Ami si tu tombesRoger Pannequin1976

"Sur des événements aussi exceptionnels que ceux des années quarante, tout témoignage risque de n'être qu'une interprétation des faits. Quelle tentation que de pouvoir, trente-six ans après, expliquer le passé en fonction des besoins actuels d'une propagande ! On doit trouver une garantie, une sécurité, une continuité dans cette définition de soi-même que chacun, au fond, recherche souvent en vain. Quelle justification de tant d'écarts doit apporter cette certitude que l'Histoire, inexorablement, a suivi un cours rectiligne, et que ceux qui sont morts debout, l'été 1942, fusillés dans les fossés d'Arras, préparaient l'écrasement du Prague de l'été 1968 !"
Voici qui donne le ton des "mémoires de guerre" que Roger Pannequin, une figure de la Résistance, se décide enfin à publier. Il a voulu rester fidèle aux espoirs de ses amis morts les armes à la main, mais exprimer aussi son dégoût d'une France qui ne craint plus de réhabiliter les traîtres et les collabos. Dans le Nord et le Pas-de-Calais, c'est d'abord la ruée des troupes allemandes, les exécutions, la déroute. Jeune instituteur socialiste, Roger Pannequin est fait prisonnier. Il s'évade et rejoint son "pays", la zone interdite, rattachée à la Belgique. Il entre dans la lutte armée, aux côtés des militants communistes. Repris, il est envoyé en forteresse d'où il s'évade encore. Devenu responsable F.T.P, il est arrêté une troisième fois. Un commando le libère. A la fin des hostilités, il adhère au Parti communiste.
Roger Pannequin donne de la Résistance une image vraie qui ne ressemble pas aux mythes glorieux forgés après coup par les partis et les clans. Pour les militants comme lui, la Résistance a d'abord été l'espoir d'une Révolution puis seulement des "années sans suite".