boivent pas… Et surtout, il faut bien le répéter encore et encore, au cas où les lectrices oseraient tout à coup boire un panaché ! J’exagère à dessein, mais ça donne déjà un avant-goût de la chose – d’autant plus caricatural à mes yeux, moi qui n’ai jamais été fêtarde, trop timide et peu intéressée de toute façon, mais de là à faire un caca nerveux avant d’ingurgiter la moindre gorgée de bière, soyons sérieux !
    Bien entendu, la personnage principale et narratrice, malheureuse en amour certes, précise assez tôt dans le livre qu’elle est bi : il faut bien marquer d’emblée qu’on va être hyper-tolérant et même plus envers la communauté LGBT+, c’est tellement « à la mode », il faut l’afficher ! Et après ?... Honnêtement, moi je m’en fiche de l’orientation sexuelle des personnages principaux des romans que je lis (sauf si ça a une incidence dans l’histoire, comme dans les romances par exemple : mes préférées sont les M/M !), mais sinon, à quoi bon le préciser, plus ou moins hors contexte en plus ? D’ailleurs, je cherche encore ce que la précision de la bisexualité de la narratrice apportait à la présente histoire…

    Et puis tout à coup survient cette phrase (aux 37%) : « - Et nos amis, la famille. On peut pas tout quitter comme ça, sur un coup de tête. – Moi j’aurais jamais les ovaires de le faire, c’est sûr. » Honnêtement, il m’a fallu un moment pour comprendre… et puis tout à coup ça a fait tilt ! L’autrice a féminisé l’expression typique, mais c’est quoi cette mode de tout féminiser à temps et à contretemps ?! et d’un seul coup j’ai trouvé ça tellement absurde ! Certes, la langue française est emplie de mots et expressions à caractère patriarcal, et c’est une bonne chose de vouloir faire évoluer les choses – par exemple en féminisant les noms des professions ou autres responsabilités politiques par exemple. Mais là, à mon sens, on est en train de « changer pour changer » une expression savoureuse (en quelque sorte) qui dit bien ce qu’elle veut dire, et qui en plus présuppose implicitement qu’une femme en a au moins autant qu’un homme, justement ! ;) Dans la bouche d’une femme, malgré sa vulgarité assumée, cette expression est extrêmement féministe. En tout cas, pour ma part, j’ai effectivement des ovaires, merci bien ; et pour le reste, dans certaines situations quand il le faut, j’ai des couilles, et je le revendique !

    Et puis on arrive aux 63%, et je suis tombée de très haut… Dans un contexte que je ne vais pas développer car ce serait du spoil, l’auteure s’en prend –violemment ai-je trouvé- à J.K. Rowling, l’autrice hyper-connue de la célébrissime saga Harry Potter précitée. Elle parle de (je cite) sa transphobie assumée, revendiquée même, qui blesse tant de gens à travers le monde. J’aurais aimé que l’autrice des livres de mon enfance, avec lesquels ma génération a grandi, soit une femme aimante, tolérante, bienveillante, mais il n’en est rien. Et paf allons-y à la mitraillette, et qu’on la pende ! On est n’est pas loin de l’autodafé…
    Certes j’ai entendu parler de « l’affaire », mais sans m’y attarder plus que ça : ce ne serait pas la première fois dans l’histoire de la littérature qu’un.e auteur.e paie au prix fort sa (grande) notoriété, à cause d’un (ou plusieurs) propos plus ou moins déplacé.s, et ensuite plus ou moins interprété.s à ses dépens. Mais on est à l’ère d’Internet et des réseaux sociaux, où tout le monde peut dire tout et surtout n’importe quoi, se donnant une importance qui n’existerait pas autrement… et ainsi quelques internautes en ont fait une montagne, ça a pris des proportions échappant à tout contrôle, car l’esprit critique de tout un chacun s’est vraisemblablement envolé dans l’histoire. J.K. Rowling a été crucifiée sur l’autel des juges Internet, sans aucune possibilité d’appel ni même de défense.

    Pour ma part, puisque le sujet est posé (et a en plus créé le débat parmi avec mes co-lectrices), je suis retournée aux sources de cette polémique, et j’ai essayé de retrouver ce qui avait tant posé problème. J’ai trouvé quelques articles, la plupart sur des sites apparemment orientés, et qui présentaient les choses résolument à charge… J’ai donc survolé mais pas retenu. À mon grand étonnement, c’est finalement dans un magazine belge destiné aux jeunes femmes, et généralement plutôt léger, Flair pour ne pas le citer, que j’ai trouvé un article complet qui reprend toute l’histoire de bout en bout, sur un ton relativement neutre : je vous invite à le consulter ! Lu ce 21 août : https://www.flair.be/fr/lifestyle/socie … k-rowling/ , le titre de l’url résume bien les choses, « Transphobe ou maladroite J.K. Rowling ? », tout comme le titre de l’article même se veut gentiment ironique « Harry Potter & les reliques de la transphobie, comment J.K. Rowling est devenue Voldemort ». À noter que l’article ne tranche pas vraiment, laissant à chaque lecteur se faire son avis.
    La même revue propose un article lié (lu le 22 août) : https://www.flair.be/fr/lifestyle/tout- … k-rowling/ , qui termine par ces paroles très sages, je trouve : «Propos maladroits, bienveillance dissimulée, pensée mal exprimée… J.K. Rowling, en diffusant de tels tweets, a montré, à ses dépens, l’importance du combat quotidien pour défendre les personnes transgenres. Énormément de réponses à ses propos invitaient l’auteure à lire et à se renseigner sur ce que sont les personnes trans. Une démarche intéressante qui a le don de conscientiser une cause dont beaucoup ignore les difficultés de compréhension qui se cachent derrière.»

    Pour être complète, j’ajouterai à tout cela que j’ai dans mes proches très proches une personne qui a vu son mari devenir une femme… et que cette histoire très personnelle (qui n’est pas l’objet de ce commentaire, mais je ne pouvais pas ne pas la mentionner) rend très sensible au sujet de la transidentité : on apprend à respecter malgré une incompréhension de base, et c’est un apprentissage de tous les jours ; on souffre avec ceux qui doivent « subir » cette nouvelle identité (l’épouse ou la mère notamment) et on les accompagne comme on peut dans l’évolution de ce qui est réellement une nouvelle vie qu’elles n’ont pas demandée, sans doute même jamais imaginée, aux côtés de celui qu’elles ont aimé, qu’elles aiment encore, follement, mais qui est devenu « celle » ; et en tout cas, on n’arrête plus (jamais) de se poser des questions sur la personne concernée, on a toujours peur de mal dire, mal faire ... et de se faire lyncher. Autrement dit, on est dans une lucidité exacerbée (et sans doute biaisée) par un vécu bien particulier, mais en tout cas on est très loin du politiquement correct rigide des bien-pensants… qui ont un seul défaut, mais majeur : ils ne savent pas de quoi ils parlent !

