Vivre
Anise Postel-Vinay2015

"Il y deux ans et demi j'ai cherché à rencontrer Anise Postel Vinay dont je connaissais l’existence par le livre de Germaine Tillion. Anise n’a pas accepté. Je l'ai relancée à plusieurs reprises, et finalement, elle a accepté. L’entretien s’est révélé trop court et bouleversant, car entrecoupé de sanglots. Je lui ai écrit plusieurs lettres, restées sans réponse. A la fin de l'année dernière, elle a accepté de témoigner : elle pense qu’il y a urgence à raconter, transmettre, expliquer. Depuis la tuerie de Charlie, son inquiétude redouble et elle n’aurait jamais pensé vivre dans un pays que des juifs quittent chaque jour à cause du regain d’antisémitisme. Ma fille Léa et moi – c’est important, je crois, que ce soit trois générations qui dialoguent – avons été chaque semaine recueillir la parole d’Anise. Nous avons été enthousiasmées par sa gaîté, sa modestie, sa philosophie de ne jamais renoncer à ses idéaux et de ne jamais sacrifier sa liberté ainsi que par son sens de l’amitié qui lui a – comme elle le dit - sauvé la vie. Anise ne se trouve pas d’un courage particulier : elle s'engage pour l’Intelligence Service, est arrêtée . Après un an à Fresnes et à la Santé, elle est déportée à Ravensbrück dans le même wagon que Germaine Tillion. Elle y survit dans le même block qu’elle.
Seule survivante aujourd'hui du trio qu'elle formait avec Geneviève Anthonioz De Gaulle et Germaine Tillion, Anise reste incorrecte, irrévérencieuse, libre, et nous offre cent pages que vous n'oublierez jamais."
Laure Adler