[Suivi lecture] domi_troizarsouilles

 
  • FloXy

    Empereur des pages

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    #151 29 Octobre 2021 17:03:52

    Grominou a écrit

    Tu sais, ce n'est pas parce les gens ne laissent pas de commentaires qu'ils ne te lisent pas!


    Je confirme. :tim:
    Il y a des lecteurs ninja ! :cachecache:

  • Mypianocanta

    Livraddictien de l'espace

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    #152 30 Octobre 2021 18:01:47

    Je plussoie aussi Grominou - j'ai de plus en plus tendance à passer en mode fantôme, surtout quand je ne connais pas les livres dont il est question.
    Bon week-end :)
  • Bouledechat

    Passionné du papier

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    #153 03 Novembre 2021 09:20:03

    :+1:
    Pareil je ne commente pas toujours, mais je lis tes avis quand il s'agit de livres de SF ou de Fantasy principalement (je passe sur les policiers que tu lis car c'est un genre qui ne me parle pas du tout !). Je tiens à dire que tes avis sont toujours de qualité et que tu ais aimé le livre ou pas, tu pousses l'analyse ce qui fait qu'on comprend parfaitement toutes tes raisons, à défaut de toujours les partager mais on s'en fiche, comme tu le dis souvent on est un lecteur avec un vécu, des valeurs, des attentes et une histoire très différents de l'un à l'autre. Et je ne vois pas du tout en quoi c'est embêtant =) (en plus perso ayant lu ou pas le roman dont il est question je partage ton avis la plupart du temps).

    Et je suis de l'avis de Grominou : comme tes avis sont écrits dans tous les cas, tu peux toujours continuer à les publier ici si tu le souhaites en faisant moins de mise en forme, ceux qui ont pris l'habitude de te lire ne s'en offusqueront pas.

    Bonnes lectures ! ;)
  • domi_troizarsouilles

    Enfileur de mots

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    #154 25 Novembre 2021 14:36:10

    Hello!

    Merci à tous pour vos gentils mots qui m'encourageaient à continuer malgré tout... :pink:

    J'ai parfois l'impression de vivre ma reprise de la lecture (qui ne date que de l'été 2020, après une "panne" qui a duré une quinzaine d'années donc) comme une espèce de nouvelle vie...
    Au début, les hésitations, les premiers pas maladroits, et puis une fois qu'on tient debout, on court, on court, on court, de plus en plus vite!
    Jusqu'à se fracasser dans une espèce d'adolescence à nouveau pleine de maladresses - où on se sent bêtement (ou pas) heureux du moindre succès, mais où, aussi, la moindre remarque fait terriblement mal et plonge dans une noirceur qu'on ne comprend pas tout à fait soi-même.
    J'ai eu, notamment, énormément de remarques sur le fait que je lis beaucoup, dans les challenges et ailleurs... et je vous assure que, adolescence ou pas, certaines ont fait vraiment mal.
    Mais voilà: on finit par devenir adulte (ou pas tout à fait après tout =D ) et peu à peu on se détache de tout ce qui n'a pas vraiment d'importance - sachant que, pour moi, plus que jamais, je lis pour le plaisir (et pour apprendre de nouvelles choses, aussi, mais toujours sous le logo du plaisir).

    Bref, si je veux remettre tout à jour, y a un sacré boulot! :angel:
    Donc mes avis restent disponibles, en version brève sur mon Profil, en version longue ils sont tous sur Babelio sous le même pseudo...

    ... mais pour bien marquer mon retour ici :heart: , je vous mets quand même mes trois dernières lectures. Par le hasard des choses, ce sont trois briques, dont la largeur va quand même en décroissant, et les avis au contraire en crescendo!


    Crescent City, tome 1 : Maison de la Terre et du Sang de Sarah J. Maas
    Un petit 13/20... après avoir très longuement hésité entre 12 et 15!

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    Synopsis : Liés par le sang. Tentés par le désir. Déchainés par le destin.
    Bryce, une jeune femme mi-fae, mi-humaine, a une vie parfaite : elle travaille la journée chez un marchand d'antiquités qui vend des artefacts magiques et fait la fête toute la nuit avec ses amis en savourant chaque plaisir qu'offre Lunathion - plus connue sous le nom de Crescent City.
    Mais un jour, un terrible meurtre va venir ébranler les fondations de la ville, de même que le monde de Bryce. Deux ans plus tard, son travail ressemble à une impasse et elle se plonge dans l'oubli en écumant les clubs les plus fameux. Mais lorsque le meurtrier frappe de nouveau, Bryce se retrouve entrainée dans l'enquête et doit faire équipe avec Hunt, un mystérieux ange déchu dont le passé noir hante chacun de ses pas.
    Ce dernier est l'assassin personnel des archanges et il doit protéger la jeune femme, même s'il lui porte peu d'intérêt. A la recherche de la vérité, Bryce et Hunt vont apprendre à se connaître et vont explorer les bas-fonds de la ville jusqu'aux niveaux les plus sombres de l'Anfer où des choses qui dormaient depuis des millénaires se réveillent...


    Mon avis :
    Je suis encore et toujours étonnée de ces notes dithyrambiques que certains livres obtiennent, quand lesdits livres m’ont laissée beaucoup plus dubitative. Au moment où je commence ce commentaire (le 15 novembre en soirée), il a : 17,9/20 sur Livraddict ou 4,54/5 sur Babelio. Ce n’est pas rien quand même !
    Cependant, vous l’avez compris : je ne partage pas (une fois de plus ?) l’engouement massif que ce livre semble avoir suscité. Oh ! pour autant, cette fois en tout cas, je ne dirais pas non plus que je ne l’ai pas aimé… mais le moins qu’on puisse dire, c’est je l’ai trouvé tout à fait inégal et, si le monde créé est extrêmement bien travaillé, il n’est pas foncièrement original.

    La première idée qui me reste à l’esprit après avoir refermé ce livre il y a une douzaine d’heures, c’est sa longueur : il est réellement interminable. L’autrice aurait pu le couper de 200-300 pages et on n’y aurait rien perdu, mais j’y reviens…
    Le début a même été très pénible. Certes, on comprend après coup qu’il était nécessaire pour bien poser le contexte, et présenter les personnages principaux, surtout celle qui reste la personnage principale à travers tout (même si un personnage principal masculin va bientôt évoluer à ses côtés) : la jeune Bryce Quinlan, métisse mi-fae mi-humaine, employée à tout faire dans un magasin d’antiquités très spécial dirigé par une sorcière qui se veut menaçante (mais que, pour ma part, j’ai surtout trouvé gentiment moqueuse mais irréaliste). Elle a été à l’université, mais il n’est jamais dit ce qu’elle a étudié exactement (ou alors j’ai zappé), et aimerait un autre emploi sans trop savoir quoi elle-même, Elle qui a dû renoncer à son rêve de devenir danseuse car elle n’avait soi-disant pas le bon physique ; elle qui est de toute façon bloquée d’emblée par son statut de mi-humaine, dans un monde où les humains sont tout en bas dans la hiérarchie sociale. Mais surtout, on nous présente aussi son amitié à la vie à la mort, de ces amitiés à la limite de l’extrême dont tout le monde rêve bien un peu, avec l’une des plus puissantes louves métamorphes de la ville : Danyka Fendyr.
    Quoi qu’il en soit, vraiment j’ai dû m’accrocher pour ne pas lâcher durant au moins la première centaine de pages – paradoxalement, ce sont justement ces notes tellement enthousiastes qui m’ont motivée : si tant de lecteurs l’ont à ce point apprécié, c’est qu’il ne peut pas être tout à fait mauvais, n’est-ce pas ?

    Parmi les bons points que l’on peut relever d’emblée, il y a donc cet univers dans lequel évoluent nos personnages : il est, comme je disais plus haut, extrêmement bien travaillé, avec plein de détails qui font sens et qui permettent que chaque espèce, chaque niveau de pouvoir soit parfaitement reconnaissable à tout moment, tout au long de la narration. En outre, l’autrice a réussi ce tour de force de ne pas nous le décrire façon « plaquée » au début de l’histoire, au contraire : c’est dilué tout au long des pages, de façon suffisamment précise pour que les éléments les plus importants soient clairs d’entrée, et ensuite les détails s’ajoutent tranquillement au fil de l’action.
    Mais voilà : mon bémol, qui certes ne dérange pas la lecture, mais fait « tiquer » par moments quand même, c’est que l’autrice ne présente pas quelque chose de réellement original… La société qu’elle nous présente m’a immédiatement fait penser à la Grèce antique – avec, notamment, une hiérarchie sociale très figée, avec les citoyens (les fameux civitas !) qui jouissent d’un certain nombre de droits tant qu’ils se plient aux obligations liées à leur rang propre ; et tout en bas de l’échelle, les esclaves, gagnés le plus souvent à la guerre – ici, les anges déchus. Le tout étant chapeauté par de mystérieux supérieurs qu’on ne croisera que très brièvement mais dont on parle tout le temps, ces fameux Asteri, qui font tellement penser aux dieux capricieux (et souvent détestables) de l’Olympe. Je précise : je ne suis absolument pas spécialiste de la Grèce antique, mais il se trouve, tout à fait par hasard, que mon fils aîné apprend actuellement le grec ancien à l’école (ce que je n’ai, quant à moi, jamais eu…), et nous a abondamment parlé de ses premiers cours, dans lesquels on leur exposait d’abord en long et en large la civilisation grecque antique… et tout à coup, le rapprochement était tellement évident qu’il m’a presque choquée !