    En revanche, clairement, l’avis de Betty Piccioli est fait, tranché, et sans aucun possibilité de doute. Elle s’est faite juge implacable comme un grand nombre d’internautes, elle hurle avec les loups, suivant le mouvement « politiquement correct » de la dénonciation aveugle.
    Enfin, notre jeune auteure qui se veut bienveillante et reproche à sa cible de manquer de cette bienveillance tellement à la mode : je ne vois vraiment pas en quoi ce parti-pris sans aucune nuance permettrait de mieux respecter / accepter / vivre avec les personnes transgenres…

    Mais ça ne s’arrête pas là… Un peu plus loin dans cette partie de son livre, elle écrit (je cite à nouveau) : Alors, comme beaucoup de fans de cette saga mythique, nous faisons comme si Harry Potter n’avait été écrit par personne. C’est sûrement mieux ainsi.
    Ca ne vous choque pas ? avec cette phrase, et une autre quelques pages plus loin (je cite encore : Je commence à penser que malgré la haine affichée de son autrice pour une partie de la population, son œuvre lui a échappé (…) - je ne relèverai même pas la "haine affichée" qui n’est en aucun cas prouvée par un quelconque tribunal indépendant), Betty Piccioli réfute très explicitement les droits à la propriété intellectuelle de J.K. Rowling ! Alors, quoi que Betty Piccioli en pense, et même si la transphobie présumée de J.K. Rowling c’est le mal, ce n’est pas juridiquement répréhensible. En revanche, la violation de la propriété intellectuelle est un délit, passible de peines au pénal. Et cette pensée de certains fans selon laquelle une oeuvre n'appartiendrait plus à son auteur quand elle a du succès, est bel et bien une forme de violation de la propriété intellectuelle.

    Or, non seulement Betty Piccioli crache donc sur ce droit élémentaire pour une écrivaine (elle serait pourtant bien embêtée, si on lui retirait, à elle,  ce droit élémentaire pour son « oeuvrette »), mais en plus elle est elle-même à un doigt du plagiat ! En effet, pour les besoin de son livre, elle met en avant une série imaginaire, dont elle propose un extrait en italique au début de chacun des chapitres de sa propre histoire – ce qui, soit dit en passant, donne une certaine dynamique au livre, même si ce ne sont pas les passages les plus exaltants. C’est une saga de romance plutôt historique, qui serait devenue une série sur une chaîne de type Netflix, et qui serait l’un des éléments qui rassemble les 4 amies, et qui s’appellerait « Time Turners ». Or, d’après mes co-lectrices, ladite série imaginaire présente d’étranges similitudes avec la saga « Le cercle de pierre », plus connue sous son titre original à la suite du succès phénoménal de son adaptation en série : « Outlander » (ou « Le chardon et le tartan ») de Diana Gabaldon.
    Le problème, c’est que pas une seule fois (ni en introduction, ni même dans ses remerciements) Betty Piccioli n’y fait référence ! Après une brève vérification, je plussoie pourtant mes co-lectrices : il est évident qu’une grande partie du livre est largement inspirée de ce fameux « Outlander ». Dès lors, je me demande : qu’a donc fait Diana Gabaldon pour mériter un tel ostracisme ? Car clairement, aux yeux de l’autrice, elle existe encore moins que J.K. Rowling… même son œuvre n’est pas citée une seule fois ! pourtant cet "Outlander" est encore trop récent pour être tombé dans le domaine public. Alors ???

    Osons le dire : ce parti-pris sans réflexion, fondé sur une prise de position partiale de quelques internautes, est tout simplement ahurissant. Et Betty Piccioli ne se contente pas de l’évoquer (ce qu’on aurait pu tolérer) sur quelques lignes, mais elle l’enfonce bien profondément sur plusieurs pages ! Mais, une fois encore, c’est tellement dans l’air du temps de penser ainsi, et d’en rajouter une couche (c’est ce que j’appelle le « politiquement correct », au-delà de toute analyse pondérée), alors allons-y gaiement ! Même les meurtriers du Bataclan, dont le procès commence dans quelques jours, auront droit à un jugement plus réfléchi, pesé, argumenté, équitable où toutes les parties seront entendues…Pourtant, à part mon avis de presque-vieille, qui ai vécu la transidentité d’un proche très proche, qui osera relever à quel point tout ceci est un lynchage en règle où les droits de la défense sont inexistants ? et dans la foulée on est à la limite du plagiat de l’œuvre d’un autre auteur, ce qui fait sourire les connaisseurs, mais c’est tellement moins grave que la transphobie n’est-ce pas ?...

    Pour tout dire, après cette diatribe de plusieurs pages contre J.K. Rowling, je n’avais plus vraiment envie de continuer le livre. Je l’ai fait quand même, à cause d’une certaine curiosité à propos du sort que l’autrice réserverait à ses personnages, mais le plaisir était définitivement parti, et il n’est pas revenu. Heureusement, comme je le disais en introduction, ce livre se lit très, très facilement, donc je n’y ai plus perdu trop de temps. En résumé, je peux dire quand même que, dans ce livre, il y a donc du bon, et même du très bon par moments… c’est bien pour ça que, après avoir hésité, je lui laisse le bénéfice du manque d’expérience et ne lui donne pas une note négative. Mais décidément l’autrice doit mûrir et sortir de ce ton quelque peu moralisateur-féministe trop politiquement correct sans personnalité ni clairvoyance, ni même cette bienveillance qu’elle revendique pourtant.

  • Olive-oued

    Insomniaque des livres

    Hors ligne

    #136 23 Août 2021 14:27:33

    J'aime beaucoup ton avis sur le livre de Betty Piccioli ! Effectivement, j'entends tout à fait tes arguments et je vais de ce pas aller lire les articles mis en lien.
  • Bouledechat

    Passionné du papier

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    #137 23 Août 2021 15:01:06

    Pareil, je me retrouve tout à fait dans ton coup de gueule contre les jugements à l'emporte pièce, le politiquement correct et de manière générale, les effets de mode... N'étant pourtant pas une Potterhead, loin de là, je trouve ça hyper choquant de voir "comme si Harry Potter n’avait été écrit par personne." !!! :aaah: Mais enfin, ça n'a rien à voir !! Ce que pense un artiste dans sa vie privée et son talent créatif ! Ce sont deux choses différentes ! Et le coup de Outlander, bien joué aussi tiens... Pff... :tetemur:
  • FloXy

    Empereur des pages

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    #138 23 Août 2021 23:36:20

    L'anti-magicien est vraiment une saga intéressante pour les raisons que tu décris, ce que les tomes suivants ne font que renforcer (j'en ai lu 4 pour l'instant). :ok:


    Par contre je partage beaucoup moins ton enthousiasme pour La fileuse d'argent dont j'ai du mal à finir le dernier tiers, les thèmes m'intéressent moins que Déracinée, il y a moins d'action et de diversité, on est trop dans les contes traditionnels, les histoires de mariage qui ne me passionnent guère...
    Et contrairement à toi je trouve qu'on est justement dans un sexisme inversé systématique, les hommes sont toujours bêtes et méchants, c'est bien simple le seul homme gentil c'est présenté comme un défaut parce qu'il fait un métier de rapace alors il ne sert à rien et c'est sa fille qui doit lui sauver la mise....
    Et tout le long c'est ça. Un homme fait mal, mais une brave femme va rattraper le coup. Heureusement qu'elle sont là les femmes quand même hein. Pour rattraper toutes les horreurs des hommes. Alala. :euhnon:


    Cependant je te rejoins totalement sur l'ineptie de l'affaire JKR, mais est-ce seulement possible d'en parler posément sans se faire traiter de transphobe ? :chaispas:
    Dans le doute, je vais me taire... :chut:
    En tout cas si le bad buzz ne tue pas, le ridicule non plus, quand on voit par exemple que l'auteur de la chaine YT Licarion Rock appelle assez clairement à boycotter les œuvres de la "méchante transphobe" alors qu'une bonne partie de ses vidéos (et sans doutes les plus populaires) se trouvent être des parodies et critiques des films adaptés de sa saga... :grat:
    Ce genre de personnage devrait peut-être commencer par se boycotter lui-même, m'est avis. :grimaces:
    Apparemment on a eu droit à quelques autodafés d'Harry Potter suite à cette affaire, ce qui fait une belle symétrie avec la vague précédente qui était elle l’œuvre de trumpistes convaincus ! :goutte:
    En voilà une belle ligne à rajouter à son CV. Cramée par les 2 camps à la suite. Forever outcast. :cowboy:
  • domi_troizarsouilles

    Enfileur de mots

    Hors ligne

    #139 28 Août 2021 23:45:18

    Bonsoir tout le monde!

    Pour commencer: je suis "soulagée" de lire que je ne suis pas la seule à me sentir mal à l'aise (et c'est peu dire) face aux attaques envers J.K. Rowling. En effet FloXy, il est devenu impossible d'en parler posément sans se faire traiter nous aussi de transphobe, c'est hallucinant...
    Merci à vous pour ces mots en tout cas, car quand on voit tous les articles à charge sur Internet, on finit par se poser des questions, même si on reste persuadé au fond que c'est "n'importe quoi".

    Par ailleurs, beaucoup en effet ont comparé La fileuse d'argent à l'autre livre de Naomi Novik, Déracinée... je ne l'ai pas lu, donc je ne peux pas me prononcer, mais il vient de m'être imposé dans un énième challenge :ptdr:, donc je le lirai avant fin août 2022! ;)

    Côté petites nouvelles:
    * j'ai participé à une LC qui m'a beaucoup... perturbée (?) : c'était une LC qui s'est fait en quelque sorte en prévision du BC de ce week-end. Je ne mettrai donc pas encore mon avis long sur ce suivi aujourd'hui, car je vais d'abord le mettre sur les pages du BC: c'était donc Sirius de Stéphane Servant, avec les traditionnelles sections Parlons du roman... et Pour aller plus loin...

    * après les deux livres "gagnés" en Masse critique sur Babelio (dont un que vous découvrirez sur ce post ;) ), voilà qu'une autrice que j'affectionne a lancé un appel à candidatures pour un SP sur sa page Insta. J'ai tenté... et j'ai été sélectionnée! :pompom: J'ai ainsi reçu My sweet Baby-sitter de la très sympathique Mo Gadarr! :pink: C'est de la romance, on aime ou on n'aime pas en général, mais en tout cas j'avais été très touchée par sa saga T'as qu'à maigrir !
    Quant au Baby-sitter, je n'ai pas encore commencé, ce sera probablement début semaine prochaine, quand j'aurai avancé dans mes lectures en cours...

    * grande nouveauté!! Avec le soutien moral de nos admin/modo Julie et Grominou (que je remercie au passage: sans leurs encouragements, je serais sans doute encore en train de me dire que "ça me tente" mais de ne pas oser...), j'ai lancé deux lectures communes, pour deux nominés au prix Livraddict! :pompom: Vous trouverez donc:
    => Et toujours les forêts de Sandrine Collette, catégorie SF, début le 5 octobre;
    => La cave aux poupées de Magali Collet, catégorie Thriller, début le 15 novembre.
    Et bien entendu:

    :welcomehome:




    Et à part ça... ;) ceci reste un suivi de lecture, et j'en ai à nouveau un paquet puisque je suis restée 5 jours sans venir ici...

    Honneur au SP, Masse critique privilégiée de Babelio, auquel j'ai mis 17/20.
    À noter qu'il ne sortira officiellement que le 1er septembre.

    De silence et de loup de Patrice Gain

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    Synopsis : Tiksi, ville portuaire oubliée aux confins de la Sibérie, accessible par avion ou par bateau deux ou trois mois l’an. C’est là, à 700 kilomètres derrière le cercle polaire, qu’Anna rejoint une équipe de scientifiques qui s’apprête à hiverner sur la banquise à bord d’un voilier.
    Mais dans cet extrême bout du monde, où la fonte des glaces fait resurgir des virus millénaires, où rôdent les ours et les loups, où s’affrontent chasseurs de mammouths et militaires corrompus, les avaries et la tempête retardent le périple. Prise au piège des éléments et de l’hostilité ambiante, l’expédition se fige. Et au cœur de ce huis-clos glaçant, la violence des hommes ne tarde pas à se déchaîner contre les femmes, renvoyant Anna à un drame intime qu’elle pensait apprivoiser en rejoignant cette terre lointaine.
    De silence et de loup est la longue errance d’Anna, sa confrontation avec son passé dans le décor spectral de la Russie arctique. Un roman très noir, brutal, entre grand roman d’aventures et récit résolument contemporain, par Patrice Gain, l’auteur de Terres Fauves et du Sourire du scorpion.


    Mon avis :
    Ça semble la coutume, alors je commence ainsi : je remercie sincèrement Babelio et les éditions Albin Michel de m’avoir fait confiance en m’envoyant ce livre dans le cadre d’une Masse critique privilégiée.

    C’est ainsi le deuxième livre que je reçois dans le cadre d’un « service presse », mais le tout premier que je commente à ce titre – car je n’ai pas encore terminé l’autre livre, même si je l’ai reçu juste deux jours avant celui-ci, par l’un de ces hasards d’un calendrier tout à coup bien capricieux. Et mon premier sentiment a été une espèce de soulagement ;) : je ne dois pas mettre des gants pour commenter un livre qui m’a été gracieusement offert, car mon commentaire sera positif !

    L’histoire commence comme un coup de poing : Dom Joseph, jeune prêtre qui a choisi récemment une vie érémitique au monastère de la Grande Chartreuse où il est désormais novice, reçoit de façon impromptue le journal de sa sœur Anna – cette sœur devenue si lointaine dans sa nouvelle vie ! – qui relate son expérience en tant que journaliste, et interprète car elle parle russe, au sein d’une expédition scientifique française dans l’arctique, aux confins de la Sibérie. D’emblée le ton est donné : on comprend assez vite que Dom Joseph a rejoint cette vie éloignée de tout et de tous pour fuir quelque chose mais on ne sait trop quoi, tout comme le choix d’Anna d’avoir rejoint cette expédition loin de tout elle aussi, semble une fuite en avant inattendue, qui dérange pourtant son frère plus qu’elle ne l’étonne. En outre, le passage du carnet qu’il nous donne à lire dès les premières pages est glaçant et ferme la porte à tout espoir – sachez-le d’emblée : ça ne finira pas bien, et on comprend (même si on espère encore que non, en ce tout début de roman), qu’on va refermer ce livre avec une pierre sur l’estomac.