    Cette base étant posée, l’autrice l’ornemente de diverses créatures plus ou moins classiques de la fantasy – donc, là non plus, rien de bien nouveau sous le soleil. Alors, ici encore, je ne suis pas spécialiste du genre, mais les métamorphes sont des personnages récurrents chez pas mal d’auteurs, sans même parler des démons ; et pour le reste on fait un petit détour en Nouvelle-Zélande chez Nalini Singh et sa Chasseuse de vampires (coucou Raphaël !), ou dans les romans précédents de notre autrice, car bien sûr on reconnaît aussitôt les terribles fae de son célébrissime ACOTAR !
    Cela dit, je suppose que la majorité des auteurs de fantasy ne font rien d’autre que piocher dans ce qui existe, pour en faire une espèce de remix saupoudré, plus ou moins intelligemment, de leur propre assaisonnement, en changeant çà et là l’orthographe pour y ajouter une touche personnelle, ce qui me semble tout à fait inutile : un vampyre reste un vampire, ou l’Anfer reste le monde des Enfers ! Ce n’est pas une critique : après tout, c’est la même histoire depuis longtemps, quand on pense par exemple aux très nombreux récits de la Création des diverses religions, qui se recoupent tous plus ou moins ; or, ces écrits sont tout à fait passionnants pour la plupart ! Mais je voulais surtout souligner que, décidément, on ne peut pas dire que cet univers soit original, ce n’est en aucun cas le mot qui peut le définir – ce qui n’empêche pas, au risque de me répéter, qu’il est extrêmement bien travaillé, ciselé même. Je suis donc mi-figue, mi-raisin sur ce premier point.

    Des personnages, je n’ai (étonnamment ?) pas grand-chose à dire. Comme l’univers dans lequel ils évoluent, ils sont tous extrêmement bien travaillés, et on s’attache exactement à ceux auxquels l’autrice semble avoir voulu qu’on s’attache : Bryce bien sûr, mais aussi l’ange déchu Hunt Athalar, homme de main (entendez : exécuteur) au nom du puissant archange Michée, avec qui Bryce va peu à peu développer une relation « ennemies to lovers » - amenant ainsi cette histoire aux limites de la bit-lit. Autour d’eux, tout un petit monde se crée, je ne vais pas tous les nommer et encore moins détailler ici, mais indéniablement : ils sont parfaitement maîtrisés, ils flirtent parfois avec certains clichés que l’autrice s’emploie à casser au fur et à mesure dans des tours de passe-passe très réussis, ils sont tous bien campés et portent des noms suffisamment distincts pour être immédiatement identifiables, même les plus secondaires n’ont pas échappé à ce travail minutieux, et pour cela : bravo !

    Reste donc l’écriture : je l’ai dit, elle est très inégale.
    La première chose à dire, c’est une oscillation permanente dans le niveau de langage. En effet, alors que le niveau de langage général est tout à fait correct, on ne peut que remarquer de façon criante l’utilisation systématique, agaçante et parfaitement inutile des termes « putain » et « merde/merdique ». Plutôt que de la grossièreté (comme dénoncent certains), j’y ai trouvé un énorme manque de maturité, comme si l’autrice avait voulu « faire adulte », mais à la manière d’une ado qui ne sait pas très bien comment s’y prendre ! Si c’est là sa façon de passer d’un public young adult (comme ACOTAR), à un public adulte-adulte, c’est un flop considérable. En effet, même si cette peut-être grossièreté se limite exclusivement à ces deux mots-là – je n’ai rien trouvé d’autre qui mérite le terme de grossier -, c’est leur utilisation à tort et à travers, pour tout et n’importe quoi, qui finit par lasser… et surtout, leur répétition, plusieurs fois à chaque page, et si par miracle on ne les trouve pas sur l’une ou l’autre page, on les retrouve en abondance sur la suivante ! Si on retirait toutes ces occurrences du livre, on gagnerait au moins 20-30 pages, voire même davantage…

    Pour le reste, comme dit plus haut, je me suis ennuyée pendant les 100 premières pages, au point d’avoir plusieurs fois hésité d’abandonner ce livre. Mais quand cette interminable introduction laisse enfin la place au cœur de l’intrigue, peu à peu on se laisse vraiment prendre, car c’est plein de rebondissements, tout en approfondissant le monde dans lequel vivent nos personnages principaux. Rebondissements ne veut pas dire rythme pour autant, cela dit : j’ai parfois été agacée de la lenteur de l’évolution de la relation entre Bryce et Hunt. On avait compris dès le début que la relation évoluerait, mais là encore, ça se fait à la façon d’un roman young adult où on ose à peine se toucher, et les scènes à caractère sexuel sont à hurler de rire tant elles sont lentes et empruntées, avec là aussi la tentative de l’autrice de « faire adulte »… à travers l’utilisation maladroite du mot « bite » par exemple. Il aurait pourtant suffi de lire l’une ou l’autre romance érotique de bonne facture, et tant qu’à faire, ça aurait pu être plus « chaud » tout en étant plus crédible et mieux écrit !
    J’ai également été agacée de la lenteur de certaines petites révélations.

    Spoiler (Cliquez pour afficher)

    Je noterai notamment : depuis le début, je me suis demandé : mais qu’est-ce qu’ils attendant à aller voir la veste de Danyka, que cette dernière avait laissée dans le placard à balais !? peut-être n’y aurait-il rien eu, et ok Bryce était encore et toujours submergée par son chagrin, mais quand même : c’était évident qu’il y avait là une piste… mais l’autrice y arrive par des chemins tellement tortueux, dignes d’un très mauvais polar, c’est ahurissant !



    Enfin, quand on arrive au « climax » du livre, l’autrice passe à un langage très cinématographique, qui aurait pu faire son effet… malheureusement il est exagéré, on « sent » carrément le procédé, et ça, c’est bien le pire qui pouvait arriver. Ce livre est plein de procédés d’écriture divers et variés, mes anciens « cours » en atelier d’écriture m’ont permis d’en identifier plusieurs, ok. Mais un bon livre devrait mettre ces procédés au service de la narration pour être vraiment efficaces, pas ressortir à ce point. Car le problème d’une écriture cinématographique, c’est qu’elle n’est quand même pas une caméra : si elle permet des images mentales ultra-précises, à la seconde près, la lecture ne permet jamais de visualiser les choses aussi vite que le ferait un film… si bien que cette partie-là devient, à son tour, interminable, tant elle est inondée de menus détails qui auraient leur place dans un script, mais certainement pas dans un roman ! Certes, à cet endroit-là je ne me suis pas ennuyée… mais j’ai indubitablement sauté des lignes et des lignes, car vraiment c’était beaucoup, beaucoup trop long !

    D’ailleurs, mon avis est déjà beaucoup trop long lui aussi… Pour faire bref, je dirai donc que j’ai trouvé ce livre moyen : beaucoup de bon, notamment dans des personnages réellement ciselés qui évitent l’écueil des clichés même s’ils sont parfois à la limite, un univers extrêmement bien travaillé (même s’il n’est pas foncièrement original), mais aussi de (très) gros défauts : l’utilisation exagérée de certains termes qui font hésiter entre manque de maturité ou grossièreté, une introduction beaucoup trop longue, et des procédés littéraires tellement visibles qu’ils finissent par gâcher la narration.





    Nevernight, tome 1 : N'oublie jamais de Jay Kristoff
    Un très bon 17/20

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    Synopsis : Dans un pays où trois soleils ne se couchent presque jamais, une tueuse débutante rejoint une école d'assassins, cherchant à se venger des forces qui ont détruit sa famille.
    Fille d'un traître dont la rébellion a échoué, Mia Corvere parvient de justesse à échapper à l'anéantissement des siens. Livrée à elle-même et sans amis, elle erre dans une ville construite sur les ossements d'un dieu mort, recherchée par le Sénat et les anciens camarades de son père.
    Elle possède un don pour parler avec les ténèbres et celui-ci va la mener tout droit vers un tueur à la retraite et un futur qu'elle n'a jamais imaginé.
    À 16 ans, elle va devenir l'une des apprentis du groupe d'assassins le plus dangereux de toute la République : L'Église rouge. La trahison et des épreuves l'attendent dans les murs de cet établissement où l'échec est puni par la mort. Mais si elle survit à cette initiation, elle fera partie des élus de Notre-Dame du Saint-Meurtre, et elle se rapprochera un peu plus de la seule chose qu'elle désire : la vengeance.