    Il faut dire, dès le début, peut-être encore davantage que l’impression que donnait cet extrait pourtant désespéré du carnet d’Anna, on est saisi par la description (pourtant brève) de la Grande Chartreuse. J’avais l’impression de m’y retrouver, moi qui ai eu la chance d’y faire une randonnée en autonomie autrefois, comme si la plume magique de l’auteur m’y avait tout à coup transportée : on la voit et elle fait vibrer, cette montagne austère, aussi magnifique que majestueuse, mais l’homme est si petit face à elle et son côté implacable pour qui n’y prend garde… Dès lors, il était presque facile de faire le parallèle avec les paysages tout aussi impitoyables de l’immensité glacée à 71° Nord (et l’expédition ira jusqu’à 80°). C’est que l’histoire alterne les chapitres auprès de Dom Joseph, au fil des jours et des heures canoniales qui s’égrènent dès le milieu de la nuit, vues par un narrateur omniscient qui colle réellement au personnage ; et les pages du carnet journalier d’Anna, à la 1re personne du singulier bien sûr, où elle ne manque jamais de noter en entête date, lieu précis d’où elle écrit et température extérieure bien souvent glaciale, mais quelquefois aussi trop élevée par ces latitudes – à raison d’un chapitre court au nom de Dom Joseph, pour 2 ou 3 chapitres un peu plus longs de la part d’Anna.

    Cette alternance surprend d’abord, d’autant plus qu’on ne comprend pas bien ce que la vie de Dom Joseph a à voir avec le cheminement d’Anna, qui semble la principale intrigue du roman. Mais on se laisse happer malgré tout, peu à peu on fait connaissance avec les différents personnages – dont certains auraient peut-être mérité d’être un peu plus travaillés. On reconnaît très vite les principaux, et on s’attache fort à Anna, autant que Dom Joseph suscite un mélange d’intérêt et de répulsion ; les secondaires les plus importants (tels que Jens, Jeanne ou Valéry) sont eux aussi bien campés… mais je n’ai cessé de confondre les deux marins, tous deux affublés d’un nom à résonance bretonne en plus, ou les deux autres femmes de l’expédition ! Cela dit, si c’est un chouïa gênant quand l’histoire se tourne vers eux (au point que j’ai parfois reculé de quelques pages pour relire les présentations des membres de cet équipage à Anna), ça n’entrave pas l’histoire outre mesure, car le réel intérêt dans tout cela ne se trouve pas tellement dans les personnages en tant que tels, mais bien dans les interactions qu’ils vont développer dans une situation de plus en plus improbable, de plus en plus périlleuse.

    À travers eux, l’auteur s’attaque à toute une série de sujets assez graves, que je ne vais pas lister cependant, car ce serait un fameux spoil (pour certains du moins), mais on peut souligner sans risque de dévoiler, son souci écologique constant et tellement justifié, qui revient comme un leitmotiv à travers tout : le réchauffement climatique est là et bien là, l’Arctique est en train d’en souffrir à une vitesse phénoménale, révélant virus et autres gaz potentiellement mortels, jusque-là enfermés (on croyait pour toujours) par des glaces millénaires. L’auteur dénonce ainsi sans concession le besoin des autorités russes d’y asseoir leur suprématie, pour des raisons géo-politiques autant qu’économiques, ce qui prime largement sur la préservation d’un environnement qui devient peu à peu une poudrière, sans parler des trésors archéologiques inestimables… ou même des vies humaines qui se débattent (depuis la nuit des temps pour certains) dans ces contrées inhospitalières. On pourrait regretter ce parti-pris presque cliché contre les Russes, et notamment son armée omniprésente dans cette ville de Tiksi… mais alors je repense à l’un ou l’autre reportage vu plus ou moins récemment, sur ces bases militaires russes qui se multiplient côté Sibérie, face à l’Alaska quasi-voisin, en ces temps de fonte accélérée du permafrost arctique. Et ainsi on comprend que la documentation de l’auteur est solide, sans jamais devenir assommante, car elle se glisse de façon tout à fait naturelle dans l’intrigue.
    Par ailleurs, on est soulagé sur l’aspect « cliché », car ce stéréotype initial du militaire russe endoctriné et un peu primaire, est contrebalancé par le personnage précité de Valéry, qui va peu à peu révéler un visage humain bien différent de ce qu’on pouvait attendre de lui.

    Et donc, on suit Anna dans son périple de plus en plus désolé et désolant, dans son non-espoir qui grandit, dans une certaine folie qui la guette. Avec elle on frissonne, on est de plus en plus gelé par ces températures insupportables – et c’était d’autant plus prenant quand on sait que j’ai lu ce livre en plein milieu d’un été aux allures de toussaint, chez moi en Belgique, avec notamment, il y a à peine un mois, ces terribles inondations qui ont dévasté l’est du pays, indubitablement liées à ce dérèglement climatique qu’on ne peut plus nier, nulle part.

    L’écriture est incisive et de plus en plus glaçante. J’ai vu certains commentaires lui reprocher de rester aussi cohérente alors qu’Anna est en pleine perdition. Certes, on reste dans un (très) bon niveau littéraire, qui (puisqu’il s’exprime à la 1re personne) pourrait paraître surprenant de la part d’une femme dans un tel état physique et psychique… mais clairement l’auteur n’a pas fait le choix de l’hyper-réalisme. Pour ma part, ça ne m’a pas choquée : même à travers ces mots qui témoignent d’une qualité littéraire avérée, on a réellement l’impression d’être dans la tête d’Anna, on sent avec elle cette perte de l’espoir, cette lourdeur, ce découragement, tous peu à peu remplacés par une certaine résignation, un déplacement inconscient vers la folie – c’est là que le silence et le loup prennent tout leur sens… - et un sursaut de conscience pour que cette histoire ne se perde pas.

    Au final, bien plus qu’un thriller dans l’immensité glacée des terres arctiques russes ou dans la solitude recherchée au sein d’un monastère dans une montagne austère, on a là un roman terrible et bouleversant, notamment à travers son souci pour une terre qui se meurt tandis que les « grandes puissances » y voient surtout une nouvelle source de pouvoir politique et économiques, attitudes que l’auteur dénonce encore et encore. Mais surtout, il nous parle de la vie et de la mort, certes dans des conditions extrêmes, mais il touche ainsi quelque chose en chacun de nous.




    La villa aux étoffes d'Anne Jacobs
    Une romance "d'ambiance" dans l'Allemagne de 1913, mais bien loin des rumeurs de la guerre qui s'annonçait pourtant. 17/20 également

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    Synopsis : Dans l'Allemagne de 1913, dans l'apparat d'une somptueuse maison bourgeoise, maîtres et domestiques se croisent et se côtoient, partageant joies, drames, secrets et amours interdites.
    La jeune orpheline Marie occupe le poste de femme de ménage dans l'imposante résidence de la famille industrielle Melzer. Alors que Marie cherche sa place parmi les domestiques, l’agitation règne lors de la saison du bal hivernal : Katharina, la belle et plus jeune fille des Melzers, doit être introduite en société. Seul Paul, l'héritier de la famille, se tient à l'écart et préfère sa vie étudiante à Munich - jusqu'à ce qu'il rencontre Marie...
    Tandis que la guerre approche, petite et grande histoire se mêlent, palpitantes, pour nous plonger au coeur d'une saga inoubliable.


    Mon avis :
    J’ai découvert ce livre par le hasard des invitations à participer à l’une ou l’autre lecture commune, et ça tombait bien en ce mois d’août, puisque le challenge « Je voyage » auquel je participe, met les auteurs allemands à l’honneur ce mois-ci. Je dois dire : je n’étais pas hyper-enthousiaste à l’idée de l’entamer malgré tout, un peu échaudée par mon expérience de lecture des Sept sœurs, que je compare peut-être à tort, mais qui se présentait également comme une saga familiale assaisonnée de romance.

    J’ai été bien vite rassurée !
    D’abord, il faut le savoir car ça peut surprendre : ici, il n’y aura pas d’action endiablée, pas de grandes révélations fracassantes etc. On est bien davantage dans un roman d’ambiance, qui met en scène la petite ville bavaroise d’Augsburg en 1913 : l’électricité est une nouveauté dont s’équipent peu à peu ceux qui peuvent se le permettre ; l’automobile côtoie les fiacres à chevaux, dans une évolution pas tout à fait tranquille. L’industrialisation flamboyante des usines (ici textile) bat son plein, à cette époque où les syndicats sont encore confidentiels car interdits, mais où le patron agit encore en « bon père de famille » pour ses ouvriers, dans la mesure où ils ne boivent pas leurs revenus, leur fournissant divers services tels qu’un logement ou une crèche pour leurs enfants, ces enfants (les filles surtout) dont le travail est encore tout à fait légal, tandis que leur scolarisation prend peu à peu l’importance qu’elle doit avoir. La haute société est composée de riches industriels, perçus comme des « nouveaux riches » que la noblesse (souvent désargentée) méprise quelque peu, mais courtise néanmoins, tandis que les jeunes militaires vivent une vie de parade tranquille sous cet Empire bonhomme, loin de la Prusse conquérante, que l’on regarde avec un mélange d’incompréhension et de crainte. La pauvreté existe et n’est pas voilée, certains ont même des conditions de vie terribles, dont les orphelins tout en bas de l’échelle, dans cette société très allemande où les hôpitaux sont divisés entre ailes catholique ou protestante – mais jamais on ne plonge dans une atmosphère à la Dickens. L’autrice a résolument pris le parti de l’optimisme, de la douceur de vivre qui caractérise cette belle Bavière en temps de paix, même si les bruits de la guerre à venir commencent à gronder au loin, dans la Prusse précitée ou dans les Balkans.

    C’est dans ce contexte extrêmement bien rendu, on est réellement immergés dedans, que l’autrice place ses personnages et son intrigue. On suit ainsi l’arrivée de la jeune Marie, orpheline indomptable mais qui doit absolument réussir à se caser pour échapper définitivement à cet orphelinat où elle a grandi sans amour et dans un grand dénuement, dans la villa du riche industriel Melzer. Si Marie est indéniablement la personnage principale de l’histoire, avec son caractère fort et fier malgré toutes les embûches qu’elle a dû traverser depuis son plus jeune âge, c’est l’histoire de toute la maisonnée qui nous est contée : l’attachement du père à son usine, l’amour de son épouse d’origine noble qui dirige la maison avec autorité et bienveillance, les turpitudes de leurs deux filles : Lisa (Elisabeht) l’aînée un peu trop enveloppée et définitivement acariâtre, et Kitty (Katharina) la jolie cadette aux rêves d’artiste et bien un peu écervelée, et le cheminement du fils Paul. C’est aussi toutes les interactions entre les nombreux domestiques, chacun étant bien dépeint avec ses traits de caractère dominants, ses secrets et ses joies (j’ai adoré la cuisinière !), et chacun ayant un rôle bien défini. Tous font partie « de la famille », dans une hiérarchie bien établie et quelque peu figée, où l’ascension sociale – pour les domestiques - se limite à devenir femme de chambre quand on est bonne à tout faire, tandis que les filles de la famille ont une vie de petites dindes dont le seul avenir consiste à faire un mariage qui conviendra à toutes les parties, mais qui n’est plus strictement arrangé comme l’était celui de leurs parents, dans la mesure où les mœurs acceptent désormais de parler d’amour également, et d’entendre la voix de la fille concernée.

    Comme l’ambiance, ces personnages sont extrêmement travaillés et « vivants », on les reconnaît sans jamais se tromper tant ils sont typés, et tellement humanisés qu’on n’entre jamais dans le cliché – pourtant le risque était énorme. On s’attache très fort à la jeune Marie, on sourit de la vie de Kitty même si elle agace parfois, et on déteste gentiment Lisa ; on craint quelque peu le sieur Melzer, et on plaint le jeune Paul d’avoir un père pareil, tout en espérant que les deux vont pouvoir s’entendre pour le bien de l’usine et de la « famille ». On adore la chef cuisinière, tellement typée mais aussi très réaliste, autant qu’on voudrait voir disparaître la Maria Jordan, femme de chambre des femmes de la maison, mais surtout particulièrement odieuse avec Marie. Et ainsi de suite : chaque personnage, même ceux en-dehors de la maison qui vont apparaître de façon récurrente ou plus épisodique dans l’histoire, provoque un intérêt certain, qu’il soit entouré de curiosité, d’affection ou au contraire d’une certaine antipathie.

    C’est dans ce contexte à l’ambiance et aux personnages très élaborés que se greffe la partie romance, et on a de la romance à tous les étages ! C’est l’amour qui a grandi au sein du couple Melzer, et qui se dilue parfois dans l’attachement presque excessif du père à son usine, mais qui reste néanmoins bien présent et un certain moteur de toute l’histoire ; c’est le désespoir de Lisa de voir tous les hommes ne s’intéresser qu’à sa trop jolie sœur pourtant bien frivole, et qui finira par faire n’importe quoi par alpaguer celui sur qui elle a jeté son dévolu ; c’est le mélodrame de Kitty, la pauvre petite fille riche, qui mélange allègrement passion agrémentée du plaisir des sens et des arts, et amour solide sur lequel on peut baser quelque chose en commençant par la confiance ; ce sont les magouilles et la grossesse non désirée d’Augusta, la « deuxième bonne », qui cherche désespérément à se marier au valet pour ne pas se faire virer (car la grossesse d’une domestique célibataire était alors motif de renvoi !), mais le valet disparaît tandis que la bienveillance ambiante lui permet de garder sa place. Mais évidemment, c’est surtout l’histoire entre Paul le fils de la maison, et la jeune Marie, propulsée femme de chambre de Kitty qui lui a donné son amitié – une romance joliment développée et qui prend de plus en plus de place, comme un jeu du chat et de la souris, mais façon Tom & Jerry alors, où la souris bien déterminée ne s’en laisse pas conter.

    On a aussi un vague mystère sur les origines de Marie, c’est sans doute la partie la moins bien exploitée de ce livre. Certes, le début est intriguant, et mène sur une fausse piste qui m’a fait « tricher » un peu et aller voir le synopsis du tome 2, pour être certaine que mon hypothèse de départ ne pouvait être la bonne – et ouf, en effet, elle ne l’était pas ! Mais cette pseudo-enquête menée pourtant tambour battant par Marie est un peu trop lente à éclore, on en reçoit des bribes et on finit par comprendre l’ensemble, si bien que ça tombe un peu à plat quand c’est enfin révélé « officiellement ».