    Mon avis :
    Nouveau livre lu dans le cadre du Prix Livraddict, catégorie Fantasy : sans que ce soit tout à fait un coup de coeur, je peux dire que je suis séduite ! Il y a certes quelques petits bémols, mais à part ça, j'avais déjà pris goût à la plume de Jay Kristoff, dans l'exceptionnel premier tome de Illuminae (j'ai acheté les suivants, mais pas encore lus). Certes, ici on est dans un autre genre, et le livre a été écrit en solo alors qu'Illuminae est un livre à quatre mains. Néanmoins, j'y ai retrouvé plusieurs éléments qui m'avaient tant plu, j'y reviens.

    Commençons cependant par ces fameux bémols, et avant tout par un détail livresque très terre-à-terre, qui n'a pas gâché ma lecture en tant que telle, mais qui m'a quand même bien agacée : il semble que j'ai découvert ce livre un peu trop « tard ». En effet, il est vendu soit en version reliée avec une magnifique couverture, soit en version brochée avec une couverture… qui me plaît nettement moins !

    <image> <= la version reliée, vs. la version brochée ci-dessus.

    Hélas, la couverture reliée a été publiée en nombre limité, et est désormais introuvable – du moins en français, alors qu'elle est toujours disponible en anglais ou en traduction allemande, par exemple ! Alors, pourquoi la traduction française en version reliée est-elle déjà épuisée ??
    C'est clairement une pure affaire commerciale, mais pour le coup l'éditeur De Saxus est trèèèèès décevant !

    J'en viens maintenant au contenu et à ce qui représente le vrai gros bémol à mes yeux : comme dans tant d'autres livres du genre, on a ici des héros très jeunes, à peine ados même s'ils ont la plupart du temps un comportement plutôt proche du « young adult » - ce qui, en soi, pose déjà question. Certes, on est dans un monde tout à fait imaginaire, mais sérieusement : vous imaginez nos jeunes boutonneux désinvoltes de 16-17 ans évoluer à la façon de nos héros ? Ou alors on est dans un énième monde très vaguement inspiré du Moyen-Âge, où l'on était adulte avant 14 ans ?... ce n'est pas l'impression générale que j'ai eue ! On est certes dans un monde original, vaguement inspiré d'époques plus anciennes et politiquement sombres de notre histoire (que je n'ai pas cherché à identifier) et effectivement il n'y a aucun élément qui pourrait rattacher le lecteur à une époque plus actuelle (comme des téléphones portables ou ce genre de choses), mais par ailleurs, l'auteur souligne bien, à un moment donné, que dans le monde de Nevernight, on ne peut devenir soldat qu'à 18 ans accomplis… Alors ?

    En outre, oui : l'essentiel de l'intrigue se passe dans une école (si on peut l'appeler ainsi), mais ne peut-on pas se former à tout âge ? Pourquoi tous ces candidats assassins, qui viennent d'horizons bien différents en plus et pour des raisons propres bien différentes (on est très loin d'une école à la Harry Potter où on est convoqué à 11 ans, point !) ; bref, pourquoi sont-ils tous de ce même âge, pas encore tout à fait sortis de la puberté ? Était-ce si difficile de mettre en scène parmi eux l'un ou l'autre adulte plus âgé, qui après un quelconque revers de la vie aurait lui/elle aussi décidé de rejoindre une telle école ?
    Le pire, c'est que ce livre nous est présenté comme adressé à un public adulte, et il était bel et bien vendu au rayon adulte de ma librairie. Pour ma part, je ne suis pas 100% convaincue de cette classification, il y a comme une légère déviation de public-cible, en tout cas je ne me suis pas sentie tout à fait concernée. Ou alors, il est adressé à des adultes-mais-pas-trop-vieux-quand-même ? (ce que je ne suis plus) Oh ! je l'ai déjà dit pour d'autres livres : je n'ai pas forcément besoin de m'identifier aux héros, mais quand la majorité de ceux-ci, y compris l'héroïne principale et ses plus proches amis, sont si jeunes, alors que les quelques adultes qui les entourent sont tout sauf des « modèles », j'ai parfois un peu l'impression de voir des gamins s'agiter dans un jeu dont je ne comprends absolument plus les règles – et qui dès lors ne m'intéresse pas vraiment…

    Et pourtant !
    Et pourtant, je me suis complètement laissée embarquer, grâce à la plume magique de Jay Kristoff. On peut sans doute en dire beaucoup de choses, la décortiquer etc. ; pour ma part, je résumerai en peu de mots : c'est tout simplement un formidable conteur ! Il fait ce que tant d'auteurs oublient parfois de faire : il nous raconte une histoire qui tient la route, tout simplement. Sans grands effets de style, sans vocabulaire extrêmement recherché mais de bon niveau quand même, il parvient à entraîner son auditoire, pardon, ses lecteurs, au coeur de ce monde improbable où trois soleils alternent en n'offrant que des non-nuits (ah cette traduction bien ingénieuse de nevernight !) pour de trop rares vrainuits, au coeur de cette montagne qui abrite une terrible école d'assassins, pour lesquels on se prend pourtant d'affection… ou au contraire dont on se méfie, selon ce que l'auteur veut bien instiller. Ils sont (presque tous) jeunes mais pas forcément beaux, ils ont des talents particuliers et parfois même repoussants, et pourtant on est captivé par leur histoire.

    En outre, c'est une histoire pleine de rebondissements, qui n'ont pas tous la même valeur captivante mais qui entretiennent le suspense malgré tout, et un fameux retournement – quelques indices étaient pourtant disposés çà et là, mais j'ai quand même été soufflée… comme dans ces Policiers (mon genre préféré) bien faits, où on reste bouche bée quand le meurtrier est révélé, et qu'on se rend compte l'instant d'après qu'il y avait partout ces petits cailloux blancs qui menaient bel et bien à lui, mais qu'on ne les avait même pas vus !
    Et si vous avez encore un doute, lisez juste le chapitre 1… probablement l'un de mes préférés, vraiment du grand art !

    Spoiler (Cliquez pour afficher)

    La parallèle quasi-simultané, autant que l'art de l'écrit le permet, que l'auteur fait entre l'acte sexuel et l'acte meurtrier est tout simplement extraordinaire – j'en ai encore des frissons rien que d'y penser !



    À côté de ça, l'auteur utilise quelques-uns de ces « trucs littéraires » qui marchent… ou pas ; moi j'ai été convaincue. On a d'une part l'alternance entre l'intrigue en elle-même, et l'évocation du passé de notre héroïne Mia, ce qui l'a conduite à choisir de rejoindre cette école d'assassins. Le tout est présenté de façon assez classique : quelques pages en italique au début d'un certain nombre de chapitres (mais pas tous) marquent le passé de Mia, tandis que la narration même s'enchaîne en caractères normaux « regular ». La distinction est donc très visuelle dans un procédé qui n'a rien de nouveau ; néanmoins, il joue bien son rôle de mener le lecteur sur deux tableaux sans le perdre, au contraire, les choses s'éclairent ainsi petit à petit ; en outre, ça permet de donner rythme, de « casser » cette narration qui, autrement, avant le retournement précité du moins, aurait peut-être paru trop linéaire.

    Mais Jay Kristoff ne s'est pas contenté de ça ! Il a aussi pris un risque… que tous les lecteurs n'ont pas apprécié : sachant que j'ai lu ce livre en lecture commune, j'ai pu constater que ça a gêné la plupart de mes co-lecteurs, et c'est une remarque qui est ressortie dans pas mal des autres commentaires que j'ai lus çà et là ; bref, il a pris un vrai risque, en altérant la forme d'un simple roman. Certes, on est loin d'une mise en page à la « illuminae » ; néanmoins, la technique n'est pas courante dans un roman, et est même généralement rédhibitoire. Et pourtant (encore une fois), ça marche !
    Vous l'avez compris : je parle de ces nombreuses notes de bas de page dont l'auteur n'a cessé de parsemer son texte. Dans les premières pages, on tâtonne un peu et on se demande pourquoi il nous embête avec ça… mais peu à peu, on entre dans son jeu, car on comprend que c'est là que se développe dans toute sa splendeur le monde dans lequel évoluent les personnages. C'est là que l'auteur expose un certain nombre de faits, d'anecdotes passées relatives à son monde, qui permettent de l'appréhender de mieux en mieux. Mais ce n'est pas tout : en fait, j'ai lu que pas mal de lecteurs, hérissés par le concept même de notes de bas de page, ont fini par ne plus les lire… eh bien, ce n'est pas grave ! Il se trouve que ces notes ne sont jamais tout à fait indispensables à l'intrigue – et c'est bien là tout le tour de force du romancier : de réussir à écrire toutes ces notes (qui, ensemble, font certainement plusieurs pages quand même), sans que ça dérange vraiment la lecture, sauf pour ceux qui y sont restés hermétiques. Et justement : celles et ceux qui ne les ont pas lues n'ont rien perdu de l'intrigue, mais ont peut-être manqué quelque chose de l'esprit du livre. Car c'est dans ces notes que, de façon plus évidente encore que dans l'intrigue même, l'auteur déploie tout son talent – en y ajoutant presque systématiquement une touche d'humour, qui relativise le côté très sombre de l'histoire par ailleurs (un peu comme un copain viendrait nous poser sa main sur l'épaule en nous disant, le sourire aux lèvres : t'inquiète, ce n'est pas si grave que ça !) ; c'est là qu'il s'adresse au lecteur tantôt comme à un complice qui aurait partagé les mêmes cours d'histoire de ce monde, tantôt comme à un privilégié à qui il fait le plaisir d'en savoir un peu plus, comme un griot raconterait des histoires autour du feu jusqu'au bout de la nuit, tandis que les enfants fatigués sont déjà partis se coucher, et que seuls restent ceux qui luttent contre la torpeur mais veulent à tout prix savoir… Et ainsi, petit à petit, on se réjouit, même, de ces notes de bas de page ; elles font sourire ou surprennent… et puis j'avoue aussi : parfois j'en ai survolé l'une ou l'autre mais, comme dit plus haut, j'avais alors déjà compris que je n'y perdrais pas d'information majeure, peut-être juste un clin d'oeil… et puis on dévore d'autant mieux la suivante !

    Deux dernières petites choses sur la narration, qui pour moi sont autant de signes de réussite. D'abord, il faut souligner que j'ai trouvé les scènes de combat (il y en a quelques-unes quand même) vraiment bien écrites ! Je n'ai pas encore lu énormément de fantasy, mais quand même quelques titres… et souvent c'est là que le bât blesse, comme si la plume de ces auteurs bloquait dès lors qu'il faut se jeter dans la mêlée et voir le sang jaillir ! Ici, toujours avec cette plume qui n'a pas peur des mots et des descriptions visuelles sans en faire un faux cinéma, on est réellement plongés dans l'action quelle qu'elle soit, y compris des combats qui ne sont pas de simples jeux d'enfant !
    Par ailleurs, je parlais plus haut du retournement… j'oublie de dire que j'ai aussi beaucoup apprécié le cliffhanger qui apparaît tout à coup l'air de rien dans l'une des scènes finales, mais on sent là encore comme un clin d'oeil de l'auteur : le voyez-vous le message caché que je vous mets là l'air de rien ? Ah, il faudra lire le tome 2 pour découvrir si mon intuition est bonne, mais je suis quasi-persuadée qu'on tient là un élément qui ne peut que ressurgir. L'épilogue quant à lui joue son rôle tranquille d'épilogue : il offre une conclusion logique à ce premier tome, sans fioritures inutiles, il permettrait même qu'on en reste là car, en plus, il réconcilie le lecteur avec certaines parties plus dures qu'on n'avait pas tout à fait digérées.

    Ainsi donc, si les quelques bémols soulevés plus haut font passer ce livre juste à côté du statut de coup de coeur, il n'en reste pas moins une excellente lecture. Je retiens par-dessus tout la plume enchanteresse et maîtrisée de Jay Kristoff, une certaine originalité dans la forme, et l'humour bien présent, comme en filigrane, malgré la noirceur de l'histoire.




    Lorsque le dernier arbre de Michael Christie
    Un coup de :heart: qui lui donne 19/20 - et ne me demandez pas pourquoi mes coups de coeur reçoivent parfois 19, et d'autres fois carrément 20, c'est vraiment "au feeling"!
    Attention: ce livre est taggé Drame, et l'est sans aucun doute (en partie), mais c'est aussi un peu de Dystopie, un peu de Contemporain et pas mal d'Historique...

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    Synopsis : « Le temps ne va pas dans une direction donnée. Il s'accumule, c'est tout - dans le corps, dans le monde -, comme le bois. Couche après couche. Claire, puis sombre. Chacune reposant sur la précédente, impossible sans celle d'avant. Chaque triomphe, chaque désastre inscrit pour toujours dans sa structure. »
    D'un futur proche aux années 1930, Michael Christie bâtit, à la manière d'un architecte, la généalogie d'une famille au destin assombri par les secrets et intimement lié à celui des forêts.
    2038. Les vagues épidémiques du Grand Dépérissement ont décimé tous les arbres et transformé la planète en désert de poussière. L'un des derniers refuges est une île boisée au large de la Colombie-Britannique, qui accueille des touristes fortunés venus admirer l'ultime forêt primaire. Jacinda y travaille comme de guide, sans véritable espoir d'un avenir meilleur. Jusqu'au jour où un ami lui apprend qu'elle serait la descendante de Harris Greenwood, un magnat du bois à la réputation sulfureuse. Commence alors un récit foisonnant et protéiforme dont les ramifications insoupçonnées font écho aux événements, aux drames et aux bouleversements qui ont façonné notre monde. Que nous restera-t-il lorsque le dernier arbre aura été abattu ?
    Fresque familiale, roman social et écologique, ce livre aussi impressionnant qu'original fait de son auteur l'un des écrivains canadiens les plus talentueux de sa génération.


    Mon avis :
    Voici encore une surprise de ma bibliothèque communale, et quelle surprise ! je reçois régulièrement leur lettre de contact, qui présente entre autres les nouveautés de leur catalogue : c’est ainsi que je suis tombée sur ce livre-ci, sans trop savoir à quoi m’attendre. Je craignais bien un peu une énième fable à caractère écologique : c’est désormais « à la mode », et j’ai lu au moins deux livres du genre (très différents !) ces derniers mois, avec plus ou moins d’enchantement – un flop (pour moi, s'entend) pour Sirius de Stéphane Servant, auquel je n’ai pas réussi à accrocher, mais une belle découverte pour Et toujours les Forêts de Sandrine Collette.

    Or, s’il y a bien un peu de cette approche dans ce livre-ci, c’est bien davantage comme un fil rouge qui reste toujours présent mais dans la discrétion, tandis que l’histoire s’attarde auprès des différents personnages, leur vie, leur époque, leurs choix, leurs erreurs et leurs réussites, mais toujours au contact des arbres et du bois !
    On part de 2038, époque vaguement dystopique où le monde entier (les États-Unis en particulier) est devenu poussière, à la suite du « Grand Dépérissement », événement qui n’est jamais clairement décrit, mais on comprend très vite qu’il s’agit d’une catastrophe écologique majeure qui aurait détruit tant et tant de forêts et qui, cette fois, aurait bien eu lieu entre notre époque actuelle et cette fameuse année 2038 – or, c’est demain, 2038 ! La grande majorité des gens vit désormais dans une grande pauvreté, et cette poussière terrible qui s’insinue partout quoi qu’on fasse, et tue sans discernement, notamment les enfants qui meurent de la craqueuse, une nouvelle maladie où cette poussière qui a envahi leurs poumons les fait tousser jusqu’à ce que leurs os mêmes craquent… Jake, dendrologue quelque peu idéaliste, de son vrai nom Jacinda Greenwood, vit et travaille (comme simple guide) sur l’un des derniers remparts de verdure au monde : une île forestière nommée « Greenwood Island » au large de la Colombie-Britannique, le Canada et ses forêts, pourtant bien décimées, étant devenus un refuge climatique accessible à ceux qui en ont les moyens, tandis que l’île en question sert de lieu de vacances écologiques de luxe pour les plus fortunés. Jake pense savoir que son nom et le nom de l’île qui l’héberge n’ont rien à voir, que c’est un pur hasard qu’ils soient les mêmes. Mais quand un ex-petit ami, avocat, vient lui annoncer qu’elle est peut-être bien la descendante du propriétaire richissime de l’île, elle qui n’a pas un rond, étranglée par un prêt étudiant dont le remboursement impossible l’enfonce de plus en plus, elle se prend à croire que, peut-être…

    Et c’est ainsi que l’auteur nous entraîne dans son histoire et l’histoire de sa peut-être famille, quittant la dystopie pour parcourir diverses époques : 2008 et les prémices de ce Grand Dépérissement, époque où un capitalisme aveugle explose tandis que certains continuent vaguement d’espérer que le recyclage et l’économie des ressources pourraient peut-être encore sauver le monde ; les années 1970 et le mouvement hippie, dans lequel certains auraient déjà eu un souci écologique ; les années 1930, savant mélange entre ces blessés (physiques et/ou psychologiques) qui ne cicatriseront jamais de cette Grande Guerre à laquelle ils ont pris part, dans cette lointaine Europe, et en même temps explosion de la créativité et d’un esprit d’entreprise neuf, tandis que sévit la Grande Dépression, événement qui n’a rien de « naturel » mais avec lequel l’auteur fait un saisissant parallèle avec le Grand Dépérissement de la dystopie de départ ; et enfin 1908, année de la naissance improbable des racines de cette famille Greenwood, pleine de surprises.
    Il remonte ensuite les années dans le sens inverse, jusqu’à revenir au destin de Jake, et la réponse (ou pas) à la question du départ : est-elle oui ou non l’héritière inattendue de cet empire ?