    Mais ceci est le seul point un peu faible de ce roman qui, bien plus que nous raconter une histoire qui serait liée à un climat d’avant-guerre (ce n’est pas du tout le cas dans cette Bavière bien éloignée du pouvoir impérial), c’est toute une époque dans laquelle le lecteur est immergé, aux côtés de personnages parfois à la limite du cliché, mais extrêmement bien travaillés et réellement « humains », au point de susciter des sentiments très forts, dans un sens ou un autre. L’aspect romance est une cerise sur le gâteau. Une très belle réussite, et je suis curieuse de lire la suite !





    Des vacances presque parfaites d'Élodie Koenigshoven
    Une lecture de vacances sans prétention mais bien sympathique, et surtout, qui a parfaitement rempli son rôle: passer un bon moment! Et encore un 17/20

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    Synopsis : Enfin, ce sont les vacances d’été !
    Comme le veut la tradition, Margaux et sa famille se rendent au Lavandou, au camping de Gérard et de Martine, leurs amis de longue date. Tous les éléments pour passer de merveilleuses vacances sont réunis. Au programme : plage, mer, soleil et farniente.
    Sauf que cette année, rien ne se déroule comme prévu…


    Mon avis :
    Je devais lire, pour l’un des nombreux challenges auxquels je participe bien sûr, un livre contenant le mot « vacances » dans le titre. Après une brève recherche je suis tombée sur celui-ci : c’est indéniablement LE livre qu’il faut lire durant l’été !
    D’abord, la couverture est vraiment craquante, et même si nos ananas sont un peu trop exotiques par rapport au contenu du livre (il y a des ananas qui poussent au Lavandou ?), ils sont une illustration parfaite du groupe d’amis que l’on va retrouver, entre apéros et détente sur fond de mer magnifique qu’on a tellement besoin de voir au moins une fois par an, et ce sable fin que l’on foule au petit matin dans la tranquillité d’un camping encore endormi, ou en journée en famille et avec les amis.

    Ainsi, le décor est planté, et nous voici entrés dans une version livre, certes un peu différente mais en même temps tellement proche, de la série télévisée « Camping Paradis » : le groupe de vacanciers qui se retrouve d’année en année, copains avec le patron qu’ils revoient avec le même plaisir ; chacun y arrive avec sa valise de petits (et parfois plus gros) soucis du quotidien, liés au couple (et à la famille, dont les ados, pour ceux qui en ont), on la dépose, elle explose évidemment tôt ou tard, mais comme on est dans un monde hors du temps façon bisounours, tout est bien qui finit bien. Je précise d’emblée : cette comparaison de ma part est tout à fait positive ! Je n’irais pas jusqu’à dire que je suis fan de la série, mais à chaque épisode que je regarde quand ça me prend, c’est indéniablement un moment de détente sans prise de tête et, si ça touche à des sujets récurrents, que l’on trouve dans tant et tant de séries et autres romans étiquetés « feel good », ici comme dans la série, ils sont traités avec justesse et légèreté.

    Eh oui, si les vacances sont « presque » parfaites, c’est parce qu’il y a une succession de petits problèmes, de ces contretemps qui peuvent complètement entacher une journée, mais sans lesquels il n’y aurait pas d’histoire à raconter ! Ces petits complications sont évidemment très cliché, ce qui participe à faire sourire : la panne d’essence à quelques kilomètres de l’arrivée ne nous est pas épargnée, histoire de se mettre dans l’ambiance… et puis, dès les premiers pas au camping, les « vraies » mauvaises surprises commencent : notre famille principale est accueillie par une petite jeune inconnue qui semble les regarder de haut, au lieu de la patronne et leur amie depuis de nombreuses années ; de plus, leur emplacement habituel, l’un des meilleurs du camping et proche des trois autres couples qu’ils retrouvent depuis des années, a été attribué à d’illustres inconnus, tandis qu’ils sont relégués à un emplacement nettement moins agréable, près des poubelles et des sanitaires… La suite de l’histoire, je vous la laisse lire, mais on l’a compris : il y a anguille sous roche, et les quatre couples vont s’employer à comprendre ce qu’il se passe exactement, qui est cette trop jeune et jolie Lucie qui a pris la place de leur amie la patronne, pour ensuite déjouer ses plans et la faire partir en beauté si possible.

    Si l’intrigue principale tourne là autour, toute une série de sujets qui touchent à n’importe quel couple sont également abordés, sachant que l’accent est tourné vers la famille principale, comme je disais plus haut, composée de Margaux la narratrice qui nous présente les choses selon sa perception au fil des jours, Marc son mari, et leurs ados Thomas et Mélanie, respectivement 16 et 14 ans. J’ai trouvé Margaux parfois acerbe (et pourtant aimante) à propos de son mari… et puis je me suis rendu compte que c’est ainsi que je parle parfois du mien quand nous papotons entre collègues (celles dont je suis très proche en tout cas) ou entre copines. ;) Elle a un regard désabusé sur ses enfants, à cet âge typique où rien ne leur convient jamais à part les copains, mais où la complicité mère-enfants persiste malgré tout, et si les moments câlins sont devenus rares, chacun de ces instants reste précieux, car l’envol n’est plus très loin – et, si mon aîné n’a encore que 14 ans, et n’est pas encore tout à fait dans ce cliché, on est quand même peu ou prou dans ce même schéma, qui est tellement réaliste et dès lors touchant !

    Mon seul petit « reproche », finalement, c’est que les autres personnages importants du livre, c’est-à-dire les trois autres couples avec qui la famille principale passes ses vacances chaque été, sont brossés de façon tellement rapide que, très vite, je ne savais plus trop qui était qui, qui était avec qui, ni ce qui les caractérisait – entre le couple sans enfants, choix assumé, un couple décrit comme complètement « dépareillé » mais heureux ; l’autre couple affublé de deux jeunes enfants qui, contrairement aux ados, s’émerveillent encore de tout ; et le couple qui a fini par accepter mais traîne la douleur de n’avoir pas pu avoir d’enfant ; donc, oui, entre eux tous je connaissais ces quelques particularités, mais j’ai très vite perdu le fil de quel prénom correspondait à quel profil, en plus de leurs professions qui étaient vaguement évoquées ! Ce n’était pas forcément indispensable de les connaître intimement, mais j’aurais apprécié de les reconnaître plus facilement, par des petits rappels ici ou là… ou, pourquoi pas après tout, un schéma du camping avec leurs emplacements et leurs prénoms ? Ça aurait indéniablement été cliché, mais ça n’aurait pas dénoté par rapport à l’ensemble, au contraire, ça aurait pu être perçu comme un clin d’œil supplémentaire !