    Comme je disais donc : à part le vague caractère dystopique du début, que l’on retrouve à la fin puisque c’est aussi la suite des aventures de Jake qui clôt l’histoire, on n’est pas vraiment dans un roman de science-fiction. Au contraire, on est dans le contemporain quand on est en 2008, et peu à peu on replonge dans un roman historique au fil de la descente (puis la remontée) dans le temps proposée par l’auteur. Chaque époque est présentée avec un réalisme saisissant et un souci du détail qui ne se dément pas : on est réellement replongé dans l’ambiance de chacune de ces périodes, c’est vraiment très bien rendu ! On voit la jupe batik que porte Willow dans les années 1970, comme si on était à côté d’elle ; on a envie de consoler le rescapé de la Guerre qui traîne son stress post-traumatique dans une vie de vagabondage, sans pouvoir le comprendre ni l’expliquer, et encore moins le soigner (un mal à peine connu, à l’époque !) ; on s’émeut et on sourit de la vie des frères Greenwood à leurs débuts au tout début du XXe siècle, quand aller à l’école n’était pas encore une obligation…
    Chacune de ces époques apporte son lot de joies et de peines à ces héros du quotidien que l’on croise, des bons comme des mauvais, tous toujours très humains dans ce que ça peut signifier de pire ou de meilleur. Car c’est aussi une saga familiale où plusieurs personnages de cette famille (et quelques autres qui gravitent autour d’eux, d’une façon ou d’une autre) tiennent le premier rôle au fil des années à tour de rôle, avec une justesse déconcertante, provoquant un attachement qui prend aux tripes même quand l’un ou l’autre nous irrite tout à coup – mais la plupart du temps, ils émeuvent, profondément.

    Et toutes ces vies, en tout cas celles de tous les membres de cette improbable famille Greenwood, sont intimement liées aux arbres et aux divers métiers du bois. Car tous aiment profondément ces arbres, d’une façon propre à leur époque, parfois désastreuse si on les considère avec notre regard actuel, trop conscient qu’une catastrophe telle que ce « Grand Dépérissement » est tout à fait possible, latente même – et  plusieurs de ces métiers du bois sont mis en avant, avec délicatesse mais sans concession : les exploitants industriels (à une époque où l’industrie était encore manuelle, cela dit) de ces forêts éternelles (vraiment ?) du Canada pour en faire du bois de construction ou de la pâte à papier ; l’exploitant beaucoup plus modeste, celui-là qui « saigne » quelques érables choisis pour en retirer leur extraordinaire sirop ; l’activiste qui immobilise (vive le sucre et son incompatibilité avec les carburants pétroliers !) les machines géantes de déboisement massif ; ou le charpentier qui privilégie le bois de récupération pour diverses constructions ; jusqu’à notre dendrologue lourdement endettée qui ouvre et referme l’histoire.

    C’est une profonde histoire d’amour pour ces forêts (et la nature en général), un cri de passion envers ces géants qui ont tant de choses à nous dire à leur façon. On trouve au fil des pages, dans le fil de la narration, quelques éléments qui expliquent comment les arbres communiquent entre eux, comment ils grandissent et que les différents cercles qui forment leur tronc racontent leur histoire et l’histoire du monde, au moins autant que nos chroniques humaines, etc. – certes, rien de bien nouveau pour qui s’intéresse un tant soit peu à ce sujet, ce livre ne semble pas vouloir nous instruire « techniquement » sur ces choses-là. En revanche, c’est une sensibilisation vivante et constante, car nos vies s’imbriquent bel et bien dans celle de ces arbres, ces forêts primaires (et autres) que nous continuons pourtant de massacrer, alors qu’elles font tellement partie de nous, de notre quotidien. Comment, à part en prison (brièvement évoquée, comme un lieu de non-vie justement), pourrait-on vivre dans un monde sans arbres, sans bois ? C’est tout simplement inimaginable, et ce livre le dit merveilleusement !

    C’est un très gros coup de cœur, un livre éblouissant, à lire absolument.

    Dernière modification par domi_troizarsouilles (25 Novembre 2021 14:39:08)

  • atick

    Dompteur de pages

    Hors ligne

    #155 27 Novembre 2021 17:11:14

    Le dernier arbre avait attiré mon attention dernièrement. Je n'ai pas tous lu ton avis pour me laisser la chance de le découvrir, car je pense bien qui va rejoindre ma liste pour 2022!
    Bonne journée à toi!
  • domi_troizarsouilles

    Enfileur de mots

    Hors ligne

    #156 01 Décembre 2021 09:30:20

    Bonjour par ici!

    Novembre est terminé, et le bilan confirme mon sentiment général de ces dernières semaines: c'est le plus petit mois (niveau lectures, bien sûr), depuis que j'ai repris les livres, et notamment Livraddict en novembre 2020. Seulement 5.525 pages, en 14 livres: c'est mon record le plus bas pour l'instant! Vivement dans trois semaines: je serai en congé à partir du 23 décembre, pour deux semaines... :pompom:

    Cela dit, j'ai à nouveau passé le cap de trois livres lus depuis mon dernier post, donc il est temps de vous donner mes impressions - à défaut de remonter dans le temps, ce pour quoi je ne trouve absolument pas le temps ces jours-ci!
    (oui, oui, je travaille :sifflote: ... mais en plein exercice budgétaire actuellement, donc j'ai besoin de "m'aérer l'esprit" entre deux budgets!)

    On part donc pour une première romance de Noël (mitigée) et un petit, double voyage en Finlande, grâce au chouette challenge En 2021, je voyage... (à noter aussi que l'édition 2022 vient d'être publiée!) :

    De l'amour comme s'il en neigeait de Sophie Rouzier
    Un petit 11/20

    <image>

    Synopsis : Coach de Noël: Le métier de Noémie est peu banal.
    Sa mission : aider ses clients à ajouter de la magie à leurs fêtes. Gaspard, le fan number one de la période de l’avent, Gloria, la veuve grincheuse, André, l’ancien père Noël à la retraite forcée, Nathanaël, l’étudiant de bonne famille et les autres ont tout misé sur elle. Inconsciemment, ils espèrent également qu’elle régule leurs vies amoureuses. Et ce n’est pas une mince affaire... Elle qui collectionne les mauvaises expériences avec la gent masculine autant que les guirlandes lumineuses, est-elle vraiment la mieux placée pour réaliser ce genre de miracles ?
    Il paraît que les cordonniers sont les plus mal chaussés... Alors réussira-t-elle à rendre son Noël plus féérique cette année ? Elle en rêve, surtout depuis qu’elle a croisé le beau Samuel, le patron du café le Mannele, son QG pour sa nouvelle activité.


    Mon avis :
    Bon, bon, bon… La période des romances de Noël est lancée ! Or, même si je lis beaucoup moins de romances qu’il y a quelques mois, ça me plaît encore d’en découvrir l’une ou l’autre, et en cette période (il fait gris et froid !), j’ai plus que jamais envie de ces fameuses romances de Noël, donc… Hélas, il faut croire que je me suis trop éloignée de ce type de littérature, car vraiment, et malgré quelques points (très) positifs, je suis assez déçue de cette première lecture.
    Les principales qualités de ce livre, et raisons pour lesquelles je lui mets quand même une note acceptable, c’est que la plume est indéniablement fluide, et que par ailleurs c’est plein de bons sentiments bien de saison – ça fait toujours du bien au moral.

    Oui, mais…
    Plume fluide ne veut pas dire captivante… ça se lit vite, et même très vite, dans un bon niveau de langue sans être exceptionnel ; jusque-là ce n’est pas bien grave, de toute façon on ne recherche pas un éblouissement linguistique dans ce type de livre. Mais alors, c’est d’une platitude extraordinaire, et avec des clichés à la pelle qu’on ne sait plus comment faire pour les déblayer !
    On a des personnages, les filles comme les garçons, sans aucune profondeur; ils sont (presque) tous extrêmement nunuches, avec leur besoin de s’apprêter pour oser sortir / pour recevoir l’élue de leur cœur (ou alors moi qui ne me maquille jamais, je suis un ours ? peut-être après tout…), ou quand ils frémissent face à celui/celle qui les fait trembler… comme ma fille de pas tout à fait 13 ans le fait quand elle me parle de ses « crush » !? OK le sentiment amoureux peut tous nous rendre un peu bêtes, mais là on est dans le drame de bas étage, quel que soit l’âge de ces différents protagonistes – car oui, là il y a quand même un petit bon point : pour une fois, on n’a pas que des jeunes adultes à la recherche de leur vie, on a aussi deux sexagénaires, et ma foi, non seulement je reconnais le mérite (rare) d’avoir mis de tels personnages en scène, mais en plus ce sont probablement les plus crédibles.
    Avec ça, certes il est question de sentiments et de cœurs qui battent, mais le plus souvent, on a l’impression qu’ils ne pensent tous qu’à passer à la casserole d’une façon ou d’une autre, je me suis demandé un moment si l’autrice n’est pas obsédée par le sexe ? et pourtant, ce n’est pas un livre de la mouvance « new romance », il n’y a aucune scène de sexe justement, mais une tension sexuelle constante, ça en devenait lourd par moments.

    En outre, l’autrice a fait le choix d’un roman choral… pourquoi pas ? c’est assez courant après tout. Hélas, ici c’est un flop. D’abord, il y a pas moins de 6 personnages qui s’expriment à tour de rôle, et tous à la première personne du singulier ! cela donne une chorale quelque peu cacophonique, notamment parce que je n’ai toujours pas compris ce que l’un ou l’autre de ces personnages apportait réellement à l’histoire… L’autrice s’est clairement dispersée, en abordant des tas de problématiques plus ou moins « à la mode » : la tendance hygge, la surconsommation, les familles désunies, les différences de culture, etc. il ne manquait qu’un personnage LGBT+ (pourquoi, d’ailleurs ?) et ça aurait la totale ! Certes, ces 6 personnages se rejoignent plus ou moins grâce à la personnage principale, cette fameuse Noémie qui s’improvise « coach de Noël ». Mais à force de vouloir en faire trop, l’intérêt réel de l’histoire de Noémie se dilue dans trop d’histoires secondaires, qui sont peut-être intéressantes, mais qui auraient gagné à prendre moins de place… quitte à être exploitées par ailleurs dans un roman indépendant ! Je pense en particulier à l’histoire d’Akhil, architecte indien et hindou, avec sa copine allemande et très catho, Mareike. Non seulement ils n’apportent absolument rien à l’intrigue principale concernant Noémie (à part le vague fait de faire partie de ses clients), mais en plus, ils auraient sincèrement mérité tout un livre, plus développé, plus approfondi, à eux seuls.

    Mais surtout, écrire un roman choral, c’est tout un art. Le problème, comme en musique finalement, c’est que l’ensemble doit donner l’impression d’une certaine unité (ce qui, comme expliqué ci-dessus, est un peu raté), mais aussi, chacun y chante quand même avec sa voix propre.
    Or, dans ce livre, nos 6 narrateurs s’expriment exactement de la même façon ! L’autrice n’a absolument rien fait pour les différencier, il est tout à fait impossible de les reconnaître l’un de l’autre sans l’aide de l’indication en tête de chaque chapitre qui indique à qui c’est le tour. Et pour ne rien arranger, tous leurs dialogues sonnent de la même façon (avec plus d’une fois un sentiment de « pas naturel » : jamais on ne parlerait ainsi dans la vraie vie !). Il ne fallait pourtant pas de grands artifices, mais quelques détails auraient fait la différence. Bon, d’abord, au risque de me répéter : les réduire ! Ensuite, créer un tic de langage chez l’un ou chez l’autre ; des registres de vocabulaires différents ; ou que sais-je encore… mais ici, on ne trouve rien de tout ça.
    C’est un choral tout à fait artificiel et qui du coup ne « marche » pas.

    Tout cela étant dit, je ne veux pas rester sur une note négative. Outre l’aspect rédaction de la bonne élève sans vraie originalité, et dont les rares tentatives en ce sens ne donnent pas le résultat escompté, si bien qu’on a envie d’écrire sur sa copie « peut mieux faire », on se laisse quand même quelque peu toucher par la flopée de bons sentiments qui dégoulinent de ce livre.
    Et puis bon, un autre gros point positif pour moi : j’adore l’Alsace, et là clairement, l’autrice a réussi à nous en faire rêver ! Si je ne suis pas ultra-attirée par les fameux mannele qui ornent la couverture (je préfère les cougnous de chez moi ;) ), j’ai désormais des envies de marché de Noël (qui, ici, seront probablement annulés, ou pour le moins très strictement restreints) et de bredele, hélas introuvables en Belgique ! À défaut, je pourrai toujours me faire un chocolat ou autre boisson chaude réconfortante, telles que celles qui sont présentées dans ce livre – pas de recettes, malheureusement, mais quelques idées qu’on aurait bien envie d’essayer.





    Chroniques de l'Abbaye Écarlate, tome 1 : Maresi de Maria Turtschaninoff
    Un bon 15/20

    <image>

    Synopsis : Parmi ces femmes, elle avait trouvé un refuge.
    Aujourd’hui, elles sont toutes menacées.
    Une île invisible depuis la mer, balayée par les vents. Une communauté de femmes, de fillettes, d’anciennes. Une communauté de sœurs. Toutes ont fui la fureur du monde et, parfois, la brutalité des hommes. Et toutes sont venues se placer sous la protection de la magie ancestrale de ce lieu.
    Sur cette terre de femmes, Maresi, adolescente libre, avide de connaissance et soucieuse des autres, peut s’épanouir, sans crainte de l’avenir. D’autant que, sur ces rivages, nul homme n’a le droit de poser le pied.
    Mais un jour, une nouvelle fille vient demander l’asile.
    Qui est-elle ? Et qui la poursuit ?


    Mon avis :
    Voici un livre que j’avais repéré depuis un moment, je ne sais plus trop pourquoi… mais je le gardais précieusement pour ce challenge autour du monde auquel je participe depuis janvier, et dans lequel le pays mis à l’honneur ce mois de novembre est la Finlande. Pour bien commencer, c’est donc une autrice finlandaise mais suédophone, avec un nom à consonance plutôt russe, c’est intéressant je trouve !
    Le livre même, quant à lui, ne m’a pas follement emballée, mais il se laisse lire sans souci et laisse un goût tout doux. Il nous présente l’histoire de la jeune Maresi, qui a trouvé refuge plusieurs années auparavant sur l’île (imaginaire) de Menos, où se sont installées autrefois quelques femmes désirant fuir la violence des hommes, pour vivre une vie communautaire… Cette « abbaye écarlate » rappelle furieusement, par bien des aspects, la vie idéale d’une communauté religieuse où toutes les femmes seraient vraiment des sœurs, unies par des liens qui transcenderaient leurs petits antagonismes du quotidien, où tout le monde est heureux et trouve sa voie, tout en étant éduqué de façon générale au début, et puis de plus en plus spécialisée selon ses propres dons et la sœur qui choisit l’une ou l’autre comme novice propre. C’est un monde féminin idéal bien sympathique, où règne une indéniable harmonie, et où toutes les femmes et jeunes filles – qu’elles soient extraites de riches familles qui les ont envoyées là pour recevoir une éducation de pointe, ou qu’elles soient à leur tour des jeunes filles ayant fui la violence d’un père par exemple – peuvent vivre en paix et entrevoir un avenir radieux.