    L’écriture de l’autrice colle de façon tout à fait parfaite à cette ambiance et à cette histoire : c’est léger, c’est pétillant, c’est drôle même parfois, et en même temps c’est tendre, sans concession sur les réalités pourtant, mais sans jamais dramatiser non plus. On n’est pas pétri d’émotions, et je me rends compte que je n’ai vraiment ri qu’à un seul passage (je ne sais même plus à quel moment), mais je pense bien avoir affiché un sourire ravi tout au long de ma lecture. De plus, ce livre se lit extrêmement facilement, je l’ai eu terminé en moins d’une journée, en l’intercalant pourtant avec quelques autres lectures plus « sérieuses », entre télétravail et rendez-vous chez l’ophtalmo !

    On l’a compris : c’est une lecture très agréable, qui ne va pas changer la face du monde, mais on aime tellement ce portrait d’un camping où les petits drames du quotidien sont désamorcés tout en sensibilité et avec une fraîcheur additionnée d’une pointe d’humour. C’est Le livre de l’été, qu’on lit avec une facilité déconcertante à la plage ou entre deux moments sérieux, car de toute façon il détend et on se laisse aller au rythme des vagues et au son des cigales, et on en redemande !





    On arrive au bout... ;) en passant par une petite Fantasy qui ne m'a pas tout à fait convaincue, 15/20 pour:

    La stratégie des as de Damien Snyers

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    Synopsis : Pour vivre, certains choisissent la facilité. Un boulot peinard, un quotidien pépère. Humains, elfes, demis... Tous les mêmes. Mais très peu pour moi. Alors quand on m'a proposé ce contrat juteux, je n'avais aucune raison de refuser. Même si je me doutais que ce n'était pas qu'une simple pierre précieuse à dérober. Même si le montant de la récompense était plus que louche. Même si le bracelet qu'on m'a gentiment offert de force risque bien de m'éparpiller dans toute la ville. Comme un bleu, j'ai sauté à pieds joints dans le piège. L'amour du risque, je vous dis. Enfin... c'est pas tout ça, mais j'ai une vie à sauver. La mienne.

    Mon avis :
    Je viens de finir ma lecture, et je suis assez dubitative… Ce livre ne me laissera pas un souvenir impérissable, mais les trois (et même quatre, façon trois mousquetaires) sont tellement touchants en leur genre, qu’on les quitte avec un petit regret ! A cela se mêle un vague sentiment d’appartenance, du besoin d’apprécier – ou pour le moins d’être particulièrement indulgente si je n’ai pas trop apprécié – ce jeune auteur compatriote, dont la plume, sans être éblouissante, est suffisamment particulière pour se faire remarquer.
    A vrai dire, j’ai emprunté ce livre à la bibliothèque, car j’avais repéré « Ex Dei » en librairie du même auteur évidemment, que plusieurs critiques considèrent comme une suite, même si les deux pourraient apparemment se lire séparément. Il n’en reste pas moins que, si « Ex Dei » est au moins un peu une suite, je devais d’abord lire l’entrée, qui est donc ce livre-ci.

    On rencontre ainsi trois arnaqueurs professionnels à l’occasion d’un de leurs tours de bas étage qui leur permet à peine de survivre : c’est James (Jimmy) Laany, la narrateur elfe ; son ami Jorg le troll, race mal-aimée dans cette ville nommée « Nowy Kraków », qui se situerait dans une région au climat désormais régulé par magie, et qui rappellerait une ancienne ville polonaise (Kraków, c’est la magnifique ville de Cracovie en fait !), placide et constamment embêté par se grande taille ; et Élise, la « demi », mi-humaine mi-elfe, ainsi nomme-t-on les métisses entre les différentes races, qui vivent le fait de n’appartenir vraiment à aucune, et la particularité automatique d’être stériles de naissance. Ainsi, lorsqu’un étrange et richissime humain leur propose une mission qui sera grassement rémunérée, et malgré une méfiance toute légitime envers cet étrange homme, ils acceptent la mission, qui consiste à dérober une pierre hors de prix, le « Rein d’Isis », lors d’une soirée privée dans une maison huppée.
    Le livre s’occupe essentiellement de tout ce qui tourne autour de ce « casse » qu’ils vont minutieusement préparer, très vite rejoints par leur concurrente sur la même affaire (engagée par les mêmes riches commanditaires), l’humaine Mila ; puis le casse même, et enfin la chute quand ils vont remettre la pierre (car évidemment ils arrivent à se la procurer, il n’y a quasi aucun dès le début) à leur commanditaire.

    Et ciel, que je me suis ennuyée durant la 1re partie, celle de la préparation du casse ! À part dire et répéter qu’ils n’avaient pas le début d’une idée et se soûler au bar du coin, il ne se passe pas grand-chose. Certes il y a les démarches d’approche, mais tout cela prend tellement de temps et manque cruellement d’action, avec la logorrhée du narrateur qui noie réellement le peu qu’il se passe… heureusement ça bouge enfin le jour J, et ensuite on ne cesse plus d’être surpris jusqu’à la dernière page !

    Un autre point qui m’a un peu embêtée est le monde dans lequel évoluent nos trois puis quatre héros. Il est extrêmement bien développé, ça on ne peut le nier, et on découvre les choses au fil de la narration de Jimmy l’air de rien, mais tout à coup on happe un élément ici ou là, et l’ensemble crée un monde tout à fait cohérent et surprenant par certains aspects : au-delà d’un monde fantasy, on est bel et bien sur notre terre, mais dans un futur lointain (du moins on le suppose, car aucune date n’est jamais mentionnée), où le climat est régulé par magie, généralement sur beau temps, et où les progrès de la civilisation ont désormais lieu en Afrique, continent où les pauvres rêvent de pouvoir aller un jour… Les humains semblent encore dominants, mais partagent leurs villes avec d’autres races, dont les elfes (ou les trolls bien moins acceptés), peut-être d’autres aussi laisse-t-on entendre mais sans les citer, et donc les fameux « demis »… Le seul truc qui m’a gênée finalement, c’est que tout au long de l’histoire, quelquefois Jimmy rappelle l’une ou l’autre de ses particularités d’elfe, e systématiquement une petite voix me disait : « Ah c’est vrai, c’est un elfe ! » … comme s’il n’était pas assez typé pour que je m’en rappelle spontanément. Ou peut-être l’auteur a-t-il voulu faire passer un message de tolérance l’air de rien ? Message qui est assez évident dès qu’il s’agit du troll, un peu moins quand il s’agit des « demis » même si on compatit pour leur triste sort… mais l’elfe est devient tellement proche de nous, comme un ami un peu filou, qu’on le voit à notre propre image finalement.