    Ce monde nous est présenté pendant plus de la moitié du livre, à travers la voix de Maresi à la première personne du singulier, car c’est elle qui relate toute l’affaire – elle qui a été placée là car, dans sa famille, on mourait de faim. Avide de savoir, amoureuse des livres et des écrits anciens, Maresi est une personnalité curieuse et ouverte, très proche des plus jeunes novices dont elle (encore novice sans attribution particulière) s’occupe au quotidien. Ainsi, on confine par moment à un véritable feel-good… malgré une certaine tension qui s’instille petit à petit.
    C’est que, un beau jour, arrive sur l’île la jeune et énigmatique Yaï, visiblement traumatisée par un passé dont elle ne laisse passer la moindre bribe. Maresi la prend sous son aile et l’aide à s’ouvrir à son tour. Mais le danger menace, jusqu’au jour où tout bascule…

    On entre alors, assez tard dans le livre comme je disais plus haut, dans une partie plus « active », mais la narration se distingue bien davantage par l’art de la suggestion, que par des scènes de combat extraordinaires ! Cela rend le récit presque poétique malgré l’horreur que vivent tout à coup les sœurs, tandis que leur magie (dont on ne perçoit que des bribes, que je ne vais pas divulgâcher ici, mais c’est vraiment original) ne suffit pas à repousser cette bande d’hommes qui a réussi à pénétrer sur l’île malgré tout, mais dont la violence ne semble pas un seul instant crédible, malgré le fait qu’ils sont présentés comme vulgaires et méchants. Franchement, si on les compare aux « vrais guerriers » que notre monde a connus, que ce soient certains soldats du moyen-âge, les armées du IIIe Reich ou les acteurs du génocide rwandais (liste non exhaustive), ces hommes qui envahissent l’île de Menos sont à peine plus terribles que des enfants de chœur.

    Spoiler (Cliquez pour afficher)

    Sérieusement : peut-on imaginer des hommes aussi rustres et animés d’un désir de vengeance, se contentent de violer à tour de rôle une seule sœur qui se dévoue à cette fin, et renoncent à s’attaquer à aucune des autres… sauf dans un dernier sursaut qui vient bien tard ? c’est tout à fait irréaliste…



    Ainsi donc, il ne faut pas aborder ce livre en espérant lire un roman d’action même léger. En revanche, comme évoqué plus haut, c’est une écriture fluide, agréable et souvent poétique, qui décrit un monde enchanteur sans grande manifestation de magie toutefois, dans lequel vivent des personnages auxquels on s’attache très vite. C’est en même temps un éloge constant au savoir, aux livres et à l’enseignement, la transmission du savoir qui fait grandir l’autre, et rien que pour ça, c’est magnifique !





    Frontière blanche de Matti Rönkä

    <image>

    Synopsis : Ancien agent du KGB, Viktor Kärppä a quitté sa Russie natale pour la Finlande afin de fuir son passé. À Helsinki, où il a ouvert une agence de détective privé, il rend divers services à des trafiquants locaux, traversant souvent la frontière pour passer en douce des documents ou prendre livraison d’alcool ou de cigarettes.
    Lorsque Aarne Larsson, marchand de livres anciens et nostalgique du nazisme, lui demande de retrouver sa femme Sirje, qui a mystérieusement disparu, Viktor pense qu'il s'agit là d'une simple affaire de routine... Or, bien vite, il découvre que Sirje est la sœur d’un baron de la drogue, l'Estonien Jaak Lillepuu.
    L'enquête de Viktor semble soudain intéresser beaucoup de monde, trop à son goût : un inspecteur de la police d'Helsinki, à qui il donne parfois des tuyaux, ses anciens « camarades » du KGB et Jaak Lillepuu en personne. Un jour, ce dernier disparaît à son tour...


    Mon avis :
    Que d’avis plutôt négatifs, ou pour le moins mitigés, ai-je lus sur ce roman ! Il est vrai que, étant présenté comme « meilleur polar nordique 2010 », certains en attendaient peut-être une révélation, dans la veine (mais avec ses particularités) de ces polars scandinaves très à la mode qui inondent le genre depuis quelques années – et que j’apprécie, même si j’en lis assez peu à vrai dire, mais là n’est pas la question. Certes, on n’est pas dans un policier ou thriller trépidant, il y a très peu d’action, et la tension (bien présente pourtant) n’est pas insupportable. Mais aussi, il ne faut pas confondre nordique et scandinave…
    Ainsi, je pense que mon avis, même si ce n’est pas de l’emballement, sera plus modéré que ceux évoqués ci-dessus. Il faut savoir, pour commencer, que j’ai lu ce livre dans le cadre de ce challenge que j’ai déjà évoqué, qui consiste à voyager autour du monde en lisant des auteurs de diverses nationalités, dont certaines assez peu « habituelles » - en effet, j’ai bien un peu galéré pour trouver des auteurs finlandais traduits en français, autres que le très connu Arto Paasilinna (et son Lièvre de Vatanen, que je ne connais pourtant pas et que, du coup, je n’ai même pas lu !).

    Et je pense que, pour appréhender ce livre-ci en particulier, il faut se rappeler que la Finlande, toute membre de l’Union européenne qu’elle soit, est un pays un peu « à part » en Europe. D’abord, ce n’est pas un pays scandinave (la Scandinavie ne rassemblant que les trois royaumes norvégien, suédois et danois). Ensuite, elle partage une (très longue) frontière avec ses puissants voisins, la Russie et la Suède, envahisseurs à tour de rôle, ce qui n’a pas manqué de marquer son histoire : la Suède, d’ailleurs, reste très présente à travers, entre autres, les suédophones de Finlande (le suédois étant l’une des langues officielles de la Finlande, à côté du finnois). C’est l’un des pays les plus étendus de l’UE… mais aussi l’un des moins densément peuplés ; c’est le pays du Père Noël ! Et puis, en parlant de langues : c’est aussi l’un des rares pays (avec l’Estonie et la Hongrie) de l’Europe qui ne parle pas une langue indo-européenne, mais bien une de ces mystérieuses langues dites ouraliennes (on disait autrefois finno-ougriennes, mais apparemment la classification a été revue depuis mes dernières leçons sur le sujet), langues qui en plus ne sont pas mutuellement intelligibles – contrairement aux langues scandinaves par exemple : j’ai toujours été étonnée de voir des collègues suédois et danois parler ensemble chacun dans leur langue… et se comprendre suffisamment ; ou bien ma maman flamande, qui parvenait à communiquer de façon satisfaisante avec la famille germanophone de mon papa, chacun parlant son propre dialecte régional…
    Or, je reste convaincue que la langue que l’on parle, cette fameuse « langue maternelle » (et ensuite, sans doute, l’intégration que l’on fait des éventuelles langues « étrangères » que l’on apprend) a un effet sur notre perception du monde, et notre façon de l’exprimer, même dans la fiction.

    Si « j’étale » tout cela, ce n’est certainement pas pour paraître plus maligne que je ne suis… mais il se trouve que, par le hasard des rencontres de la vie, mon mari et moi avons autrefois été en contact proche avec une famille finlandaise finnophone, sans parler du fait que nous avons fait notre voyage de noces dans les pays baltes (donc pas la Finlande, mais bien l’Estonie, entre autres, dont il est aussi beaucoup question dans ce livre), ce qui fait que j’étais déjà sensibilisée à un certain nombre de choses.
    Et c’est bien là mon plus gros regret envers ce livre, qui n’est pas lié au contenu même : si la traductrice a bien pris le soin d’expliquer un certain nombre de notions qui apparaissent çà et là dans la narration, j’ai beaucoup regretté qu’on ne trouve pas une introduction (ou une postface, comme ça avait été le cas pour le très beau mais très surprenant L’homme qui savait la langue des serpents de l’Estonien Andrus Kivirähk) qui nous présente ce pays, et particulièrement cette région qu’est la Carélie, sans cesse écartelée entre Finlande et Russie ; de même, une carte de cette région, représentant les diverses villes dans lesquelles le narrateur se rend pour une raison ou une autre, aurait été plus que bienvenue ! Certes, les moyens informatiques actuels permettent de les trouver très facilement… mais je ne lis pas forcément un bon livre avec mon ordinateur sous les yeux…
    Mais voilà : l’Archipel n’a pas fait un tel choix éditorial, et c’est bien dommage, car il aurait indéniablement été un bonus très appréciable !

    Venons-en maintenant à l’histoire même. Comme je disais plus haut, on n’a ici pas d’action folle, pas de tueur implacable à retrouver, pas de tension insoutenable. On accompagne tout simplement le narrateur : Viktor Kärppä de son nom finnois. Il est l’un de ces Russes originaires de Carélie, qui a bien effectué son service militaire en Russie (et ses qualités particulières ont fait qu’il a très vite intégré le KGB, échappant ainsi à la guerre en Afghanistan), mais a obtenu apparemment assez facilement (d’une façon qui n’est jamais tout à fait explicitée) la nationalité finlandaise. C’est là qu’il vit désormais, à Helsinki où il s’est installé comme détective privé. On comprend à demi-mot que ce seul boulot ne lui permet pas tout à fait de vivre, mais qu’il arrondit ses fins de mois en participant à quelques menus trafics qu’il considère comme « acceptables » (cigarettes et autres contrefaçons, tandis qu’il s’est donné pour limite de ne jamais tremper dans la drogue), sous les ordres de deux mafieux russes très stéréotypés, et qu’il assure sa tranquillité en collaborant quelquefois avec la police locale.
    Mais un jour, un client vient lui demande de retrouver sa femme disparue : cette dernière, estonienne, est en plus la sœur d’un dangereux gangster de ce même pays, qui cherche à installer ses « affaires » en Finlande…

    On suit ainsi la (non-)progression de Viktor Kärppä dans cette enquête improbable, à travers sa narration à la première personne du singulier, comme on lirait le journal intime de ce détective. Pas de grandes vagues, de la discrétion tranquille, une certaine introspection aussi parfois, mêlée de ses souvenirs d’enfance dans cette Carélie qui garde une place particulière dans son coeur, et d’une inquiétude constante pour sa mère âgée et à la santé fragile, qui a choisi de rester « au pays » quand elle a eu la possibilité d’obtenir pourtant elle aussi la nationalité finlandaise. Il trempe certes dans plus d’une affaire louche et est imprégné de cet esprit corruptif et corruptible que l’on imagine trop aisément lié à tout ce qui est au moins un peu russe, mais il a gardé une conscience vaguement idéaliste, à la limite de la naïveté parfois même, et reste fidèle à ses principes en tout temps.
    Tout cela fait de lui une espèce de anti-héros presque gentil, à qui on ne s’attache pas tout à fait, mais pour qui on ressent quand même de l’inquiétude, dans cette tension faible mais constante qui sous-tend à cette intrigue. Il n’est pas assez « chevalier blanc » pour pouvoir porter le titre de héros, mais ses fameux principes, ses scrupules que l’on touche du doigt à chaque nouvelle opération que lui proposent ses pseudo-amis mafieux, le rendent sympathique malgré tout.

    En même temps, ce roman explore le drame de cette région du monde, le contraste entre trois frontières pourtant si proches par la géographie et par l’histoire : on se trouve à un carrefour entre une certaine opulence en Finlande, une ouverture de plus en plus marquée en Estonie, mais la misère en Russie, les trois (la dernière en particulier) restant gangrénées par les mafias locales. C’est une véritable étude, certes fictive, de ce milieu particulier, et jusque dans la fiction on ressent le regret de l’auteur pour cette gangrène qui détruit jour après jour son pays natal qu’il chérit.
    Et avec ça, on a un retournement final, à nouveau pas spectaculaire, mais inattendu, qui conforte l’impression globale plutôt positive que j’avais de ce livre depuis le début.

    Tout cela n’en fait certes pas une réussite littéraire exceptionnelle, mais ce n’est pas ça non plus que je recherchais en commençant ce livre. En revanche, il a tout à fait répondu à mon premier souhait : voyager, découvrir un autre monde, une autre façon d’appréhender la vie, à travers une intrigue de type policier jamais réellement palpitante, mais maniant un suspense pas insoutenable mais toujours bien présent, dans un climat terriblement réaliste.

  • LaurineR

    Lecteur du dimanche

    Hors ligne

    #157 01 Décembre 2021 10:04:03

    Coucou !

    Après t'avoir croisée sur plusieurs challenges, je viens de découvrir que tu avais un suivi lecture et je dois dire que je suis fascinée ! :pink:
    Tu as vraiment un don pour l'écriture, c'est super agréable de te lire, donc merci pour tes avis constructifs et détaillés :heart:
    Du coup, je m'abonne à la discussion pour suivre tout ça et parler des lectures :pompom:

    Bonne journée

    Dernière modification par LaurineR (01 Décembre 2021 10:32:50)

  • domi_troizarsouilles

    Enfileur de mots

    Hors ligne

    #158 31 Décembre 2021 19:43:50

    Bonsoir à tou.te.s!

    Je ne suis à nouveau pas venue depuis une éternité, pourtant j'ai peu à peu repris un rythme de lecture presque normal.  ;) J'avoue: mon congé depuis une semaine n'y est pas pour rien.

    Mes avis restent dispo sur mon profil sur Babelio, et de plus en plus sur Insta - même pseudo partout, et j'espère pouvoir me remettre à jour ici aussi dans les prochains jours!

    J'ai plein de messages ici ou sur Discord auxquels je dois répondre, je ne vous oublie pas, je suis juste déphasée avec les enfants à la maison H24, demandeurs... et qui vont dormir tard, ne me laissant que peu de temps à moi, et c'est normal! :heart:

    Mais en attendant, je vous souhaite à tou.te.s un heureux réveillon et surtout, ce n'est pas original mais tellement précieux : une bonne santé pour vous et vos proches!

    :newyear:
  • Grominou

    Modératrice

    Hors ligne

    #159 31 Décembre 2021 20:28:30

    Bon réveillon, bonne année!
  • domi_troizarsouilles

    Enfileur de mots

    Hors ligne

    #160 01 Janvier 2022 22:41:25

    Grominou a écrit

    Bon réveillon, bonne année!


    Merci Grominou! :)

    ... et maintenant, comme ça semble être la tradition à cette période de l'année, et comme je n'ai pas de blog c'est ici que je le fais:

    MON BILAN 2021



    <image>



    ... dans l'ordre ou le désordre ;)

    Pour tous les livres cités dans cet article, sachez que les avis sont disponibles sur Babelio (même pseudo). Dans tous les cas, j'ajouterai la référence de ma critique dans ce suivi... et si l'une ou l'autre n'est pas encore disponible ici, je l'ajouterai en priorité dans les prochains jours!

    - Alabama 1963 de Ludovic Manchette et Christian Niemiec => mon avis est ici (dans le bas de l'article)

    - Dans tes pas de Jessi Kirby => mon avis est ici

    - Je suis ton soleil de Marie Pavlenko => pas encore publié ici...

    - Lie to love de Marie H.J. et K. Jarno => pas encore publié ici...

    - Recettes d'amour et de meurtre de Sally Andrew => mon avis est ici




    Et maintenant:

    Quelques statistiques...



    - J'ai lu 222 livres au cours de ces 12 mois;

    - Cela fait une moyenne de 18,5 livres par mois, avec un record en juillet (8.234 pages en 23 livres) ou mars (9.578 pages en 22 livres), et une évidente baisse de régime en novembre avec seulement 5.525 pages en 14 livres;

    - Sans surprise, les genres les plus lus sont... à égalité parfaite! :O (38 livres chacun) les Policiers et la Contemporaine - toutefois, si on compte en nombre de pages, les Policiers ont un léger avantage;

    - Toujours sans surprise, ils sont aussitôt suivis par les Thrillers (31 livres), sachant qu'un certain nombre sont classés dans les deux catégories à la fois, et puis quand même par la Romance (18 livres), ce genre si souvent sous-estimé, qui garde pourtant une place spéciale dans mon coeur, car c'est par ce chemin que je suis revenue à la lecture, il y a un peu plus d'un an, après une panne d'une quinzaine d'années;

    - Les littératures de l'imaginaire, plus simplement appelées SFFF, tirent très honorablement leur épingle du jeu, avec 41 livres, répartis comme suit: 15 pour la Fantasy, 14 pour la Science-fiction et 12 pour le Fantastique;

    - Plus surprenant pour moi, 29 livres classés Jeunesse ont été lus pendant cette année, moi qui n'en avais plus lu depuis des années, avant de rejoindre les plateformes de lecteurs...

    - Côté "flops", on notera 1 seul Manga, 1 seul Classique mais 3 BD's quand même!

    Je note ici aussi ma participation à de (trop) nombreux challenges et à plusieurs swaps... mais je n'ai pas compté!
    Encore merci à toutes et tous pour tous ces contacts, généralement sympathiques et intéressants! :heart:

    <image>






    Place maintenant aux

    Coups de coeur



    Ce sont quelques livres que je cite indépendamment du top 5 ci-dessus (qui sont bien sûr "hors concours"), et qui n'excluent pas que j'aie eu d'autres coups de coeur... mais les suivants m'ont touchée plus particulièrement d'une façon ou d'une autre!

    Le meilleur policier (et aussi le plus jazzy) :
    Carnaval de Ray Celestin => mon avis est ici (en bas de l'article)

    La plus grosse claque :
    Cadavre exquis d'Agustina Bazterrica => mon avis est  ici

    Le plus original - et ça suit côté contenu!  :
    Illuminae, tome 1 : Dossier Alexander de Jay Kristoff et Amie Kaufman => mon avis est ici

    La découverte marquante :
    Ma soeur, serial killeuse d'Oyinkan Braithwaite => mon avis est ici (celui-ci aussi en bas d'article)

    Le plus lumineux - et je ne parle pas que de la couverture :
    Umami de Laïa Jufresa => mon avis est ici (encore une fois en bas de l'article)

    L'inclassable :
    Lorsque le dernier arbre de Michael Christie => mon avis est  ici

    Et pour finir, au risque de me répéter, je vous souhaite :

    BONNE ET HEUREUSE ANNÉE À TOUS, ET PLEIN DE BONNES LECTURES !