    Et donc, toute cette histoire se déroule à la 1re personne du singulier avec Jimmy comme narrateur. Cette longue narration a des allures de logorrhée, comme je le disais plus haut : on a le flot ininterrompu des pensées de Jimmy, ça part dans tous les sens (mais ça fait sens malgré tout), tout le temps, y incluant aussi bien les réalités de sa vie, ses pensées du moment, ses espoirs, ses souvenirs, et les actions auxquelles il participe, et qui vont aller en s’accélérant, pour le plus grand plaisir du lecteur. On a très vite l’impression d’être avec lui dans sa tête, et c’est la tête d’un type incapable de tenir en place (il le répète d’ailleurs lui-même à plusieurs reprises), dans notre société ce serait l’hyperactif de la classe qu’on ne sait pas canaliser, mais que l’on supporte quand même car il présente une intelligence apparemment supérieure à beaucoup d’autres, sans jamais se prendre au sérieux, on est davantage dans une espèce d’autodérision (bien typique de par chez moi, soit dit en passant). Ce choix d’une telle narration ne permettant pas une écriture trop littéraire, l’auteur compense par un style extrêmement entraînant, débridé, qui ne laisse pas le lecteur reprendre son souffle, c’est tellement prenant qu’on ne lâche pas ! Eh oui, c’est à tel point que, même dans la partie initiale où je me suis quelque peu ennuyée à cause du manque d’action, cette exubérance de la narration fait qu’on continue de lire quand même, comme si on savait que, d’un moment à l’autre, ça allait basculer, et que le rythme ne cesserait plus de s’accélérer jusqu’au final, où on se laisserait retomber comme un athlète dopé aux endorphines après avoir gagné sa course.

    Ce n’est sans doute pas le meilleur roman de fantasy que j’aie jamais lu, mais c’est un premier roman très prometteur, et sa narration à un rythme effréné lui donne une place particulière dans la littérature du genre (du moins si je compare avec ce que j’en ai déjà lu). Si l’histoire, et surtout sa trop longue introduction, ne m’a pas tout à fait convaincue, j’ai beaucoup aimé le monde dans lequel nos héros évoluent, une certaine ambiance, et les personnages vraiment touchants.





    Et on termine avec une chick-lit, ici aussi sans prétention, mais ici aussi le but recherché est atteint: j'ai passé un bon moment, certes pas très intellectuel, mais le monde serait bien triste si on n'avait pas de temps en temps un livre du genre...

    Des papillons dans le coeur de Petra Hülsmann

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    Synopsis : La vie de Lena est à son image : nette et rangée. Jusqu'au jour où, à la veille de ses 30 ans, alors qu'elle s'apprête à se marier, son fiancé Simon lui annonce qu'il est tombé amoureux d'une autre. Comme si ça ne suffisait pas, elle est virée de son travail suite à une étourderie.
    Mais il en faut plus pour abattre la jeune femme. Pourtant, ses espoirs sont battus en brèche : elle qui espérait s'épanouir dans une agence de relations publiques, trouve un poste dans la petite librairie de son quartier, tenue par Otto, un vieil homme bougon.


    Mon avis :
    En faisant une rapide recherche pour trouver l’un ou l’autre polar allemand, je suis tombée sur ce livre-ci. Les choix proposés par l’ami Google sont parfois bien surprenants ! De toute évidence, ceci n’est pas un polar… mais ça a attisé ma curiosité : un roman de chick-lit allemande, présenté par erreur parmi un choix de Policiers (j’aurais dû faire une capture de ma recherche !), voilà qui s’avérait interpellant. Certes, la couverture, assez désolante pour le GF ou l’ebook, se transforme en quelque chose de beaucoup plus pétillant en poche, beaucoup plus proche de la version originale, aussi ! <image> Pas de chance : ma mauvaise vue m’interdit la plupart des poches, dont les caractères sont souvent trop petits, si bien que j’ai « dû » le lire en ebook… mais c’est un moindre mal ; après tout, c’est le contenu qui compte, n’est-ce pas ? Alors, lançons-nous !

    On retrouve très vite, j’allais dire instantanément (pour partie en tout cas), tous les ingrédients qui font le succès (ou la source d’ennui) du genre : une héroïne pas tout à fait à l’aise dans la vie, qui s’entiche du mauvais homme tandis qu’elle entretient une relation d’amitié-haine avec un autre, plus ou moins proche, qu’elle n’imagine cependant pas un seul instant pouvoir aimer réellement. Elle est bien sûr entourée de ses parents dont elle s’est éloignée, mais qui jouent quand même un certain rôle dans l’histoire, et d’une bande d’amis fidèles – c’est peut-être ici qu’on a la plus grande différence avec les « classiques » du genre : ici on n’a pas l’ami homosexuel déjanté qui semble être devenu indispensable dans tant et tant de livres du genre (en commençant par la référence, Bridget Jones, à qui ce livre m’a plusieurs fois fait penser) ; en revanche, on a le vieux monsieur bougon à qui on s’attache peu à peu même s’il n’est jamais tout à fait sympathique.

    À côté de ça, on a l’indéniable touche allemande : les amis boivent de la bière à temps et à contretemps, quelle que soit l’occasion, ou du schnaps quand il faut vraiment se consoler d’un quelconque revers (bon, il y a parfois aussi du vin ou du whisky…), et on croise un nombre impressionnant de kiosques à saucisses ! Outre ces clichés, bel et bien présents et auxquels on finit par s’habituer, l’autrice nous propose çà et là une petite balade dans la ville de Hambourg (après tout, c’est le « titre » de la série dont ce livre est le premier tome, du moins dans la version allemande). On ne trouvera pas de description ultra-précise, et il ne faut pas s’imaginer pouvoir visiter la ville avec ce livre… mais on a quelques passages marquants, comme par exemple (sans révéler l’action) une très sympathique scène de patinage sur l’Elbe gelée !

    On est d’accord : ce n’est clairement pas de la grande littérature, c’est truffé de clichés et tout est prévisible (ou presque), mais l’autrice laisse entrevoir qu’elle est capable d’un tout autre niveau… qu’elle détourne ici en quelque sorte, proposant des passages absolument savoureux, quand elle nous cite les pensées ou autres extraits du roman de Jan, le pseudo-écrivain, l’un des personnages dont je ne vous dirai pas plus ici. Certes, ces passages prêtent à rire tant ils paraissent décalés dans le contexte, mais en fait ils sont tout à fait intéressants, pas en tant que tels bien sûr, mais du fait qu’ils montrent une autre facette de la plume de cette autrice bien intéressante.
    Pour le reste, on rit, car il y a des passages vraiment (très) drôles, et on laisse passer le fait qu’ils soient tellement prévisibles parfois (je me répète !) ; et on pleure (moi en tout cas j’ai dû garder une boîte de mouchoirs à portée de main), car il y en a d’autres qui provoquent de fortes émotions. Ces extraits-là touchent à ces relations humaines que tout le monde a connues ou connaîtra un jour ou l’autre, certes un peu différemment selon la vie de chacun ; ce sont comme des « instantanés de vie », à chaque fois réalistes et très justes, qui ne peuvent que faire écho en chaque lecteur.

    Ainsi donc, j’ai passé un très bon moment de lecture, entre rire et larmes, avec cette histoire au scénario plus que prévisible, mais avec suffisamment de différences par rapport aux classiques du genre, et ses spécificités propres (dont quelques-unes très « allemandes ») qui, sans le rendre exceptionnel, en font une chick-lit dans la lignée de tant d’autres, mais vraiment intéressante à découvrir pour un moment de lecture-plaisir sans prise de tête.

  • Taevinn

    Collectionneur de pages

    Hors ligne

    #140 29 Août 2021 22:50:25

    Coucou,

    La villa aux étoffes est prévu dans mes lectures du mois prochain ! Je suis super contente de ton avis qui me donne encore plus envie de le lire alors qu'on est pas encore en septembre ^^.
    J'adore la couverture de "Des vacances presque parfaites" :lol:

    Bonnes lectures !